Concurrence inéquitable
Sur X, notre ministre de l'Agriculture a constaté qu’il « demeure donc une divergence entre le droit français et le droit européen, ce qui conserve les conditions d’une concurrence inéquitable faisant courir un risque de disparition de certaines filières ». Mais Annie Genevard n’annonce pour l’instant aucune initiative pour remédier à cette situation, se contentant d’appeler, « dans l’urgence, pour venir en aide à des productions menacées », à consommer français.
Le président de la région Hauts-de-France, grande productrice de betterave, a pourtant demandé « à Annie Genevard de saisir la Commission européenne pour mettre en place des clauses miroirs afin que ne soient pas importées des denrées, y compris d'autres pays de l'UE, ayant subi un traitement à l'acétamipride ». Xavier Bertrand propose par ailleurs de réunir « très vite l’ensemble de la filière betteravière et sucrière » et prétend qu’aucun « accord commercial comme le Mercosur ne peut être ratifié si des produits qui ne respectent pas nos normes environnementales et sanitaires peuvent entrer en France ».
Ces saillies verbales ont-elles la moindre chance d’être suivies d’effet ? La distorsion concurrentielle concernant l'acétamipride est due, comme toujours, à la manie de la France habituée à en rajouter dans l’application, chez elle, des mesures européenne. Elle interdit, ainsi, chez nous des produits que nos voisins autorisent chez eux.... et exportent vers l'Hexagone. Mais jamais, dans d’autres situations analogues, l’Union européenne n’a entravé son sacro-saint principe de libre circulation afin de corriger une situation de concurrence déloyale. La réponse de Bruxelles est donc connue d’avance : jamais l’UE n’a obligé la France à interdire à ses agriculteurs l’emploi de l'acétamipride.
Quant à la menace de non-ratification des accords de type Mercosur, deux remarques s’imposent : en premier lieu, constatons qu’à aucun moment Ursula von der Leyen n’a tenu compte des demandes françaises sur la question, menant en solitaire les négociations avec les Sud-Américains. Par ailleurs, Xavier Bertrand, par son propos, confirme son accord de principe sur la mise en place de ces traités qui constituent des dangers mortels pour nos agriculteurs. Il est donc peu probable que son discours soit reçu cinq sur cinq par nos agriculteurs, ni d’ailleurs par Annie Genevard…
Un nouveau texte ?
Le premier à réagir à la censure constitutionnelle a été Laurent Duplomb. Le sénateur de Haute-Loire (Les Républicains), qui a donné son nom à cette loi, estimait en effet, dès le 8 août, au micro de RMC, que le Conseil constitutionnel avait laissé une voie ouverte en jugeant que cet article 2 réintroduisant l'acétamipride « n'était pas encore assez encadré sur la durée, [que] ce n'était pas encore assez encadré sur la liste des filières ». Le Conseil constitutionnel « nous donne les éléments qui pourraient permettre, avec un nouveau texte, de trouver des solutions pour pouvoir peut-être réintroduire l'acétamipride », disait le sénateur. Tentant de jouer l’apaisement, il constatait que « le Conseil constitutionnel ne dit pas que l'acétamipride ne pourra jamais être réintroduit. Il ne ferme pas la porte. » Laurent Duplomb se montre cependant prudent, on le sent bien dans ses propos. Pas sûr qu’il soit en effet suivi par Annie Genevard dans cette voie. Et s’il l’était, la possible censure du gouvernement sur le budget pourrait remettre ce projet à plus tard.
La Coordination rurale prête à l'action
En attendant, si l’alliance syndicale FNSEA-JA s’est contentée de réagir fortement à cette censure de l’article 2, la présidente de la Coordination rurale a, elle, annoncé des actions concrètes, au cas où aucune solution ne serait trouvée : « Nous demanderons au gouvernement le retrait des rayons de tous les produits d'importations ayant fait usage de l'acétamipride. Tous ces produits très achetés, très appréciés comme les pâtes à tartiner, certains fruits. » Véronique Le Floc’h prévient que « si jamais l'État ne mettait pas en œuvre ces retraits de produits, nous serions amenés à aller le faire nous-même. Nous ne crèverons pas en silence ! »
La rentrée agricole s’annonce mouvementée.