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tradition - Page 107

  • Soissons (Berzy-le-Sec), vendredi 14 juillet, grande journée patriote "French Party"

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    Amis lecteurs de l'Aisne, de la région et d'ailleurs, venez nombreux. Nous serons heureux de vous retrouver sur le stand de Synthèse nationale...

    http://synthesenationale.hautetfort.com/

  • "La Monarchie pour une vraie démocratie". Partie 1 : Quand le président Macron joue à la Monarchie...

    Tandis que la grande ombre de l'abstention s'étendait sur les urnes et que le soleil inondait la France, le Groupe d'Action Royaliste faisait banquet ce dimanche 18 juin pour la dernière fois de l'année scolaire, au terme d'une longue période électorale épuisante et fort déstabilisante pour les anciens équilibres politiques, désormais obsolètes. En présence d'une cinquantaine de convives, j'ai déroulé quelques éléments de réflexion sur le thème de « la Monarchie pour une vraie démocratie », dont voici le résumé, en trois parties, dont la première ci-dessous :

    La République s'est donnée un nouveau président, à l'issue d'élections plus animées par les affaires et les juges que par les vrais débats économiques, sociaux ou tout simplement politiques : on peut le regretter, mais c'est ainsi... Il est vrai que nous vivons à l'ère de la communication, et le règne de la transparence ressemble de plus en plus à celui des juges. Sommes-nous désormais les sujets d'une République des juges qui s'imposerait au Politique et ordonnerait ses décisions et l'orientation du Pouvoir d’État ? Peut-être pas encore, mais certains en rêvent, et ce n'est pas sain pour la qualité du discours et de la discussion politiques...

    Et c'est ainsi, en définitive, que M. Macron a profité des circonstances autant que du soutien, fort peu discret, des grands médias et de l'Union européenne (en ses institutions et commensaux) qui, désormais, s'invite sans vergogne dans nos élections et débats français, décidant pour nous de ce qui est bien et de ce qui est mal. Ainsi, selon la Commission européenne, il ne pouvait y avoir que deux candidats acceptables, viables et, surtout, « eurocompatibles », MM. Fillon et Macron, ce dernier devenant son favori après les ennuis judiciaires du candidat de la Droite républicaine, et son « chouchou » quand il revendiquait haut et fort son europhilie et sa modernité. 

    Ainsi fut-il élu, presque sans peine...

    Mais il n'alla pas célébrer sa victoire à la Bastille ou à la République, lieux symboliques et habituels de cette Gauche qui se réfère à une Révolution dont les ouvriers et paysans furent pourtant les principales victimes comme l'avait bien compris le socialiste Proudhon. C'est au Louvre qu'il se rendit, dans le palais des rois, dans ce lieu d'histoire qui est la preuve la plus forte et convaincante que la France n'est pas née en 1789 !

    Hommage du vice à la vertu, diront certains d'entre nous, mais ne boudons pas notre plaisir de voir l'histoire royale française ainsi reconnue, valorisée et sans doute récupérée, peut-être sous l'influence de Stéphane Bern, soutien affirmé du couple présidentiel  : après tout, ne dit-on pas que le diable porte pierre ? 

    M. Macron connaît l'histoire de France, mais il la trafique parfois et en contredit la vérité quand il parle de la colonisation en Algérie comme d'un crime contre l'humanité. Nous le savons, nous qui sommes royalistes de la longue mémoire, et nous le contredirons, au nom de cette vérité due à la France mais aussi à nos enfants, même s'il semble avoir renoncé à ce qui paraît bien être une provocation sans lendemain (mais pas forcément sans conséquences)...

    Il connaît l'histoire de France et s'amuse aussi à lui faire nombre de clins d’œil, comme il semble aussi en faire aux royalistes ou, du moins, à ceux qui savent l'importance de l'héritage monarchique dans notre pays. Son entretien de l'été 2015 publié dans la revue Le 1 et dans lequel il évoquait l'absence de la figure du Roi comme préjudiciable à l'exercice même du pouvoir en France et dans lequel il rappelait, à raison, que le peuple français n'avait pas voulu la mort du roi en 1793, ne nous laisse pas, évidemment, indifférent.

    Mais nous sommes en République...

    (à suivre)

    http://nouvelle-chouannerie.com/index.php?option=com_content&view=article&id=1425:qla-monarchie-pour-une-vraie-democratieq-partie-1-quand-le-president-macron-joue-a-la-monarchie&catid=51:2017&Itemid=62

  • «L’avenir appartient à ceux qui ne capitulent pas»

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    Par rapport à nos ancêtres, nous nous sommes vraiment distingués par la lâcheté, la passivité fataliste et la paresse. Tout cela, cependant, peut changer rapidement.

    Un entretien avec Milos Kovic, historien, professeur qui a publié un livre sur un moment difficile où seul un chemin restait pour la Serbie et pas très prometteur – « L’unique voie : Pouvoirs de l’Entente et la défense de la Serbie en 1915 ».

    A quel point est-elle précise la théorie selon laquelle il existe des événements tragiques, d’une force exceptionnelle, qui façonnent vraiment l’identité d’une nation ? Comment cela se passe-t-il et quid si nous n’apprenons pas la leçon de ces expériences ?

    – L’éminent écrivain français Renan a écrit dans sa conférence « Qu’est-ce qu’une nation? » que les gens sont souvent liés par des souvenirs de souffrance partagée, et les Serbes ne font pas exception. Aujourd’hui, lorsque la Yougoslavie n’est plus, il n’y a aucune raison pour que Jasenovac ne soit pas ramené au centre de l’identité serbe, tout comme les Juifs l’ont fait avec Auschwitz.

    Au cours des guerres des Balkans et la Première Guerre mondiale, nous avons eu une grande victoire, mais aussi beaucoup de souffrances. Nous avons toujours été critiqués pour bâtir notre identité sur la souffrance, la défaite et, par conséquent, pour ne pas regarder vers l’avenir.

    – Lorsque les Américains vous posent une question comme celle-ci, ils devraient se souvenir du spectacle de Hollywood « 300 » sur Leonidas, qu’ils ont filmé et gagné une somme d’argent considérable. Quelle est l’éthique enseignée dans ce film? Il ne s’agit pas de célébrer seulement les défaites. Les batailles sont menées afin d’être gagnées. Personne ne veut mourir. L’éthique de la guerre exige du courage, de la sagesse et de la victoire. Et les défaites nous apprennent des leçons et elles devraient nous rendre plus sages.

    Si nous établissons une comparaison entre le comportement des Alliés pendant la Première Guerre mondiale et ce qui s’est passé dans les années quatre-vingt-dix, nous pouvons constater que dans les deux cas, les intérêts serbes ont été écrasés et trahis, mais malgré toutes les décisions préjudiciables pour nous, nous marchons toujours vers l’intégration européenne.

    – En 1914, l’Empire austro-hongrois avait un bâton dans une main, et dans un autre, il avait un sac, et ils ont offert l’intégration à la Serbie, de meilleures routes, de meilleurs soins de santé, de meilleures écoles. La seule condition était d’abandonner l’indépendance. Aujourd’hui, l’UE a le même comportement, pire encore. Le bâton est plus épais et les carottes sont plus fines. Il est intéressant de noter que, à l’heure actuelle, un grand pourcentage de Serbes sont prêts à plonger le pays dans l’UE et à renoncer à la souveraineté et à la liberté, et en 1914, cela était impensable.

    Pourquoi était-ce impensable?

    – Les réponses se trouvent en nous-mêmes. Nous sommes soumis à un traitement spécial par les grandes puissances qui ont appliqué des méthodes similaires à Hawaii, aux Philippines, au Far West, en Inde. Mais nous ne pouvons pas tout le temps jeter la faute sur quelqu’un d’autre. L’honneur serbe a été rendu célèbre par les Serbes de la Republika Srpska et l’ancienne République de Krajina (en Croatie). Regardez le malheureux Monténégro, l’ancienne Sparte serbe. Ou notre Belgrade affligée, qui agit toujours comme si c’était la capitale de la Yougoslavie. Par rapport à nos ancêtres, nous nous sommes vraiment distingués par la lâcheté, la passivité fataliste et la paresse. Tout cela, cependant, peut changer rapidement. Vladislav Petković Dis (poète serbe) se lamentait de la même manière sur les vices serbes, à la veille des grandes victoires 1912-1918. Nous n’avons besoin que de détermination, d’intelligence et de courage.

    De nos jours, beaucoup de gens croient que nos défaites de la fin du XXe siècle sont enracinées dans les victoires des guerres des Balkans et de la Première Guerre mondiale, parce qu’à cette époque, nous avions obtenu un nouvel Etat?

    – Je dirais que ce genre de débat ne concerne que les années quatre-vingt-dix. Les générations qui fuyaient la mobilisation militaire et protestaient contre leur propre pays, alors que les Serbes de l’autre côté du fleuve Drina se battaient pour la survie, maintenant ils fuient leur propre faiblesse et accusent leurs grands-pères et leurs arrière-grand-pères. Ces pères ont plongé un sabre puissant dans la pierre dure, et leurs fils, ne pouvant sortir cet épée, en accusent leurs pères. Nos grands-pères nous ont laissé un excellent Etat yougoslave. Nous, notre génération, nous n’avons pas su le conserver. Il est facile de jeter la faute sur les morts pour notre propre faiblesse. Regardons dans le miroir et répondons à la question de savoir où nous étions et ce que nous avons fait dans les années quatre-vingt-dix, lorsque la Yougoslavie a été démantelée et ce que nous faisons aujourd’hui lorsqu’ils essaient de détruire notre Serbie.

    Qu’est-ce qui est réellement arrivé aux Albanais en 1912, 1913, 1914 et après 1941?

    – On avait proposé aux Albanais musulmans, qui étaient une classe privilégiée dans l’Empire ottoman, de vivre dans un Etat yougoslave relativement bien ordonné et moderne au lieu de vivre dans l’Empire ottoman. En tant que citoyens égaux avec leurs anciens serfs. Malheureusement, la plupart d’entre eux ont refusé. L’hostilité des Albanais vis-à-vis du nouvel Etat était fondée sur des motifs religieux et de classe. C’est pourquoi, dans la guerre mondiale qui s’en suivait, la majorité a pris parti des occupants et des ennemis du peuple serbe et ont de nouveau commis un génocide contre le peuple serbe au Kosovo et en Macédoine, mais aussi contre les Macédoniens.

    Dans quelle mesure le problème a-t-il été exploré dans l’historiographie serbe? Y avait-il des punitions et des représailles dans l’armée serbe?

    – Oui il y en avait. Il y a des commandements conservés des officiers lors de la retraite en Albanie indiquant que tout vol de civils albanais serait sévèrement puni. Dans la petite histoire Resimić, le batteur, Dragisa Vasic décrit un tel cas, lorsque les soldats serbes affamés, en traversant l’Albanie, volent de la volaille dans un village albanais et, à la demande des paysans, l’officier serbe fusille ces enfants. C’était un événement historique vrai.

    Simon Sebag Montefiore dans son Jérusalem, considère les Albanais très au sérieux et note qu’ils sont devenus un groupe ethnique fort depuis le début du 19e siècle. Par quel moyen les avons-nous sous-estimés en tant que groupe et un pouvoir politique?

    – Il faut dire que Belgrade a vraiment sous-estimé le nationalisme albanais et qu’il était généralement méprisé. Nous n’avons pas été en mesure d’encourager les professionnels des études albanaises. Il y en avait, mais pas assez. Il est encore difficile de trouver quelqu’un qui s’occupera de cette question importante. Contrairement aux Albanais qui, au moins au Kosovo-Metohija, apprenaient le Serbe, nous n’apprenais pas l’Albanais. Donc, il y a eu une sous-estimation, en particulier du nationalisme albanais, et nous en avons payé le prix. Néanmoins, nous ne devons pas perdre de temps en nous accusant nous-mêmes, nous ne devons pas perdre confiance en notre propre force et nous ne devons pas oublier que l’avenir appartient à ceux qui ne capitulent pas.

    Milos Kovic 31/05/2017

    Traduction du Serbe : Svetlana MAKSOVIC

    Source:
    https://zurnalist.rs/intervju-nedelje/item/1369-bitke-se-vode-da-bi-se-pobedilo.html
    25.05.2017.

    Milos Kovic : Historien serbe, docteur en sciences historiques et professeur adjoint au département d’histoire, Faculté de philosophie de Belgrade, Serbie.
    Il est l’auteur du best-seller historiographique « Disraeli and the Eastern Question » (« Disraeli et la question de l’Est ») – Ed.
    Par Oxford University Press, 2011. 364 pp. / Revue: British Scholar:
    http://britishscholar.org/publications/2012/11/27/november-2012-disraeli-and-the-eastern-question/
    Les domaines de sa recherche sont les relations internationales (fin du 18e au début du 20e siècle), l’histoire des idées politiques (fin du 18e au début du 20e siècle).
    Il était à l’Université d’Oxford pour un développement professionnel en 2004-2005. Il a participé à des conférences internationales à Londres, Florence, Iéna, Sofia, Belgrade.

    Image : Photo d’un soldat de la Grande guerre

    https://www.polemia.com/lavenir-appartient-a-ceux-qui-ne-capitulent-pas/

  • Autonomie et Tradition

    par Johann Sparfell

    Ex: http://www.in-limine.eu

    « Il ne faut pas agir et parler comme nous l'avons appris par l'héritage de l'obéissance ». C'est ainsi qu'Héraclite introduisit sa pensée sur l'autonomie, sur l'art d'acquérir un esprit libre. Il est en effet possible et même indispensable de lier la notion d'autonomie de celle d'une éducation au travers de laquelle l'on devient soi-même, l'on s'élève. Il est bien entendu que par là nous pouvons ainsi faire référence à la nécessité d'une affirmation de l'être de l'homme et, comme d'une conséquence, de la propre personnalité de chacun en ce monde. Mais serait-ce pour autant une autorisation prêtée à l'individu d'accroître sans cesse, pense-t-il naïvement, ses prérogatives, dans une « limite » de la liberté d'autrui, afin de se soumettre toujours davantage à l'illusion de la jouissance ? Au nom d'un tel dévoiement de la notion d'autonomie, nous avons en fait appris à renier cela même qui en faisait l'élément primordial de l'existence des communautés et des hommes : la Tradition.

    Mais enfin ! Qu'est-ce donc que cette « autonomie » de pacotille dont on nous serine dans nos oreilles les louanges afin de faire de nous des consommateurs « libres » de leurs choix et de leur « vie » ? Bien sûr une illusion, parce que, plutôt que d'être sans limite, elle en a au contraire beaucoup ! Ce n'est point en ce cas une affirmation de soi, mais une affirmation d'une chose extérieure à soi : d'une norme ! Oui, et c'est en cela qu'elle n'est que pure illusion ; il nous faudrait atteindre un certain état par lequel nous nous mettrions en état de suivre un mouvement que nous « participerions » à faire perdurer. « Participer » peut-être ! Mais certainement pas initier. Et encore moins innerver, c'est-à-dire en déterminer le cours, parce que ce mouvement, ce serait nous-mêmes en acte !

    La liberté individualiste, que nous confondons aujourd'hui avec l'autonomie, se mêle inextricablement dans la soupe post-moderne avec l'adaptabilité, la flexibilité, la rentabilité, l'utilitarisme, l'esprit d'innovation techniciste et l'instinct de concurrence ; tout ce qui, en fait, permet au Capital, en tant que rapport social, de faire perdurer l'exploitation des ressorts humains au milieu de l'obsolescence de l'homme, et la domination de classe. Cette « liberté » est un statut, un état fixe et idéalisé, un ensemble de dispositions à atteindre au travers desquels les individus gagnent leur vie. La solvabilité en est par exemple un indice de relative réussite : elle ouvre la voie aux jouissances d'une consommation raréfiée. L' « autonomie » qui lui est liée est en ce cas un simulacre en ce sens qu'elle implique, une fois atteinte, de ne se battre que pour s'y maintenir, seul, et en regard des impératifs d'un procès que l'on ne maîtrise qu'à la mesure de nos renoncements.

    Elles se situent bel et bien là les limites de ce simulacre d'autonomie : à l'horizon bouchée des impératifs d'un économisme totalisant au noms desquels nous nous transformons en entités mécaniques dont le seul but devient de ne point tomber dans le néant du déclassement sociale. Le modernisme a inventé, par l'absolutisme de l'économisme, une nouvelle forme d'hétéronomie qui a su, comme ses prédécesseurs, se voiler des apparats de l'accomplissement humain et d'une certaine forme de rédemption. Or, se « mouvoir », ou plutôt bouger, par l'incitation de cette forme d'hétéronomie ne se résume dans les faits qu'à faire du sur-place en tentant de maintenir les « misérables » acquis dus à notre soumission à l'ordre accumulatif. Lorsque nous y creusons un peu plus, nous y voyons les racines du ressentiment ; d'un ressentiment que l'on ne pourrait croire issu que de ce que l'autre a pu acquérir à notre place, mais en fait provoqué par l'horreur que nous inspire l'image de la futilité d'une quête qui n'est que course vers le néant : nihilisme ! Par lui, nous nous en voulons à nous-mêmes de ne point savoir exister, signe d'une faiblesse inexcusable et d'un manque de savoir-vivre !

    Car l'autonomie, au contraire, est bien d'exister par soi-même : exister, sortir du néant, tout simplement, sans artifice, sans préjugés. L'autonomie n'est pas une fixation en un état supposé idéal malgré qu'elle implique de savoir se donner des limites, des lois, par soi-même. Elle est une dynamique, un processus jamais parfaitement accompli d'auto-détermination. Si l'hétéronomie économiste est un effort d'adaptation à un procès dans lequel il s'avère absolument nécessaire de s'intégrer pour « exister », tout en étant un rapport social de domination en sous-main, l'autonomie est une participation à un flux vital dont l'assomption invite l'être à se fonder en soi-même en tant qu'être libre de sa propre détermination : il s'agit en ce cas d'une intégration dans un tissus de relations communautaires par lesquelles l'on coopère à son propre destin et à celui de son environnement – tant humain que naturel ou artificiel.

    L'hétéronomie économiste est une fixation. L'homme échappe ainsi à son devenir, sa responsabilité, en s'enfermant dans un éternel présent, qui s'avère en réalité être un piège vers une néantisation – l'éternel présent, ou le règne de l'immédiateté, est un univers carcéral où l'horizon se résume en une fuite perpétuelle vers un futur idéalisé qui n'est en réalité qu'adhésion, au sens premier du terme. Plus rien ne fait lien dans un monde où domine une dépendance totale à des impératifs quantitatifs, ni les hommes entre eux – car tous concurrents les uns des autres – ni le passé d'avec l'avenir – car l'un et l'autre sont devenus absolument contradictoires. Se donner ses propres règles, selon la définition de l'autonomie, ce n'est nullement se laisser enfermer selon une prescription commandée par une appartenance de classe ou autres dans une actualité sans fin. C'est fort au contraire dépasser l'actualité afin de donner corps à une connivence toujours possible, toujours souhaitable, entre le passé et l'avenir : participer par conséquent au recouvrement d'un lien intime entre les deux.

    Plutôt que dans le temps, qui est une constante projection vers l'au-delà du réel, ce qui nous rend absolument dépendants du règne de la mesure temporelle, nous devrions nous inscrire dans la durée, qui est une possibilité perpétuellement donnée de pouvoir affirmer son être. Chaque être est en fait une durée singulière, un devenir qui s'étire de son origine à sa finalité, mais s'inscrivant toujours inévitablement dans une plus longue durée au sein de laquelle il devient un transmetteur, le dépositaire d'une traditio. La longue durée est une suite indéfinie d'événements, un processus global du devenir des civilisations, chacune d'elles imbriquée dans le devenir de l'humanité, et où demeurent les archaïsmes : « ce qui ne passe pas » et que l'on tient en réserve afin de dépasser sa propre condition initiale. Les durées singulières se lient les unes aux autres, transposent d'une génération à l'autre le socle sur lequel chacune participera à bâtir l'histoire à sa façon. Et pour ce faire, il est indispensable de pouvoir réellement exister ! Qu'est-ce à dire ? Que chaque homme, chaque communauté, doit pouvoir construire sur de bonnes bases ses propres règles, donc être autonome et ne plus dépendre de l'arbitraire des dogmes.

    L'existence est une élévation, l'acte de se mettre debout et d'affirmer la singularité de son être au milieu de la pluralité contradictoire de ce, et de ceux qui nous entourent. Exister, réellement, a à voir avec l'autonomie ; c'est un acte de volition qui est la condition même de la réalisation de l'autonomie. Lorsque nous nous mettons à exister « pleinement », non de façon désobligée comme aujourd'hui – l'individualisme ne nous engage plus à rien -, nous nous en tenons à une affirmation qui repose en premier lieu et qui a toute chance de pouvoir prendre son essor à partir d'un socle commun. L'existence est un passage : celui du non-être à l'être au croisement du passé et de l'avenir, où règne l'infini et la négation, l'éternel présent – mais ne s'y attardent que les aventuriers de l'esprit, s'y perdent les autres... les insensés ! -, ce qui implique de devoir y adjoindre un sens. L'existence est une dynamique en quelque sorte, dont l'élément moteur est la Tradition : le « socle » commun. Un « élément » dont la primordialité n'a d'égale que le sens qu'Elle apporte aux hommes et à leurs œuvres, un sens partagé de génération en génération par lequel le monde se voit doté d'une signification sacrée en une « durée » où se déploie l'existence, l'indéfinité des existences influant les unes sur les autres en de multiples « écosystèmes ».

    La durée dans laquelle nous nous inscrivons est une épaisseur qui est celle des interrelations par lesquelles il nous est donné de pouvoir construire nos autonomies, tant personnelles que communautaires ; en d'autres termes donc, exister, à chaque instant qu'il nous est donné de pouvoir vivre par soi-même ! A contrario du temps, linéarisé par les besoins d'une foi toute basée sur un type d'homme, que l'on peut s'imaginer telle une meurtrière à travers de laquelle l'on n'a la possibilité de n'apercevoir qu'une frange étroite de la réalité : celle d'objectif qui recule sempiternellement à chaque minute.

    La quête de l'autonomie est en nous comme un besoin vital de réaliser notre vie, d'être pleinement nous-même en accord avec le monde. C'est une dynamique qui se prolonge durant « mille vies » et nous transpose à chaque point de cette durée du non-être à la grâce d'être – dynamique symbolisée par la Croix, l'un des plus vieux symbole en ce monde. Elle est le Mythe, le mythos primordial que ne vient pas de l'homme, mais qui néanmoins perdure en l'homme et le fait être tel lorsqu'il en ressent le devoir, c'est-à-dire tant qu'il a en lui ce désir de s'affirmer pour le bien commun de ceux par qui, et quoi, il existe. Elle est en fin de compte l'expression « vitale » de la Tradition Elle-même, son souffle sacré par lequel les mondes se constituent et se succèdent, prennent sens et épaisseur.

    Mais qu'est-ce donc qu'être autonome sinon être soi-même, devenir soi-même, simplement, parmi les autres ? Être un esprit libre comme ont su le dire Héraclite, Montaigne ou Nietzsche, un « barbare » - un être « simple » - en chemin vers la maîtrise de son existence qui se réfère en toute humilité aux leçons et expériences accumulées par les générations qui l'ont précédées. C'est un accomplissement qui se réalise au nom d'une notion de Bien Commun, d'une notion secrètement portée par la Tradition et qui ne peut dépendre que d'un minimum de préjugés sur l'homme et la nature a contrario du respect de la parole donnée. Comme le disait S. Weill, la vérité est enfouie dans le silence des humbles ; la Tradition y a toujours trouvé son ultime refuge. La Tradition est un appel intemporel pour l'homme à s'extraire et s'élever par lui-même, de par ses propres forces, au-delà du magma informe de l' « indifférencié civilisateur » - j'entends par là la tendance historique à la standardisation massificatrice du processus civilisateur dont le marxisme orthodoxe et le néo-libéralisme, qui sont si proches l'un de l'autre dans les faits, en sont les portes-voix modernes -, donc des préjugés et des « héritages de l'obéissance ». Elle est une Connaissance qui engage à l'empathie, donc à l'autonomie.

    Que pourrions-nous en conclure en somme ? Que la Tradition, loin d'être une sommation à l'inertie et l'impuissance, est fort au contraire une invitation au développement indéfini de nouvelles manière de « voir » le monde et de le faire nôtre, consciemment. Elle n'est pas une vérité imposée d'une « hauteur » inatteignable mais l'invitation à la recherche constante de la vérité. La Tradition est ce qui ne passe pas, telle une clef intemporelle qui est à même de nous élever à la com-préhension, à la lucidité « raisonnable », de ce qui agit dans le monde au travers de nos êtres et constitue celui-ci à chaque instant, à chaque époque singulière. Loin de pouvoir être interprétée Elle-même telle un carcan ou une « vérité » irréfutable sur l'homme, Elle constitue ce qui au contraire peut nous apporter en tout temps la conscience du devoir de construire nos autonomies, celle de la personne comme celle de ses communautés, afin de toujours pouvoir faire surgir, in limine, la nécessité de concevoir un sens commun au milieu de ce qui n'est, en vérité, que chaos, mais chaos riche d'une multitude de possibilités de créations, mais aussi de destructions. Elle est en somme, la richesse des possibles contenue dans l'existence et qu'il nous appartient de mettre à jour à chaque instant de l'histoire, en faisant l'histoire : en composant de nouvelles harmonies, en donnant du sens à nos vies. Elle est un socle bâti par la multitude d'expériences accumulées par l'homme sur lui-même et son devenir...

    La Tradition accompagne donc la marche de l'histoire, en lui donnant l'ouverture indispensable vers l'ensemble des possibles et des révolutions ; Elle ne saurait par conséquent représenter pour l'humanité éveillée un système clos sur lui-même, une injonction théorique idéalisée dans un système religieux, « politique » ou philosophique : « La transformation de l'activité théorique en système théorique qui se veut fermé c'est le retour vers le sens le plus profond de la culture dominante. C'est l'aliénation à ce qui est déjà là, déjà créé ; c'est la négation du contenu le plus profond du projet révolutionnaire, l'élimination de l'activité réelle des hommes comme source dernière de toute signification, l'oubli de la révolution comme bouleversement radical, de l'autonomie comme principe suprême ; c'est la prétention du théoricien de prendre sur ses propres épaules la solution des problèmes de l'humanité. Une théorie achevé prétend apporter des réponses à ce qui ne peut être résolu, s'il peut l'être, que par la praxis historique. Elle ne peut donc fermer son système qu'en pré-asservissant les hommes à ses schémas, en les soumettant à ses catégories, en ignorant la création historique, lors même qu'elle la glorifie en paroles. Ce qui se passe dans l'histoire, elle ne peut l'accueillir que s'il se présente comme sa confirmation, autrement elle le combat – ce qui est la façon la plus claire d'exprimer l'intention d'arrêter l'histoire. »1

    Yohann Sparfell

    Note:

    1Cornélius Castoriadis in L'institution imaginaire de la société, éd. Du Seuil, 1975, p. 101

    http://euro-synergies.hautetfort.com/archive/2017/06/08/autonomie-et-tradition.html

  • Casapound. Carnet de voyage d’un catholique chez les fascistes romains

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    Un lecteur nous a adressé ce compte rendu de voyage que nous vous proposons ci-dessous. 
    CE QUE J’AI VU 
    Je reviens d’un séjour de cinq jours à la CasaPound, centre social et mouvement fasciste italien, occupant un immeuble depuis 2003 dans le centre de Rome, où sont accueillies des familles italiennes dans le besoin. En Italie, l’adjectif « fasciste » n’est pas infamant : c’est un courant d’opinion minoritaire mais les Italiens respectent leurs morts de la Seconde guerre mondiale et sont reconnaissants au Ventennio (la période fasciste de 1922 à la fn de la guerre) d’avoir instauré les premières lois sociales, restauré les infrastructures et les routes (comme la superbe Via dei fori imperiali, pleine de touristes, qui relie le Colisée au Capitole et au palais de Victor-Emmanuel II en longeant les forums antiques) et sauvé l’Italie des bandes communistes.
    L’une des choses les plus surprenantes ici, c’est qu’il est plus facile de se dire « fasciste » que « lepéniste » en France. La plupart des figures de la droite viennent peu ou prou des milieux fascistes tant Mussolini a laissé son empreinte sur la société italienne. À mon arrivée, Sébastien (français, responsable de l’accueil des étrangers) nous accueille à la gare de Termini. Notre chauffeur est Massimo, un père de famille d’une cinquantaine d’années, expulsé de son domicile avec sa famille. On nous explique que de jeunes militants de CasaPound se sont battus pour que ce couple et leurs enfants soient relogés.
    Certains jeunes, tout comme leurs chefs, ont même fait de la prison pour s’être opposés à cette expulsion. Il est presque minuit, nous débarquons au Carré Monti. Pour fêter notre arrivée, le barman, Pierre, un Français docteur en philosophie et ancien instituteur, nous prépare trois Spritz . Le spritz est un cocktail alcoolisé largement consommé en apéritif dans les grandes villes 1 de la Vénétie et du Frioul-Vénétie julienne, et également répandu dans toute l’Italie.
    À la fermeture du Carré, Sebastien nous propose d’aller manger un morceau au Cutty Sark, le pub historique de CasaPound, là où tout a commencé. Derrière la porte du pub sur laquelle est peint un portait du personnage Albator, se tiennent une quinzaine de jeunes du Blocco Studentesco qui ont préparé un colloque européen rassemblant des Espagnols, des Français, des Allemands et des Grecs. Le décor est chaleureux et soigné.
    Tout le monde s’empresse de nous saluer en nous demandant nos prénoms et en échangeant avec nous quelques mots de bienvenue, l’accueil est fraternel et les attitudes sont bienveillantes. Cette atmosphère contraste avec celle de nos parvis d’églises ou de certains événements politiques en France. Une charmante personne nous apporte nos plats. Vient s’attabler avec nous Alberto, qui nous explique dans un français impeccable les voyages humanitaires en Syrie et chez les Karens qu’il organise avec les jeunes de CasaPound. 
    Ce soir, nous dormons à la « Casa », le dortoir dans lequel nous déposons nos sacs s’appelle l’Ornithorynque. Ici, pas d’eau chaude pour la douche du matin afin de nous rappeler que le militant doit mépriser la vie commode (disprezza la vita comoda). Vendredi matin, nous sommes invités à une visite de Rome organisée par l’association culturelle Fons Perennis, pour l’anniversaire de sa fondation par Romulus et Remus, les topos historiques sont d’une qualité universitaire et ont été préparés par des militants de différents âges.

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