Mais ce mot, « racisme », ne doit pas être employé à tort et à travers. Lors de son intervention, Zohra Boukenouche, membre du collectif Mémoires en marche, a pourtant fait un raccourci hasardeux. Elle a comparé les violences policières racistes qui avaient mené à la marche de 1983 à l’affaire Nahel. Or, dans le cas du « petit ange », tué par un tir de policier suite à un refus d'obtempérer, à ce jour, rien n’indique qu’il s’agit d’un crime raciste. C’est sans doute l’émotion qui a parlé. Ce tragique événement survenu en juin dernier lui ayant rappelé de sombres souvenirs.
N'oublions pas Laura et Mauranne
Si le mot « racisme » ne peut pas être employé à toutes les sauces, il ne doit pas non plus l’être unilatéralement, comme l’a fait le maire de la deuxième ville de France dans son discours : « La République ne peut pas, ne peut plus, ne doit plus laisser prospérer en son sein le terreau fertile du racisme, de l’antisémitisme, de la haine des musulmans, des discriminations. » L’élu a oublié les autres racismes comme celui qui a frappé, via le terrorisme islamiste, Laura et Mauranne le 1er octobre 2017, à Marseille, sur le parvis de la gare Saint-Charles. Ce jour-là, les deux cousines âgées de 20 et 21 ans ont été poignardées à mort par Ahmed Hanachi au cri de « Allah Akbar ». L’attentat a ensuite été revendiqué par l’État islamique qui, comme l’indiquait Pierre-Jean Luizard, spécialiste du Moyen-Orient, à Franceinfo, a pour vocation de s’attaquer aux « mécréants ».
Laura et Maurane n’étaient pas des cibles choisies au hasard, pas plus que Samuel Paty, Jean-Baptiste Salvaing, Jessica Schneider, le père Hamel ou, plus récemment, Dominique Bernard. Toutes ces personnes ont été les victimes du djihad, victimes d'un certain racisme puisque tuées pour ce qu'elles étaient. Benoît Payan les a occultées, preuve que son combat n’est pas un combat contre le racisme au sens large mais contre un racisme en particulier.
Sur un sujet qui devrait mettre tout le monde d’accord, le deux poids deux mesures et l’indignation à géométrie variable viennent une nouvelle fois pourrir la cause. À Marseille, ville cosmopolite, multiculturelle et multiconfessionnelle par excellence, où le vivre ensemble n’est pas toujours aisé, on aurait pu attendre mieux du maire. Certaines luttes doivent être, à ses yeux, moins nobles que d’autres.