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culture et histoire - Page 1134

  • Chronique de livre : Philippe Baillet "L'autre tiers-mondisme ; des origines à l'islamisme radical"

    4159368228.jpgPhilippe Baillet, L'autre tiers-mondisme; des origines à l'islamisme radical

    Fascistes, nationaux-socialistes, nationalistes-révolutionnaires entre « défense de la race » et « solidarité anti-impérialiste »

    (Akribéia, 2016)

    Qu'est-ce que l'autre tiers-mondisme ? Un tiers-mondisme différent de celui que l'on connaît, c'est à dire « classique, progressiste, qu'il soit chrétien, humanitaire et pacifiste, communiste orthodoxe, trotskiste ou encore d'ultragauche » ? Effectivement. L'autre tiers-mondisme est l'expression par laquelle Philippe Baillet désigne tous ceux que l'on pourrait considérer comme tenants d'un « tiers-mondisme de droite » ou plutôt d'extrême-droite (même quand ceux-ci viennent ou sont d'extrême-gauche, à l'image d'un Soral).

    L'autre tiers-mondisme est une sensibilité politique qui a, évidemment, évolué avec le temps mais qui s'appuie, dans son acceptation générale, sur certaines idées-clés. Le développement d'une Troisième Voie européenne hostile au communisme et à la démocratie parlementaire en est la base. En découlent logiquement le non-alignement sur les deux blocs (avant la chute de l'URSS) et l' « anti-impérialisme ». Sans surprise, l'incarnation de cette idée se fit donc, chez certains courants ou auteurs, à travers le fascisme ou le national-socialisme... Par ailleurs, « l'autre tiers-mondisme n'est jamais, même quand il s'enveloppe d'une sympathie sincère pour les cultures non occidentales, un internationalisme ». En effet, il « entend s'adresser à des peuples opprimés en respectant les spécificités de chacun ».

    Bien antérieur à la conférence de Bandoeng (1955) ou à l'apparition du terme « tiers-monde » dans les dictionnaires, l'autre tiers-mondisme a toujours présenté un double visage. Le premier est politique et stratégique. Il prône l'alliance avec des forces du monde non occidental afin de lutter contre l' « impérialisme ». Il n'implique pas forcément d'attirance particulière pour les peuples du tiers-monde (un cas emblématique: Jean Thiriart) à la différence du second qui est avant tout idéaliste et métapolitique. Ici, l'on a beaucoup plus affaire à des personnalités pouvant être subjuguées par des aspects culturels ou spirituels non-européens, en particulier l'islam. On y trouve ainsi des convertis qui sont des figures de première importance de l'autre tiers-mondisme : Johann von Leers ou Claudio Mutti. Les idées dont l'ouvrage traite se retrouvent avant tout chez les « nationaux-révolutionnaires » mais pas seulement car elles sont le fruit d'une « mouvance, bien plus qu(e d') un phénomène très structuré ».

    Sur ce sujet complexe mais ô combien instructif de l'histoire des idées, Philippe Baillet, connu pour être le traducteur français de nombres d'œuvres de Julius d'Evola et, plus récemment, l'auteur d'ouvrages remarqués (voyez ma chronique de son précédent livre : Le parti de la vie), a mené avec la rigueur qu'on lui connaît une étude en profondeur des acteurs, courants, réseaux et mouvements pouvant être rattachés à l'autre tiers-mondisme au sein de la droite radicale européen où celui-ci « a fait son chemin lentement mais sûrement ». Après avoir été longtemps minoritaire, il est devenu, de nos jours, un pan important des idées professées dans (ou autour de) nos mouvances. L'autre tiers-mondisme ne se limite cependant pas à cet aspect et se veut un livre militant qui, à partir de l'analyse des idées de l'autre tiers-mondisme, entend démontrer à quel point elles sont nocives dans le cadre du combat que nous, les nationalistes européens, menons. Le lecteur sera peut-être étonné par la longueur de cette chronique. Il y a deux raisons à cela : la grande richesse du livre que je ne fais ici qu'effleurer et l'importance de cette parution que j'estime fondamentale pour notre courant de pensée.

    Un siècle d'autre tiers-mondisme

    Baillet estime qu'on retrouve les premières traces de l'autre tiers-mondisme en Europe à Fiume, au lendemain de la Grande Guerre. Se voulant « l'épicentre de la révolution mondiale des peuples opprimés », y est créée La Ligue de Fiume qui dénonce le « trust mondial des Etats riches » qu'est la SDN. Assez peu présente au sein de l'Italie fasciste, c'est dans l'Allemagne des années vingt et trente que la tendance va poursuivre son chemin. On l'observe avant tout au sein de l'aile gauche du NSDAP et chez les nationaux-révolutionnaires (NR) qui en sont, souvent, proches. Deux personnages sont ici à mentionner : Johann von Leers et Friedrich Hielscher. Le premier se rallie au régime national-socialiste et y fera carrière « tout en conservant certaines caractéristiques typiques de l'aile gauche de la NSDAP » tandis que le second y est hostile et en viendra même à le combattre, ayant probablement mal supporté (comme beaucoup de ses camarades NR) de ne pas avoir réussi à faire plus de place à ses idées dans la nouvelle Allemagne... Il faut dire qu'Hielscher, qui avait publié en 1927 un appel aux peuples opprimés d'Asie et du monde arabe -vus comme alliés naturels du peuple allemand face au rationalisme et au culte de l'argent occidentaux- avait sans doute une différence d'appréciation dans la politique à mener envers les peuples non-européens par rapport à la doctrine nationale-socialiste. Si Hitler ou Rosenberg pouvaient, comme on le sait, professer des sentiments bienveillants envers telle culture étrangère ou tel peuple non-européen, la « défense de la race » étaient, pour eux, primordiale et passait bien avant toute considération « anti-impérialiste ». Ne lisait-on pas dans Mein Kampf l'affirmation suivante :

    « En raciste qui se base sur la race pour estimer la valeur du matériel humain, je n'ai pas le droit de lier le sort de mon peuple à celui des soi-disant « nations opprimées » connaissant déjà leur infériorité raciale »

    Rosenberg, quant à lui, « pressent(ait) qu'un jour le flot montant des peuples de couleur pourrait trouver une direction nette et une forme d'unité grâce à l'islam ». La citation suivant, relevée une fois encore par l'auteur, provient du Mythe du Xxe siècle:

    « Face à cette haine des races bâtardes de couleur, conduites par l'esprit fanatique de Mahomet, qui s'allieront peut-être un jour, les races blanches ont plus que jamais toutes les raisons de prendre garde. » Prophétique comme dit Baillet !

    Après 1945 et durant deux décennies, l'autre tiers-mondisme entre dans « le temps des réseaux ». Toujours ultra-minoritaire, cette tendance est portée par plusieurs personnages de la droite radicale européenne sur lesquels Philippe Baillet revient plus ou moins longuement : Johann von Leers à qui il consacre un long chapitre, François Genoud, aventurier et éditeur suisse haut en couleur, Maurice Bardèche et d'autres. A partir d'un examen détaillé de leurs écrits, l'auteur estime qu'ils faisaient « leur révolution par procuration à travers Nasser, le FLN algérien et un islam largement fantasmé » (il parle pour Bardèche d' « islam de salon fabriqué à Paris ») ; à l'instar de la gauche française qui, après 1968, a projeté « toutes ses attentes sur le Nouveau Monde latin » (de Guevara et Castro à Chavez). La critique de Baillet va plus loin : les personnages mentionnés oublient la dimension raciale du « fascisme du phénomène européen » et voient du fascisme là où il n'y en a pas (car le fascisme est européen martèle-t-il). Ils auront toutefois de nombreux continuateurs...

    Dans les années 1960, l'autre tiers-mondisme, dans sa version politique et laïque, va prendre un réel essor et se structurer théoriquement parlant par l'action du belge Jean Thiriart. Pionnier dans ce domaine, il va développer grâce à ses écrits (dont les journaux « Jeune Europe » puis « La Nation Européenne ») et au mouvement politique « Jeune Europe » l'idée d'une Europe puissance, unitaire et communautaire. S'il prône l' « anti-impérialisme » et l'alliance des militants NR européens avec ceux du tiers-monde, sa vision reste strictement eurocentrique : « il fut très certainement celui qui alla le plus loin dans l'affirmation d'un autre tiers-mondisme politique, mais il fut aussi celui qui se montra le plus incurieux et le plus méprisant envers les peuples et cultures du tiers-monde ».

    Thiriart et son mouvement eurent une influence non négligeables sur bien des militants (Christian Bouchet ou Claudio Mutti pour les plus réputés) et on retrouva cette postérité chez des organisations telles que 3ème Voie ou Nouvelle Résistance. En Italie, cette postérité fut un peu plus importante, favorisée par Claudio Mutti qui avait été l'un des principaux cadres de Jeune Europe dans ce pays ; citons par exemple le cas du quotidien « de gauche nationale » Rinascita (qui paraît toujours aujourd'hui). Quoi qu'il en soit, la haine des Etats-Unis (désignés comme « l'ennemi principal ») de Thiriart et ses thèses auront été une étape très importante du logiciel intellectuel et militant d'une certaine partie de la droite radicale européenne qui va désormais se désigner comme nationale-révolutionnaire (en Italie, ce terme s'appliquera justement à ceux ne se reconnaissant pas dans le MSI). Par ailleurs, il faut souligner que l'anti-américanisme de Thiriart était plutôt sommaire ; il sera par la suite fortement approfondi, en particulier au sein de la Nouvelle Droite...

    Les idées relevant de l'autre tiers-mondisme se retrouveront également dans le « traditionnalisme-révolutionnaire », sorte de synthèse d'idées d'Evola, de Thiriart et de la gauche fasciste dont le principal organe en France fut la revue « Totalité » (publiée chez Pardès) à partir de 1977. Le soutien à des formes d'islamisme radical y est clair dans plusieurs numéros (auxquels Baillet a lui-même contribué, ayant eu des optiques quelque peu différentes à cette époque)... N'oublions pas l'impact qu'eût alors la révolution iranienne sur les milieux NR! L'attrait envers l'islam devint prépondérant chez certains des acteurs de ce courant, en particulier Claudio Mutti qui « illustre à la perfection les ravages que peut exercer la passion antijuive, y compris chez les plus cultivés et les plus intelligents ». Mutti s'est ainsi converti à l'islam et a abandonné toute forme de racialisme pour se rallier à une vision du monde universaliste (y voyant même une continuité avec le combat national-socialiste!)... Les militants d'aujourd'hui auront bien du mal à le comprendre mais l'islam, il y a trois ou quatre décennies, paraissait à certains un allié de choix. Baillet cite ainsi Alain de Benoist qui écrivait dans Eléments en 1985 que : « Le réveil de l'islam n'est pas à nos yeux une menace mais bien plutôt un espoir. » La passion anti-américaine a fait elle aussi des ravages...

    L'auteur du Parti de la Vie examine également l'influence qu'a eu (et a encore) René Guénon. Souvent bien vu dans une partie de nos mouvances, ce converti, qui demanda même la nationalité égyptienne, n'en reste pas moins un auteur méprisant « l'Occident » (donc l'Europe) et idéalisant l'Orient. Aucun racialisme chez lui dont « bon nombre de vues (…) doivent être combattues sans modération ». Ayant contribué à l'entretien d'un climat islamophile en France et ailleurs, Guénon a eu beaucoup de continuateurs plus ou moins directs jusqu'à aujourd'hui. Baillet explore cet aspect culturel de l'autre tiers-mondisme en soulignant à quel point le « parti islamophile » en Europe est dangereux et difficile à combattre à cause de son « caractère polymorphe ». Ayant des ramifications partout (de la politique aux médiats en passant par l'administration et le monde universitaire), le « parti islamophile » voit l'immigration de peuplement comme inévitable et considère que l'implantation de l'islam est positive (quelles qu'en soient les modalités). L'islam a fasciné voire conquis plusieurs tenants de l'autre tiers-mondisme mais souvent pour de mauvaises raisons. Baillet, bon connaisseur de cette religion, revient sur ces errements dans un petit chapitre passionnant : il démonte l'idée de l'islam comme vecteur de virilité (argument souvent cité) et démontre que le double discours, le « mensonge par omission », la « tromperie active » sont des armes qui peuvent être couramment employées par les musulmans en accord avec leurs préceptes religieux et leur objectif de conquête...

    Ces dernières années, bien des positions islamophiles liées à tort ou à raison à la droite radicale sont devenues monnaie courante dans ce que Philippe Baillet appelle le « philo-islamisme radical ». Celui-ci est généralement lié à un « sous-marxisme rustique typiquement tiers-mondiste » ou est « emprunt de complotisme à la faveur du développement exponentiel de la « foire aux Illuminés » ». Bien différent du « fascisme comme phénomène européen », ses traits principaux sont : une indifférence plus ou moins marquée envers la « défense de la race blanche », une « véritable passion antijuive » et anti-américaine, une grande hostilité à la finance et au capitalisme, une sympathie pour toutes les causes « anti-impérialistes » et pour l'islam comme religion ou civilisation (l'Islam dans ce cas). Que nous partagions certaines idées de ce courant ne nous en rend pas forcément proche, et je rejoins en cela l'auteur. Celui-ci souligne la diversion effectuée par cette sensibilité chez un grand nombre de personnes qui oublient par ce biais «la priorité absolue» en ce « moment capital de l'histoire de la civilisation européenne »: la perpétuation des peuples européens (de leur partie saine tout du moins). De Roger Garaudy, « illuminé christo-islamo-marxiste » à Carlos et son internationalisme en passant par le chantre de la réconciliation Alain Soral qui « s'inscrit parfaitement (…) dans la vieille tradition des chefaillons et Führer d'opérette chers à la droite radicale française », nombre de figures chères à la frange la plus islamophile de nos mouvances sont ici égratignées par Baillet qui n'a pas son pareil pour souligner leurs contradictions (quand Soral se prétend "national-socialiste français" par exemple)... ou rappeler à notre bon souvenir certaines énormités ou actes pas reluisants. Il souligne ainsi les tentatives d' « islamisation » de la « mouvance nationale » en prenant le cas d'une association telle que celle des « Fils de France » qui se veut un « rassemblement de musulmans français patriotes » et qui a reçu, entre autre, le soutien d'Alain de Benoist. Le philo-islamisme de ce dernier se manifeste depuis bien longtemps. Baillet rapporte d'ailleurs plusieurs citations de celui qu'il qualifie de « toutologue » à ce sujet! Plus ou moins récentes, elles permettent de mieux comprendre le personnage (voir plus haut)... Autant dire qu'on ne peut qu'aller dans le sens de Baillet lorsqu'il argue de l'étendue et de la diversité du « parti islamophile » en France. « Ce n'est pas du tout rassurant », en effet ! Le « parti islamophile » est bien enraciné et doit être combattu « sans faiblesse » partout où il se trouve. Un peu d'espoir cependant :

    « Aujourd'hui, on peut penser que « l'autre tiers-mondisme » est voué à connaître, dans les milieux de la droite radicale européenne, un certain reflux, à cause des craintes légitimes engendrées par l'immigration de peuplement, l'installation durable de l'islam dans le paysage ouest-européen, le développement de l'islamisme radical, les crimes du terrorisme islamiste. »

    Les Européens et leur survie

    La dernière partie de l'autre tiers-mondisme a une dimension beaucoup plus militante. C'est un véritable appel à la résistance face à l'islamisation de notre continent et à son invasion. D'où la nécessité d'avoir étudié les différentes formes de l'autre tiers-mondisme et du « parti islamophile ». Philippe Baillet considère en effet que « la crainte ou la peur de l'islam (…) est parfaitement justifiée » mais le combat contre cette religion doit, avant tout, être mené dans une perspective identitaire, en démontrant toujours plus que l'islam est « incompatible avec l'héritage spirituel et culturel européen ». Il examine (et critique le cas échéant) pour cela les écrits de Guillaume Faye et de Renaud Camus, deux auteurs connus pour leur lutte contre l'immigration-invasion et le « grand remplacement ». Regrettant le rejet par le FN de ce dernier thème et donc le renoncement de fait à celui de la remigration, Baillet estime que ce parti ne peut parvenir au pouvoir légalement étant donné la part grandissante du poids représenté par le vote musulman en France (on peut illustrer la justesse de ce propos avec le cas récent de Londres ou celui, plus ancien, d'Anvers). Qu'a-t-on à attendre de la République française de toute façon ? Elle « n'est que l'affreux miroir grimaçant de la décadence ininterrompue et toujours aggravée du pays. » De plus :

    « C'est une illusion de croire que l'on pourra sauver la France de l'islamisation en défendant un régime qui, depuis plus de deux siècles, a tout fait pour détruire chez les Français jusqu'aux dernières traces de conscience raciale. »

    Face à l'uniformisation, à « l'effacement de toute humanité différenciée » et à « l'avènement définitif du métis planétaire », de « l'homme remplaçable, interchangeable, substituable à merci », qui sont en somme les « visées profondes du mondialisme », Baillet propose quelques pistes doctrinales, en premier lieu, il loue le « rôle socialement protecteur du préjugé » (thème qu'il explicite plus avant à partir des écrits des conservateurs anglo-américains, Burke en priorité) qui est l'un des « mécanismes de défense immunitaire collective », surtout en ce qui concerne la race. Sa défense est notre combat premier et même si le fait racial « fait de la résistance » par lui-même, le racialisme « ennemi absolu des mondialistes » doit être notre horizon.

    « En effet, parce qu'il est radicalement anti-universaliste, le racialisme est seul à même d'assurer dans l'avenir le maintien de la diversité des races, des cultures et des peuples contre le rouleau compresseur de l'uniformisation. »

    En France (mais le constat est le même dans le reste de l'Europe de l'Ouest), l'Etat est « illégitime, tyrannique et criminel », il étend en parallèle son emprise totale sur la vie des citoyens en usant en particulier de l'ingénierie sociale (l'auteur mentionne le très bon ouvrage Gouverner par le chaos), nous devons, en conséquence, absolument résister. En effet, « contre un pouvoir qui n'a plus pour lui que la légalité, l'insurrection s'impose », d'autant que « le pouvoir mondialiste ne renoncera à aucun de ses objectifs mortifères. » Il y met toute sa hargne comme sa propagande incessante et sa répression le démontrent. « La sous-humanité du petit bonheur » qu'il propose est un leurre mais les Européens fatigués, lassés « de vivre et de combattre » sauront-ils retrouver un mythe mobilisateur ? Je vous laisse découvrir l'avis de Baillet sur la question... Il ne vous laissera pas indifférent.

    Conclusion

    Ouvrage dont la double dimension -histoire des idées et optique militante- m'a fortement plu, je ne saurais trop conseiller la lecture attentive de l'autre tiers-mondisme. Ce livre éclaire, démythifie et dénonce bien des idées reçues (par exemple, le manque complet de reconnaissance que les musulmans ayant travaillé avec des membres de la droite radicale ont toujours professé à l'égard de ces derniers...). Il se fait fort de rappeler les fondements essentiels de notre combat et montre que bien des errements sont à corriger dans la "mouvance" (dans certaines de ses sensibilités tout du moins). Comment certains peuvent-ils encore vouloir frayer avec un islam qu'ils fantasment et qui est complètement contraire à ce que nous sommes? « Le Coran est parfaitement indifférent à la dimension raciale » rappelle Baillet. Certains n'avaient peut-être pas encore compris...

    J'imagine que l'autre tiers-mondisme fera réagir, ce qui est normal, mais il serait bien malhonnête de mettre en doute le travail de Philippe Baillet qui a épluché une variété de sources immense et n'omet jamais de citer ses références. Pas comme d'autres...

    Rüdiger / C.N.C.

    http://cerclenonconforme.hautetfort.com/le-cercle-non-conforme/

  • De Bonaparte à l'Union européenne, mort et renaissance du Saint-Empire : la recherche de la paix en Europe et l'opposition au nationalisme

    Bonaparte bouleverse l'ordre européen hérité du Moyen Âge

    En 1805 à Austerlitz, Napoléon et ses troupes brisent le Saint-Empire romain germanique qui disparaît un an plus tard. C'est, pense-t-on, la fin de l'ordre féodal et le triomphe des idées de la Révolution. Les innovations françaises essaiment en Europe. Cette guerre menée par Napoléon aux monarchies et au vieil ordre européen inspirera un ouvrage clef au prussien Clausewitz, De la Guerre. Ce dernier comprend qu'avec la Révolution, l'avènement de la nation et la levée en masse, la guerre change de nature. Et si la guerre change de nature, la paix doit-elle aussi changer de nature ?

    La furie napoléonienne sème l’effroi en Europe, et il faudra un certain nombre d'erreurs et une coalition continentale contre la France pour mettre un terme à l'aventure. D'abord en Russie (1812) puis après le retour que l'on connaît, et pour de bon, à Waterloo (1815). C'en est fini, pense-t-on, de ces tourments semés par l'Antéchrist Bonaparte ! Ce dernier, en effet, était peu aimé des autorités et royaumes catholiques. Ses relations complexes avec la Papauté, qui furent entre autres marquées par l’enlèvement de Pie VII en 1809, n'arrangèrent pas la situation.

    L'épisode bonapartiste avait pourtant pour objet de réconcilier la Nation et l'Eglise, ou du moins, la nation et les catholiques. La nation prétendait à l'unité de tous, comme le catholicisme. Nation et confession pouvaient-elles faire bon ménage ? La période révolutionnaire marque la difficile arrivée de la nation – au sens moderne – dans l'histoire et le deuxième recul de l'unité confessionnelle qui avait été rétablie avec autorité par les monarques durant et à la suite des guerres de religion en France. La nation, en quelque sorte, permet l'unité malgré les différentes confessions. Le serment du jeu de Paume, peint par David, illustre bien cette réconciliation des confessions par la nation. Ni sujet du roi, ni agneau de Dieu, mais citoyen.

    Les principaux opposants à la Révolution constituent ce qu'on appelle « la contre-révolution ». Quelques personnages emblématiques composent ce courant : Joseph de Maistre, l'abbé Augustin Barruel, Louis de Bonald ou en Espagne Juan Donoso Cortes. En Angleterre l'irlandais Edmond Burke.

    En 1798, l'abbé Barruel, célèbre pour avoir attribué la Révolution aux juifs, aux franc-maçons et aux protestants invente le mot de « nationalisme » : "Le nationalisme prit la place de l'amour général ( ... ) Alors, il fut permis de mépriser les étrangers, de les tromper, de les offenser. Cette vertu fut appelée patriotisme. Et dès lors, pourquoi ne pas donner à cette vertu des limites plus étroites ? Ainsi vit-on du patriotisme naître le localisme, l'esprit de famille et enfin l'égoïsme". Pour les catholiques contre-révolutionnaires, l'invention de la nation est contraire à l'universalité chrétienne et à la recherche de la paix. Cette volonté de promouvoir la paix n'est pas neuve, elle est pour beaucoup dans l'émergence de l'Empire carolingien. En effet le premier empire uni par la chrétienté plus que par la romanité est celui fondé, contre son gré, par Charlemagne. Alcuin considère Charlemagne comme le nouveau roi David de l'Ancien Testament. Insuffisamment romanisés, les Germains sont surtout progressivement christianisés. Le titre de « roi des Romains » faisant surtout référence à la domination de l'Italie. Son fils, Louis le Pieux, approfondira l’œuvre chrétienne voulue par le Pape : réforme monastique confiée à Benoît d'Aniane ou encore humiliation publique de 822.

    Si le titre impérial va connaître des hauts et des bas, c'est en 962 que va naître ce qu'on appellera le Saint Empire Romain Germanique. Cet empire qui n'était ni vraiment saint, ni vraiment romain, pour s'inspirer de la formule de Voltaire (« ni saint, ni romain, ni empire » dans Essai sur les mœurs), va profondément structurer l'Europe des environs de l'an Mil jusqu'à la période révolutionnaire. En quelque sorte il naîtra et mourra à peu près en même temps que la monarchie française (987-1792). Cet empire qui fut fondé par Othon Ier prétendait raviver l'Empire de Charlemagne. Les premiers empereurs étaient des « avoués de l'Eglise » et avaient pour mission de la protéger. On connaît les relations complexes de cet empire avec la Papauté au moment de la querelle des investitures, illustrées par la pénitence à Canossa d'Henri IV en 1077. En Italie cette rivalité conduisit à l’érection de deux partis : les Guelfes et les Gibelins. Les Guelfes étaient favorables au Pape et les Gibelins à l'empereur. La dynastie des Hohenstaufen dut ferrailler avec la papauté mais fut vaincue.

    En France, la « paix » sera promue par deux grands mouvements : la Paix de Dieu et la Trêve de Dieu. Deux mouvements qui vont anticiper celui de la croisade, un pèlerinage en arme qui vise à protéger le tombeau du Christ, menacé par les incursions turques. L'idée de paix est fortement bouleversé par les guerres de religion au XVIeme siècle. Dans le Saint-Empire, la question avait été tranchée dès l'époque de Charles Quint : la population devait adopter la confession de son Prince (Cujus regio, ejus religio). En France le prince était catholique, alors le peuple devait l'être également. On sait combien cette politique contribua à l'émergence de la monarchie absolue mais aussi des Lumières qui ne remirent pas en question la monarchie (Montesquieu défendait l'idée de la Monarchie constitutionnelle par exemple) mais critiquaient l'absence de liberté de conscience et affirmèrent, à leur façon, l'importance de la raison. A ces conflits religieux s'ajoutent les conflits en Europe, particulièrement à l'époque de Louis XIV. L'abbé de Saint-Pierre formé par les Jésuites va publier Un projet de Paix perpétuelle en 1713 à la suite du traité d'Utrecht. Considéré comme un Moderne dans la querelle des Anciens et des Modernes, diplomate, il est un précurseur de la philosophie des Lumières et membre de l'Académie française dont il sera exclu pour ses opinions hostiles à la monarchie absolue. Dans son projet, il défend l'idée d'une Diète européenne inspirée par la Diète du Saint-empire favorisant le règlement des différends et d'une langue européenne. Il sera raillé. En avance sur son temps, selon le lieu commun consacré, il est souvent perçu comme un précurseur des projets de paix internationale comme le fut la SDN.

    Au XVIIIème siècle, plusieurs vassaux du Saint-Empire sont souverains en dehors. Citons quelques exemples : l'Electeur de Hanovre est roi d'Angleterre en 1714, le duc d'Holstein roi du Danemark, l'Electeur de Saxe est roi de Pologne et les Habsbourg eux-mêmes règnent en Bohême et en Hongrie. Même si l'Empire est donc surtout germanique et que l'on n’hésite pas à parler d'Allemagne ou des Allemagnes, il exerce une influence continentale à laquelle seule la France échappe réellement. Ainsi, quand, au XVIIIème siècle, la France s'oppose à l'Angleterre, c'est à un vassal de l'Empereur qu'elle s'oppose et non simplement au roi d'Angleterre. Lorsque la Révolution naît en France, c'est tout un édifice qui est menacé, un édifice qui est familial mais aussi vassalique. C’est cet édifice que Napoléon balaye et c'est autour de la restauration de celui-ci que va naître la Sainte Alliance. Au Congrès de Vienne, ce sont des monarchies à la fois proches et rivales qui s'accordent pour mettre un frein aux idées révolutionnaires et rétablir la paix sur le continent. Là aussi l'idée de la paix est au cœur des préoccupations.

    Les catholiques après 1815 : entre contre-révolution et démocratie-chrétienne

    Profondément secoués par la Révolution, déçus par Bonaparte, les catholiques cherchent à réaffirmer une conception de l'ordre social et continental conforme aux Évangiles.

    En France, la Restauration semble être en phase avec les idées contre-révolutionnaire mais elle connaît certaines difficultés qui conduiront en 1830 aux Trois Glorieuses, peintes par Delacroix et à une monarchie plus souple, plus bourgeoise. Parmi les personnalités de la Restauration, le contre-révolutionnaire Louis de Bonald. Il défend un pouvoir de droit divin et s'oppose aux idées de la Révolution et à la philosophie de Rousseau (Du Contrat social). De Bonald est aussi connu pour ses correspondances avec une autre figure contre-révolutionnaire, Joseph de Maistre. Formé chez les Jésuites dont on le dit proche, franc-maçon, il défend une conception théocratique du pouvoir, rejette la séparation éventuelle de l'Eglise et de l'Etat et reconnaît la supériorité du Pape. A côté d'une contre-révolution toujours forte, le christianisme libéral émerge progressivement. Ce dernier est souvent considéré, à tort, comme un compromis avec la Révolution. En 1830, quelques auteurs catholiques comme l'ultramontain et légitimiste Félicité Robert de Lamennais vont œuvrer au sein du journal l'Avenir.Mais ce dernier sera condamné par le Pape en 1832 (Encyclique Mirari Vos). S'il ne dure que peu de temps (environ un an) il sera lu par des auteurs célèbres comme Hugo ou Balzac. On considère cette initiative comme l'embryon de la démocratie-chrétienne. Parmi les positions tenues, l'Avenir est favorable à certaines libertés politiques, à la démocratie dans un cadre monarchique, au fédéralisme, à la séparation de l'Eglise et de l'Etat pour mettre un terme au Concordat qui soumet l'Eglise à l'Etat ou encore à l'unité politique européenne. Autant de thèmes qui feront flores... Si le Pape condamne l'Avenir c'est essentiellement en raison de son attachement à la liberté de la presse et à un certain nombre de libertés politiques qui menaceraient l'ordre en place.

    Seize ans plus tard, une autre initiative permet l'émergence réelle de la démocratie-chrétienne, il s'agit de l’Ère nouvelle avec comme acteur majeur Frédéric Ozanam. Inspirés par l'Avenir, ils feront preuve d'une plus grande prudence tout en diffusant des thèmes chers à Lamennais. En effet en 1848, les catholiques ont une opportunité historique. Avec l'instauration du suffrage universel masculin et la fin du suffrage censitaire, c'est une France essentiellement rurale, encore peu pénétrée par les idées libérales et la révolution industrielle qui se rend aux urnes. On connaît la suite : Louis-Napoléon Bonaparte devient président de la République et les parlementaires sont presque tous catholiques : bonapartistes, légitimistes, orléanistes, catholiques libéraux… L’Ère nouvelle n'est pas un journal de combat au sens polémique du terme : « Le souffle qui nous anime n'est pas un esprit de guerre, c'est un esprit de paix ». L’Ère nouvelle se prétend être le journal de la fraternité : « la liberté et l'égalité ont leur journaux, la fraternité aura le sien ». Il est à noter que pour l'Ere nouvelle, la liberté, l'égalité et la fraternité sont des valeurs chrétiennes bien avant de devenir la devise de la République et de la France. Ainsi Ozanam écrira que « La révolution de février [1848] n'est pas pour moi un malheur public auquel il faut se résigner ; c'est un progrès qu'il faut soutenir. J'y reconnais l'avènement temporel de l’Évangile exprimé par ses trois mots : liberté, égalité, fraternité. » Ozanam oppose une doctrine démocratique où « [...] c'est le nombre qui fait le droit. Il le fait sans égard pour les opinions dissidentes qu'il a le pouvoir de contraindre et d'étouffer » et une autre doctrine démocratique où « la fin de toute société n'est point d'établir le pouvoir du plus grand nombre, mais de protéger la liberté de tous [...] ». L’Ère Nouvelle aussi ne survit pas plus d'une grosse année et disparaît en 1849. Si en 1848 la démocratie-chrétienne prend son envol, c'est aussi l'année du printemps des peuples. En Italie, le Pape Pie X s'oppose à ces insurrections populaires et voit d'un bon œil l'intervention autrichienne à Milan comme l'intervention française à Rome. Mais on arrête pas le vent des idées et que ce soit symboliquement avec Verdi ou plus concrètement avec Mazzini (franc-maçon), le fondateur de « Jeune Italie », la conscience nationale italienne commence à s'aiguiser. L'unité italienne conduit alors à l'excommunication de Victor-Emmanuel II et de la Maison de Savoie et à la « question romaine ». Le Pape s'enferme au Latran.

    Avec son Encyclique de 1892, le Pape Léon XIII promeut le ralliement. Anatole Leroy-Beaulieu qui fut président de la Ligue contre l'athéisme y voit un héritage de Lamennais : « C'est parce que Lamennais se trouvait en avance sur son époque, que Lamennais a été abandonné et condamné par Rome, c'est un demi-siècle plus tard, après le bref essai du Pape Pie IX de 1848, c'est à Léon XIII qu'est revenu l'honneur de reconnaître qu'il était l'heure pour l'Eglise de se décider à tendre la main à la « Reine des Temps Nouveaux » [la démocratie] et Léon XIII l'a fait avec une netteté et une résolution qu'il est impossible de contester. » Malgré les hésitations et les complications (laïcisme scolaire, affaire Dreyfus, séparation des Eglises et de l'Etat de 1905) l'Eglise souscrit donc progressivement à la démocratie-chrétienne. Elle comprend, sûrement avant les autres, ou peut-être en s'inspirant des Lumières qui avaient influencé les élites de leur temps, que la société n'a pas besoin de monarques chrétiens de « droit divin » pour être chrétienne. En Italie, la démocratie-chrétienne va donc peu à peu émerger et elle se développe en lien avec l'Eglise pour contrer le nationalisme italien puis le fascisme. C'est d'ailleurs le prêtre Luigi Sturzo qui sera le premier à initier la résistance au fascisme dès 1920. Ce dernier fonde en 1918 le Parti Populaire Italien avec un certain Alcide de Gasperi qui sera plus tard un des « Pères de l'Europe » au côté de l'agent américain Jean Monnet et de Robert Schuman. La signature des accords du Latran entre le Saint-Siège et Mussolini sera un coup de maître de la Papauté qui est reconnue dans sa souveraineté, y compris territoriale depuis la fin des Etats de l'Eglise, par l'Etat italien. Cela n'empêche absolument pas l'Eglise de mener une politique hostile au nationalisme.

    Le nationalisme c'est le diable. Critiqué par l'abbé Barruel dès 1798, considéré comme une idée funeste de la révolution, le nationalisme a été perçu par une partie non négligeable de l'Eglise comme un nouveau ferment de division et aussi comme un frein à ses intérêts comme nous l'avons vu. Le nationalisme diffère de la contre-révolution, qui visait surtout à la restauration d'un ordre ancien, féodal, s'appuyant sur des monarchies de droit divin ou du moins au maintien d'Etats catholiques. La démocratie-chrétienne quant à elle accepte donc l'idée de la démocratie, mais seulement si la souveraineté populaire est en même temps la souveraineté de Dieu. De fait, Napoléon était l'antéchrist et le nationalisme est le diable. Le diable n'est autre que celui qui divise (du Grec diabolos). Jacques Ellul dans Anarchie et Christianisme considère par exemple le nationalisme comme un élément de division, comme une manifestation de diabolos. Lutter contre le nationalisme et œuvrer pour la paix sur le continent, se fait donc ici au nom de valeurs chrétiennes (charité, paix, tolérance, ouverture). Ce qui démontre une nouvelle fois à ceux qui refusent de l'entendre qu'il y a une différence entre un christianisme en acte qui conduisit l'Eglise catholique à devenir démocrate-chrétienne et à excommunier l'Action Française et un christianisme patrimonial et identitaire plébiscité dans la droite nationale qui correspond aux défenseurs de l'ordre pré-révolutionnaire refusant l'avènement de la démocratie quand bien même celle-ci serait considérée comme « l’œuvre de Dieu ». Toutefois on peut noter, déjà sous le Second empire mais également à la Belle-Epoque une fusion progressive entre une partie de la contre-révolution et le nationalisme. C'est ce qu'on retrouvera dans l'Action Française. Mais le nationalisme intégral d'un Maurras sera tout de même jugé avec méfiance par la Papauté, qui eut recours à l'excommunication comme elle le fit au moment de l'unité italienne contre le roi. Quant aux  non-conformistes des années 30, qui pour certains passèrent par l'Action Française, ils contribuent au développement de la philosophie personnaliste et seront souvent hostiles au nationalisme et favorables à un fédéralisme européen. Qu'on songe aux intellectuels regroupés autour de la revue "L'Ordre nouveau" par exemple.

    Le projet européen : d'une utopie démocrate-chrétienne à la restauration d'un nouveau Saint Empire

    Bien qu'il doit aussi dans l'idée à un personnage singulier, le comte Coudenhove-Kalergi, le projet européen tel que construit depuis la CECA est une initiative de la démocratie-chrétienne. Adenauer, Schuman, De Gasperi et même plus tard un Giscard d'Estaing, rédacteur du Traité Constitutionnel Européen de 2005 rejeté par les Français et René Pleven, auteur de la loi Pleven contre le racisme, sont tous de la grande famille de la démocratie chrétienne. Merkel, qui écrase actuellement l'Europe, est membre de la CDU, le grand parti démocrate-chrétien allemand. Nombreux sont les éléments chrétiens dans la symbolique de l'UE. L'hymne n'est autre que le Te Deum (A toi, Dieu) qui sont les premiers mots de certains textes liturgiques. Les douze étoiles feraient quant à elle référence à la Vierge Marie, aux douze tribus d'Israël et aux douze Apôtres. La devise de l'UE In varietate concordia(Unité dans la diversité) se rapproche fortement de l'ancienne devise des Etats-Unis, E Pluribus Unum (De plusieurs, l'Un). Cette idée d'unité dans la diversité est très proche de ce que fut le Saint-Empire ou même, après la chute de celui-ci, de l'Autriche-Hongrie.

    Depuis la réunification allemande, l'UE est probablement devenu un nouveau Saint Empire romain germanique. Animé par les valeurs de la démocratie-chrétienne : la paix, la liberté, la fraternité et l'hostilité au nationalisme et au rejet des étrangers, fédéraliste et favorable au régionalisme, c'est une lutte qui est formulée, pas à pas, contre l'héritage nationaliste issu de la Révolution et dont la France et l'Italie sont les deux éléments les plus gênants. L'historien Jean Meyer se risque à aller dans ce sens : « Quand l'historien regarde la carte des régions économiques de l'Union européenne et, plus encore, lorsqu'il repère sur cette même carte l'implantation des courants régionalistes et des mouvements séparatistes, il ne peut s'empêcher de voir resurgir la carte de duché et comtés du Moyen Âge, avant l'émergence des puissants royaumes de France, d'Espagne, d'Angleterre. Comme si l'union de l'Europe menaçait de détruire les Etats nationaux anciens ou nés au XIXe siècle. » Cité en note de bas de page d'un ouvrage de Thierry Lentz et Patrice Gueniffey paru récemment chez Perrin, cet extrait appuie un développement de celui-ci à ce propos : « En exagérant à peine, on pourrait dire que la pente dominante de ce début de troisième millénaire en Europe paraît être au retour à l'Europe médiévale, celle du Saint-Empire romain germanique qui, se réclamant de l'héritage des Césars, coiffait une pluralité de cités, duchés et principautés et assurait leur existence au sein d'un ensemble à peine moins inconsistant que l'actuelle Union européenne où les Etats ne trouvent pas aisément leur place, dont les nations se défient, mais où les communautés infrapolitiques, civilisations, villes, provinces, régions et « tribus » définies par les mœurs ou les croyances sont comme chez elles. »

    En appréhendant l'actualité au regard du temps long historique, on comprend assez aisément que l'Europe carolingienne est en réalité déjà existante. Et au même titre qu'elle eut des difficultés à survivre à son créateur et aux différences des peuples qui la composaient au IXème siècle et qu'elle se limita au final aux principautés germaniques et à quelques autres, on constate que l'UE, qui est sous domination allemande, pourrait très bien voir le projet carolingien s'effondrer au profit d'une Allemagne qui tenterait de satelliser des états voisins à l'image du Saint-Empire. Parmi ceux-ci, l'Italie, la Belgique ou la France, le tout en lien avec les élites xénophiles du Vatican. Le Prix Charlemagne, dont le nom est tout sauf un hasard et dont le premier lauréat fut le comte Coudenhove-Kalergi, a été remis au Pape jésuite François. On pourrait se risquer à appréhender la politique menée entre Merkel et le Pape François dans le temps long des rapports entre le Saint Empire romain germanique et la Papauté. A l'inverse on constatera la résistance des Eglises nationales en Autriche, en Hongrie, en Pologne ou en République Tchéque comme ce fut souvent le cas dans l'histoire européenne (un des prémisses de la réforme luthérienne et de l'émancipation vis à vis de la Papauté et du Saint-Empire fut d'ailleurs le mouvement fondé par le Tchéque Jean Hus).

    Aussi paradoxal que cela puisse donc paraître, c'est bien une partie de l'héritage de la Révolution française qui est progressivement détruite par l'UE. Ralliée à la démocratie et au libéralisme, favorable à la paix continentale, s'appuyant sur les désastres des deux conflits mondiaux, la démocratie-chrétienne combat non seulement le nationalisme mais également le « populisme » lointain descendant du bonapartisme. Celui-ci est l'exemple historique sur lequel se fonde le populisme de type césariste dans l'Europe contemporaine. Bonaparte est pour les catholiques de son époque un véritable antéchrist qui exporte partout le poison de la Révolution. Même si certains catholiques (dont Barruel) se rallieront à lui y voyant – à tort – une restauration de l'ordre ancien. Le bonapartisme qui fut brisé à la fois par les monarchistes et les républicains impulsa l'idée du coup de force en politique : c'est ce que n'osa faire un Boulanger qui eut séduit quelques bonapartistes mais c'est ce que fera en Italie Mussolini qui établira un nouveau césarisme politique d'inspiration augustéenne.

    La nation, simple voie d'intégration à l'imperium ?

    La nation est donc restreinte actuellement à une voie d’intégration vers l'imperium. Devenir citoyen français, allemand, belge, italien ou autre c'est devenir de facto citoyen européen. C'est aussi a contrario ce que le Brexit illustre : défiance des Anglais à l'égard du continent et d'un nouveau Saint Empire romain germanique, opposition Angleterre/Ecosse et Angleterre/Irlande, c'est le temps long historique qui fait encore des siennes. Le Brexit, n'est-ce pas au final la politique d'Henry VIII ou celle, plus récente, des « Little Englanders » ? Le Frexit ne serait-il pas, tout simplement, un retour à la politique capétienne ? Le succès du Front national navigue donc sur deux tendances de l'histoire nationale, les Capétiens et le Bonapartisme. Chez les Capétiens, la constitution d'un Etat souverain où le roi était « empereur en son royaume » ce qui signifiait in fine qu'il se considérait indépendant, voire égal, de l'empereur germanique, le tout adossé à une politique religieuse plutôt gallicane. Même si le terme est alors anachronique. Par exemple le mouvement de croisade lancé par le clunisien Urbain II concerne à l'origine des princes périphériques et non la monarchie capétienne. Les grands princes de la première croisade sont Raymond IV de Toulouse, engagé dans la Reconquista et Godefroy de Bouillon, issu de l'ancienne Lotharingie, qui devait constituer le cœur carolingien après le partage de 843. Quant à la Révolution française et à Bonaparte, ils retranscrivent aussi deux choses : le retour du refoulé antique, foulé au pied ou modelé par l'Eglise catholique et le retour du politique au sens antique, c'est à dire du citoyen qui appartient à une communauté de destin distincte des autres, qui prend la forme au XIXème siècle de la nation. Bonaparte, bien qu'il souhaita s'inscrire dans un héritage carolingien, mena une politique totalement inverse de celle des Carolingiens. Là où Bonaparte voulu soumettre l'Eglise à l'Etat, l'Empire carolingien représente la soumission de l'Etat à l'Eglise.

    Ce qui se joue au sein de l'UE est donc un combat certes politique, mais aussi un combat philosophique, un combat d'idées. Ou la France, à l'origine du fait national, parvient à imposer sa voie (la fameuse « Europe des nations ») et à défendre le nationalisme quitte à privilégier en parallèle d'autres formes d'alliances (l'union latine dont nous avons déjà parlé), ou bien elle continue à être un satellite allemand dans un utopique projet européen influencé par la démocratie-chrétienne. Un imperium européen sans la démocratie-chrétienne, tel que voulu par une partie de la Nouvelle Droite est-il possible ? Les seules fois où il a existé un projet continental c'était sous l'impulsion de la papauté ou de personnalités catholiques, sinon chrétiennes.

    Jean/C.N.C.

    http://cerclenonconforme.hautetfort.com/archive/2016/07/31/de-bonaparte-a-l-union-europeenne-mort-et-renaissance-du-sai-5832198.html

  • Alain Escada présente Civitas au micro de Radio Courtoisie

  • Ce régionalisme peu connu par Georges FELTIN-TRACOL

    Au cours des quarante dernières années, la République française fut souvent confrontée aux revendications, parfois violentes, de mouvements régionalistes, autonomistes, voire indépendantistes, en Corse, au Pays Basque, en Bretagne sans oublier des contrées d’Outre-mer. La Catalogne du Nord, l’Occitanie, le Pays Nissart, la Savoie, l’Alsace connurent, eux aussi à un degré moindre, des réclamations similaires. On ignore en revanche qu’il existe en Normandie un mouvement régionaliste.

    C’est l’histoire de ce régionalisme peu connu qu’étudie Franck Buleux. Son travail sort au moment où les régions basse- et haute-normandes s’unissent pour former une seule entité régionale : la Normandie. Cette unification constituait la raison d’être majeure du Mouvement Normand (MN). Fondé le 29 septembre 1969 à Lisieux par le député gaulliste Pierre Godefroy, l’universitaire Didier Patte et l’écrivain Jean Mabire, il se nomme avant 1971, Mouvement de la Jeunesse de Normandie (MJN) et rassemble, d’une part, les militants anti-communistes de la Fédération des étudiants rouennais (FER), et, d’autre part, les notables pro-gouvernementaux de l’URN (Union pour la région normande). « Le MJN se veut, non pas l’interlocuteur des masses, mais celui des élus. Il ne se fixe pas des objectifs électoraux, mais son rôle est de convaincre les élus normands de la nécessité, historique comme économique, d’unifier la Normandie  (p. 103). »

    La Normandie une et diverse

    Son dynamisme en fait vite le promoteur d’une identité normande enchâssée dans plusieurs cercles d’appartenance culturelle et politique spécifiques. « La Normandie, observe Franck Buleux, composée de fortes distinctions géographiques naturelles (notamment par la différence des sols) estimées au nombre de vingt-sept pays (le pays d’Ouche, le pays de Caux, le pays d’Auge, le pays de Bray, la Hague, le Val de Saire, le Cotentin, l’Avranchin, le Mortanais, le Passais, le Bessin, le Bocage, le Houlme, la campagne ou plaine de Caen, la campagne ou plaine d’Alençon, le Lieuvin, le Hiémois, le Thimerais, le Roumois, la Campagne du Neufbourg, la plaine de Saint-André, la Madrie, le Vexin, le Talou, l’Aliermont, le Petit Caux et le Perche) connaît aussi une distinction linguistique (p. 10). » S’ouvrant sur la Manche, la Normandie entre en résonance certaine avec le monde anglo-saxon (qu’il serait plus juste de dire « anglo-normand » !) et la Scandinavie. 

    Franck Buleux s’intéresse longuement à la revue d’inspiration nordiciste Viking de Jean Mabire. « Fondée en mars 1949 et diffusée à partir de cette même date, y compris en kiosques dans l’ensemble des départements normands et dans la Capitale, [elle] se qualifia comme “ la revue des Pays Normands ” ou les “ Cahiers de la jeunesse des pays normands ”. Elle va illustrer, tout au long de sa pagination et de son existence, cette identification de la terre normande à son passé scandinave. Cette revue […] produisit un ensemble de 27 numéros entre mars 1949 et le printemps 1958 (p. 44). »

    Contrairement à quelques groupuscules indépendantistes loufoques brièvement mentionnés, leMouvement Normand « rejettera, dès son origine, toute volonté séparatiste vis-à-vis de la France qui entraînerait l’indépendance normande (p. 117) ». Il préfère se définir régionaliste et français. Il réclame par conséquent une véritable et profonde décentralisation. En effet, « au-delà de la réunification, l’objectif concomitant du MN est la reconnaissance d’un réel “ pouvoir régional ”, ce qui le distingue d’autres mouvements de droite, souvent considérés comme proches. Ainsi, Didier Patte reprochera généralement à la droite, ainsi qu’à l’extrême droite nationale, d’être certes, toutes deux, favorables à la réunification, mais d’être beaucoup plus réticentes à la mise en place d’un pouvoir régional, avec la dévolution de certaines prérogatives au profit d’une assemblée normande (p. 116) ».

    Des actions plus culturelles que politiques

    N’hésitant pas, le cas échéant, à présenter des candidats aux élections, le Mouvement Normand investit en priorité la métapolitique et l’influence auprès des élus locaux. Sa défense acharnée des intérêts normands du Cotentin à la vallée de la Seine, du littoral de la Manche à la Suisse normande, contrarie régulièrement les initiatives strictement localistes et presque égoïstes des maires, des conseils généraux et des conseils régionaux.

    Afin de faire avancer ses idées qui ne se limitent pas à la seule unification normande puisqu’il aborde en permanence les questions économiques et d’aménagement du territoire, le Mouvement Normand dispose de deux périodiques : L’Unité Normande à tonalité politique et Culture Normande consacrée aux problèmes culturels. Franck Buleux n’évoque en revanche pas le médiat sur Internet, TVNormanChannel (TVNC), lancé en 2010. Son étude démontre finalement qu’en dépit du centralisme parisien multiséculaire et malgré l’unicité uniformisatrice propre à l’idéologie égalitariste républicaine, un régionalisme enraciné et conséquent aide au maintien du caractère pluraliste des nombreux terroirs qui façonnent cette « Europe en miniature », la France. 

    Georges Feltin-Tracol

    • Franck Buleux, L’unité normande. Réalité historique et incertitude politique, Paris, L’Harmattan, coll. « Connaissance des Régions », 2015, 261 p., 26,50 €.

    • D’abord mis en ligne sur Euro-Libertés, le 19 juillet 2016.

    http://www.europemaxima.com/

  • L'Islam est étranger à la civilisation française. Pourquoi ne pas l'admettre une fois pour toutes ?

    Par Gilbert CLARET

    Un commentaire, reçu sur Lafautearousseau vendredi 29, qui a retenu notre attention parmi ceux de ces derniers jours, nombreux et souvent excellents. Un regard raisonnable, clair, pondéré et néanmoins très ferme, sur le rapport de la société française à l'Islam. Il nous a paru important de le donner à lire au plus grand nombre de lecteurs de Lafautearousseau. Même si l'heure est plutôt à l'affrontement qui nous est tragiquement imposé, qu'à la réflexion sereine. Mais sans-doute faut-il considérer que l'une et l'autre ne s'excluent pas.  LFAR   

    L'Islam est étranger à la civilisation française. Pourquoi ne pas l'admettre une fois pour toutes ?

    Cette admission était implicite dans la rupture politique avec le concept d'Algérie française. L'Algérie aux algériens, la France aux français. De Gaule l'avait parfaitement compris et mise en pratique tel un homme d'Etat digne de ce nom..

    Ceci étant posé, la France, fidèle à sa tradition d'ouverture d'esprit universel, pouvait et pourrait encore parfaitement accepter qu'une petite minorité de musulmans vivent sur son sol, disons dans une proportion de 2% ou 3% de la population française, telle une curiosité intéressante permettant de débattre sur les mérites et particularités ou bizarreries de cette religion si peu conforme à nos religions judéo-chrétiennes, mœurs, mentalités et formes de pensée bimillénaires, sans prétendre nier les apports estimables  arabo-berbéro-ottomano musulmans dans les arts, les sciences, l'architecture et la littérature notamment.

    Jacques Chirac, après avoir nié contre toute évidence les racines chrétiennes de l'Europe, a eu l'audace d'ajouter contre la conviction intime des Français, que ses racines étaient autant musulmanes que chrétiennes. Jacques Chirac, parlant au nom de la France, parangon de la haine de soi au sommet de l'Etat ! Il est temps pour la France de recommencer à être elle-même et à s'aimer dans ses racines bimillénaires. Comme l'énonce un sage adage : « soyez vous-même, les autres sont déjà pris ».

    http://lafautearousseau.hautetfort.com/

  • Libérer l'enseignement de la tutelle de l'Etat

    6a00d83451619c69e201bb09231980970d-200wi-1.jpgYves More, Docteur ès lettres, titulaire d'un DEA de sciences de l'Education, diplômé de l'Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales, et Godefroy de Villefollet, directeur d'un réseau d'enseignement supérieur privé, ont publié un ouvrage intitulé En finir avec l'Ecole républicaine. Plutôt que de prendre partis entre les théoriciens des méthodes pédagogiques modernes et les défenseurs de la sacro-sainte Ecole républicaine, avec son mythe de l'instituteur, cet hussard noir de la République, ils montrent que ces deux camps partagent la même idéologie. Toutes les réformes scolaires ont visé non à adapter l'institution aux besoins de la société, mais à mettre a la portée de tous les études les plus traditionnelles, jugées plus gratifiantes. C'est contre cette idéologie qu'ils s'élèvent :

    "Or, le double caractère étatique et monopolistique de l'enseignement public est l'un des vices rédhibitoires de notre système scolaire, nous l'avons vu. Nous vivons, depuis la création de l'Université napoléonienne (1808) et de l'enseignement primaire guizotin ultérieurement rénové par Ferry (1833), sous le régime de l'Etat enseignant et de l'Etat maître souverain exclusif de la collation des grades universitaires. Il s'agit là d'une aberration unique au monde, une de ces regrettables exceptions françaises dont nous nous rengorgeons. [...]

    Si bien qu'en France, il n'existe pas de secteur libre et concurrentiel d'enseignement, hors quelques rares établissements privés hors contrat. L'Etat décide des programmes d'enseignement, rémunère les maîtres, impose ses directives réglementaires et son contrôle administratif dans le "privé" sous contrat d'association comme dans le public. Et les collectivités prennent en charge les dépenses matérielles de fonctionnement des établissements relevant de l'un comme de l'autre. Et l'Etat seul confère les grades universitaires. Il n'existe aucune alternative à l'Etat enseignant dont on connaît le marasme. Or, il y a urgence à mettre fin à cet absolutisme scolaire si l'on veut mettre fin à une crise scolaire commencée il y a quarante-cinq ans (et dont les prodromes sont beaucoup plus anciens) et restaurer un système d'enseignement apte à répondre aux exigences du monde actuel et en accord avec les exigences de la coopération européenne. [...]

    Si absolu fût-il, Louis XIV lui-même n'intervenait aucunement (et ne songeait pas à le faire) dans la vie, l'enseignement des universités et collèges et la collation des grades. Et de nos jours, il en est de même à l'étranger. Un doctorat de l'université privée de Columbia (New-York) n'est pas accordé par un jury d'Etat et validé par un ministère ou une administration publique, mais uniquement par un jury de cette université ; et il a la même valeur nationale, voire internationale, qu'un doctorat conféré par l'Université de Californie à Los Angeles (UCLA), publique quant à elle. Il n'existe pas de diplômes "privés" d'établissements privés ni de diplômes "publics" d'établissements publics, ni de do-iplômes exclusivement publics, préparables dans des établissements privés, mais décernés uniquement par des jurys d'Etat. Il existe des diplômes universitaires décernés aussi bien par des établissements privés que par des établissements publics, et sans que l'estampille de l'Etat soit nécessaire. L'Etat n'a pas à être propriétaire des diplômes. Les trop fameuses notions de "caractère national" et de "valeur nationale" des diplômes n'ont aucun sens. Nul ne s'en préoccupe à l'étranger ni ne s'en souciait en France avant Napoléon."

    Michel Janva

  • RAPPEL - Immigration de masse ET Métissage programmé (Coudenhove Kalergi ) - Nick Griffin