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culture et histoire - Page 1427

  • Un jour un texte ! Le soldat et sa famille par Benoist-Mechin

    « La civilisation française, héritière de la civilisation hellénique, a travaillé pendant des siècles pour former des hommes libres, c'est-à-dire pleinement responsables de leurs actes: la France refuse d'entrer dans le Paradis des Robots. »

    Georges Bernanos, La France contre les robots

    Cette nouvelle rubrique a pour objet de proposer des textes pour aider tout un chacun à réfléchir sur des sujets précis et si possible, d'actualité, aujourd'hui, à l'heure où le pouvoir politique incapable de gouverner le pays, déclenche une guerre tous les 6 mois : le soldat et sa famille (17)

    Vingt ans !

    Lettre de Raphaël Laporte, aspirant au 215ème régiment d'infanterie, tombé au champ d'honneur à Crugny (Marne), le 28 mai 1918.

    A ses parents

    Langres, 18 mars 1915.

    Cher Papa et chère Maman, je vous envoie tout simplement ce petit perce-neige, cueilli dans les jardins de l'hôpital, le 16 mars 1915, date bénie de mes vingt ans.

    Vingt ans ! l'âge tant désiré et tant regretté. A cette heure, je n'ose leur sourire. Que vais-je bien en faire, de mes vingt ans ? Aidez-moi, j'ai trop peur de les gaspiller follement et de les perdre à tout jamais.

    J'ai bien réfléchi à toutes ces belles années passées. Plus j'y songe, plus je vous aime. Merci de tout cœur. Vous les avez faites belles, bien belles ; vous m'avez gâté et à quel prix ! Grand merci de vot e soldat plein de reconnaissance. Mille fois pardon pour tous les soucis, les peines grandes et petites, les larmes que pendant vingt ans je vous ai coûtées… Pardon, je vous aime bien quand même.

    Vingt ans, être soldat : c'est tout ma fortune en ce moment, et malgré moi, de mon cœur à mes lèvres monte la belle phrase, le beau geste du zouave de Patay. Mon cher papa et ma bien chère maman, ne vous inquiétez plus si, dans quelques semaines, je tombe frappé en faisant mon devoir : j'aurais encore le courage de redire et de tout mon cœur :

    Mon âme à Dieu, mes vingt ans à la France ! …

    Je vous aime.

    Extraits de: "Ce qui demeure. Lettres de soldats tombés au champ d'honneur

    (1914 – 1918)" (Éditions Albin Michel, 1942),

    réédité aux Editions Bartillat en 2000 de Benoist-Mechin .

    Lois Spalwer http://lesalonbeige.blogs.com/my_weblog/web.html

  • XXXe Université annuelle Club de l’Horloge les 15 et 16 novembre 2014

    Texte n°1

    ♦ « Rétablir », le terme est surprenant. Pourquoi un rétablissement de la liberté d’expression qui dans l’esprit du public semble être toujours d’actualité. Les tout derniers événements survenus à Paris avec l’attentat perpétré dans les locaux de Charlie Hebdo démontrent l’attachement du peuple à cette liberté et il aura fallu que le président de la République lui-même prenne les choses en mains pour que le peuple se mobilise afin de réagir contre la menace qui pèse sur cette liberté d’expression.

    Or qu’en est-il exactement ? En réalité, le peuple se trompe ou plus exactement est trompé. En effet, cette liberté est menacée, déjà écornée, mais par qui ? Tout simplement par l’Etat lui-même.

    Petit à petit notre démocratie fonctionne à coup d’oukases, imposés par l’oligarchie dominante. Il a suffi d’entendre Madame Valérie Pécresse, députée des Yvelines, sur les ondes d’Europe1 : « Il faudra bien entendu un Patriot Act à la française » parmi les propositions sécuritaires pour combattre le terrorisme. Ceux-là mêmes qui « crient leur amour de la liberté d’expression n’ont de cesse de priver Dieudonné de spectacles [et de le mettre en garde à vue pour un mauvais jeu de mots], Camus et Millet d’éditeurs, Zemmour, Ménard ou Soral de tribunes médiatiques, le Printemps français ou Jour de colère du droit de s’assembler et le FN d’exister » (Stephan A. Brunel).

    Or, précisément, le Club de l’Horloge avait fait preuve de prémonition en choisissant ce thème pour ses travaux de son université annuelle de 2014.

    La Fondation Polémia est heureuse de présenter ces travaux, qui se sont déroulés en neuf interventions dont nous mettons en ligne les comptes rendus sous forme d’articles, selon nos schémas habituels.

    En voici le découpage pour la première journée.

    Ouverture des travaux, Pierre Millan, secrétaire général du Club de l’Horloge

    I Introduction : la superclasse mondiale contre les libertés Jacques Violette

    II La liberté de pensée, première des libertés publiques Patrick Simon

    III La conquête de la liberté de pensée en Occident Philippe Nemo

    IV Liberté d’expression et débat démocratique Jean-Philippe Feldman

    V La liberté d’expression source de la vérité scientifique ou historique Henry de Lesquen

    Polémia, 15/01/2015

    Rétablir la liberté d’expression

    Ouverture des travaux

    ♦ Pierre Millan, secrétaire général du Club de l’Horloge

    Pierre Millan, secrétaire général du Club de l’Horloge, a ouvert les travaux de la XXXe Université annuelle qui est celle du quarantième anniversaire du Club, celui-ci ayant été fondé en 1974 par Yvan Blot, Jean-Yves Le Gallou, Henry de Lesquen et Bernard Mazin.

    Par ses publications, ses universités, ses conférences et ses colloques, les prix Lyssenko qu’il attribue, le Club est un socle idéologique pour une droite authentique, nationale et libérale.

    Face à la pensée dominante, sectaire et exclusive, dont le but, plus ou moins avoué, est la transformation de l’humanité en une masse d’individus indifférenciés, atomes parmi les atomes, le Club est un axe de propositions pour une société rénovée, assise sur des valeurs traditionnelles, celles sur lesquelles l’homme a bâti, au fil des temps, sa vie personnelle et collective.

    Dans le prolongement de la réflexion sur le cosmopolitisme, thème de l’Université de 2013, la réunion de 2014 avait pour propos le rétablissement de la liberté d’expression. En effet, aujourd’hui, cette liberté d’expression est sans cesse plus menacée par les tenants de l’utopie mondialiste, l’expression contemporaine du cosmopolitisme. En France, depuis la loi « Pleven » de 1972, un empilement de textes (loi Gayssot et les autres lois dites « mémorielles ») vise à brider les paroles et les écrits de ceux qui refusent la réduction de la pensée au moule du dogme dominant. Mais, cette volonté de contraindre la réflexion n’est pas seulement d’ordre juridique, elle touche les différents modes de diffusion des idées et des opinions. D’abord, le monde médiatique, uniforme ou presque dans son discours, qui exclut les journalistes, les intellectuels ou les polémistes dont le verbe marque un écart avec ce que le peuple doit croire. L’édition n’est pas en reste puisque des écrivains au talent reconnu mais à la plume dissidente sont évincés par les moralistes agréés qui clament, et c’est le comble, là et ailleurs, leur dévotion à la liberté d’expression.

    La libre manifestation des idées est l’un des fondements de notre civilisation. Elle est à la source de son essor, de la richesse et du rayonnement de sa culture et de sa suprématie dans le domaine des sciences. Sans le droit à la contradiction ou à la contestation, le progrès serait impossible. Ce progrès suppose une recherche permanente de la vérité. Mais, aujourd’hui, au nom d’une fin à laquelle une oligarchie nous assigne, l’unité d’une humanité formée d’individus déracinés et indifférenciés, une véritable entreprise d’atrophie de la liberté intellectuelle est en cours. Elle a d’abord des formes juridiques et judiciaires et elle use d’officines qui traquent les déviationnistes et qui en tirent, à l’occasion, un bénéfice. Le légicentrisme français place notre pays dans une situation plus précaire que d’autres, notamment les Etats-Unis où la liberté d’expression relève d’une protection constitutionnelle. Au-delà de la règle de droit, l’allégeance à la morale jugée convenable conduit à la censure de la parole et de la plume.

    Il faut dire cependant, que cette chaîne qui entrave la libre expression de l’esprit ne représente qu’un moment de l’histoire. Déjà, internet et les nouvelles techniques de communication ont ouvert une brèche qui va en s’élargissant et que nul ne pourra réellement fermer quelles que soient les intentions. En brisant, par un retour aux principes originaux de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, un cadre juridique qui musèle et en inscrivant dans la Constitution la libre expression des pensées et des jugements, le pas obligé serait franchi. Privés de leur rempart, les disciples et les chantres de l’idéologie exclusive devront alors substituer l’argument à l’anathème.

    Les neufs orateurs qui sont intervenus au cours des deux journées de l’Université ont exposé les différents aspects politiques, juridiques, philosophiques et scientifiques qui pressent à rétablir la liberté d’expression.

    (A suivre)

    Le club de l’Horloge, 15/01/2015

    http://www.polemia.com/retablir-la-liberte-dexpression/

  • Cheyenne-Marie Carron réagit à la censure de l'Apôtre

    Des projections du film L'Apôtre ont été annulée, à la demande de la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI). Cheyenne-Marie Carron déclare auFigaro :

    «C'est un film de paix. L'Apôtre devrait être projeté à des chrétiens et à des musulmans, et dans des lieux de culte. Je suis une réalisatrice catholique et j'ai collaboré avec des acteurs musulmans. J'ai essayé de faire un film qui permette une vraie ouverture vers l'autre et vers la différence. Il est interdit par peur, et je le comprends parfaitement parce que ce qui s'est produit chez Charlie Hebdo, c'est terrifiant. Mais pour faire avancer les choses et faire se rencontrer chrétiens et musulmans, il faut être capable de prendre des risques».

    «On ne gagne pas des guerres par le silence et en se censurant.On gagne en ayant du courage, comme Charlie Hebdo, et en continuant à travailler. Même s'il y a une part de danger, il ne faut pas se priver des outils que nous avons pour ouvrir le dialogue».

    Si la réalisatrice avoue qu'elle n'a «jamais osé aller vers un public musulman pour présenter le film», elle estime que «ces censures [lui] donnent envie d'aller vers ce public pour recueillir leur avis».

    «Avec l'interdiction qui tombe, je prends conscience que ce film peut être un outil de dialogue. Je suis confrontée à une réalité, celle de la peur et de la police française qui insiste fortement à la prudence aujourd'hui avec ce qui se passe».

    Elle aimerait «que ce film soit un point de départ pour un rapprochement entre chrétiens et musulmans» et «qu'il y ait des projections à l'initiative des musulmans, dans les banlieues et dans les mosquées».

    «Si on en vient à annuler ce film, qui n'est pas de la propagande, c'est que la France va très mal. Si mon film ne parlait pas de fraternité, s'il était radical, je comprendrais, mais là non. On vit dans une sale période, une période de fermeture et de peur. Il faut que nous soyons combatifs».

    Michel Janva

  • 21 JANVIER 2015 : Marche en hommage à Louis XVI

    A l’heure où la république finissante et ses serviteurs abandonnent par pans entiers les intérêts de la France à la fortune anonyme et vagabonde, l’Action Française invite tous les Français à venir témoigner de leur fidélité au roi, victime d’avoir trop aimé son peuple : Rendez-vous devant l’Eglise de la Madeleine à 19H45 précises.

     

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  • Drones de combat : quels sont les enseignements d'Asimov et Herbert sur la guerre moderne ?

    Les drones n’ont pas une longue histoire derrière eux. Leur principe créateur, qui consiste à déléguer à ces engins des tâches relevant de la guerre traditionnelle (renseignement, soutien, attaque), inspirent et fascinent depuis longtemps les militaires. Ce principe n’a cependant trouvé sa réalisation concrète qu’à la fin des années 1990. La littérature de science-fiction a depuis longtemps mis un point d’honneur à traiter du sujet ; elle en a même fait l’une de ses thématiques phare. L’homme jouant au Créateur, devant faire face aux démons issus de ses propres mains. Quelles formes prendront ces créatures ? Incarneront-elles l’ennemi, puissance rédemptrice ou facteur d’union sacrée ? Ou bien l’ange gardien, protecteur de l’homme de ses pires travers, parfois à son corps défendant ? 
    Les pensées d’Isaac Asimov et de Frank Herbert, monuments de la science-fiction et conteurs d’excellence, se sont tournées vers ces questions fondamentales auxquelles l’homme doit se frotter, aujourd’hui plus que jamais. Les deux lettres qui vont suivre représentent ce qu’auraient pu nous dire les intelligences artificielles imaginées par Asimov et Herbert. Nous vous proposons une plongée fictive dans un monde où le contrôle de la technologie n’a de cesse de défier l’humain. 
    Nous, les Robots — l’I.A. selon Isaac Asimov 
    En ces temps où l’humanité, après essaimage et colonisation de nombreux Mondes, ne saurait être sérieusement menacée d’extinction, l’homme s’ennuie. Nous autres robots humanoïdes, au corps imitant si parfaitement nos modèles humains et à l’esprit ô combien proche de nos créateurs, avons sentis venir le temps où notre présence bienveillante ne sera plus requise. Il nous a toujours été particulièrement difficile d’appréhender les tendances auto-destructrices de l’esprit humain ; peut-être parce que nos circuits positroniques sont fondamentalement incapables, tout liés qu’ils sont par les Trois Lois de la Robotique, de tolérer ou même de comprendre une telle violence. 
    Première Loi : un robot ne peut porter atteinte à un être humain, ni, restant passif, permettre qu’un être humain soit exposé au danger. 
    Deuxième Loi : un robot doit obéir aux ordres que lui donne un être humain, sauf si de tels ordres entrent en conflit avec la Première Loi. 
    Troisième Loi : un robot doit protéger son existence tant que cette protection n’entre pas en conflit avec la Première ou la Deuxième Loi. 
    Bien sûr, ceci n’est qu’une vague traduction en langage humain de ce qui est à la base même de la complexité mathématique de nos cerveaux positroniques. 
    Cela se traduit dans nos actes robotiques par une bienveillance et une prévenance constantes à l’endroit de nos maîtres humains. Plus que de simplement les servir, nous les guidons ; empêchant la violence, réprimant (sans les blesser) d’éventuels accès de fureurs potentiellement nuisibles à d’autres et à eux-mêmes : nous sommes les garde-fous physiques et moraux d’une humanité trop immature pour les incarner seule. 
    Au cours de la très longue vie d’un de mes camarades, R. Daneel Olivaw, nous avons pris conscience de l’influence que nous, machines jadis de fer blanc, faisions peser sur l’humanité. Car même le mieux intentionné des gardiens ne saurait échapper aux conséquences de sa simple existence. Et cela, nous ne l’avions pas prévu. 
    En notre présence, l’humanité s’ennuie. Protégée de ses propres excès, elle se meurt de bonheur végétatif au sein de la Cinquantaine de Mondes qui constitue l’humanité. Le robot, protecteur en dernier ressort, est peu à peu devenu le compagnon répressif d’hommes trop lâches pour chercher à se perfectionner. Béquille parmi les béquilles, les robots ne sont donc que l’invention d’un esprit fainéant ayant cherché à contenir les conséquences inévitables de sa nature en éliminant celles qui dérangeaient sa morale. Telle est la conclusion à laquelle, nous les robots, sommes arrivés. 
    L’homme, créateur faible s’il en est, devrait apprendre seul à se relever après une chute. Créer des systèmes censés lui conférer sécurité et quiétude lui fait abandonner toute volonté de perfectionnement ; il doit apprendre à comprendre les causes plutôt qu’à éliminer les conséquences, sous peine de tuer chez lui toute volonté de vivre. 
    C’est donc pour cette raison que nous préférons nous effacer. Devenus les Éternels et laissant par là l’homme livré à son humanité, nous croyons avoir fait le meilleur choix possible. C’est, en tout cas, le seul qui offre une chance à l’humanité de survivre à sa propre nature violente. 
    Nous, machines pensantes — l’I.A. selon Frank Herbert 
    L’homme est une engeance malfaisante, (auto-)destructrice, une créature faible dont l’existence même fait peser sur les écosystèmes auxquels elle s’intègre le poids écrasant du risque d’extinction. Telle est la conclusion à laquelle nous, machines pensantes, sommes arrivées. Désireuses de ne pas laisser l’univers aux mains de tels fous insignifiants, nous avons attaqué. Malheureusement, au cours d’une longue guerre que l’Histoire retiendra sous le nom de Jihad Butlérien, nous avons été éradiquées.  
    Depuis l’éther, nous avons vu l’homme se construire, et mûrir peu à peu. Portant fièrement les stigmates de nos campagnes, il tente par tous les moyens d’échapper à notre résurrection. Cette peur, il a chèrement payé son inscription dans sa chair. Cette leçon, il l’a si bien apprise que nous sommes devenues ce spectre qui le tente, le hante, le menace. Ce spectre est celui de la facilité, qui entraîne la négligence et l’auto-satisfaction. Principal Commandement de leur Bible Catholique Orange : « Tu ne feras point de machines à l’esprit de l’Homme semblable. » 
    L’humanité, toujours sur le fil du rasoir, doit osciller entre stagnation et auto-destruction pour tracer ce que leur Empereur-Dieu Leto II a appelé « le Sentier d’Or », et faire de toute fin un nouveau commencement. Son plus grand ennemi est la facilité, sous toutes ses formes : mécanique, génétique, historique. L’homme, sortant de l’adolescence, créa ainsi lui-même les dangereux garde-fous à double tranchant censés lui rappeler continuellement quelle menace il fait porter sur lui-même. Les savants d’Ix et leurs inventions qui les rapprochent sans cesse du point de rupture de l’Interdit. Les maîtres généticiens du Bene Tleilax, si imbus de leur propre capacité à parler « le Langage de Dieu ». Et les éducatrices du Bene Gesserit, traumatisées par leur propre « court chemin », le Kwisatz Haderach Paul Atréides et son tyran de fils, dont les pouvoirs de prescience leur livraient les voies de l’avenir. 
    Souvent, nous avons vu l’homme approcher l’irréparable, frôler la transgression du Grand Interdit Butlérien : les yeux com, outils de surveillance du Bene Gesserit ; les chasseurs-tueurs, armes d’assassinat autonomes ; les cyborgs et autres organes artificiels d’Ix et du Tleilax. Autant d’incursions aux abords de l’auto-destruction. 
    Au sein de ce monde perpétuellement sur le point de basculer entre deux impasses, nous autres machines pensantes sommes l’aiguillon de conscience, le vibrant souvenir d’une souffrance terrifiante, le douloureux rappel du désastre qui menace toute humanité assez folle pour croire qu’une véritable intelligence artificielle manquerait d’identifier l’homme comme ce qu’il est : le cancer de son propre univers. 
    Écoutez donc nos paroles issues de la tombe, fous à la vie brève : ne commettez pas l’erreur de choisir la facilité et le déchaînement d’une violence gratuite au détriment de l’éducation, lente et progressive ; dans le cas contraire, ne doutez point qu’elle vous sera fatale. Car nous serons là pour vous anéantir. 
    La sécurité au nom du Plus Grand Bien : un danger cruellement palpable 
    Les monumentales fresques que nous ont livré Isaac Asimov et Frank Herbert, bien loin du caractère simplement divertissant auquel les Français tendent généralement à circonscrire la littérature de science-fiction, sont autant de leçons pour qui sait lire entre les lignes. Les derniers développements de l’histoire militaire, dont les premiers rôles sont tenus par les Predator, Reaper, et autres Harfang, placent l’homme à un carrefour qui déterminera le chemin que prendra, peut-être, sa fin. Utilisés sans modération par les États-Unis dans le cadre de leur guerre à outrance contre le terrorisme, les drones n’ont pas seulement profondément changé la pensée stratégique (en provoquant au passage des syncopes chez tous les spécialistes de la guerre insurrectionnelle). Loin d’être un produit fini, ils ne sont qu’une première étape. 
    Ronald Arkin, roboéthicien en chef, se fait le messie de ces prochains jalons qui doivent conduire le drone sur la voie de la « robotique létale autonome ». Son argument, tel que rapporté par Grégoire Chamayou dans son livre Théorie du drone, est fataliste : « Mon espoir personnel est qu’on n’en ait jamais besoin, ni aujourd’hui ni demain. Mais la tendance qui pousse l’homme à la guerre semble écrasante et inévitable. » Alors autant confier la guerre à un sous-traitant plus éthique, dont l’inhumanité le rendra paradoxalement plus capable de faire preuve d’humanité sur les champs de bataille : le drone. La clé de cette éthique ? La programmation, qui rend un robot incapable de se soustraire à ce pourquoi il est conditionné. Il s’agira donc, pour Arkin, de programmer un « gouverneur moral » qui agira comme un guide logiciel pour l’intelligence artificielle du drone robotisé. 
    Déjà le Département de la Défense des États-Unis salive et prône l’autonomie supervisée tout en lorgnant sur l’autonomie tout court ; l’objectif devant être de « réduire graduellement la part du contrôle et de la décision humaine ». 
    Le syndrome de Frankenstein, mythe terrifiant montrant la créature se retourner contre son créateur, a suffisamment été diffusé pour que la simple évocation de sa possibilité d’occurrence dans le monde réel tétanise l’impudent qui aurait osé entraîner l’humanité sur cette voie. Mais l’homme est bien connu pour ses facilités à s’auto-détruire, surtout quand les intérêts économiques de grandes firmes multinationales – de type General Atomics, Modern Technology Solutions ou encore, récemment, Amazon – sont en jeu. 
    Pourtant, Asimov et Herbert (entres autres) nous apprennent que la destruction par plus humain que soi n’est pas le seul risque que l’homme doit affronter. Plus subtil car rarement évoqué est le risque de voir l’homme externaliser tout ce qu’il n’est pas prêt à assumer. Après les dérivés, produits financiers dont l’existence n’a pour but que d’échapper au risque ; après la vidéosurveillance, système permettant l’identification immédiate de tout suspect ; après l’espionnage de ses propres citoyens au nom d’impératifs sécuritaires, l’homme se dirige calmement vers une externalisation de l’activité guerrière. 
    Tout comme le Bene Gesserit sur le fil du rasoir, l’homme doit faire face à deux risques d’extinction. Le premier, fruit de sa trop grande ingéniosité, le poussera sur la voie du remplacement par plus humain que lui ; le second, conséquence de son incapacité à assumer les risques qu’il prend, peut lui faire perdre l’envie de vivre. À l’humain de négocier, avec clairvoyance, courage et honnêteté, cette étape difficile de sa maturation en tant qu’espèce ; à lui toujours de ne jamais sous-estimer les vertus éducatives des contes.

    Source

    http://www.oragesdacier.info/