Sous le feu des critiques après son désaveu sur Florange, Arnaud Montebourg a manqué l'opportunité de devenir un "héros" pour la gauche de la gauche au moment où le gouvernement "assume" son virage social-libéral, selon des politologues.
Après une offensive tambour battant contre Lakshmi Mittal, le patron du groupe sidérurgique ArcelorMittal, dont il ne voulait plus en France, le héraut de l'anti-mondialisation lors de la primaire PS pour la présidentielle a finalement dû s'incliner.
Le Premier ministre Jean-Marc Ayrault a écarté son idée de nationaliser les hauts-fourneaux de Florange (Moselle) que veut fermer ArcelorMittal, pour un accord qualifié de "renoncement" par les syndicats.
Furieux, Arnaud Montebourg a menacé de démissionner (voir notre article) dans un premier temps avant de se raviser. "Je lui ai dit (au président de la République) que si rien n'était fait avant ce soir (samedi) pour réparer les dégâts sur cette question de nationalisation, je ne resterai pas au gouvernement", a déclaré le ministre au quotidien Libération. De fait, samedi, M. Ayrault a dit, dans un communiqué, combien était importante l'action de M. Montebourg.
"Arnaud Montebourg qui aurait dit +je démissionne+, c'eût été catastrophique pour le gouvernement et il aurait gagné dix points en termes d'image et de popularité. Il serait devenu une star, un héros pour la gauche de la gauche", souligne Gaël Sliman (BVA).
"Il a perdu sa crédibilité gouvernementale et n'est plus qu'un ministre de la parole", estime pour sa part Gérard Grunberg (Cevipol). "Le volontarisme anti-mondialisation a prouvé ses limites", ajoute-t-il.
La droite a tiré à boulets rouges sur le ministre du Redressement productif, à l'instar du président proclamé mais contesté de l'UMP, Jean-François Copé, estimant que M. Montebourg "nuit à l'image de la France".
DEUX GAUCHES "SE TOURNENT LE DOS"
Le Parti socialiste est monté en première ligne lundi pour défendre le ministre. Un des porte-parole du parti, David Assouline, a salué ainsi son "action déterminée et déterminante", évoquant son "rôle majeur dans cette bataille".
François Hollande a assuré de son côté que "tout le gouvernement était solidaire" des décisions prises concernant Florange et prévenu Mittal que "tous les moyens de droit" seraient utilisés si l'accord présenté vendredi n'était pas "appliqué et respecté".
C'est davantage pour avoir au gouvernement une caution de l'électorat populaire que représente, du moins dans l'opinion de gauche, M. Montebourg, que le chef de l'État l'a retenu, avancent les politologues.
"François Hollande ne veut pas et ne peut pas se permettre de perdre quelqu'un qui représente l'aile gauche du PS au moment où son gouvernement assume un tournant social-libéral", fait valoir M. Grunberg, en référence au pacte de compétitivité.
Pour la sénatrice PS Marie-Noëlle Lienemann, membre de l'aile gauche du PS, Florange a révélé l'affrontement de deux gauches: d'un côté le couple exécutif et de l'autre M. Montebourg, la première voulant "tourner le dos" à la seconde.
"Je ne sais pas s'il (Arnaud Montebourg) doit se sentir à l'aise dans ses baskets en ce moment", s'est demandé Olivier Besancenot (NPA), faisant remarquer qu'entre "le programme qu'il avait défendu à la primaire PS et ce qu'il fait actuellement, il y a un décalage. À lui d'en tirer les conséquences".
Arnaud Montebourg dispose encore d'un capital de sympathie du côté des syndicats, qui saluent son "courage de dire +stop+" face aux grands patrons. "Moi, je dis bravo (...) il a mouillé sa chemise", a dit Édouard Martin, délégué CFDT du site d'ArcelorMittal de Florange.
Avec AFP http://www.francepresseinfos.com/