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Ce que cache l’accord migratoire signé entre l’Union européenne et l’Égypte

7,4 milliards d’euros, dont 200 millions pour lutter contre l’immigration : tel est le montant de l’accord de partenariat signé, ce dimanche 17 mars, entre l’Union européenne et l’Égypte. C’est au Caire qu’ont été reçus, par le président Abdel Fattah al-Sissi, la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen, le président chypriote Níkos Christodoulídis et quatre Premiers ministres : Alexander De Croo (Belgique), Giorgia Meloni (Italie), Kyriákos Mitsotákis (Grèce) et Karl Nehammer (Autriche). Les modalités avaient été discutées en amont lors d’une rencontre à Bruxelles, le 23 janvier dernier.

L'UE n'a pas lésiné sur les moyens. Les sommes allouées se répartissent ainsi : cinq milliards d'euros de prêts, 1,8 milliard d’investissements, 400 millions d'aide pour des projets bilatéraux. Une manne pour les finances publiques égyptiennes, fort mal en point. Et 200 millions, donc, pour la lutte contre les immigrations illégales, qui s’ajoutent aux subsides des années précédentes (23 millions en 2022, 115 millions en 2023). L’augmentation de ce budget s’explique par la pression migratoire croissante que connaît l’Égypte avec, sur la frontière sud, la guerre civile au Soudan et, au nord-est, la bande de Gaza. L’Égypte accueille actuellement 9 millions de réfugiés. À charge, pour l’Égypte, de gérer le problème et de réadmettre ses ressortissants expulsés par l’UE.

Pour une fois, un peu de réalisme politique

Un bon accord ? Aux yeux de l’eurodéputé Thierry Mariani (ID), qui siège à la commission des Affaires étrangères, cet accord est une bonne nouvelle, explique-t-il à BV« L’intérêt de l’UE est que les gens ne montent pas dans les bateaux. Une fois qu’ils ont embarqué, ils ont déjà un pied en France, en Allemagne ou ailleurs en Europe. La marine égyptienne fait preuve de son efficacité depuis plusieurs années pour lutter contre ce phénomène. » Des traités analogues ont déjà été signés avec la Turquie et, cet été, avec la Tunisie. « Le problème de la Turquie est que M. Erdoğan a des vues politiques sur l’Europe, poursuit Thierry Mariani. Tel n’est pas le cas de la Tunisie ni de l’Égypte, qui n’ont aucune visée hégémonique. Ces deux régimes se sont imposés en luttant contre les Frères musulmans qu’Erdoğan, lui, soutient. Tunisie et Égypte méritent d’être aidées. »

Mais comment concilier cet accord qui vise à freiner l’immigration illégale avec le discours officiel de l’UE, pro-migrants ? Pour Thierry Mariani, sur ce plan, « l’hypocrisie est totale ». L’UE a transformé Frontex en agence d’accueil - Fabrice Leggeri a été viré et son successeur ne croit pas en l’utilité des frontières - mais « la Commission européenne tire les conséquences de son échec en ce domaine, explique Mariani. La seule stratégie faisable, qui est hypocrite, est de sous-traiter ce qu’on n’ose pas faire. Ce n’est pas glorieux - il ne faut pas se réjouir quand on doit payer quelqu’un pour assurer sa sécurité parce qu’on en est incapable - mais c’est efficace. C’est du réalisme politique. » On a connu Ursula von der Leyen plus idéologue!

Un alignement de calendriers propice

Un réalisme qui s’explique par un alignement de calendriers, maritime et électoral. Le printemps est la saison la plus propice au franchissement de la Méditerranée. « Il ne reste à cette Commission que quelques mois à vivre (et j’espère qu’elle ne ressuscitera pas), constate Thierry Mariani. Son cauchemar est qu’à la mi-avril, en pleine campagne électorale, des dizaines de milliers de migrants traversent la Méditerranée. » On imagine sans peine l’effet des images sur un électorat européen que les débarquements des migrants en Europe et leur dispersion incontrôlable ne réjouissent pas.

Bien entendu, cet accord UE-Égypte mécontente les défenseurs des droits de l’homme, pour qui l’Égypte est une dictature, et les ONG immigrationnistes. Le collectif Refugees Platform in Egypt (RPE) dénonce un accord qui aboutit à « une restriction de la liberté de mouvement » - soit la liberté de circuler des clandestins ! Du reste, RPE avertit l’UE sans prendre de gants : « Ces régimes continueront à utiliser les questions de migration et d’asile comme monnaie d’échange pour faire pression sur l’Europe afin qu’elle fournisse des fonds. Ils ouvriront leurs frontières dès que l’Europe refusera de payer face à leurs revendications incessantes. » Ce n’est pas faux, et on remercie RPE de se soucier de l’Europe, mais on se passera des conseils venant d’un collectif qui participe à son invasion.

Samuel Martin

https://www.bvoltaire.fr/ce-que-cache-laccord-migratoire-signe-entre-lue-et-legypte/

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