Hitler : l’éternel retour. Le phénomène s’accélère à mesure que s’éloigne dans le temps la seconde guerre mondiale, il se passe rarement une semaine en France depuis vingt ans, sans que le totalitarisme nazi ne soit évoqué dans les médias au détour d’une émission, d’une fiction, d’un documentaire, d’un reportage, d’un entretien. Quant à la survivance de cette idéologie en Europe, concentrée dans quelques groupuscules « folkloriques » de quelques dizaines d’individus, peuplés d’indicateurs de police, d’illuminés manipulés et sans soutien dans l’opinion, elle est elle aussi grossie exagérément, mise en exergue régulièrement au travers d’enquêtes sensationnelles dans les magazines, et bien sûr dans le cinéma hollywoodien ou les téléfilms dont le service public à le secret. Le traumatisme majeur de la dernière grande guerre civile européenne, son cortège de monstruosités, de massacres et de persécutions, n’explique pas à lui seul ce pilonnage. Nous le savons, la reductio ad hitlerum visant tous les défenseurs des identités et des souverainetés nationales, des valeurs traditionnelles, reste une arme efficace de diabolisation. Elle entend rendre infréquentables et illégitimes les courants patriotiques. Une démonisation de l’adversaire politique qui est d’ailleurs le ressort de tous les totalitarismes…Stigmatisation qui touche ainsi en premier lieu les opposants au totalitarisme bruxellois, lequel n’est jamais que l’aboutissement du rêve d’une Europe supranationale… dirigée par l’Allemagne…ça ne vous rappelle rien ? Bruxellois qui entendent interdire aux Européens toute manifestation d’une fierté nationale, toute volonté de préserver leurs racines. Dénoncer les ravages de l’idéologie mondialiste, aimer son peuple, défendre l’authentique civilisation européenne, c’est de facto être suspect de crypto fascisme. Tout sursaut identitaire doit donc être frappé d’infamie, et les Européens qui entendent le rester sont invités à faire leur autocritique et à se laisser « châtrer » sans moufter…
Mort en 45, Hitler reste un épouvantail commode, mis à toutes les mauvaises sauces. Chevalier de la Légion d’honneur, officier des Arts et Lettres, le metteur en scène et propriétaire du Théâtre du rond point, qui abrita notamment la pièce crapoteuse Golgota Picnic, Jean-Michel Ribes a d’ailleurs fait sensation en invitant le chancelier allemand dans le débat sur le mariage et l’adoption pour les couples homosexuels.
Lundi 28 janvier sur RTL Soir, dans l’émission de Marc-Olivier Fogiel, le citoyen Ribes a violemment attaqué Frigide Barjot qui défendait une conception traditionnelle de la filiation. Argument massue, il a éructé que « le papa et la maman ça a donné Hitler »… Cela a aussi « donné » Jean-Michel Ribes, mais nous sommes priés d’admirer la finesse et l’intelligence du raisonnement. Pour faire bonne mesure, M. Ribes a fait un parallèle, comme le délicat Pierre Bergé avant lui, entre ce qu’il croit être le retour de l’homophobie et l’antisémitisme… ça ne mange pas de pain.
Au-delà de cet épisode consternant, qui prouve la pauvreté navrante des arguments de prosélytes du mariage gay, l’anniversaire de l’arrivée au pouvoir d’Hitler, il y a 80 ans, le 30 janvier 1933, a été utilisé à plein. Les faiseurs d’opinions ont abreuvé les foules de commentaires sentencieux établissant comme de bien entendu un parallèle entre la geste hitlérienne et l’émergence de courants « populistes » en Europe, qui seraient animés des mêmes pulsions coupables plus ou moins inavouables …
En Belgique, Jean-Pierre Jacqmin, directeur de l’info à la RTBF, a mis en place hier la 30 janvier une « journée Hitler » dont le but pédagogique était d’expliquer que la Bête est toujours tapie dans l’ombre prête à bondir et à asservir les peuples d’Europe. D’ailleurs, invité à expliquer pourquoi les représentants des partis et mouvements nationaux sont interdits d’antenne sur « sa » chaîne » il confesse que « ce cordon sanitaire a une raison d’être ». « Il répond à l’obligation que nous avons à la RTBF d’être responsables des propos qui sont tenus et qui ne peuvent pas être en contradiction avec les lois contre le racisme, la xénophobie, la discrimination, les genres (sic), etc. Et quand nous avons l’impression que ce genre de dérapage est possible, notamment avec l’extrême droite, nous jouons notre rôle d’éditeur responsable et nous ne les prenons pas en direct. »
Un « principe de précaution », si nous suivons la logique de ce monsieur, qui commanderait d’interdire purement et simplement les Mouvements patriotiques et la possibilité pour ces derniers de se présenter aux élections. Cette tentation là, est toujours présente prévient Bruno Gollnisch, et elle est étudiée, il faut le savoir, par les plus hautes instances européistes…
Bien sûr, pas de grand débat sans grand sondage et le quotidien gratuit Métro a publié ce matin celui de l’ Ifop. Les sondeurs « ont posé aux Français une question radicale, inscrite dans cette perspective historique : Croyez-vous possible qu’un mouvement politique se réclamant du nazisme arrive un jour au pouvoir dans un pays européen, comme Hitler en Allemagne en 1933 ? Le résultat interpelle : un tiers des personnes interrogées (34%) répond par l’affirmative. Qu’ils expriment du pessimisme, de l’inquiétude ou de la vigilance par rapport aux mouvements d’extrême-droite, c’est une part non négligeable qui juge que le ventre dont est sorti la Bête pourrait encore être fécond, estime Frédéric Dabi, directeur général adjoint de l’Ifop.
Se voulant plus rassurant, le spécialiste de l’extrême-droite, Jean-Yves Camus, ne cite par Bertold Brecht comme M. Dabi, mais reprend une formule de Louis-Ferdinand Céline en affirmant que « l’histoire ne repasse jamais les plats. Il y a des différences fondamentales (entre les années 30 et la situation actuelle, NDLR) ne serait-ce que parce qu’il existe aujourd’hui une législation contre le racisme et l’antisémitisme . S’il note qu’il faut s’inquiéter de la montée en puissance de partis néo-fascistes comme Jobbik en Hongrie (étiquette rejetée catégoriquement par cette formation et dont le programme ne s’apparente en rien à celui du fascisme des années trente, NDLR) ou Aube dorée en Grèce, le chercheur à l’Iris qualifie leur capacité à arriver au pouvoir de pratiquement inexistante ». Alors pourquoi tant de battage ?
Et bien parce que « La crainte que les gens expriment, c’est en réalité celle de l’arrivée au pouvoir de partis populistes et xénophobes. Et là, l’affaire est déjà jouée d’avance puisque des formations de ce type ont déjà accédé au gouvernement. Parti de la Liberté de Geert Wilders aux Pays-Bas, FPÖ autrichien du temps de Jorg Haïder, Ligue du Nord en Italie, où Silvio Berlusconi vient de susciter un tollé en rendant hommage à Mussolini… Ces mouvements auprès desquels peut-être rangé le FN ont enregistré des succès électoraux ces dernières années. De quoi faire redoubler les vigilances.»
Bref, à écouter nos spécialistes, les gens craignent le retour d’Hitler parce que des mouvements qui ne sont dans leur essence ni totalitaires, ni fascistes, ni héritiers de l’hitlérisme sont demain en position d’arriver au pouvoir…chercher l’erreur !
Dans ce concert d’avertissements solennels, laissons le mot de la fin à Benjamin Abtan, président du Mouvement antiraciste européen – European Grassroots Antiracist Movement (EGAM), ancien conseiller «Droits de l’Homme et Société Civile» de Bernard Kouchner et ancien président de l’UEJF. Dans une lettre ouverte à la chancelière Angela Merkel et publié par le Nouvel Obs, il félicite cette dernière « pour le travail d’histoire et de mémoire », mais il agite les fantasmes d’une Europe rongée par la haine vis-à-vis des minorités.
Il exige que « l’Allemagne, comme tous les pays de l’UE, (remette) au cœur de son discours européen la promotion et le développement de la démocratie, en particulier la lutte contre le racisme et l’antisémitisme. » Soit le « projet civilisationnel que porte l’Europe, fondé sur la Paix, la démocratie, l’Égalité, et le dépassement des identités particulières en une identité collective plurielle et diverse »
M. Abtan, précisait sa vision de l’Europe « plurielle et diverse », dans les colonnes du Monde au lendemain du 22 avril dernier. Avec « 17,90 %, avrtissait-il, le score du Front National au premier tour de l’élection présidentielle résonne comme un coup de tonnerre aux oreilles de tous ceux qui sont attachés aux valeurs de la démocratie, en France comme en Europe ». Il appelait les «démocrates européens à agir vigoureusement» pour que le score de Marine Le Pen soit relégué «au rayon des mauvais souvenirs anachroniques». « Avec près de 80 % de participation, l’extrême droite rassemble derrière elle le plus grand nombre de Français depuis la Collaboration, d’où sont issus les fondateurs du FN, et donne au 22 avril 2012 un relent nauséabond de 21 avril 2002 » affirmait sans crainte du ridicule ce militant. Comme disait Joseph Goebbels, en grand maître de la propagande, « plus c’est gros plus ça passe » ?
La solution pour arracher la mauvaise herbe européenne ? Notre antiraciste de choc la donne, à savoir la poursuite d’une « immigration extra-européenne (qui) a contribué à donner à notre continent son plus beau visage, celui du métissage des cultures (…). Il est grand temps que les dirigeants politiques européens démocrates s’adressent à leurs concitoyens pour leur parler de ces bouleversements, à l’instar de Bill Clinton expliquant dans les années 1990 au peuple américain qu’il n’y avait plus de majorité ethnique ou religieuse dans le pays et traçant des perspectives de vivre ensemble pour une Amérique transformée. Il leur faudra expliquer, avec pédagogie et clarté, que nous ne pouvons bénéficier de la démocratie et d’un haut niveau de protection sociale sans les apports de l’immigration. Nous avons besoin de plus d’immigration si nous ne voulons sacrifier ces deux autres éléments qui fondent l’identité européenne. »
Benjamin Abtan a au moins le mérite d’énoncer clairement l’alternative posée entre deux conceptions du devenir de la France et de l’Europe; en dernier ressort les Européens ont encore la possibilité de choisir…avant qu’il ne soit trop tard.