culture et histoire - Page 1285
-
Les grandes batailles du passé - Austerlitz 1805
-
IX e Journée nationaliste le 10 octobre 2015
-
La dentelle du rempart
Parmi les florilèges maurrassiens, découvrons La Dentelle du Rempart, où la force de l'expression participe mystérieusement à celle de la pensée. Une anthologie préfacée par un éditeur de renom, Bernard Grasset.
La luxuriante diversité des oeuvres de Charles Maurras appela de son vivant l'anthologie. Tout le monde connaît Mes Idées politiques publiées en 1937 par la librairie Fayard qui les réédita en 1968 avec une préface de Pierre Gaxotte. Le petit poussin de l'admirable avant-propos rédigé par Maurras est resté justement célèbre : « Le petit poussin brise sa coquille et se met à courir... Mais le petit homme ? » L'anthologie fut établie par Maurras lui-même à la demande de nombreuses personnes.
Pour une petite anthologie
Nous citerons, moins connu, le choix de textes par François Natter et Claude Rousseau, De la politique naturelle au nationalisme intégral (1). Le livre de trois cents pages se divise en quatre parties : des textes autobiographiques, dont des poèmes, une analyse de la maladie démocratique, des vues sur la politique naturelle, enfin un exposé du nationalisme intégral. Un index, une solide bibliographie, des notes abondantes en font un ouvrage universitaire.
Peut-on passer sous silence le monumental Dictionnaire politique et critique de "Pierre Chardo" (2) ? C'est une mine où l'on peut puiser indéfiniment. Les OEuvres capitales rassemblent, elles, l'essentiel des écrits de Maurras en quatre gros volumes, avec de douloureux sacrifices dus aux malheurs du temps.
Mais je dois avouer que je suis particulièrement attaché à une petite anthologie, La Dentelle du Rempart, choix de pages civiques en prose et en vers (1886-1936) avec une préface de Bernard Grasset (3), texte publié d'abord dans la Revue universelle du 1er janvier 1937 sous le titre : Notes pour un hommage à Charles Maurras. Que signifie le titre que Maurras donna à son florilège ? Il écrit dans son introduction : « Le rempart sert à protéger. Le créneau, à guetter. Mais les festons de la découpure dorée, le grain brillant d'une pierre taillée à vif, l'heureuse harmonie des rapports en long et en large, peuvent bien émouvoir d'un égal intérêt l'agresseur et le défenseur. » Qu'elles soient analytiques ou polémiques, politiques ou poétiques, les pages de Maurras possèdent toujours une valeur littéraire qui n'est pas une "valeur ajoutée" ; la force de l'expression participe mystérieusement à la force de la pensée.
Qui était Bernard Grasset ?
Né en 1881 à Montpellier, Bernard Grasset fit des études de Sciences économiques, puis "monta" à Paris où il fréquenta dans les cafés littéraires Moréas, Faguet, Giraudoux, Charles Maurras. Il fonda une maison d'édition qui connut rapidement le succès avec deux prix Goncourt en 1911 et 1912 : Monsieur des Lourdines d'Alphonse de Chateaubriant et Filles de la pluie d'André Savignon, sans compter l'immense succès des délicieux pastiches À la manière de... signés Paul Reboux et Charles Muller.
En 1913, il publia à compte d'auteur le premier livre d'un certain Marcel Proust, Du côté de chez Swan après que le manuscrit eut été refusé chez d'autres éditeurs. L'oeuvre fut saluée par Léon Daudet. Accusé de collaboration en 1944, Bernard Grasset bénéficia d'un non-lieu. Il céda son capital à Hachette en 1954 et mourut l'année suivante. Les éditions qui portent encore son nom ne présentent que peu de points d'affinité avec lui.
La préface de Bernard Grasset révèle un parfait connaisseur de Maurras capable de souligner les lignes les plus importantes de sa pensée. Maurras est un conciliateur : « Toutes les oppositions qui ne viennent pas de la nature des choses tombent devant ce magicien. » L'homme d'action est mis en avant, à l'égal de l'humaniste : « Un tel esprit, généralisateur par essence, n'en est pas moins aux ordres du quotidien. » Bernard Grasset a vu combien Maurras, homme d'ordre, est épris de liberté, des libertés, droits qui touchent à d'autres droits et, par ce fait, sont limités, car l'homme dépend de l'homme.
Pauvreté
Le préfacier insiste sur l'esprit de pauvreté du maître de l'Action française qui transporta hors de lui tous ses soins et ne vécut que pour le service de son pays. Il met enfin en lumière ce que Maurras doit à la Grèce et à Rome : Il tientde Rome son réalisme politique, la raison gouverne le sensible, et la Grèce constitue le fondement de son esthétique. Mais Maurras n'aurait pu être sans Paris : « En vérité, comme tout s'unit en cet homme ! Ne pense-t-on pas que cet ardent troubadour est le plus haut trouvère de ce temps ? » Admirable synthèse due à un éditeur qui fut l'honneur de sa profession au temps où les grands éditeurs ne faisaient pas songer à des marchands de nouilles !
Gérard Baudin L’ACTION FRANÇAISE 2000 du 19 novembre au 2 décembre 2009
1) - Librairie philosophique J. Vrin, Paris, 1972.
2) - La Cité des livres, Paris, 1932.
3) - Ed. Bernard Grasset, Paris, 1937.
-
Cette haine que la République a toujours vouée à la France
Nous arrivons à la phase terminale de la haine inexpiable qu’une certaine conception nihiliste de la République a toujours vouée à la France comme patrie charnelle. Nul ne sait qui l’emportera.
La manipulation politico-médiatique à laquelle nous assistons depuis quelques jours, s’agissant de l’accueil en Europe, et plus particulièrement en France, de prétendus réfugiés, ne doit pas nous empêcher de raison garder. Ce déferlement d’immigrants illégaux, encouragé par certains États membres de l’Union européenne et par Bruxelles, provoque la sidération par son orchestration médiatique, qui n’hésite devant aucun mensonge ni aucune voyeurisme pour justifier l’imposture droit-de-l’hommesque.
Merkel, par cette politique d’appel d’air et ses menaces contre Schengen, qu’elle sait concrétiser, cherche à la fois à s’acheter une virginité humanitaire, à répondre aux besoins d’une Allemagne qui a besoin d’une main-d’œuvre à bon marché et à forcer, avec l’appui de Bruxelles, ses partenaires européens à adopter sa politique, même si en l’affaire elle a peut-être oublié la vertu de prudence.
S’agissant de la France, en tout cas, les diktats allemands, auxquels Hollande a pour habitude de se soumettre illico, permettent surtout à nos élites de concrétiser leur haine profonde du peuple français. Ce déferlement d’immigrants illégaux, que le « trouple » incestueux formé par le pays légal, les médias de l’oligarchie et le patronat encourage contre des franchouillards incurables, est, à leurs yeux, une chance démographique à saisir car elle leur permet d’accélérer la désintégration de la France.
C’est évidemment au nom des « valeurs de la République » qu’il convient d’accueillir, « sans discrimination » aucune, ces réfugiés, mâles à près de 80 % – chiffre de l’ONU -, qui ont courageusement laissé femmes et enfants au pays ou dans leur exil précédent avant de les faire venir chez nous. Autant, donc, de faux réfugiés et de vrais immigrants dont le ministre Macron, il y a quelques jours (vendant la mèche), a salué l’arrivée prochaine comme « une vraie opportunité économique ». Alors que le chômage ne cesse de progresser et que la fracture sociale s’aggrave désormais d’une fracture culturelle et religieuse.
François Marcilhac Directeur éditorial de L’Action Française 2000
La suite sur Boulevard Voltaire
http://www.actionfrancaise.net/craf/?Cette-haine-que-la-Republique-a
-
In Mémoriam - au crépuscule
-
Les ravages de l'esprit révolutionnaire
Une critique politique de la révolution et de l’esprit révolutionnaire est souvent à courte vue. Le phénomène de la révolution est multiforme. La révolution peut être violente comme celles de Robespierre ou de Lénine. Elle peut aussi se dérouler sans violence apparente mais bouleverser la société en profondeur. Les Canadiens parlent de « la révolution silencieuse » des années soixante où la pratique religieuse a diminué, le taux de natalité s’est effondré, la délinquance a augmenté, etc… On a bien eu dans les années 68 comme on dit en France, une sorte de révolution dans les mœurs (au sens large) qui a été reprise notamment par le parti socialiste et qui n’a pas fini d’avoir de l’influence, y compris sur la vie politique.
L’une des analyses les plus profondes de l’esprit révolutionnaire a été faite par le philosophe allemand existentiel Martin Heidegger. Dans son livre « que veut dire penser ? » (« Was heisst denken ?») il a montré que cet esprit ne procédait ni de la politique ni de la morale, mais bien de la métaphysique. La métaphysique ignore la différence entre l’être et l’étant. Elle ne connaît que l’étant et l’homme moderne, déterminé par la pensée métaphysique sans même le savoir, vit « le nez dans le guidon » accroché aux objets immédiats et à l’instant présent. Il oublie l’être sans lequel les étants n’existeraient pas.
Cet homme moderne correspond au « dernier homme » décrit par Nietzsche dans « Ainsi parlait Zarathoustra ». Ce dernier homme n’a plus d’idéal, il est matérialiste et utilitariste.
« Qu’est ce que l’amour ? Qu’est ce que la création ? Qu’est ce que la nostalgie ? Qu’est ce qu’une étoile ? » Ainsi demande le dernier homme et il cligne de l’œil. « Nous avons inventé le bonheur disent les derniers hommes, et ils clignent de l’œil ». Dans les quatre questions posées, le dernier homme montre :
- - sa froideur envers les hommes considérés comme des matières premières interchangeables (l’égalitarisme a pour but de faciliter cette interchangeabilité avec de beaux objectifs affichés) ;
- - son scepticisme envers un Dieu créateur ;
- - son mépris du passé (c’est un trait fondamental comme on le verra) ;
- - son rejet de tout idéal (l’étoile).
Le dernier homme est persuadé d’avoir inventé le bonheur : c’est typique de tous les esprits révolutionnaires. Et il va chercher à l’imposer. « Il cligne de l’œil » veut dire qu’il se sent supérieur et qu’il croit que ses jugements de valeur ont une validité universelle.
Nietzsche va loin car il découvre que la réflexion la plus profonde dont est capable le dernier homme est fondée sur « l’esprit de vengeance ». Dans le chapitre sur « les Tarentules », il explique que l’égalitarisme n’est pas autre chose que de la volonté de puissance qui prend la forme de la vengeance sous le masque de la justice. Nietzsche dit que l’on ne pourra dépasser le dernier homme que si l’on est capable de se libérer de cet esprit de vengeance, donc de l’égalitarisme. Cet homme libéré de l’esprit de vengeance, il l’appelle le surhomme, dont il donne une définition : « César avec l’âme du Christ » !
La métaphysique moderne, observe Heidegger, identifie l’être avec la volonté. La volonté veut commander à tout : c’est la définition même de l’esprit révolutionnaire. Or, quel est l’obstacle invincible contre lequel la volonté ne peut rien ? C’est le temps et plus particulièrement le passé. Le temps est ce qui passe. On ne peut pas revenir sur ce qui est passé. Et Nietzsche définit la nature de cette vengeance métaphysique : c’est la vengeance à l’égard du temps qui passe, la vengeance à l’égard du passé.
C’est bien ce que l’on trouve chez tous les révolutionnaires : Robespierre comme Lénine comme les animateurs de Mai 68 : ils ont la haine du passé. Le passé est à détruire, c’est lui qui bloque l’accès au bonheur. Pour la métaphysique, l’être, c’est l’instant, ce n’est ni ce qui est passé, ni ce qui est à venir. Autrement dit, l’être n’est autre que l’étant, les objets (y compris les hommes) que l’on a sous la main.
Mais la métaphysique commet plusieurs erreurs : l’être n’est pas l’étant mais à la fois le passé, le présent et l’avenir. Le temps lui-même ne peut être réduit à l’instant. Le temps est durée : passé, présent et avenir. C’est en cela qu’être et temps sont inséparables.Toute la civilisation est fondée sur la prise en compte de ce temps long. Le révolutionnaire qui veut tout ici et maintenant n’aboutit qu’à détruire et à tuer.
C’est l’enfant ou le sauvage qui n’est pas capable de prendre en compte le temps, d’investir dans le temps et de faire fructifier dans l’avenir l’héritage du passé.
L’esprit révolutionnaire est bien parmi nous et il exerce ses ravages. Chaque fois que la facilité conduit à ne voir que l’avantage dans l’instant, cet esprit conduit à détruire notre avenir et à gaspiller l’héritage du passé. La responsabilité de l’adulte est justement de savoir prendre des décisions dans la durée. La propriété, la famille sont des institutions qui justement poussent l’homme vers plus de sens des responsabilités. Le citoyen propriétaire aura toujours une vue plus responsable que le gérant élu pour un temps court : c’est sur cette idée qu’est fondée la démocratie directe des Suisses. T
outefois, pour Heidegger, Nietzsche avait fait un bon diagnostic mais n’a pas trouvé le remède. Il le trouve dans l’éternel retour de l’identique. Mais on ne voit pas comment cet éternel retour supposé nous délivre vraiment de l’esprit de vengeance. Pour cela, il faut aller au-delà de la métaphysique. Il ne faut plus considérer le temps exclusivement comme ce qui s’enfuit, donc comme un ennemi. Le temps, c’est aussi, ce qui advient, donc c’est un don qui nous est fait par l’être. Le don, s’il est perçu, nous conduit non à la vengeance mais à la gratitude. Alors, nous sortons totalement de l’esprit révolutionnaire et de son esprit de vengeance égalitaire, nous en sommes délivrés.
Yvan Blot , 0I/09/2010
-
Roger Vandenberghe
-
Le pentagone du prince
Le silence assourdissant des maisons princières aux jours de l'assaut des frontières européennes, ainsi qu'au spectacle de cette guerre non déclarée d'une rive à l'autre de la Méditerranée qu'est l'offensive du fondamentalisme musulman, m'a conduit à douter de leur perception des enjeux. Quel est leur degré de perception des réalités ? Ma langue au chat. Quel devrait-il être ? C'est déjà plus facile.
Contre la Cour - Billet didactique offensif
Il y a quatre choses pour soutenir un monde : La connaissance du Sage, la justice du Grand, les prières du Pieux, le courage du Brave. Mais tout cela n'est rien sans celui qui gouverne et connaît l'art de gouverner (Frank Herbert, in Dune). C'est le pentagone du pouvoir.
Cet art de gouverner s'apprend jeune. Il doit pénétrer le prince au fur et à mesure de sa croissance. C'est son sang, son âme, sa "spécialité". Les enfants des dynasties régnantes sont éduqués au berceau pour y atteindre - enfin, dès l'âge de raison. En dehors du cursus d'appropriation des connaissances, le plus difficile pour eux est d'apprendre à convaincre plutôt qu'à obliger. Aiguiser l'analyse et le jugement réclame des connaissances fouillées, mais d'abord la formation d'un caractère "intellectuel" affirmé, en plus d'un tempérament persuasif et serein. Le nerf du prince n'est pas celui du commun.
Les enfants des dynasties ambitieuses qui ne règnent pas doivent être mis au travail comme les autres, sinon on peut retrouver en eux le jour venu, les mêmes travers que l'on reproche aux dirigeants de rencontre que la République puise dans le vivier des arrivistes : boulimie sexuelle, comportement de parvenus ridicules, goinfrerie gratuite, caporalisme du commandement et in fine tyrannie ; toutes choses impossibles chez une famille régnante même depuis peu, qui entendrait poursuivre.
Nous devons constater, sans nous en affliger, que les prétendants que promènent ci et là les actualités royalistes ne sont pas prédisposés à la mise sur orbite d'un vrai chef d'Etat ; soit qu'ils jugent utopique une quelconque confrontation de leurs capacités à l'emploi éventuel qui les guette, soit que ces mêmes capacités ne suffisent pas à les porter au niveau requis et qu'ils en soient conscients. D'aucuns peuvent aussi se laisser tromper par le niveau parfois exécrable de chefs sélectionnés par le système démocratique. Sont-ce les princes les plus inquiets de ce hiatus ? peut-être plus que la cour qui ne rêve que de promulguer avertissements et conseils ! Les "dresseurs de prétendants", selon l'heureuse formule d'Yves-Marie Adeline, se renouvellent sans cesse à mesure de l'usure du précédent, vaincus par l'inertie du champion. La chambrière de Royal-Artillerie n'est pas loin non plus de glisser des mains du Piéton.
Mais hors de la pépinière des conseillers avoués, le doute fuse et la proportion très grande de militants royalistes rangés des voitures - comme l'avait mesuré le sondage¹ SYLM pour les Premières Assises Royalistes - ne s'explique que par la révélation de l'inanité d'un combat dont l'urgence n'est pas partagée en haut lieu. L'infanterie se laisse décimer en formation tant que le capitaine est devant, l'épée au ciel.
Sans déroger au respect que méritent les princes sincères, on peut faire une simulation de niveau et laisser à chacun le soin de mesurer l'écart à l'existant. Nous avertissons le lecteur que la description d'emploi contenue dans les lignes qui suivent ne visent en rien à copier les gouvernements d'Ancien régime, mais cherche à cerner les qualités utiles pour faire de la politique exécutive à haute fréquence. Dans notre monde, la prise de décisions irrévocables est quotidienne pour l'Exécutif. Cette aptitude dépasse la formation classique d'un élève appliqué. Il y faut la race : on ne peut que partir d'un tempérament favorable et forger le caractère qui y commandera. Sans ce préalable, il est vain de "cotiser".
Comme nous le disions dans un billet irrévérencieux au mois de mars, L'âme des princes « la destinée du prince oblige à monter le niveau le plus haut possible pendant la période de sa formation - on en jugera par les diplômes obtenus - et à forger un caractère résilient. Outre les nécessaires humanités et mathématiques, il tombe sous le sens que des études de droit public, de finances publiques et de commerce international, clôturées par un passage dans une académie militaire, soient le minimum syndical pour qui s'apprêterait à nous gouverner aujourd'hui ». Ceci étant acquis, il reste la pratique des codes sans laquelle le prince accédant resterait dépendant de son entourage. C'est exactement l'objet de cet article.
Gouverner au plus près du vent oblige à bien connaitre les codes de communication et de transaction des hommes qui comptent. Sans en rechercher l'expertise, le prince doit être familier de la langue des grandes corporations sociales qui pèseront le plus lourdement sur ses décisions. Cet apprentissage ne peut être obtenu autrement qu'en travaillant le temps nécessaire à cette acquisition dans chacune de ces grandes corporations. Cette accoutumance "technique" est indispensable pour comprendre les débats du futur Conseil et provoquer sans délai les synthèses attendues. Le monde du XXI° siècle ne nous laisse plus le loisir d'interminables exégèses, il faut "réagir". Pour ce faire, faut-il aussi comprendre l'événement dans l'essentiel sans le filtre du chargé d'affaires. Les anciens rois nous avaient habitués à cette prescience.
Quelles sont donc ces corporations que la culture générale de l'honnête homme ne suffit pas à connaître ? Il y en a heureusement peu, mais ce sont des spécialités contiguës au pouvoir ; à notre avis, les voici toutes, je crois :
* Finances internationales immergées, marchés denrées et matières
* Droit international appliqué
* Infra-stratégies, art de la guerre
* Physique sociale du comportement des masses
* Géographie humaine de l'Afrique noire et haïkous
En quelques paragraphes pourquoi :
Ces spécialités ne sont pas enseignées pour elles-mêmes, sauf à dériver d'enseignements magistraux plus globaux, et il vaut mieux qu'il en soit ainsi car le monde universitaire est trop confiné et lent pour les pratiquer ensuite². Elles s'apprennent en s'investissant dans le milieu considéré, pas forcément longtemps. Il y a d'autres spécialités secondaires dans ce cas, mais elles ne sont pas contiguës au pouvoir et ne nous intéressent pas ici. Exemple : affrètement, conduite d'une opération amphibie, cyber-attaque,... le cas de l'espionnage se discuterait :)
#1. Les finances immergées et les marchés denrées-matières sont des spécialités dont la compréhension n'est accessible que par les back-offices des banques ou par les salles de marché des maisons de trading. Leur influence est considérable sur les paramètres politiques, certains disent que l'essentiel du pouvoir y gît.
#2. Sauf à passer par un cursus juridique classique de droit public, la connaissance des réalités pratiques du droit de force inter-nations est indispensable. Il est aujourd'hui des cours internationales qui brassent ces problèmes quotidiennement.
#3. Pour la stratégie, on a envie de pousser à l'étude des Sun Tzu et Clausewitz - ce qui ne serait aucunement perdre son temps - mais ce sont les infra-stratégies actuelles qui comptent dans le débat et leur approche n'est pas si aisée. Peu de cénacles s'en occupent et les pénétrer demande beaucoup d'habileté ou de relations. Avec les secondes cela reste possible.
#4. La sociologie des foules est une base d'apprentissage politique qui fut travaillée par de grands penseurs, mais la nouvelle société de communication actuelle en demande la révision complète pour ne pas dire la reconstruction. Les foules réagissent au smartphone. Le meilleur stage ne peut être fait ailleurs que dans un grand service de sûreté nationale ou chez... Facebook.
#5. Pourquoi l'Afrique noire ? Parce que c'est notre premier défi européen. Nous en économisons ici la description que chacun anticipe déjà. Le prince en formation ne pourra faire autrement que de passer du temps dans plusieurs ONG/agences mouillées sur le terrain. Vacances exotiques en perspective sur trois ou quatre ans. Et les haïkous ?
C'est le comte Herman Van Rompuy qui m'a demandé d'ajouter cet art tout en finesse qui ne sera jamais enseigné à la fac à peine d'en mourir. Ils lui permirent de meubler les séances interminables du Conseil européen. Royal-Artillerie vous offre le sien à la fin du billet.
À la fin du cycle des spécialités, viendra le temps des synthèses. En situation d'accéder, le prince devrait avoir achevé la connaissance intime de son pays en faisant l'inventaire des dépendances incontournables, des contraintes indesserrables que sa géographie et le monde lui appliquent. Il serait dommage à ce moment d'affaiblir sa réflexion de l'incorporation de coutumes apprises de l'ancien temps puisque l'époque du royalisme pouet-pouet sera achevée à la veille de l'accession.
Les atouts du pays qui restent nombreux à ce jour seront mis à l'actif du bilan. Contraintes et dépendances au passif. Afin que le déséquilibre du bilan national soit gérable, il conviendra de combattre l'effet des dépendances et contraintes et de magnifier les atouts. Par l'optimisation des déséquilibres se terminera l'apprentissage de "l'art de gouverner" laissant place dès lors à l'accumulation de l'expérience.
A la table du nouveau gouvernement on ne devrait gérer que le domaine régalien - il serait sage précaution que de laisser la société à ses disputes démocratiques. Au Conseil de demain, ils seront cinq. Comme un poing fermé, ce Conseil des ministres sera puissant et réactif. Ainsi que l'expliquait Jean-Claude Martinez à la conférence du Centre d'Etudes Historiques sur le Maroc : un pays se gouverne avec une demi-douzaine de "patrons". Faut-il encore les avoir ! C'était l'effectif de la vieille monarchie et Napoléon n'en prit pas beaucoup plus. L'Allemagne (5+9), la Suisse (7) s'y tiennent presque. Les cabinets pléthoriques de la République française sont ridicules, et l'émiettement partisan du pouvoir ajoute l'inefficacité au grotesque ! Ne changeons pas en pire et retenons-nous, messeigneurs, de récompenser ducs et marquis, vicomtes et barons.
Que vienne ce temps avant que le pays n'expire. Il aura alors achevé sa révolution à l'extrême limite de la période autorisée pour sa survie. Deux siècles et demi pour lui faire faire 360 degrés. Au roi, et vite !
Vexilla regis prodeunt, y a plus qu'à !
Note d'ordre
À quoi sert ce billet, en suite de quelques autres attachés à la formation du prince ? L'audience modeste du blogue laisse répondre : "à rien". Mais le Web est vaste comme l'océan où on laisse des bouteilles. Si quelque impétrant ramasse celle-ci sur la grève de nos regrets, elle voudra lui dire que nous prenons au sérieux le retour d'une monarchie en France et qu'il ne faut pas jouer avec notre espérance. A se dire "dynaste" comme on l'entend partout dans les maisons princières, il sied de se préparer à toute éventualité de restauration ou instauration pour la conduire au succès, et cela commence par sa propre formation et celle de ses héritiers.
Les princes d'aujourd'hui en situation d'accéder ne sont pas vraiment formés à l'emploi³. Etudes très moyennes, profession sans profession, inaptitude à bâtir un corpus doctrinal personnel, communication terne, confort de l'historicisation de toute apparition publique, revendication répétitive de droits hérités qui sont en fait perdus, le tout signalant une inaptitude alarmante. Le syndrome du bouchon de liège plombé par l'hameçon.
Si leurs enfants ne sont pas mieux formés à terme, alors nous saurons que les princes en vue n'y croient pas plus que n'y croient nos adversaires républicains et qu'ils jouent avec un mouvement de sympathie populaire qui les flatte et leur coûte si peu. C'est pour cela que j'observerai avec une grande curiosité les progrès que feront Eugénie, Gaston, Louis, Alphonse, Antoinette, Louise-Marguerite et quelques autres... en souhaitant de tout cœur que cette nouvelle génération s'investisse avec courage dans le grand projet en s'organisant entre eux pour le réussir.
A défaut de quoi, le pronostic historique demeure qu'ils devront s'effacer tous un jour pour laisser passer du sang neuf, car il est une certitude inflexible : le plus beau pays du monde ne pourra rester longtemps sans maître.
(1) 61% selon le Livre Blanc de 2009
(2) La lexicisation du transport maritime mondial entreprise soit par l'ONU soit par l'université française dans les années 80 sont des exemples aboutis d'obsolescence instantanée. Deux mois de travail chez un transitaire hongkongais valent deux ans de cours et durent plus longtemps.
(3) Sauf un.
-
L'illusion libérale par Alain de Benoist - Dextra - 07/11/14
-
La Décroissance #122 : "Halte au fanatisme"