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Pour s’être mariée à un chrétien, une Miss algérienne menacée de mort

© Capture écran Instagram
© Capture écran Instagram
Avec ses 1,2 million d’abonnés sur Instagram, Chanez Belaïd est ce qu’on appelle une influenceuse. Son élection au titre de « Miss Tourisme Arabe » a fait d’elle une figure populaire auprès de la jeunesse algérienne avec laquelle elle partage régulièrement des contenus à mi-chemin entre mode, beauté et lifestyle. Il y avait donc peu de chances pour que le mariage de la jeune femme passe inaperçu, dans son pays. D’autant moins que l’homme qu’elle a choisi d’épouser se trouve être de confession chrétienne…

Sur les photos de l’heureux événement, la belle Chanez apparaît en robe blanche, tout sourire, dans une église. De quoi susciter milles réactions en ligne. Si beaucoup lui ont adressé leurs félicitations, appelant au respect de sa vie privée et à son droit d’épouser qui bon lui semble, certains Algériens n’ont pas eu cette ouverture d’esprit. « C'est interdit pour une musulmane d'épouser un non musulman, a ainsi tempêté un certain Med, sur FacebookElle a qu'à ne plus être musulmane et faire ce qu'elle veut. » L’ancienne Miss a vu ses comptes en ligne envahis d’insultes et de menaces de mort, certains internautes estimant que son mariage était « invalide », comparable à un « adultère » ou lui valant même de « brûler en enfer ».

Face à la polémique et à son écho dans la presse de son pays, Chanez Belaïd a été contrainte de réagir. Elle a pris la plume sur Instagram afin de démentir tout reniement religieux : « Ma relation avec mon Créateur m’appartient, à moi seule. Je n’aime pas me justifier auprès de qui que ce soit. Des années sur les réseaux sociaux avec respect… À vous de faire de même. Le bouton "Désabonner" existe. »

Un patriarcat bien vivace

Cette affaire souligne le retard qui persiste dans certains pays en matière de liberté et d’égalité. Si le patriarcat de « l’homme blanc » est en état de putréfaction avancé, il en est un autre qui n’a rien perdu de sa vigueur. On le rencontre dans la plupart des pays de culture musulmane dont l’archaïsme condamne les femmes à un destin d’infériorité et d’assujettissement. En Algérie, par exemple. Cet État figure tout en bas du « Global Gender Gap », le rapport annuel du Forum économique mondial qui classe les pays en fonction du degré d’égalité entre les sexes. Au 139e rang, la dictature d’Abdelmadjid Tebboune côtoie le Koweït (131e sur 146), le Maroc (127e), l’Iran (143e) ou encore le Pakistan (145e), tous loin derrière la France et son honorable 22e place.

 

Le poids de l’islam est, bien entendu, central dans l’état d’infériorité auquel sont condamnées des millions de femmes à travers le monde. N’en déplaise à certains, c’est bien la fameuse religion « de paix et d’amour » qui fait de l’inégalité entre les sexes une prescription divine, sourates à l’appui, et qui vante le voilement des femmes comme unique garant de leur sécurité. L’imam de Brest n’avait-il pas affirmé, dans un prêche en 2012, que « le hijab, c’est la pudeur de la femme. Et sans pudeur, la femme n’a pas d’honneur. Et si la femme sort sans honneur, qu’on ne s’étonne pas que les gens, que les frères, abusent de cette femme-là » ?

En matière de mariage, la femme musulmane est soumise à certaines règles immuables dont la première est de ne surtout pas épouser un infidèle. « Depuis l’époque des compagnons du prophète jusqu’à ce jour, les savants musulmans sont unanimes sur le fait que l’identité musulmane du mari est une condition de validité du mariage de la femme musulmane », avance ainsi Yûsuf al-Qaradhâwî, ancien président de l’Union internationale des savants musulmans et guide spirituel des Frères musulmans, s’appuyant sur une fatwa publiée en 1950 selon laquelle il ne faut pas donner le nom de « mariage » à ce qui n’est qu’une « pure ignominie ».

Certains pays musulmans ont néanmoins souhaité moderniser cette législation. C’est le cas de la Tunisie qui, en septembre 2017, a annoncé l'abrogation d'une circulaire administrative interdisant aux femmes tunisiennes de se marier avec des étrangers non musulmans. « Tous les textes liés à l'interdiction du mariage de la Tunisienne avec un étranger, à savoir la circulaire de 1973 et tous les textes semblables, ont été annulés. Félicitations aux femmes de Tunisie », s’était enthousiasmée Saïda Garrach, porte-parole de la présidence de la République.

Pour les femmes d’Algérie, en revanche, il semble que le chemin soit encore long.

Jean Kast

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