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géopolitique - Page 793

  • Scandale de la National Security Agency : encore des remous

    PARIS (NOVOpress via Bulletin de réinformation) – Bien que la situation syrienne ait habilement détourné l’attention, le scandale PRISM mis à jour par Edward Snowden n’a pas fini de faire parler de lui. Après avoir appris l’existence d’un vaste réseau de surveillance informatique international mis en place par la NSA, l’agence de renseignements étatsunienne, nous découvrons aujourd’hui l’ampleur de ce réseau et ses implications.
    La chaîne de télévision brésilienne Globo a révélé certaines informations contenues dans les documents fournis par Snowden au journaliste Glenn Greenwald, résidant à Rio de Janeiro. On y apprend que la NSA a infiltré et espionné, entre autres, les réseaux privés du système bancaire international Swift, de la compagnie pétrolière Petrobras ou encore, et c’est plus inquiétant, du Quai d’Orsay. Nous découvrons donc que notre ministère des Affaires étrangères se retrouve donc mis sur écoute par les services de renseignements étatsuniens sans déclencher d’incident diplomatique. Pire encore, notre gouvernement voudrait aujourd’hui partir en guerre au côté d’un allié qui nous espionne. Décidément, que penser d’un Etat souverain qui se plie à toutes les volontés d’un autre Etat, sinon qu’il n’est plus vraiment souverain. La chaîne Globo, quant à elle, fait preuve de plus de courage en défendant les intérêts brésiliens en dénonçant l’espionnage commercial de Petrobras, grande compagnie brésilienne.
    Mais qu’est-ce qui a permis cette brèche de sécurité des réseaux privés ?
    Eh bien nous apprenons cette semaine également que la NSA dispose des ressources nécessaires pour venir à bout de presque tous les protocoles de cryptage et de chiffrage informatique. Cette information qui bouleverse le monde de la sécurité informatique s’accompagne de révélations sur les moyens de pression mis en place par la NSA pour obliger les fournisseurs Internet, les compagnies de sécurité informatique et les fabricants de logiciels à leur construire des accès ou leur fournir des clefs permettant de venir à bout de tous leurs protocoles de cryptage. Plus que jamais, vigilance sur Internet, sur les téléphones mobiles et autres appareils informatiques, on ne sait jamais si nos « alliés » ne sont pas en train de nous lire ou de nous écouter.
    http://fr.novopress.info

  • Intervention en Syrie : la recherche d'un prétexte à tout prix

    La France a-t-elle encore une politique étrangère ou fait-elle celle du Qatar, de l’Arabie Saoudite et des Etats-Unis ?
    La coalition réunissant les Etats-Unis, le Royaume-Uni, la France, la Turquie, l’Arabie Saoudite et le Qatar vient de franchir un nouveau pas dans sa volonté d’intervenir en Syrie afin de renverser le régime de Bachar el-Assad. Utilisant ses énormes moyens de communication, elle vient de lancer une vaste campagne d’intoxication de l’opinion internationale afin de la convaincre que Damas a utilisé l’arme chimique contre son peuple, commettant ainsi un véritable crime contre l’humanité et méritant « d’être puni ».
    Aucune preuve sérieuse n’a été présentée à l’appui de ces affirmations. Au contraire, de nombreux éléments conduisent à penser que ce sont les rebelles qui ont utilisé ces armes.
    Ces mensonges médiatiques et politiques ne sont que des prétextes. Ils rappellent les tristes souvenirs du Kosovo (1999), d’Irak (2003) et de Libye (2010) et ont pour but de justifier une intervention militaire afin de renverser un régime laïc, jugé hostile par les Etats-Unis – car allié de l’Iran et ennemi d’Israël – et impie par les monarchies wahhabites d’Arabie Saoudite et du Qatar. Il est particulièrement affligeant de voir la France participer à une telle mascarade.
    La falsification des faits
    Depuis deux ans, des informations très contradictoires et souvent fausses parviennent en Europe sur ce qui se passe actuellement en Syrie. Il est ainsi difficile de comprendre quelle est la situation exacte dans ce pays. Certes, le régime syrien n’est pas un modèle démocratique, mais tout est mis en œuvre par ses adversaires afin de noircir le tableau, dans le but d’assurer le soutien de l’opinion internationale à l’opposition extérieure et de justifier les mesures prises à son encontre, dans l’espoir d’accélérer sa chute.
    Cette falsification des faits dissimule systématiquement à l’opinion mondiale les éléments favorables au régime :
        - le soutien qu’une grande partie de la population syrienne, principalement les sunnites modérés et les minorités (chrétiens, druzes, chiites, kurdes), continue d’apporter à Bachar el-Assad, car elle préfère de loin le régime actuel – parfois par défaut – au chaos et à l’instauration de l’islam radical ;
        - le fait que l’opposition intérieure, historique et démocratique, a clairement fait le choix d’une transition négociée et qu’elle est, de ce fait, ignorée par les pays occidentaux ;
        - la solidité militaire du régime : aucune défection majeure n’a été observée dans l’armée, les services de sécurité, l’administration et le corps diplomatique et Damas est toujours capable d’organiser des manœuvres militaires majeures ;
        - son large soutien international. L’alliance avec la Russie, la Chine, l’Iran et le Hezbollah libanais ne s’est pas fissurée et la majorité des Etats du monde s’est déclarée opposée à des frappes militaires, apportant son soutien total aux deux membres permanents du Conseil de sécurité de l’ONU – Russie et Chine – qui ont clairement indiqué qu’ils n’autoriseraient pas une action armée contre la Syrie. Rappelons également que le régime syrien n’a été à ce jour l’objet d’aucune condamnation internationale formelle et demeure à la tête d’un Etat membre à part entière de la communauté internationale ;
    - le refus délibéré des Occidentaux, de leurs alliés et de la rébellion de parvenir à une solution négociée. En effet, tout a été fait pour radicaliser les positions des ultras de Damas en posant comme préalable le départ sans condition du président Bachar.
    Au contraire, l’opposition extérieure, dont on cherche à nous faire croire qu’elle est LA solution, ne dispose d’aucune légitimité et demeure très éloignée des idéaux démocratiques qu’elle prétend promouvoir, en raison de ses options idéologiques très influencées par l’islam radical.
    De plus, la rébellion syrienne est fragmentée entre :
        - une opposition politique extérieure groupée autour des Frères musulmans, essentiellement contrôlée par le Qatar et la Turquie ;
        -  une « Armée syrienne libre » (ASL), composée d’officiers et d’hommes de troupe qui ont déserté vers la Turquie et qui se trouvent, pour la plupart, consignés dans des camps militaires, faute d’avoir donné des gages d’islamisme suffisants au parti islamiste turc AKP ; son action militaire est insignifiante ;
        - des combattants étrangers, salafistes, qui constituent sa frange la plus active et la plus violente, financés et soutenus par les Occidentaux, la Turquie, le Qatar et l’Arabie Saoudite.
    Ainsi, la Syrie connaît, depuis deux ans, une situation de guerre civile et des affrontements sans merci. Comme dans tous les conflits, les victimes collatérales des combats sont nombreuses, ainsi que les atrocités. Toutefois, les grands médias internationaux qui donnent le ton – qui appartiennent tous aux pays hostiles à la Syrie – cherchent à donner l’impression que les exactions, massacres et meurtres sont exclusivement le fait du régime et de son armée. Si certaines milices fidèles au régime ont commis des exactions, cela ne saurait en aucun cas dissimuler les innombrables crimes de guerre qui sont chaque jour, depuis deux ans, l’œuvre de la rébellion, et dont sont victimes la population syrienne fidèle au régime, les minorités religieuses et les forces de sécurité. Ce fait est systématiquement passé sous silence. Pire, les nombreux actes de barbarie des djihadistes soutenus par l’Occident, la Turquie et les monarchies wahhabites sont même souvent attribués au régime lui-même, pour le décrédibiliser davantage. L’Observatoire syrien des droits de l’Homme (OSDH), principale source des médias sur les victimes de la « répression », est une structure totalement inféodée à la rébellion, créée par les Frères musulmans à Londres. Les informations qu’il diffuse relèvent de la pure propagande et n’ont donc aucune valeur ni objectivité. S’y référer est erroné et illustre l’ignorance crasse ou la désinformation délibérée des médias.
    Enfin, face à ce mainstream médiatique tentant de faire croire que le Bien est du côté de la rébellion et de ses alliés afin d’emporter l’adhésion de l’opinion, toute tentative de vouloir rétablir un minimum d’objectivité au sujet de ce conflit est immédiatement assimilée à la défense du régime.
    Les objectifs véritables d’une intervention en Syrie
    Dès lors, on est en droit de s’interroger sur les raisons réelles de cet acharnement contre Bachar el-Assad et d’en rechercher les enjeux inavoués. Il en existe au moins trois :
        - casser l’alliance de la Syrie avec l’Iran ; le dossier iranien conditionne largement la gestion internationale de la crise syrienne. En effet, depuis trois décennies, Damas est l’allié de l’Iran, pays phare de « l’axe du mal » décrété par Washington, que les Américains cherchent à affaiblir par tous les moyens, tant en raison de son programme nucléaire, de son soutien au Hezbollah libanais, que de son influence régionale grandissante ;
        - rompre « l’axe chiite » qui relie Damas, Bagdad, Téhéran et le Hezbollah, qui est une source de profonde inquiétude pour les monarchies du Golfe qui sont, ne l’oublions pas, des régimes autocratiques et qui abritent d’importantes minorités chiites. Ainsi, Ryad et Doha ont désigné le régime iranien comme l’ennemi à abattre. Elles veulent la chute du régime syrien antiwahhabite et pro-russe, afin de transformer la Syrie en base arrière pour reconquérir l’Irak, majoritairement chiite, et déstabiliser l’Iran. Elles cherchent aussi à liquider le Hezbollah libanais. En cela, leur agenda se confond avec celui de Washington ;
        - détruire les fondements de l’Etat-nation laïc syrien pour le remplacer par un régime islamiste. Cela signifie livrer Damas aux forces wahhabites et salafistes favorables aux pétromonarchies du Golfe, ce qui signifie l’éclatement du pays en plusieurs entités en guerre entre elles ou, pire, l’asservissement voire le massacre des minorités non sunnites.
    Ces objectifs non avoués n’ont pas été jusqu’ici atteints et ne le seront pas tant qu’existera le soutien sino-russe et tant que l’axe Damas-Téhéran ne se disloquera pas.
    Le faux prétexte des armes chimiques
    Face à la résistance de l’Etat syrien et de ses soutiens, la coalition américano-wahhabite a décidé d’employer les grands moyens afin de faire basculer l’opinion et de justifier une intervention militaire : accuser Damas de recourir aux armes chimiques contre sa propre population. Une première tentative a été entreprise en avril dernier. Malheureusement, l’enquête des inspecteurs de l’ONU a révélé que l’usage d’armes chimiques était le fait de la rébellion. Ce rapport n’allant pas dans le sens que souhaitait la coalition américano-wahhabite, il a été immédiatement enterré. Seul le courage de Carla del Ponte a permis de révéler le pot aux roses. Notons cependant que les « médias qui donnent le ton » se sont empressés de ne pas lui accorder l’accès à leur antenne et que cette enquête a été largement passée sous silence.
    Les événements du 21 août dernier semblent clairement relever de la même logique. Une nouvelle fois, de nombreux éléments conduisent à penser qu’il s’agit d’un montage total, d’une nouvelle campagne de grande envergure pour déstabiliser le régime :
        - le bombardement a eu lieu dans la banlieue de Damas, à quelques kilomètres du palais présidentiel. Or, nous savons tous que les gaz sont volatils et auraient pu atteindre celui-ci. L’armée syrienne n’aurait jamais fait cela, sauf à vouloir liquider son président !
        - les vecteurs utilisés, présentés par la presse, ne ressemblent à aucun missile en service dans l’armée syrienne, ni même à aucun modèle connu. Cela pourrait confirmer leur origine artisanale, donc terroriste ;
        - de plus, des inspecteurs de l’ONU étaient alors présents à Damas et disposaient des moyens d’enquête adéquats pour confondre immédiatement le régime ;
        - les vidéos présentées ne prouvent rien, certaines sont même de grossières mises en scène ;
        - enfin, le régime, qui reconquiert peu à peu les zones tenues par la rébellion, savait pertinemment que l’emploi d’armes chimiques était une « ligne rouge » à ne pas franchir, car cela déclencherait immédiatement une intervention militaire occidentale. Dès lors, pourquoi aurait-il pris un tel risque ?
    Aucune preuve sérieuse n’a été présentée à l’appui de la « culpabilité » de l’armée syrienne. Au contraire, tout conduit à penser que ce sont les rebelles qui ont utilisé ces armes car, contrairement à ce qui est avancé par la note déclassifiée publiée par le gouvernement français, les capacités chimiques des terroristes sont avérées :
         - en Irak (d’où proviennent une partie des djihadistes de la rébellion syrienne), les autorités ont démantelé début juin 2013 une cellule d’Al-Qaïda qui préparait des armes chimiques. Trois laboratoires ont été trouvés à Bagdad et dans ses environs avec des produits précurseurs et des modes opératoires de fabrication de gaz sarin et moutarde ;
         - en Syrie, le Front Al-Nosra est suspecté d’avoir lancé des attaques au chlore en mars 2013 qui auraient causé la mort de 26 Syriens dont 16 militaires ;
         - pour sa part, Al-Qaïda a procédé en 2007 à une douzaine d’attaques du même type à Bagdad et dans les provinces d’Anbar et de Diyala, ce qui a causé la mort de 32 Irakiens et en a blessé 600 autres. En 2002, des vidéos montrant des expérimentations d’armes chimiques sur des chiens ont été trouvées dans le camp de Darunta, près de la ville de Jalalabad, en Afghanistan.
    Les errements de la politique étrangère française
    À l’occasion de cet imbroglio politico-médiatique dans lequel ses intérêts stratégiques ne sont pas en jeu, le gouvernement français mène une politique incompréhensible pour nos concitoyens comme pour l’étranger. Depuis deux ans, la France, par le biais de ses services spéciaux, comme d’ailleurs les Américains, les Britanniques et les Turcs, entraîne les rebelles syriens et leur fournit une assistance logistique et technique, laissant l’Arabie Saoudite et le Qatar les approvisionner en armes et en munitions.
    Ainsi, la situation syrienne place la France devant ses contradictions. Nous luttons contre les djihadistes au Mali, après les avoir aidés à prendre le pouvoir à Tripoli – en raison de l’intervention inconsidérée de l’OTAN en Libye, en 2011, dans laquelle Paris a joué un rôle clé – et continuons de les soutenir en Syrie, en dépit du bon sens. Certes, le régime de Bachar el-Assad n’est pas un modèle de démocratie et il servait clairement les intérêts de la minorité alaouite, mais il est infiniment plus « libéral » que les monarchies wahhabites : la Syrie est un Etat laïc où la liberté religieuse existe et où le statut de la femme est respecté.
    De plus, il convient de rappeler que Damas a participé activement à la lutte contre Al-Qaïda depuis 2002. Pourtant, nous continuons d’être alliés à l’Arabie Saoudite et au Qatar, deux Etats parmi les plus réactionnaires du monde arabo-musulman, qui, après avoir engendré et appuyé Ben Laden, soutiennent les groupes salafistes partout dans le monde, y compris dans nos banlieues.
    Certes, notre soutien aux agendas saoudien et qatari se nourrit sans nul doute de l’espoir de quelques contrats d’armement ou pétroliers, ou de prêts financiers pour résoudre une crise que nos gouvernants semblent incapables de juguler.
    Une question mérite donc d’être posée : la France a-t-elle encore une politique étrangère ou fait-elle celle du Qatar, de l’Arabie Saoudite et des Etats-Unis ? Depuis la présidence de Nicolas Sarkozy, la France aligne ses positions internationales sur celles des Etats-Unis et a perdu, de ce fait, l’énorme capital de sympathie que la politique du général De Gaulle – non ingérence dans les affaires intérieures des Etats et défense du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes – lui avait constitué. Si les élections de mai 2012 ont amené un nouveau président, la politique étrangère n’a pas changé. En fait, nous observons depuis plusieurs années la conversion progressive d’une partie des élites françaises, de droite comme de gauche, aux thèses néoconservatrices américaines : supériorité de l’Occident, néocolonialisme, ordre moral, apologie de l’emploi de la force…
    Surtout, un fait nouveau doit être mis en lumière : la tentative maladroite des plus hautes autorités de l’Etat de manipuler la production des services de renseignement afin d’influer sur l’opinion publique et de provoquer un vote favorable des parlementaires. Ce type de manœuvre avait été conduit par Washington et Londres afin de justifier l’invasion de l’Irak en 2003, avant d’être dénoncé. Onze ans plus tard, le gouvernement recourt au même artifice grossier et éculé pour justifier ses choix diplomatiques et militaires.
    Compte tenu de la faiblesse des arguments présentés dans la note gouvernementale – qui n’est pas, rappelons-le, une note des services –, celle-ci ne sera d’aucune influence sur la presse et l’opinion. En revanche, par sa présentation, elle contribue à décrédibiliser le travail des services de renseignement, manipulés à leur insu dans cette affaire. Le mépris des politiques français à l’égard des services est connu.
    Est-ce un hasard si cette affaire survient alors que l’actuel ministre des Affaires étrangères est celui-là même qui, en 1985, alors qu’il était chef du gouvernement, a fort élégamment « ouvert le parapluie », clamant son absence de responsabilité à l’occasion de l’affaire du Rainbow Warrior ?
    Une chose au moins est sûre : une remise à plat de notre position à l’égard de la Syrie et de notre politique étrangère s’impose, car « Errare humanum est, perseverare diabolicum ».
     Eric Denécé, Directeur du CF2R, 9/09/2013
    http://www.polemia.com/intervention-en-syrie-la-recherche-dun-pretexte-a-tout-prix/

  • L'Afrique noire, entre guerres et explosion démographique

    L'image de l'Afrique noire reste sombre, associée à des guerres et des catastrophes humanitaires permanentes, ce qui repose sur des faits le plus souvent indéniables, tout en s'avérant par sa généralisation heureusement excessif. Toutefois quelques conflits localisés se poursuivent, en particulier au Mali, en Centrafrique, au Congo-Démocratique.
    Au Mali, en apparence stabilisé, les élections présidentielles ont été à peu près honnêtes. Selon l'idéologie mondialiste, cet événement marquerait le retour à une normalité internationale indiscutable, sinon la fin de tout danger de déstabilisation majeure. Non, il demeure un fort risque de retour des djihadistes en Azaouad, sitôt les armées tchadienne et française reparties ; les gros effectifs salafistes sont repliés dans les déserts libyens, en particulier dans le Fezzan voisin, où ils restent hors d'atteinte, à moins de se lancer dans des opérations militaires terrestres sans fin, tout comme dans une moindre mesure dans les immensités sahariennes du Niger et de la Mauritanie, pays qui pourraient être atteints par des offensives djihadistes "surprises". Derrière l'apparent triomphe de François Hollande, sa seule réussite, rien n'est réglé. En outre, vouloir faire régner l'ordre à Gao paraît ridicule, lorsque, de notoriété publique, y compris pour les notables locaux de gauche, le désordre mafieux, fondé sur le trafic de drogue au vu et su de tous, avec des meurtres réguliers, ravage Sevran, en pleine agglomération parisienne, ou Marseille. Quant au salafisme, il n'y a hélas pas besoin de voyager jusqu'à Tombouctou pour le rencontrer : Trappes, en banlieue parisienne suffit, ou même des quartiers islamisés de Paris intra muros dans le Nord et l'Est de la capitale. Aussi les rodomontades actuelles de l'Elysée s'avèrent parfaitement ridicules.
    La Centrafrique a complètement sombré dans le banditisme généralisé, forme de guerre civile totalement éclatée. La Seleka, coalition précaire, qui, avec un support logistique tchadien, avait pu s'emparer de Bangui il y a quelques mois, serait donc revenue à la juxtaposition de mouvements antagonistes armés, faibles en soi mais qui sévissent impunément faute de résistance organisée, ravageant par des pillages systématiques un des pays déjà les plus pauvres d'Afrique - malgré des richesses potentielles en tous domaines très réelles -. Au détour d'un entretien consacré à son autocongratulation - sur le Mali, François Hollande a déclaré qu'une intervention militaire en Centrafrique serait nécessaire. Sans nier le drame humain terrible des populations locales, on peut quand même soutenir que ce n'est pas à la France d'assurer la fonction de gendarme en Afrique - sous-traitant local du mondialisme - ; une énième intervention française n'aurait de sens que si elle s'accompagnait d'un mouvement significatif de retour de populations africaines actuellement en France, par centaines de milliers puis millions, ce qui, sous ce gouvernement socialiste fossoyeur de notre pays, reste complètement hors de l'univers mental.
    Au Congo-Démocratique, l'offensive commune de l'armée nationale et des troupes onusiennes semble l'emporter sur le mouvement rebelle M-23, repoussé loin de Goma, au point que le parrain rwandais menace d'intervenir - alors qu'il avait nié tout lien effrontément avec le M-23 jusque-là -, ce qui inverserait probablement le cours des combats. Les pays voisins antagonistes offrent un parfait contraste, entre le petit Rwanda très bien géré, modèle de croissance économique et de développement, sous la dictature militaire tutsie du président-général Paul Kagamé depuis 1994, tandis que le vaste Congo du président Laurent-Désiré Kabila, à la réélection initialement très contestée et non reconnue par la prétendue « communauté internationale » -, demeure l'exemple du pays très mal géré, largement anarchique, malgré des richesses potentielles considérables.
    À l'extrémité orientale du continent, le sort de la Somalie demeure bien incertain, avec la poursuite de la guerre civile ; mais s'organisent des entités territoriales cohérentes, autour du Jubaland au Sud, sous protection kenyane, du Pountland au Nord-Est, enfin autour de Mogadiscio pour le gouvernement dit "central". Les djihadistes des « Tribunaux islamiques » demeurent menaçants ; les clans somaliens s'affrontent encore régulièrement, mais la tendance générale malgré tout demeure plutôt positive, en comparaison de l'anarchie totale ou de l'ordre salafiste.
    À la frontière du Sud-Soudan et du Soudan, le conflit a fortement diminué en intensité. Le Soudan lui-même appartient désormais de manière indiscutable au monde arabe ; l'assimilation des populations noires du Darfour se poursuit, dans un conflit larvé persistant, marqué par un racisme ethnique, pourtant entre musulmans.
    Malgré bien des fragilités persistantes, qui font qu'en aucun pays d'Afrique Noire la stabilité
    qu'à l'échelle continentale, ces territoires connaissent depuis une quinzaine d'années de fortes croissances, souvent à plus de 5 % annuels. En partant de très bas, les résultats sont rarement spectaculaires, à l'exception du Rwanda, ou de l'Angola, à forte richesse pétrolière, attirant même des dizaines des milliers d'immigrés européens et des centaines de milliers de Chinois. Des cas a priori désespérés comme le Mozambique ont aussi participé de cette croissance, qui s'explique largement par un cycle haussier des matières premières minérales et agricoles, accompagnées d'investissements étrangers massifs, tout d'abord chinois, puis indiens, sud-coréens, des Pays du Golfe - principalement dans des pays musulmans - ; les ressources en charbon du Nord du Mozambique ont bénéficié d'investissements miniers étrangers considérables, en particulier chinois. De même sont relancées très fortement les productions de fer au Gabon, de cuivre et de zinc en Zambie et au Congo-Démocratique. Les infrastructures, principalement ferroviaires et routières, ont été largement remises en état à travers le continent, avec des grands travaux qui se poursuivent, souvent avec des compagnies chinoises, désormais réputées pour leur efficacité dans le continent des travaux interminables. Même le Zimbabwe du marxiste Mugabe, récemment réélu président - à une majorité certainement exagérée, mais pas forcément irréelle face à un opposant historique Tsvangirai très affaibli avant le scrutin -, renoue avec la croissance, au sortir d'années de désastre total d'expérience d'indigénisation agraire, grâce à la reprise très nette de l'activité minière.
    De 4 à 7 enfants par femme
    Des débuts d'industrialisation s'observent même au Nigeria, en Ethiopie, au Kenya, grâce aux très faibles coûts de la main d'œuvre et de la sécurité relative. S'appuyant sur des armées de qualité, l'Angola et l'Ethiopie constituent désormais de petites puissances régionales, en forte croissance économique, soutenues par le pétrole pour le premier, de grands barrages hydroélectriques sur tous les cours d'eau importants pour la seconde - source de tensions avec les pays en aval, qui n'en peuvent mais -.
    Le problème majeur de l'Afrique noire demeure l'explosion démographique. Avec 4 à 7 enfants par femme dans la plupart des pays, il est à craindre que l'économie ne puisse sur le long terme croître à un rythme suffisant pour assurer une baisse durable de la pauvreté. La situation, et ce n'est pas un hasard, s'aggrave particulièrement, avec une surpopulation sur des terroirs fragiles, au Sahel, menacés de désertification ; la situation ne serait pas insurmontable en des territoires régulièrement arrosés et encore peu densément peuplés, comme la Zambie. Evidemment hélas, la pression migratoire demeurera forte vers l'Europe sur les décennies à venir.
    S. de S. Rivarol du 5 septembre 2013

  • ENTRETIEN exclusif avec KAREN KHANLARI, un chrétien au parlement iranien

     La République islamique d’Iran fait l’objet de critiques récurrentes, y compris dans nos colonnes, où l’on regrette le shah. Aujourd’hui, la parole est à la défense : Karen Khanlari, député au parlement iranien, plaide en faveur d’un régime qu’il juge ouvert aux chrétiens.

    PAYS majoritairement musulman, de rite chiite, l’Iran procure la liberté de culte à l’ensemble de ses citoyens, y compris aux chrétiens, hélas persécutés dans d’autres pays d’Orient et parfois victimes de violences, après l’émergence de courants fondamentalistes encouragés, notamment, par les salafistes (de rite sunnite). Cet État, quasi théocratique, préserve la foi chrétienne des dérives de la laïcité outrancière des sociétés de consommation. En effet, le chiisme a toujours été tolérant, ouvert et peu dogmatique. L’enseignement de l’imam Ali, recueilli dans Les Dictons de sagesse, en témoigne. L’actualité le démontre aussi : nous avons en mémoire l’accueil chaleureux que la communauté chiite, y compris le Hezbollah, avait réservé au pape Benoît XVI lors de sa visite au Liban. De même, faut-il rappeler que la chaîne du Hezbollah, Al Manar, s’interdit la diffusion de programmes profanes les vendredis saints ? Afin de mettre en lumière la situation des chrétiens en Iran, nous avons interrogé un député chrétien au parlement iranien, M. Karen Khanlari. Docteur en ingénierie de construction à l’université Azad islamique (Ouloum va Tahghighat) à Téhéran, docteur en histoire de l’Institut d’histoire de l’Académie nationale des sciences d’Arménie, il a collaboré, au sein du gouvernement iranien, à l’optimisation de l’usage de l’énergétique et à l’élaboration des règlements en vigueur.Député depuis 2012, il représente les chrétiens arméniens au parlement iranien. ❑ E.H.

    L’Action Française 2000 - Quelles sont les communautés chrétiennes établies en Iran, combien comptent-elles de membres et comment ceux-cisont- ils répartis ?

    Karen Khanlari - Il existe principalement deux communautés établies en Iran : les Arméniens et les Assyriens. Au sein de chacune de ces communautés, il existe des rites spécifiques. Ainsi, 98 % des Arméniens iraniens font partie de l’Église nationale arménienne, dite Église des compagnons d’Arménie, et environ 2 % font partie de l’Église catholique arménienne, ainsi que de l’Église évangélique arménienne. La plupart des Assyriens font partie de l’Église nationale assyrienne (dite Église assyrienne d’Orient). Mais il existe également deux autres rites assyriens : l’Église catholique assyrienne ainsi que l’Église évangélique assyrienne. Selon les derniers recensements, on dénombre cent vingt mille chrétiens en Iran.

    À Téhéran, il existe huit églises nationales de rite arménien. Par ailleurs, à Djolfa d’Ispahan, par exemple, il existe treize églises. Dans les autres villes, à l’instar de Tabriz, Arak, Ourmieh, Rasht et Anzali, il existe une église. Les messes sont célébrées régulièrement avec un grand afflux de fidèles. Il existe aussi des cathédrales qui constituent des monuments historiques : il y en a trois dans la province d’Azerbaidjan et une, affiliée au rite national arménien, à Ispahan. Enfin, il existait une vie monastique il y a quelques années. À Djolfa, en Ispahan, il y avait un couvent arménien. Néanmoins, en raison de la baisse des vocations, les activités de ce monastère ont été modifiées. Elles sont principalement d’ordre caritatif.

    Qu’en est-il de la situation des chrétien au sein de la société iranienne ? En général, les communautés chrétiennes au Proche et au Moyen–Orient sont marginalisées. Parfois, elles sont menacées par la violence, comme en Irak ou en Égypte. Dans les pays du Golfe, l’exercice de leur culte est même proscrit. Quelle comparaison peut-on établir avec la République islamique d’Iran ?

    ❏ L’Iran a été, depuis la Perse antique, un pays ouvert aux croyants de différentes religions. Les conceptions fondamentales inscrites sur le cylindre de Darius le Grand, relatives à la liberté religieuse, mais aussi les enseignements d’Ali Ben Abi Taleb sur la tolérance religieuse, y ont été propagés tout au long de l’histoire. Les chrétiens bénéficient de ce climat qui a contribué à leur dynamisme. Ils ont ainsi participé activement à toutes sortes d’activités politiques, économiques et surtout culturelles, éducatives et artistiques aux côtés des musulmans, des zoroastriens et des juifs.

    Selon la constitution de la République islamique, les minorités religieuses jouissent de la liberté totale relativement à leur état civil, l’exercice de leur culte et de leurs activités religieuses et communautaires. Par ailleurs, les Iraniens chrétiens disposent de leurs propres établissements d’enseignement, de leurs associations culturelles et sportives... De même, ils disposent d’une liberté d’expression et de presse. Ainsi, la communauté arménienne publie un quotidien, plusieurs mensuels ainsi que des sites Internet en langue arménienne. Il en est de même pour les autres communautés, aussi bien chrétiennes assyriennes que zoroastrienne et juive. Toutes ces communautés sont respectées tant par la société que par le gouvernement.

    En Iran, les principes de la liberté ont été conjugués avec les traditions et les convictions nationales et religieuses. Les fondements juridiques de la tolérance et du respect des diversités religieuses ont été édictés, il y a plus d’un siècle, par la constitution iranienne. Ils ont été préservés et sont appliqués jusqu’à présent. Selon la constitution de la République islamique, les minorités religieuses et ethniques jouissent non seulement de la liberté en ce qui concerne leur état civil, où ils peuvent appliquer librement leurs règles confessionnelles et religieuses, mais ils disposent également de leurs propres députés au sein du Parlement.

    Ces députés bénéficient de prérogatives et de responsabilités équivalentes à celles des autres députés. Ils siègent dans les différentes commissions, participent au processus de légifération et de surveillance du gouvernement. Parmi les deux cent quatre-vingt-dix députés du parlement iranien, cinq appartiennent à des communautés non musulmanes. Les autres députés, musulmans, sont composés de chiites et de sunnites. À ma connaissance, la situation des chrétiens en Iran est incomparable avec les pays que vous venez de citer. Cela a toujours été ainsi. Au début du XXe siècle, alors que les Arméniens et les Assyriens étaient victimes du génocide en Turquie ottomane, l’Iran accordait l’asile aux survivants arméniens et assyriens de cette tragédie.

    L’Iran est frappé d’un embargo par l’Occident. Comment le qualifiez- vous ? Quelle est son étendue  ? Quelle en sont les répercussions sur les Iraniens ?

    ❏ Au début de l’adoption de la politique des sanctions, l’Occident prétendait que ces dernières visaient uniquement l’État iranien et qu’elles n’étaient pas édictées contre le peuple. Mais, très rapidement, une fois que les sanctions "globales", et particulièrement les sanctions pharmaceutiques, voire académiques, furent appliquées, il est devenu évident que l’Occident ne faisait aucune différence entre l’Etat et le peuple.

    Naturellement, ces sanctions ont eu des effets sur la vie sociale et économique de l’Iran. Mais ces conséquences ne sont pas de nature à engendrer de grands changements politiques. Devant cette situation, nous avons adopté un mode de vie économique spécifique. Cette pratique s’appelle « l’économie de résistance » ou « la résistance économique ». Nous avons établi, à cet égard, des programmes et des stratégies avec l’aide de spécialistes.

    Étant donné les sanctions pesant sur votre pays, y a-t-il un message que vous souhaiteriez adresser à l’Occident ?

    ❏ La politique des sanctions n’est pas un langage conforme et adéquat pour dialoguer avec la République islamique d’Iran. L’Iran a une civilisation, une histoire et une culture millénaires. Ce n’est pas un pays qui capitule facilement devant la guerre, la violence, le terrorisme, les cyberattaques ou la politique de sanctions économiques. Je souhaite voir, très prochainement, l’Occident adopter une position plus conforme à l’image qu’il entend donner de lui.

    Au lieu de faire pression sur l’Iran sous prétexte d’accusations infondées telles que le soutien au terrorisme, la transgression des droits de l’homme (leitmotiv occidental) ou les questions liées à l’arme nucléaire, j’appelle les pays occidentaux à adopter une politique plus utile pour arriver à un compromis avec la République islamique d’Iran, pour le maintien d’une paix durable dans la région. ■

    Propos recueillis par Élie Hatem pour L’AF 2869

  • 14 septembre à Paris : la manifestation en danger

    COMMUNIQUÉdu Collectif pour la Défense des Libertés Publiques

    Il y a 20 jours, le collectif de défense des libertés publiques annonçait son intention de manifester à la préfecture de Paris. Il y a 12 jours, la manifestation a été officiellement déposée, avec un trajet et des horaires clairement définis.
    Depuis, aucune information, aucun contact n’a été pris par la préfecture de police, avec les organisateurs de la manifestation. Étrange pour une administration en charge du bon déroulement des manifestations sur la voie publique. Étrange pour une administration qui accepte rapidement et simplement, ici des manifestations de soutien aux rebelles syriens, là des manifestations pro-kurdes, pro-turques, pro-ivoiriennes ou pro clandestins.
    Aujourd'hui, à 14h00, un délégué de la manifestation s'est rendu en préfecture pour demander des nouvelles...la réponse n’a pas tardé : le préfet réfléchit encore, et une réponse sera communiquée jeudi, soit 2 jours avant la manifestation. Dans quel pays sommes-nous donc ? Dans quelle république bananière ou soviétique sommes-nous pour qu'un État se donne le droit d'autoriser ou d'interdire une manifestation nationale, annoncée puis déclarée de longue date, 48 heures avant la tenue de cette dernière ?
    Le thème de la manifestation "pour la défense des libertés publiques et pour la libération des prisonniers politiques" avait été bien choisi. Aujourd'hui en France, l'État de droit n'existe plus, les libertés sont bafouées. L'organisation d'une manifestation nationale de cette ampleur, avec des bus partant de toute la France, avec des individus venant en train, en voiture, ne peut pas voir son sort décidé à 48 heures de l'échéance.
    Nous avons des règles de sécurité à respecter, une logistique à mettre en place et la préfecture sait bien qu'il est impossible, en 48 heures, d'optimiser cela. C'est pourquoi, si Mercredi 11 septembre, à 9h00, nous n'avons reçu aucune réponse de Monsieur le préfet (qui jusqu'à présent préfère se dédouaner derrière une énième contre-manifestation et des appels à la haine et à la violence de groupuscules d'extrême gauche clairement identifiés),  nous considèrerons que c'est une interdiction déguisée de la manifestation et nous en tirerons toutes les conséquences.
    Nous demandons à toutes les organisations et aux participants à la manifestation de samedi 14 septembre de rester informés, à partir de mercredi, sur les évolutions concernant la manifestation.
    Le Collectif pour la Défense des Libertés Publiques
    Ligue du Midi
    BP 1-7114
    30912 – Nîmes cedex 2
    Tel: 04 34 40 41 29 / 06 83 25 36 10
    Membre du Réseau-identités
  • Syrie : que va faire la Russie ?

    Syrie : que va faire la Russie ?
    Manuel Ochsenreiter : Le monde est actuellement en Syrie face à la plus importante crise internationale depuis la fin du bloc soviétique en 1989/90. Washington et Moscou sont face à face sur le champ de bataille syrien. Est-ce une situation nouvelle ?
    Alexandre Dougine : Nous devons analyser le combat actuel pour le pouvoir géopolitique comme une continuation de l'antique conflit des puissances continentales, représentées par la Russie, et des puissances maritimes représentées par les USA et l'OTAN. Ce n'est pas un phénomène nouveau, c'est la continuation de la vieille lutte géopolitique et géostratégique. Les années 1990 furent une période de grande défaite pour les puissances terrestres représentées par l'USSR. Michail Gorbatchev refusa de continuer le combat. Ce fut une forme de trahison et de résignation face au monde unipolaire. Mais avec le président Vladimir Poutine, au début des années 2000, survint la réactivation de l'identité géopolitique de la Russie comme une puissance terrestre. Ce fut le début d'une nouvelle compétition entre les puissances terrestres et maritimes.

    Quand est-ce que ce réveil a débuté ?
    Lors de la deuxième guerre de Tchétchénie (1999-2009). La Russie à cette époque était en butte aux attaques des terroristes tchétchènes et craignait la sécession du Caucase du Nord. Poutine a compris que tout l'Occident, les USA et l'Union Européenne prenaient le parti des séparatistes tchétchènes et des terroristes islamistes qui combattaient l'armée russe. C'était le même schéma que ce que nous voyons aujourd'hui en Syrie et hier en Libye. L'Occident aidait la guérilla tchétchènes et ce fut le moment où se révéla le nouveau conflit entre la tellurocratie et la thalassocratie. Avec Poutine, la puissance continentale s'est alors réaffirmée. La deuxième révélation eut lieu en août 2008, quand le régime géorgien pro-occidental de Sakashwili attaqua Zchinwali en Ossétie du Sud.

    La crise syrienne est-elle la troisième révélation ?
    Exactement. C'est peut même être la dernière. Si Washington n’intervient pas et accepte la position de la Russie et de la Chine, il en sera fini des Etats-Unis comme candidat au poste de superpuissance unique. C’est la raison pour laquelle je pense qu’Obama va intervenir en Syrie. Mais si la Russie reste à l’écart et accepte l’intervention américaine et trahit, éventuellement, Bachar al-Assad, ce sera immédiatement un coup très dur pour la politique identitaire russe. Ce serait une grande défaite de la tellurocratie. Après cela, une attaque sur l’Iran deviendrait possible et aussi une autre dans le nord du Caucase. Parmi les forces séparatistes dans le nord du Caucase, il y a de nombreux individus qui reçoivent des aides des Anglo-américains, des Israéliens et des Saoudiens. Si la Syrie tombe, ils mèneront immédiatement la guerre en Russie, dans notre patrie. En conséquence, Poutine ne peut pas rester neutre et abandonner Assad, parce que cela signifierait le suicide géopolitique de la Russie. Il se peut que nous vivions actuellement la crise majeure de l’histoire de la géopolitique moderne.

    Ainsi, pour vous, maintenant, les deux puissances qui dominent le monde, les USA et la Russie, sont entrées en lutte pour leur existence future…
    Tout à fait. Actuellement, il n’y a pas d’autre solution possible. Nous ne pouvons trouver aucun compromis. Dans cette situation, il n’existe pas de solution qui puisse satisfaire les deux parties. Nous savons cela de l’exemple des conflits Arméniens-Azéris ou Israéliens-Palestinien. Il est impossible de trouver une solution acceptable pour les deux parties. Nous sommes dans la même situation actuellement en Syrie, mais sur une plus grande échelle. La guerre est la seule manière de changer la réalité.

    Pourquoi ?
    Nous devons imaginer ce conflit comme un jeu de Poker. Les joueurs ont la possibilité de dissimuler leurs capacités, de faire des entourloupes psychologiques, mais quand la guerre commence, toutes les cartes se retrouvent sur la table. Actuellement, nous sommes à la fin du jeu, au moment qui précède celui où les cartes seront étalées sur la table. C’est un moment fatidique, parce que l’enjeu est le pouvoir mondial. Si l’Amérique triomphe, cela lui donnera une position de domination absolue pour plusieurs années. Ce sera la perpétuation de l’unipolarité et du libéralisme mondialiste. Ce serait un fait très important, car jusqu’à aujourd’hui, les USA n’ont jamais été capables d’avoir une domination stable, mais si ils gagnent cette bataille, ils l’auront. Par contre, si l’Occident perd cette troisième bataille (la première étant la guerre en Tchétchénie et la seconde la guerre en Géorgie), ce sera la fin des USA et de leur domination. C’est pour cela que ni les USA ni la Russie ne peuvent accepter cette situation, il est tout simplement impossible pour eux de ne pas réagir.

    Pourquoi Barrack Obama hésite-t-il à agresser la Syrie ? Il a demandé l'avis du Congrès. Pourquoi a-t-il demandé une permission dont il n'a pas besoin pour attaquer ?
    Nous ne devons pas faire l’erreur de faire une analyse psychologique d’Obama. La guerre est déjà en coulisse. Et la guerre fait rage autour de Vladimir Poutine. Il subit une forte pression des fonctionnaires libéraux, pro-américains et pro-israéliens, qui sont dans son entourage. Ils tentent de le convaincre de rester neutre. La situation en Russie est totalement différente de celle qui a cours aux États-Unis. Un homme, Vladimir Poutine, et une large majorité de la population russe qui le soutien sont d’un côté, et l’entourage de Poutine constitue une cinquième colonne de l’Occident. Cela signifie que Poutine est seul. Il a le peuple avec lui, mais pas l’élite politique. Ainsi, on peut analyser le recours au Congrès par l’administration Obama comme une solution d’attente utilisée pour avoir le temps d’accentuer la pression sur Poutine. L’Occident active tous ses réseaux au sein de l’élite politique russe pour peser sur la décision de Poutine. C’est une guerre invisible que se déroule actuellement.

    Est-ce un nouveau phénomène ?
    Pas du tout ! Dans l’antiquité, les tribus archaïques tentaient d’influencer les chefs des ennemis par des bruits forts, des cris et des tambours de guerre. Elles se frappaient la poitrine pour faire peur à l’ennemie. Les tentatives des USA d’influencer Poutine sont une forme moderne de guerre psychologique avant que la bataille réelle débute. L’administration yankee tente de gagner cette guerre sans avoir d’opposition russe sur le terrain. Pour cela, elle tente de convaincre Poutine de rester à l’écart. Elle dispose de nombreux instruments pour le faire.

    Que pensez-vous de la position de Barrack Obama?
    Je pense que tous les aspects personnels sont moins importants du côté américain que du côté russe. En Russie, une personne seule décide de la guerre ou de la paix. Aux USA, Obama est une sorte d’administrateur. Obama est plus prévisible. Il n’agit pas de lui-même, il suit simplement la ligne médiane de la politique étrangère des États-Unis. Nous devons réaliser qu’Obama ne décide rien du tout. Il est juste l’incarnation d’un système politique qui prend les décisions réellement importantes. L’élite politique prend les décisions, Obama suit le scénario qui a été écrit pour lui. Pour le dire clairement, Obama n’est rien. Poutine lui est tout.

    Vous dites que Vladimir Poutine est soutenu par la majorité de la population russe. Mais actuellement nous sommes encore en temps de paix. Les citoyens russes le soutiendraient-ils de même si une guerre éclatait ?
    C'est une très bonne question. Je crois que Poutine perdrait encore plus de soutien populaire s'il ne réagissait pas à l'intervention occidentale en Syrie. Sa position serait affaiblie s'il restait neutre. Ceux qui le supportent le font parce qu'ils veulent un pouvoir fort. S'il ne réagit pas et reste neutre du fait de la pression des États-Unis, la majorité de la population considèrera qu'il a connu une défaite personnelle. Ainsi, voyez-vous cette guerre est plus importante pour Poutine que pour Obama. Mais s'il intervient en Syrie, il devra faire face à deux problèmes. Tout d'abord, la société russe veut un pouvoir fort mais n'est pas prête à en payer le coût. Quand les couts d'une intervention seront révélés, cela peut causer un choc à la population. Le deuxième problème, je l'ai déjà évoqué, c’est que la majeure partie de notre élite politique est pro-occidentale. Ses membres s'opposeront immédiatement à la guerre et ils critiqueront les décisions de Poutine. Cela peut entrainer une crise intérieure. Je pense que Poutine a conscience de ces deux problèmes.

    Quand vous dites que les Russes pourraient être choqués par le prix de la guerre, serait-il possible qu'ils ne soutiennent pas Poutine à cause de cela ?
    Je ne le pense pas. Notre peuple est un peuple très héroïque. Penchez-vous sur notre histoire. Notre peuple n'a jamais été belliqueux, mais quand il a du faire la guerre, il l'a fait jusqu'à la victoire quel qu'en soit les coûts et les sacrifices. Regardez ce qui s'est passé lors des guerres napoléoniennes ou durant la deuxième guerre mondiale. Nous avons alors perdu de nombreuses batailles, mais nous avons gagné ces guerres. Nous ne sommes jamais prêts à faire la guerre mais nous la gagnons toujours.
    Alexandre Douguine (entretien avec Manuel Ochsenreiter) http://www.voxnr.com
    Note : Service de traduction du site Voxnr.com

  • Bachar al-Assad brise les projets de Barack Obama

    La résistance de la Syrie face à la guerre coloniale, qui l’a prend pour cible depuis deux et demi, a ouvert la voie à de nouveaux équilibres internationaux susceptibles de libérer le monde de l’hégémonie américano-sioniste. En prenant appui sur cette résistance, les partenaires et les amis de la Syrie ont commencé à jeter les fondements de nouvelles relations sur les scènes internationale et régionales, un quart de siècle après la transformation de l’Organisation des Nations unies en instrument états-unien.
    Le projet d’agression contre la Syrie, sous le prétexte de l’utilisation par le régime d’armes chimiques contre sa population, place le monde à la croisée des chemins. Soit les États-Unis réussissent à renouveler leur hégémonie totale et assujettissent toutes les puissances émergentes, soit un nouvel ordre mondial est consacré, grâce à la résistance épique de l’État syrien, de son armée et de son peuple, conduits par le président Bachar al-Assad, devenu le symbole du refus du diktat étranger et du leader attaché, même au prix de sa vie, à l’indépendance de son pays.
    Le prétexte des armes chimiques n’a pas réussi à convaincre les opinions publiques occidentales de la pertinence d’une attaque contre la Syrie. La Russie et l’Iran ont démonté les arguments des États-Unis sur l’utilisation de gaz toxique par l’armée gouvernementale syrienne. Le président Vladimir Poutine a déclaré à ce sujet : « Les forces syriennes sont à l’offensive et cernent l’opposition dans plusieurs régions. Dans ces conditions, fournir un tel prétexte à ceux qui appellent à une intervention armée serait une absurdité totale. L’interception de conversations quelconques ne peut pas servir de base pour la prise de décisions fondamentales, notamment le recours à la force contre un État souverain ».
    Évidemment, l’Occident tente d’étouffer les révélations fracassantes de la correspondante de l’Associated Presse (AP) en Jordanie, Dale Galvak, qui a publié une enquête, étayée de témoignages de rebelles syriens, reconnaissant qu’une erreur de manipulation de leur part de gaz toxique fourni par l’Arabie saoudite, est à l’origine de la catastrophe chimique du 21 août, dans la Ghouta orientale.
    La résistance de Syrie, le soutien indéfectible de ses alliés, et la peur d’une puissante riposte, ont effrayé les États-unis. C’est donc un Barack Obama « faible », comme l’ont décrit les médias israéliens, « hésitant et confus », comme l’a qualifié le vice-ministre syrien des Affaires étrangères Fayçal Moqdad, qui a annoncé, samedi soir, le report de l’agression contre la Syrie. Abandonné par ses plus proches alliés, incapable de former une coalition internationale, Obama a lancé la balle dans le camp du Congrès, en décidant de lui demander l’autorisation avant toute frappe contre la Syrie. Le Congrès, soumis à de fortes pressions de la part de l’opinion publique (80 à 90 % des États-uniens sont hostiles à toute intervention de leur pays en Syrie), a annoncé qu’il examinera la requête du président à partir du 9 septembre. C’est-à-dire que les élus ont laissé à Obama tout le temps nécessaire pour trouver une issue au piège dans lequel il s’est lui-même enfermé. Il tentera de trouver une solution avec Poutine lors du G20, à Saint-Petersbourg, le 4 septembre.
    Mais quelle que soit la décision du Congrès, la Syrie est prête à se défendre. C’est le président Bachar el-Assad qui l’a encore réaffirmé dimanche. « La Syrie est capable de faire face à toute agression extérieure, a-t-il dit dans une déclaration diffusée par l’agence Sana. Grâce à la résistance de son peuple et de son armée elle continue d’accumuler les victoires jusqu’au retour de la sécurité et de la stabilité dans le pays ».
    De son côté, Fayçal al-Mokdad a estimé que « le Congrès états-unien doit faire preuve de sagesse (…) Les allégations sur l’utilisation par la Syrie des armes chimiques n’ont aucun fondement », a-t-il réaffirmé, en estimant que M. Obama était « clairement hésitant, déçu et confus quand il parlait (samedi) » car « personne ne peut justifier une agression injustifiable ».
    M. Moqdad s’en est aussi pris au gouvernement français, seul partisan d’une agression contre la Syrie après la défection de la Grande-Bretagne, du Canada et des autres alliés traditionnels de Washington. « Les politiciens français ont trompé le peuple français et se sont comportés de façon irresponsable. Ils ont falsifié les faits et soutiennent des organisations comme Al-Qaïda », a-t-il martelé.
    Le chef des Gardiens de la révolution iraniens a mis, de son côté, en garde contre une intervention militaire US en Syrie. « Le fait que les États-uniens croient qu’une intervention militaire sera limitée à l’intérieur des frontières de la Syrie est une illusion, elle provoquera des réactions au-delà de ce pays », a déclaré le commandant Mohammad Ali Jafari, cité par l’agence Isna.
    La Syrie est la forteresse de l’arabité et Bachar al-Assad est le défenseur de son étendard. Aucune menace ne parviendra à briser sa volonté. Il sera toujours le symbole des hommes libres, prêts à tous les sacrifices pour sauvegarder l’indépendance et la souveraineté de son pays face aux envahisseurs colonialistes et aux régimes rétrogrades arabes, qui véhiculent la pensée obscurantiste. Sa résistance sonnera le glas de l’hégémonie unilatérale états-unienne et consacrera un monde multipolaire.

    Déclarations et prises de positions

    Nabih Berry, président du Parlement libanais
    « Toutes les armes en dehors du contrôle de l’armée libanaise et de la résistance sont refusées. Nos armes sont-elles refusées car nous sommes capables de dissuader l’ennemi ? Nous protégeons la souveraineté du Liban et non une communauté. Le concept d’une stratégie de Défense nationale ne concerne pas une seule secte ou une seule communauté. Les frontières au Liban-sud ne sont pas des frontières chiites, les frontières au Liban-nord ne sont pas un nid pour les takfiristes et Beyrouth n’est pas pour les sunnites. Le blocage sur la scène politique au Liban est dû aux mauvaises intentions de certaines parties qui veulent mettre la main sur le gouvernement. Nous sommes pour un partenariat au sein du gouvernement. Y-a-t-il des parties qui seraient prêtes à faire des concessions pour renforcer l’État libanais ? Israël est derrière la vague d’attentats qui a frappé le Liban. L’armée et la résistance ont déjà démantelé plusieurs réseaux d’espionnage israéliens et ceux qui mènent des attentats au Liban sont certainement liés aux réseaux israéliens. Nous devons donc trouver une issue au blocage politique au Liban et reprendre le dialogue. Nous appelons toutes les parties à gagner du temps et à entamer un dialogue ouvert au lieu d’attendre un changement régional car le Liban n’est plus la priorité pour les pays qui prennent les grandes décisions. »

    Vladimir Poutine, président de la Fédération de Russie
    « Les forces syriennes sont à l’offensive et cernent l’opposition dans plusieurs régions. Dans ces conditions, fournir un tel prétexte à ceux qui appellent à une intervention armée serait une absurdité totale. L’interception de conversations quelconques ne peut pas servir de base pour la prise de décisions fondamentales, notamment le recours à la force contre un État souverain. Concernant la position de nos amis états-uniens, qui affirment que les troupes gouvernementales ont utilisé des armes chimiques et disent avoir des preuves, eh bien, qu’ils les montrent aux enquêteurs des Nations unies et au Conseil de sécurité. S’ils ne le font pas, cela veut dire qu’il n’y en a pas. On doit se souvenir des événements de ces dernières décennies, se rappeler combien de fois les États-Unis ont pris l’initiative de conflits armés dans différentes parties du monde. Voilà ce que je voudrais vouloir dire, si possible, par téléphone à mon homologue états-uniens, en m’adressant à lui non comme au président des États-Unis, mais comme au prix Nobel de la paix. Est-ce que cela a résolu au moins un seul problème ? En Afghanistan, en Irak, il n’y a pas d’apaisement, pas de démocratie tant recherchée par nos partenaires, il n’y a même pas de paix civile la plus élémentaire ni équilibre. Les États-Unis devraient bien réfléchir avant de décider des frappes aériennes qui ne manqueraient certes pas de faire des victimes, notamment parmi la population civile. »

    Youhanna Yazigi, patriarche grec-orthodoxe d’Orient
    « La communauté internationale est responsable de la situation à laquelle nous sommes parvenus. Le rapt des évêques en Syrie est une affaire parmi tant d’autres, et nous ne pouvons rester les bras croisés. Nous avons déployé des efforts pour leur libération mais nous sommes désormais dans une impasse. Nous avons besoin d’aide pour connaitre le sort des personnes enlevées en Syrie. »

    Michel Aoun, leader du Courant patriotique libre
    « Les takfiristes apparaissent d’abord comme inoffensifs, mais lorsqu’ils prennent de l’importance, il devient impossible de les contrôler et commencent à former des cellules terroristes. Tant que certains leur assureront un environnement favorable, on ne pourra pas se débarrasser d’eux. Nous sommes tous plongés dans les complots qui ne s’arrêteront que si la sécurité est contrôlée. Le nombre de déplacés syriens a dépassé le million et demi. Ils sont traités comme de simples travailleurs, alors que nos ministres avaient proposé un plan de solution à ce problème. La distanciation avec Ersal, le Akkar et Tripoli est inacceptable. Il s’agit de terres libanaises et de citoyens libanais. Nous avons déjà dit que 500 éléments armés à Tripoli et dans ses environs prennent 400 000 personnes en otages. »

    Alexander Zasypkin, ambassadeur de Russie au Liban
    « Le président syrien Bachar al-Assad ne tombera pas sous la pression externe. La Russie cherche à éviter une opération militaire étrangère en Syrie, car elle sera porteuse de catastrophes et elle constitue en tout état de cause une violation du droit international. Nous détenons des éléments sur l’utilisation par l’opposition d’armes chimiques à Khan el-Assal le 19 mars. Quant à la Ghouta, les premières informations parvenues à la Russie montrent que les missiles ont été tirés à partir d’une zone contrôlée par les rebelles. Il faut préciser ces informations et vérifier d’où sont partis les missiles, comment et où ils ont été fabriqués. Les données doivent être claires. Nous voulons que le dossier syrien reste dans le cadre de l’Onu, mais nous n’avons pas l’intention de nous battre contre qui que ce soit. Nous ne voulons pas contribuer à hausser la tension et nous n’utilisons pas un langage de menaces (...) Les attentats survenus au Liban dernièrement s’inscrivent dans le cadre d’un jeu mené par le réseau terroriste international. »

    Hussein Moussaoui, député du Hezbollah
    « Les initiatives courageuses et libres des leaders syriens, ainsi que la fin de la lutte sanglante, qui ne mène qu’à plus de destruction, constituent le seul salut pour la Syrie. Les États-unis sont le plus destructeur des peuples par les armes chimiques et nucléaires et par les bombes à sous-munitions, du Japon au Vietnam et de l’Afrique, la Yougoslavie et l’Afghanistan aux pays arabes. Ils n’ont laissé derrière eux que le chaos. Le seul souci des États-Unis est de s’accaparer des ressources des autres et d’assurer l’hégémonie de l’entité sioniste. Nous appelons les fils de la nation à resserrer les rangs, à assumer leurs responsabilités et à s’armer de confiance les uns vis-à-vis des autres, pour préserver leurs valeurs et leur avenir. »

    Samir Geagea, chef des Forces libanaises
    « Il est impossible pour le moment de former un gouvernement d’union nationale vu que le Hezbollah prend des décisions stratégiques sans revenir à l’État. Nous souhaitons la formation d’un gouvernement neutre qui gère les affaires des citoyens. Nous voulons un gouvernement libanais et, par conséquent, ce gouvernement ne peut pas englober le Hezbollah qui a des engagements étrangers. Le Hezbollah a déjà pris sa décision en ce qui concerne le dialogue national à travers le discours du député Mohammad Raad, qui a souligné que la déclaration de Baabda était née morte. »

    Événements

    • Les douanes libanaises ont arrêté, à l’aéroport de Beyrouth, cinq individus (français, norvégiens et canadiens) qui transportaient des engins de communication non autorisés et des équipements militaires. Les forces de sécurité ont commencé à interroger les détenus pour connaître leur destination ainsi que l’usage auquel ils destinaient leurs équipements, qui comportaient des caméras sophistiquées pouvant émettre directement via satellite. De source sécuritaire, on laisse entendre que les personnes arrêtées devaient se rendre en Syrie.

    • Selon le quotidien libanais Al-Akhbar, le Hezbollah a été placé en état d’alerte générale et toutes les unités de combat, sur tous les sites de déploiement, ont été appelées à rester sur le qui-vive —une mesure qui concerne également les unités du Hezbollah présentes en Syrie—. L’ensemble de ces mesures a commencé à être mis en œuvre en toute discrétion. La Finul devait évacuer les familles de ses personnels étrangers résidant au Liban via l’aéroport de Beyrouth, dès dimanche.

    • Dans un enregistrement sonore diffusé sur la chaîne de télévision LBC, les deux pilotes turcs de la compagnie Turkish Airlines, enlevés début août au Liban, affirment être en « bonne santé » et attendent d’être libérés « dans les plus brefs délais ». Le groupe qui a revendiqué leur enlèvement demande à la Turquie d’user de son influence auprès des rebelles syriens, qu’Ankara soutient, pour obtenir la libération de neuf pèlerins libanais enlevés en Syrie en mai 2012.« Ils (les ravisseurs) ont expliqué que la Turquie était le seul pays a aider à libérer ces gens », dit Murat Akpinar, le premier pilote.

    • Le quotidien libanais Al-Akhbar rapporte qu’une réunion de haut niveau a eu lieu entre le Hamas et le Hezbollah, en présence d’Oussama Hamdane, membre du bureau politique du mouvement palestinien, et du secrétaire général adjoint du Hezbollah, cheikh Naïm Qassem.

    Revue de presse

    As-Safir (Quotidien libanais proche du 8-Mars)
    Ghassan Rifi (30 août 2013)
    L’arrestation du cheikh Hachem Minkara a provoqué un choc parmi les milieux islamistes, notamment ceux qui sont proches du 8-Mars. À l’heure où ils s’attendaient à la remise en liberté d’Ahmad al-Gharib, après qu’il se fut avéré que la personne apparue dans les images prises par une caméra de surveillance près du site de l’une des explosions n’était pas lui, mais plutôt un membre de la famille Al-Raïs, ces milieux ont été pris de court par la convocation, par le département du Renseignement des FSI, du chef du Mouvement de l’unification islamique Al-Tawhid, afin de recueillir sa déposition concernant sa relation avec al-Gharib. Ce dernier, selon des sources sécuritaires informées, aurait mentionné à plusieurs reprises son nom lors des interrogatoires ces derniers jour. Le département du Renseignement des FSI aurait relevé des contradictions entre les dépositions des deux cheikhs. Des sources de la famille de Hachem Minkara ont rejeté en bloc les accusations retenues contre l’intéressé, y voyant une opération visant à entacher la réputation des dignitaires religieux proches du Hezbollah et les « assassiner politiquement ». En outre, selon une source sécuritaire, la déposition de Hachem Minkara dénoterait qu’il était au courant de « certaines choses » liées au double attentat. D’autres sources font savoir qu’al-Gharib aurait affirmé avoir informé Hachem Minkara qu’on lui avait demandé d’exécuter les deux attentats contre les mosquées Al-Taqwa et Salam. Toutefois, Minkara aurait démenti qu’al-Gharib lui ait communiqué cette information.

    As-Safir (30 août 2013)
    Imad Marmal
    Convaincu que les mouvements terroristes et extrémistes sont d’ores et déjà isolés, le commandant en chef de l’armée, le général Jean Kahwagi a fait part de sa détermination à les poursuivre là où ils se trouvent, affirmant que l’armée est décidée à « contrecarrer le terrorisme et à lui couper les bras ». Le commandant en chef aurait également souligné que « l’institution militaire est soudée et se porte à merveille, et que le rôle national qu’elle joue sur le terrain pour la protection de la paix civile contribue » à sanctuariser le pays contre les discours incitant à la fitna. Toujours selon les visiteurs, Jean Kahwagi aurait dit ne pas craindre de discorde confessionnelle au Liban, les principaux blocs dans les différentes communautés, notamment le Hezbollah et le Futur, n’en voulant pas, et considère que les extrémistes ne seront pas capables à eux seuls d’en jeter l’étincelle. Il a ajouté qu’il pourrait y avoir des tentatives visant à entraîner les protagonistes à croiser le fer et que les derniers attentats s’inscrivent dans ce contexte. Toutefois, les principales formations internes refusent de se laisser prendre dans ce marécage. Selon ces sources, le commandant en chef de l’armée a donné des ordres clairs à toutes les unités de la troupe de traquer tout groupe terroriste dont la présence est détectée, précisant qu’aucune ligne rouge n’a été tracée à cet égard.

    As-Safir (30 août 2013)
    Daoud Rammal
    La confusion sévit au sein de l’Union européenne, qui joue un rôle contradictoire, et ambivalent. D’une part, ses États membres participent à la campagne menée contre la Syrie, qui constitue la profondeur stratégique du Hezbollah, de l’autre ils font parvenir sans cesse des messages, par le biais de différents canaux, visant à rassurer ce dernier. Un responsable libanais revient dans ce cadre sur les propos d’un ambassadeur occidental qui aurait affirmé sans ambages que le danger représenté par les islamistes et les takfiristes, dont le nombre est grandissant, devient de plus en plus important, d’où le souhait de dialoguer avec le Hezbollah. Le diplomate aurait considéré que ce dernier ne devra pas, de ce fait, fermer ses portes aux Européens avec lesquels il serait plutôt appelé plutôt à engager un dialogue. À cet égard, le même responsable libanais relève avec une grande surprise que la seule expression revenant chez tous les ambassadeurs européens qu’il a rencontrés est la suivante : « Nous avons des intérêts communs avec le Hezbollah ».

    An-Nahar (Quotidien libanais proche du 14-Mars)
    Sarkis Naoum (30 aout 2013)
    Un chercheur US assure que le régime de Bachar al-Assad sortira vainqueur de la guerre en cours en Syrie. Par conséquent, les différents protagonistes, en l’occurrence le régime, l’Iran, le Hezbollah, Al-Qaïda cohabiteraient, le cas échéant, sur le sol syrien. La Syrie deviendrait ainsi une source d’instabilité pour la région et une contrée où les plus horribles crimes contre l’humanité seront perpétrés pendant de longues années. D’où l’intérêt pour l’Occident, selon le même chercheur, à empêcher la survie de Bachar al-Assad, en menant des frappes militaires contre les bases de son régime et en mettant la pression sur Moscou et sur Téhéran pour les amener à mettre un terme à leur soutien au régime au profit d’une opposition modérée.

    An-Nahar (29 août 2013)
    Sabine Oueiss
    Des sources politiques de haut niveau assurent que le président de la République, Michel Sleiman, s’est vraiment engagé dans la bataille de la formation du gouvernement. Elles précisent toutefois que le chef de l’État, qui a préconisé un gouvernement fédérateur, approuve les modalités fixées par Tammam Salam : 24 ministres sur la base dite des « 3x8 » pour constituer un cabinet non provocateur, adoptant le principe de la rotation des portefeuilles. Le tout serait de savoir désormais si le Hezbollah acceptera de renoncer au tiers de blocage et le Futur à sa condition relative à un retrait du Hezbollah de Syrie.

    Al-Akhbar (Quotidien libanais proche de la Résistance)
    Ibrahim Al-Amine (30 août 2013)
    Le cheikh Ahmad al-Gharib a été autorisé, jeudi, à contacter sa famille. Un de ses proches rapporte qu’il leur a juré n’avoir rien à voir avec les deux attentats, ni de près, ni de loin.
    Le Renseignement des FSI renoue avec leurs vieilles habitudes. Certaines parties officielles influentes portent un regard dubitatif sur la version de ce service concernant l’implication du régime syrien dans les attentats de Tripoli, qui met en cause Ahmad al-Gharib et Hachem Minkara. Ces parties estiment que quelques minutes à peine après le double attentat, l’enquête de ce même service de renseignement s’est bâtie sur une hypothèse perçue comme une évidence : celle de la responsabilité du régime syrien. Ces parties dénoncent donc des accusations politiques toutes prêtes et considèrent que les fuites à travers les médias liés directement et indirectement au Futur reflètent la même mentalité et les mêmes velléités de vengeance. Elles considèrent enfin que Moustapha Houry manque de crédibilité.

    Al-Akhbar (29 août 2013)
    Ibrahim Al-Amine
    Parmi les questions taraudant l’esprit des Occidentaux, figure celle de l’éventuelle réaction du Hezbollah à une agression contre la Syrie. Ces questions concerneraient notamment la sécurité directe d’Israël, la sécurité des forces internationales qui opèrent dans la région, et enfin la sécurité politique et militaire des États occidentaux. Le Hezbollah maintient le silence. En ce moment, le parti n’a pas à afficher une position bien précise. Tout communiqué qui émanera de lui condamnera par avance l’agression et mettra en garde contre ses répercussions dangereuses sur la région. Sera glissé en filigrane un mot à même de faire miroiter sa disposition à épauler la Syrie pour se défendre contre toute attaque externe. Dans la conjoncture actuelle, il faut noter que le Hezbollah fait partie intégrante d’une grande alliance conduite par l’Iran. Outre la relation spéciale le liant à Téhéran, il est recommandé à toute personne avisée de déchiffrer les termes employés par Le guide suprême Ali Khameneï qui a mis en garde contre « une catastrophe qui s’emparera de la région » dans l’éventualité d’une agression contre la Syrie. Selon l’interprétation d’éminents dirigeants de l’armée, ces déclarations signifient que l’Iran n’acceptera pas de voir son allié syrien attaqué sans intervenir.
    Le Hezbollah est impliqué jusqu’au cou dans la crise syrienne, plus particulièrement dans la confrontation en cours avec les groupes armés liés à l’Occident ou aux takfiristes. Le parti y a sacrifié des dizaines de martyrs. De plus, le Hezbollah joue un rôle sérieux et se considère comme étant concerné par ce qui se déroule actuellement, partant de sa vision qui dit que l’un des principaux objectifs de la guerre consiste à frapper l’axe de la Résistance afin de l’atteindre. De ce fait, le Hezbollah n’a pas besoin qu’on lui explique les motifs d’une intervention étrangère, israélienne, US ou européenne, car il s’y attendait depuis belle lurette. Par conséquent, il convient de savoir que ce parti, lorsqu’il a décidé d’intervenir en Syrie, a étudié tous les aspects d’un tel acte, dont il ne se rétractera pas aujourd’hui. Au contraire, toute agression occidentale contre la Syrie sera un motif supplémentaire pour le Hezbollah, le portant non à se ranger encore plus aux côtés de son allié, Bachar El Assad, mais à être au cœur de la bataille de la défense de la Syrie face à cette attaque. Comment ? Seul le parti détient la réponse à cette question.

    Al-Akhbar (29 août 2013)
    Nasser Charara
    Lors d’une réunion avec des responsables syriens suite aux informations évoquant l’imminence de la frappe états-unienne contre la Syrie, le président Bachar al-Assad leur a affirmé : « Dès le départ, vous le savez bien, nous attendons le moment où notre véritable ennemi se révèlera. Je sais que votre moral est bon et que vous êtes prêts à contenir toute agression et à préserver la patrie. Mais il faudra transmettre ce moral à vos subordonnés et aux citoyens syriens. C’est une confrontation historique dont nous sortirons vainqueurs ».
    Par ailleurs, une source diplomatique arabe a fait état du transfert d’unités militaires états-uniennes, britanniques et françaises ces deux derniers jours vers la frontière syro-jordanienne. Selon la source, ces mesures auraient été prises, car l’Otan pourrait être appelée à envoyer des unités militaires vers des sites précis en Syrie, abritant les dépôts des armes chimiques.

    Al-Akhbar (28 août 2013)
    Pierre Abi Saab
    Tout suggère que la coalition occidentale se prépare à des frappes militaires en Syrie. Devons-nous livrer la Syrie à ceux qui sont épris de napalm (et de liberté) ? Les accusations montrant du doigt le régime dans l’utilisation d’armes chimiques n’ont pas attendu les rapports des experts et ont été lancées indépendamment de toute logique ! Les photos horribles du massacre de la Ghouta ont suffi pour identifier l’assassin et anesthésier l’opinion publique, tout en la préparant à accepter les crimes coloniaux à venir. L’opposition syrienne armée est en état de surexcitation, qui n’a d’égal que l’enthousiasme du président français François Hollande et l’emportement de son ministre des Affaires étrangères Laurent Fabius. Ce dernier risque de succomber à son impatience de voir sonner l’heure H qui ramènera l’Orient arabe un siècle en arrière. Maintenant que les socialistes français sont rassurés quant à leurs prouesses socio-économiques à l’intérieur, ils peuvent se consacrer à leur vocation humanitaire. Jean-Luc Mélenchon, cités sur le site du Nouvel Observateur déclare pour sa part : « Nous savons que les Nord-Américains ont l’habitude d’utiliser n’importe quelle sorte d’argument pour justifier une intervention militaire. Frapper militairement la Syrie serait une erreur gigantesque. Qui se trouve mieux depuis qu’on a tout cassé en Libye ? Nous sommes des suiveurs. Pour nous donner de la contenance, de temps en temps nous aboyons plus fort que le reste de la meute. Quant à l’opposition syrienne armée, elle a hâte de flairer l’odeur du napalm : elle veut la "liberté" fût-ce sur les décombres de son pays. Les opposants croient-ils vraiment que les États-Unis, leurs supplétifs et leurs alliés, n’ont rien de mieux à faire que de rendre de nobles services à nos peuples, à l’instar de ceux qu’ils avaient rendus en Irak et en Libye ? Ou que leur intervention vise uniquement à aider les Syriens à mettre en place "une alternative démocratique" au régime d’Assad ? 

    Al-Akhbar (28 août 2013)
    Hiyam Kosseify
    Les autorités officielles libanaises sont dans le coma au moment où la perspective d’une frappe militaire en Syrie se précise de plus en plus. C’est comme si le monde entier était dans un monde, et le Liban dans un autre. Selon des rapports militaires occidentaux, Washington ne souhaiterait pas élargir le spectre des opérations. Les mêmes rapports précisent toutefois que les pays du Golfe, l’Arabie saoudite en tête, exercent de fortes pressions pour faire en sorte que ces frappes soient fatales au régime. Dans tous les cas, le Liban ne semble pas se préparer à la période qui s’annonce, et dont les signes précurseurs ont commencé à se manifester à travers les attentats à l’explosif sur son territoire. Les rapports s’interrogent d’ailleurs sur l’attitude du Hezbollah vis-à-vis d’une éventuelle opération militaire états-unienne en Syrie. Le Liban pourrait être concerné par cette opération à plus d’un niveau :
    - Le niveau politique d’abord : Il ne fait aucun doute que le Liban aura rendez-vous avec une échéance incontournable, celle de prendre position, officiellement, au sujet de l’action militaire qui pourrait être menée en Syrie. Quelle sera la position affichée par le président de la République, le Premier ministre et le ministre des Affaires étrangères ? Dénonceront-ils cette opération ou choisiront-ils plutôt de se murer dans le silence ?
    - Le niveau sécuritaire ensuite : Quelle sera la réaction du Liban si les États-uniens utilisent son espace aérien ? D’autres interrogations portent sur les défis sécuritaires qui pourraient surgir au Liban, certaines parties pouvant exploiter la frappe en Syrie pour s’en prendre aux intérêts des pays occidentaux qui y prennent part, les États-Unis en tête, voire à la Finul. Il ne faut pas oublier non plus la possibilité de voir de nouveaux réfugiés syriens affluer au Liban, ni le danger d’un recours aux voitures piégées pour semer la peur et l’anarchie dans plusieurs régions.
    Le niveau gouvernemental enfin : D’aucuns craignent que l’offensive ne s’accompagne de pressions pour former un gouvernement coûte que coûte. Des sources informées estiment d’ailleurs que les pressions régionales pour constituer un gouvernement excluant le Hezbollah sont le maillon d’une chaîne visant à resserrer l’étau autour de ce parti et des alliés de la Syrie au Liban.

    Al-Akhbar (28 août 2013)
    Nasser Charara
    Des informations sécuritaires ont révélé que les quatre attentats qui ont frappé la banlieue sud de Beyrouth et Tripoli s’inscrivent dans le cadre d’un vaste plan appelé « Mort et Destruction », exécuté par Al-Qaïda et destiné à plonger le Liban dans un bain de sang. Toutes les données montrent que ce plan va se poursuivre et vise à contraindre le Hezbollah à se retirer de Syrie, quel que soit le prix et le sang versé.
    Après l’examen minutieux des données liées aux attentats de Bir al-Abed, le 9 juillet, de Roueiss, le 15 août et de Tripoli, le 22 août, et le recoupement d’informations à travers des écoutes téléphoniques et des infiltrations, il est désormais possible de déterminer la nature de l’attaque terroriste en cours et de ses objectifs : le message est que la vague de « Mort et Destruction » va se poursuivre et les explosions vont aller crescendo jusqu’au retrait du Hezbollah de Syrie.
    L’explosion de Roueiss a montré que le plan est entré dans sa phase d’exécution. Des informations recueillies par des services de renseignement ont fait état d’une coordination entre l’émir de l’État islamique d’Irak et du Levant, Abou Omar al-Baghdadi, et l’émir du Front al-Nosra, Abou Mohammad Al-Joulani, pour asséner des coups au Liban. Les investigations ont permis de découvrir que les deux hommes se sont entendus sur un mot de passe qui déclencherait cette vague de terreur. Ce signal a été le tir des quatre roquettes contre Israël. Effectivement, 12 heures après ce tir, les deux explosions de Tripoli ont eu lieu. Un examen des modes opératoires des attentats de Roueiss et de Tripoli montre qu’ils ont été commis par une même et seule partie. D’ailleurs, un quart d’heure après la chute des roquettes sur la Galilée, les Israéliens en ont fait assumer la responsabilité au « jihad international ». Les experts affirment que l’un des facteurs pour déterminer l’identité des auteurs d’un attentat est d’étudier le mode opératoire. Or à Roueiss comme à Tripoli, les charges piégées étaient composée de plus de 200 kg d’explosifs. Ensuite, les explosions ont ciblé des lieux publics.
    Cette vague de terreur devrait donc se poursuivre dans plus d’une région libanaise pour semer « la Mort et la Destruction » chez toutes les communautés afin de placer le Hezbollah devant l’équation suivante : se retirer de Syrie ou être confronté à une colère populaire grandissante. Dans ce cadre, il faut signaler que des voix libanaises se sont élevées, surtout après les explosions de Tripoli, pour faire le lien entre le refus du Hezbollah de se retirer de Syrie et les attentats. Ces voix adoptent, en quelque sorte, l’objectif politique que les auteurs des attentats tentent de réaliser.

    Al-Joumhouria (Quotidien libanais proche du 14-Mars)
    (28 août 2013)
    Les ambassadeurs d’Arabie saoudite, Ali Awad al-Assiri, du Koweit, Abdel Aal Kinaï, du Qatar, Saad Ali Hilal al-Mohannadi, et des Émirats arabes unis, Youssef Ali Osseimi, se sont absentés de la réunion à laquelle les a invité le patriarche maronite Béchara Raï à Dimane. Le chargé de la communication du patriarcat, Walid Ghayad, a refusé de parler « d’une absence des ambassadeurs », préférant évoquer leur présence à l’extérieur du Liban. Il a affirmé qu’il ne pouvait pas faire aux diplomates un procès d’intention, d’autant qu’ils n’ont pas publié un communiqué affirmant clairement qu’ils s’étaient absentés en raison de la présence à la réunion de l’ambassadeur de Syrie, Ali Abdel Karim Ali. M. Ghayyad a indiqué que la discussion avec les ambassadeurs a porté sur les dossiers arabes et régionaux, et les présents ont mis l’accent sur la nécessité d’unifier la position des pays arabes. Mgr Raï a expliqué la position du patriarcat maronite et son rôle, mettant l’accent sur la présence des chrétiens au Liban et en Orient, qui se complète et coexiste, historiquement, avec la présence musulmane. Le prélat a insisté sur l’importance d’édifier l’État de la citoyenneté et de l’égalité dans le monde arabe.
    M. Ghayyad a nié que le patriarche ait évoqué devant ses invités le « danger des takfiristes », précisant néanmoins que Mgr Raï a « rejeté le phénomène du terrorisme et du partage des États ». « Aucun nouveau rendez-vous n’a été fixé pour les ambassadeurs absents », a-t-il dit.

    AFP (Agence de presse française, 30 août 2013)
    De Jérusalem à Alep, de Beyrouth à Bagdad, la perspective de frappes occidentales est dénoncée avec force par les patriarches d’Églises implantées depuis la naissance du christianisme et qui n’ont pas envie d’être assimilées aux « croisés » par les islamistes comme en Irak en 2003. Le plus vif est le patriarche irakien Louis Raphaël Sako, patriarche des chaldéens : une intervention militaire états-unienne reviendrait « à faire exploser un volcan destiné à emporter l’Irak, le Liban, la Palestine. Et peut-être que quelqu’un veut précisément cela ». L’évêque d’Alep, Mgr Antoine Audo, évoque un risque d’une « guerre mondiale ». Le patriarche maronite Béchara Boutros Raï a accusé « des pays, surtout de l’Occident mais aussi de l’Orient », de « fomenter tous ces conflits ». « Nous sommes en train de voir la destruction totale de ce que les chrétiens ont pu construire durant 1400 ans » de cohabitation avec les musulmans, a-t-il estimé.
    Le patriarche syriaque-catholique Youssef III Younan a accusé les puissances extérieures « d’avoir armé les rebelles, incité à la violence, envenimé encore les relations entre sunnites et chiites ». « L’Occident pense qu’avec les sunnites au pouvoir, la démocratie remplacera la dictature, mais c’est une grande illusion », s’est-il insurgé.
    La crainte que « le scénario de l’Irak se répète » est constamment évoquée, de même que la perte d’une « laïcité » qui rendait vivable la cohabitation au Proche-Orient. Les patriarches font remarquer que les Occidentaux ne semblent guère soucieux d’attendre les conclusions de l’enquête de l’Onu sur l’attaque chimique de la semaine dernière. Ils rappellent qu’il y a dix ans, les États-uniens sont partis en guerre en Irak pour de supposées preuves inexistantes d’armes de destruction massive. Ils s’étonnent du peu d’attention accordé par les Occidentaux à la dimension communautaire et religieuse dans les déséquilibres actuels.
    Même dans les rangs des chrétiens opposés à Bachar el-Assad, le rejet de frappes étrangères est net : le monastère du père Paolo Dall’Oglio, actuellement enlevé dans le nord de la Syrie, a ainsi exhorté au « refus de toute violence ».
    Enfin, sur les blogs et Twitter, les opposants chrétiens à une intervention étrangère sont intervenus massivement ces derniers jours.

    The Independent (Quotidien britannique, 28 août 2013)
    Robert Fisk
    Si Barack Obama décide d’attaquer le régime syrien, il aura fait en sorte —pour la première fois de l’Histoire— que les États-Unis soient du même bord qu’Al-Qaïda.
    Les hommes qui ont tué des milliers de personnes, le 11-Septembre, combattront aux côtés de la nation dont ils ont assassinés si cruellement les innocents, il y a presque 12 ans. C’est tout un exploit pour Obama, Cameron, Hollande et les autres mini-chefs de guerre. Bien sûr que ceci ne sera pas crié haut et fort par le Pentagone ou la Maison-Blanche —ni, je suppose, par Al-Qaïda— qui tentent de détruire Bachar. Il en est de même du Front al-Nosra, affilié à cette organisation. Cette affaire soulève quelques possibilités intéressantes.
    Peut-être que les Américains devraient demander à Al-Qaïda de l’aider sur le plan du renseignement —après tout, elle est présente sur le terrain, là où les Américains n’ont aucun intérêt à aller—. Et peut-être qu’Al-Qaïda pourrait offrir des informations à un pays qui prétend que les hommes les plus recherchés du monde sont, justement, les partisans d’Al-Qaïda, et non pas les Syriens.
    Cela donnera lieu, évidemment, à des situations ironiques. Alors que les Américains frappent Al-Qaïda avec des drones au Yémen et au Pakistan —avec, bien entendu, le lot habituel de victimes civiles— ils fourniront en même temps à cette organisation un soutien face à ses ennemis en Syrie. Vous pouvez parier votre dernier dollar que la cible des Américains en Syrie ne pas sera Al-Qaïda ou al-Nosra.
    Et notre Premier ministre va applaudir tout ce que font les Américains. Les attentats de Londres semblent avoir disparu de sa mémoire.
    En Irak, nous sommes allés en guerre sur la base de mensonges proférés par des faussaires et des escrocs. Aujourd’hui, c’est la guerre sur YouTube. Cela ne signifie pas que les images terribles des civils syriens gazés sont fausses. Cela veut dire que toute preuve contraire va être supprimée. Par exemple, personne ne va s’intéresser à des rumeurs persistantes à Beyrouth au sujet de trois membres du Hezbollah —qui combat aux côtés des troupes gouvernementales à Damas— qui ont apparemment été frappés par le même gaz, le même jour, dans des tunnels. Ils sont actuellement traités dans un hôpital de Beyrouth. Donc, si les forces gouvernementales syriennes ont utilisé du gaz toxique, comment se fait-il que des hommes du Hezbollah ont, eux aussi, été touchés ?
    Et puisque nous parlons de la mémoire institutionnelle, lequel de nos hommes d’État sait ce qui s’est passé la dernière fois que les Américains ont attaqué l’armée syrienne ? Je parie qu’ils ne s’en souviennent pas. Eh bien, cela s’est passé au Liban, lorsque l’aviation américaine a décidé de bombarder des missiles syriens dans la vallée de la Bekaa, le 4 décembre 1983. Je m’en souviens très bien parce que j’étais ici, au Liban. Un bombardier américain A-6 a été touché par un missile Strela syrien —de fabrication russe, naturellement—. Il s’est écrasé dans la Bekaa et le pilote, Mark Lange, a été tué, son co-pilote, Robert Goodman, a été fait prisonnier et jeté en prison à Damas. Jesse Jackson a dû se rendre en Syrie pour le récupérer un mois plus tard. Un autre avion américain —un A-7 cette fois— a également été touché par des tirs syriens, mais le pilote a réussi à s’éjecter en Méditerranée, où il a été retrouvé par un bateau de pêche libanais. Son avion a été détruit.
    Bien sûr, on nous dit que cette guerre sera de courte durée, quelques jours tout au plus. C’est ce que Obama aime croire. Mais pensez à l’Iran. Pensez au Hezbollah. Je suppose que si Obama va aller de l’avant, il devra courir… courir.

    The Guardian (Quotidien britannique, 29 août 2013)
    Mona Mahmood et Robert Booth
    L’armée de l’air syrienne envisage d’utiliser des pilotes kamikazes en représailles aux attaques des forces occidentales, affirme un officier de la défense anti-aérienne de l’armée syrienne, basé près de Damas.
    L’officier a indiqué 13 pilotes syriens ont fait le serment, cette semaine, de constituer « une équipe de martyrs pour affronter les avions américains ». Le pilote loyaliste, la trentaine, sert dans la section de la défense anti-aérienne de l’armée syrienne à 10 miles de la capitale. Il a déclaré : « Si les États-Unis et les Britanniques lancent un seul missile, nous en lancerons trois ou quatre, et si leurs avions de guerre violent notre ciel, ils devront faire face à un feu d’enfer ». « Si nous sommes incapables d’abattre leurs avions de guerre avec l’artillerie, nous avons des pilotes militaires qui sont prêts à attaquer ces avions étrangers avec leurs propres avions de combat et les détruire en l’air ».
    The Guardian est incapable de vérifier l’exactitude de cette information. Mais l’officier interrogé a été en contact avec le journal à plusieurs reprises ces 12 derniers mois, au cours desquels il a fourni des informations fiables sur les combats entre les troupes de Bachar al-Assad et les groupes rebelles. Il a affirmé : « Nous avons plus de 8 000 candidats au martyre au sein de l’armée syrienne, prêts à mener des opérations kamikazes à tout moment pour stopper les États-uniens et les Britanniques. Je suis prêt à me faire sauter contre des porte-avions US pour les empêcher d’attaquer la Syrie et son peuple ».
    Évoquant l’attaque chimique de la semaine dernière dans la banlieue de Damas, l’officier a nié l’implication des forces gouvernementales, déclarant que la nouvelles de l’utilisation de gaz toxique a provoqué un choc au sein de l’armée régulière. « Pourquoi devrions-nous utiliser des armes chimiques dans la Ghouta, alors que nos troupes étaient présentes dans la région et menaient une vaste offensive appelée le Bouclier de la capitale ? Nous avons réussi à faire 75 % du chemin, mais ensuite nous avons été choqués d’apprendre que des armes chimiques avait été tirées ».
    L’officier a assuré que le moral de l’armée syrienne est élevé. « Ils (les Occidentaux, ndlr) doivent savoir que l’Iran et le Hezbollah se battront avec nous, main dans la main. Nous avons une alliance indéfectible. Nous sommes le fer de lance de la résistance dans le monde arabe (…) L’armée syrienne est à son plus haut niveau ​​d’alerte. Nous avons pris toutes les mesures pour éviter les attaques aériennes et tous nos missiles sont prêts à être tirés. L’armée a changé la plupart de ses positions et de nombreuses casernes et brigades ont été déplacées vers d’autres sites. Nous attendons les forces US et britanniques pour attaquer des cibles spécifiques », a-t-il précisé avant d’ajouter : « Ce qui se passe aujourd’hui en Syrie est incroyable. Beaucoup de jeunes syriens se sont présentés aux postes militaires et demandent à rejoindre l’armée pour se battre pour la Syrie. Certains d’entre eux étaient des partisans de l’opposition. Nous avons enregistré plus de 4 000 volontaires ces dernières 48 heures. »

    Global Times (Quotidien chinois, 29 août 2013)
    Les forces mondiales opposées à une intervention militaire doivent s’unir et empêcher cette attaque occidentale en Syrie. Si ces frappes se produisent, les forces mondiales doivent ouvertement soutenir la résistance du gouvernement syrien. Il est nécessaire que la Russie et l’Iran envisagent de fournir une assistance militaire directe au régime du président Bachar al-Assad.
    Mettre en avant une ’indécence morale’ comme excuse justifiant la préparation d’une intervention militaire apparaît précipité et irréfléchi.
    Dans un communiqué rendu public jeudi, le ministre chinois des Affaires étrangères, Wang Yi, met par ailleurs en garde contre « toute ingérence » dans l’enquête en cours de l’Onu sur l’attaque chimique du 21 août (…) Seule une solution politique peut résoudre la crise syrienne », avait déclaré plus tôt cette semaine Wang Yi.
    La communauté internationale devrait faire preuve de patience plutôt que de se laisser mener par le bout du nez par les services de renseignement états-uniens.
    Il y a dix ans, les États-Unis et leurs alliés ont contourné l’Onu pour imposer par la force un changement de régime en Irak, sous le prétexte que ce régime détenait des armes de destruction massive. Cela ne doit pas être permis une nouvelle fois. Une intervention militaire sans mandat de l’Onu ne fera qu’aggraver la situation en Syrie.

    The Wall Sreet Journal (Quotidien US, 27 août 2013)
    Adam Entous, Nour Malas, Margaret Coker
    Le vétéran de l’intrigue diplomatique à Washington et au Proche-Orient, le chef des services de renseignement saoudiens, le prince Bandar Ben Sultan, a expliqué aux Américains qu’il ne s’attendait pas à une victoire des rebelles sur le terrain dans l’immédiat.
    Le prince Bandar a confié à son demi-frère Salman de superviser l’entraînement des rebelles syriens en Jordanie.
    Les Saoudiens ont commencé en hiver à déployer des efforts considérables pour convaincre les Américains et les puissances occidentales que le régime de Bachar Al-Assad a franchi la ligne rouge en utilisant des armes chimiques. Les services secrets saoudiens affirmaient en février que le régime a utilisé des armes chimiques en faisant parvenir des « preuves » aux Américains.
    Le roi Abdallah d’Arabie saoudite a transmis un message au président Barack Obama en avril lui disant que la crédibilité des États-Unis serait écornée si le régime syrien et son allié iranien gagnaient la bataille.
    Parallèlement à ce message, le prince Bandar et l’ambassadeur saoudien à Washington ont travaillé intensément pour convaincre la Maison-Blanche et le Sénat de la nécessité de frapper la Syrie.
    Par la suite, le prince s’est entretenu à Paris avec des responsables français et en juillet, il s’est rendu à Moscou, où il a expliqué, selon des diplomates, à Vladimir Poutine, que le royaume saoudien détient de fortes sommes d’argent qu’il va utiliser pour gagner la bataille en Syrie.
    Il y a un quart de siècle, c’est le même Bandar ben Sultan qui a armé les moudjahidines afghans contre les troupes soviétiques.
    Le week-end dernier, l’Arabie saoudite a accentué la pression sur Washington pour attaquer la Syrie en réponse aux « attaques chimiques ».
    « Vous ne pouvez pas comme président tracer une ligne et ne pas la respecter », aurait dit le message saoudien au président Obama, selon un diplomate.

    Source :  New Orient News (Liban)