
Par Gwendal Keraliès
Commençons par préciser – s’il en était besoin – que l’Action française n’est pas hostile aux impôts, et encore moins favorable au « modèle américain ». Cependant, personne ne sera surpris de savoir que, vu des États-Unis, les actuelles discussions fiscales françaises sont quand même assez exotiques. Déjà, scrutées depuis les autres pays d’Europe, elles font rire nombre d’observateurs, mais alors, depuis le pays du capitalisme-roi, vous pensez !
Il paraît intéressant d’en parler, car la situation économique aux ÉU a une base quelque peu comparable. En effet, la dette publique de la France a dépassé les 3 416 milliards d’euros (soit 115,6% de son PIB annuel) et la dette publique américaine est pour sa part à $38 000 milliards de dollars (soit environ 123% de son PIB).
En conséquence, en France, pour pallier ce gouffre, la totalité des partis politiques débat depuis des mois de la meilleure manière de lever de nouveaux impôts, et chacun a des remèdes miracles pour taxer les riches, ou les entreprises ou… tout le monde. Il y a une compétition entre les génies de la fiscalité, avec l’apparition de nouveaux prophètes comme le fameux Zouk-man !
Mais qu’en est-il aux États-Unis face au mur de la dette ? La question des impôts a bel et bien été mise sur la table au premier semestre, puisque la « Tax Cut » TCJA (réduction d’impôts) initiée par Trump en 2017 arrivait à échéance fin 2025. Les Démocrates ont contesté que cette réduction d’impôts puisse être reconduite. Trump a répondu : « On refait pareil ». Fin du débat sur les impôts : ni les Républicains ni les Démocrates n’ont évoqué qu’ils puissent être augmentés !!!
Beaucoup en France pensent que Trump n’est pas très futé mais, ainsi, pour faire face au déficit public… il ne touche pas aux impôts. Chacun aura pu constater que, à la place, il tente bien d’autres choses. Précisons quand même que les droits de douane sont effectivement une taxe, qui est en partie payée par les Américains (mais les entreprises étrangères souhaitant rester compétitives sur le marché américain doivent aussi, de leur côté, baisser leurs marges).
Même s’il n’a été élu que pour 4 ans, celui qui est taxé de « roi » dans son pays n’a toutefois pas une vision à court terme, qui consisterait à simplement encaisser les droits de douane. Certes, ces « tariffs » rapportent des milliards, mais ce qui intéresse Trump en parallèle, c’est la réindustrialisation de son pays : produire plus aux États-Unis et exporter plus (grâce à un dollar plus faible). Les droits de douane ont un « effet mécanique » qui va dans ce sens-là, mais, dans la pratique, la Maison blanche n’est pas du tout passive : elle va déloger à la fourchette à escargot les grosses entreprises américaines qui sont allées produire à l’étranger. Alors, Trump sera jugé par les électeurs lors des élections de mi-mandat en novembre 2026, donc il ne perd pas de temps. Difficile de dire s’il aura de bons résultats pour sa politique qualifiée de « nationaliste » (ou de « patriote »), mais en tout cas il a besoin de résultats rapides. Cette politique est aux antipodes de ce qu’ont prêché les Américains depuis Reagan : la dérégulation des marchés, qui avait même été imposée par la force à de nombreux pays réticents (notamment en Afrique). Trump a renversé les dogmes. C’est un peu comme si, au XIIe siècle, le pape avait déclaré que ça ne servait plus à rien d’aller à la messe le dimanche. En 2025, les dirigeants de l’Union européenne (et ceux des pays d’Europe) ne veulent rien savoir : leur pape américain est devenu hérétique, mais eux continuent de croire dans la religion du libre marché. Plutôt taxer les Français à 80% que de remettre en question les dogmes fondateurs de l’UE ! Depuis le début on vous dit que l’UE doit apporter la prospérité, alors elle va l’apporter ! Peut-être que ce ne sera qu’au XXIIe siècle, mais ça arrivera ! En attendant, « on lèvera plus d’impôts encore ! »
On pourrait en rire… mais le cercle vicieux – plus d’impôts pour compenser plus de déclin – n’est effectivement pas près de s’arrêter. Le déclin démographique français, l’âge de la population, son remplacement par une immigration non-qualifiée, le manque de souveraineté énergétique, sont des points très suffisants pour tracer la voie des années à venir : il faudra de nouveaux impôts pour compenser le déclin.
En 1976, on entendait ce slogan : « En France, on n’a pas de pétrole, mais on a des idées ». C’était vrai. Ça devrait toujours l’être : la France aurait pu (et pourrait certainement toujours) compenser son manque de pétrole par ses belles idées qui créent des richesses. Mais, malheureusement, aujourd’hui les idées sont uniquement fiscales et la France regarde les idées fondatrices du XXIe siècle se créer dans d’autres pays*.
Si dans cet article aujourd’hui on parle de fiscalité, voilà une autre observation de la politique américaine que chacun pourrait faire, notamment les dirigeants politiques français : aux États-Unis, chaque innovation est comprise, protégée et valorisée à l’international par le pouvoir politique. Au lieu de débattre des impôts de manière obsessionnelle, certains dirigeants politiques pourraient peut-être évoquer cette manière plus saine de créer de l’argent ! Mais leur religion ne les autorise pas à discuter de souveraineté économique.
* Les bluffs d’Emmanuel Macron et de ses ministres sur la « start-up nation » sont totalement indécents. Les « licornes » d’Emmanuel Macron sont roses et virevoltent sans sa tête : la France est tout aussi absente des nouvelles technologies que les autres pays d’Europe.