L’objet de l’expiation
Comme le dit Guillaume Faye, si, au début du XXe siècle, l’Empire ottoman était « l’homme malade de l’Europe », l’Europe de l’Ouest catholico-protestante est actuellement l’homme malade du monde. Le traumatisme de la Shoah, dont le mécanisme a été admirablement décrit par Gilles-William Goldnadel, a engendré une haine pathologique de toute répression étatique, assimilée systématiquement, et en général inconsciemment, à une résurgence du nazisme. Dans son livre consacré à cette question, Les Martyrocrates, Goldnadel affirme que l’Europe de l’Ouest dans son ensemble, mis à part la Grande-Bretagne résistante, a été touchée par ce qu’il appelle « le Big-Bang Shoah ».
Je me permettrais de préciser d’avantage ce concept. Ce traumatisme a eu lieu dans une partie des pays de l’Europe catholique ou protestante occupés ou soumis par l’Allemagne, où les juifs ont été, de ce fait, déportés en vue de la solution finale. C’est en fait la partie de ces pays libérés par les Anglo-Saxons qui a développé ce traumatisme. Dans la partie « libérée » par les Soviétiques, il n’y a eu aucune remise en cause. Pourquoi ? Tout simplement parce que cette culpabilisation, comme le constate M. Goldnadel, s’est opérée par la médiatisation de la Shoah par le cinéma américain, à partir des années Soixante, et que le cinéma américain n’avait pas droit de cité dans les pays du Pacte de Varsovie…
Il faut d’ailleurs lier à cette absence de culpabilisation les violences anti-immigrés (ou anti-tsiganes) en Europe, apparues peu après la chute du Mur de Berlin, et qui ont eu lieu principalement dans l’ex-bloc de l’Est, notamment l’ancienne R.D.A., alors même que les immigrés y étaient beaucoup moins nombreux qu’à l’Ouest.
La répression est donc proscrite, la virilité étatiste honnie en tant que valeur « fachiste ». Même remarque pour les jugements que font les médias de ces pays à propos des affaires internationales. Pourquoi cette mobilisation des personnalités médiatiques d’extrême gauche autour du conflit israélo-palestinien ? N’y aurait-il pas d’autres conflits nettement plus graves dans le monde, comme par exemple ce lent génocide qui dure depuis plus de vingt ans au Soudan ? Gilles-William Goldnadel a fait la sensationnelle découverte de ce qu’il appelle « la nazification et la shoatisation du débat public ». L’armée israélienne, par un étrange retournement de situation, est assimilée à l’armée hitlérienne, tout simplement parce que c’est une armée de type occidentale, régulière, organisée, disciplinée, et dotée d’un armement moderne. Quant aux palestiniens qui lancent des cailloux, les voilà héritiers spirituels des juifs du ghetto de Varsovie…
Au Soudan, ceux qui exterminent les Noirs chrétiens et animistes du Sud sont une hétéroclite coterie de milices arabo-musulmanes diverses, bandes armées anarchiques et incontrôlables, qui ne peuvent être assimilés, dans l’esprit des médias de l’Europe « Shoah-traumatisée », aux S.S. ou à la Wehrmacht… Et pourtant, les crimes qu’ils commettent sont beaucoup plus graves que ceux de Tsahal.
La Shoah a donc engendré chez les Européens de l’Ouest un gigantesque traumatisme, d’autant plus grave qu’il s’exprime sous une forme inconsciente et pathogène. La conscience du génocide en Europe ne s’est imposée qu’à partir de la fin des années Soixante, par le biais du cinéma américain (avant cela, quasiment rien : presque aucun film abordant le sujet, quelques ouvrages confidentiels, et donc une indifférence et une méconnaissance abyssale de la part du grand public, malgré la proximité chronologique). La culpabilité s’est abattue comme une chape de plomb sur la conscience collective de dizaines de millions de personnes, dans les pays d’Europe plus ou moins compromis avec le nazisme, et en premier lieu l’Allemagne, l’Italie, la France (« coupable » d’avoir eu le régime de Vichy), et les autres pays du camp occidental anciennement occupés par l’Allemagne, donc ayant fourni par voie de conséquences leur lot de « collabos », et dont les autorités ont participé, d’une façon ou d’une autre (ne serait-ce qu’en restant inactives) aux rafles antisémites. La R.D.A. et les autres pays de l’Est, ancien alliés ou satellites de l’Axe, ont échappé à cette culpabilisation opérée par le biais des médias américains, évidemment interdits de séjour dans la zone du Pacte de Varsovie et en Yougoslavie : qu’on songe à la vague de violences anti-immigrés commises par des skinheads en Allemagne après la Réunification, et dont l’essentiel a eu lieu en ex-R.D.A., pourtant trois fois et demie moins peuplée.
Cette culpabilisation a entraîné des conséquences effroyables dans la psyché des Européens. À partir de la fin des années Soixante, toutes les actions répressives de l’état ont été identifiées, consciemment ou non, à la Shoah et aux persécutions antisémites de la dernière guerre. Goldnadel dénonce « la détestation de l’État-nation », en fait le rejet systématique de toute notion de répression étatique.
Bien que des groupes, de gauche ou d’extrême gauche voués par définition à la disparition des nations, se soient servis de ce traumatisme, cela ne doit pas faire oublier LA source principale, l’élément ultime dans la conscience des peuples européens qui a permis cette altération des réflexes de survie : le christianisme.
L’expiation permise par la sécularisation
des schémas de pensée chrétiens
En apparence, le christianisme, dont ces notions de culpabilisation et d’expiation sont indissociables, est en Europe sinon mourant, du moins très malade; en réalité, on assiste à une sécularisation, toujours inconsciente, de la morale chrétienne, à tous les niveaux et même dans les couches dirigeantes, qui pourtant très souvent ne portent pas l’Église dans leur cœur. Ce paradoxe est en fait tout à fait logique. À partir du moment où on abandonne sa religion sans la remplacer par une autre, quelles valeurs morales adopter ? Les mêmes, car ce sont bien les mêmes. Ou pour dire les choses plus clairement, si les mots ont changé, la syntaxe reste. Le « devoir de repentance » n’est que de l’auto-flagellation remise au goût (médiatique) du jour. La France est particulièrement marquée par cette sécularisation inconsciente, car elle a déjà connu une première manifestation de ce type. En effet, si la France disparaît en tant qu’entité culturelle, ethnique, religieuse (et, si les élections de 2007 ne changent rien à la donne actuelle, c’est ce qui se passera dans les vingt, trente ans maximum) on pourra dire que sa disparition a été très lente, se décomposant en plusieurs étapes, mais l’origine profonde, la source des sources de cette interminable agonie est à rechercher dans quatre chiffres qui ont l’originalité de signifier, en France, en même temps une année du calendrier chrétien, une idéologie, et une révolution sanglante : 1789.
La Révolution française était effectivement une révolution chrétienne inconsciente, un retour, au corps défendant de ses initiateurs, à des principes bibliques sécularisés qui ne supportaient plus le syncrétisme de l’Église catholique.
Que voulaient les révolutionnaires ? La fin des privilèges et du cléricalisme. Bref, un christianisme intégral. Ils rejetaient les croyances tout en voulant appliquer le reste, c’est-à-dire un monde chrétien dépouillé de toutes ses références divines, réduit à sa morale et à sa philosophie. Que l’égalité (ainsi que la liberté et la fraternité, soit dit en passant) soit un des piliers essentiels de l’Évangile, nul ne peut le contester. Or, qu’est-ce que le catholicisme sous l’Ancien Régime ? Un arrangement, un syncrétisme entre le dogme chrétien et les structures politiques de l’ancien paganisme d’État romain. Cette idée de nécessaires intermédiaires entre Dieu et les simples mortels, de sages censés enseigner aux ouailles la vraie parole de Dieu, l’interpréter à leur place, ne figure nullement dans le christianisme des origines, et les protestants, issus essentiellement de pays n’ayant pas subi l’influence romaine, l’ont largement rejeté, réduisant la verticalité et l’herméneutique de leur « Église » à sa plus simple expression. Ce que ceux-ci n’ont pas réussi à faire en France lors des guerres de religions, les révolutionnaires de 1789 et leurs continuateurs l’ont mené à terme : la fin de l’existence d’une sorte de « caste » encadrant la population de manière extrêmement serrée, et ce en étroite corrélation (même si elle fut souvent conflictuelle) avec cette autre caste qu’était la noblesse, et avec le soutien de l’état. Les révolutionnaires ont rendu à Dieu ce qui était à Dieu et à César ce qui était à César.
Niant tout enracinement, tout particularisme, les révolutionnaires substituent un système politique, la République, au pays réel, et remplacent le catholicisme par une nouvelle religion d’État, une religion sans dieux, une morale sanctifiée par des gens qui se PRENNENT pour des dieux, qui veulent remodeler le monde et l’humanité à leur image. La persécution, d’abord des insurgés bretons et vendéens, qui continuaient à mettre au-dessus de tout le catholicisme, et donc forcément la royauté. Ensuite, cent cinquante ans plus tard, les héritiers de la Révolution mettront un point d’honneur à supprimer toutes les cultures non-conformes à l’idéologie officielle, en privilégiant l’extermination des langues locales, le corse, le breton, le basque (Pourquoi la langue officielle devrait être le français, et uniquement le français ?). Tout simplement parce que l’uniformisation du peuple est indispensable pour l’efficience du totalitarisme idéologique de la République « française ». Plus de libertés aux régions, c’est le premier pas vers le fédéralisme, donc l’affaiblissement des maîtres à penser parisiens qui nous gouvernent (Étant moi-même un pur produit de l’Île-de-France, je me sens particulièrement à l’aise pour dénoncer la toute-puissance divine de Paris dans les affaires de mon pays).
Enfin, au stade terminal, la caste républicaine révolutionnaire, considérant que le peuple français autochtone est décidément trop dégénéré pour devenir l’« Homme Nouveau » que 1789 voulait créer, va tenter d’inventer un nouveau peuple de toutes pièces, en organisant le métissage généralisé par le biais d’une immigration que, contrairement aux autres pays européens, nous n’avons pas subi avec plus ou moins de laxisme, mais carrément organisé.
D’où l’exaltation de tout ce qui est étranger, et la haine de tout ce qui est français : le terroir, le paysan, le prolétaire de souche européenne (héros de la gauche il y a trente ans, maintenant symbolisant le « beauf » raciste dans toute sa splendeur).
Aujourd’hui, la gauche française est l’héritière de ce christianisme de substitution, l’athéisme militant, avec ses dogmes (l’anti-libéralisme, l’anti-racisme, l’apologie du métissage), ses excommuniés (Dieudonné, Soral…), ses démons (Le Pen, Bush, Sharon, Milosevic…).
Cette caste bourgeoise, se sentant investie d’une mission divine, celle d’expliquer à la plèbe où est le bien, où est le mal (et éventuellement à mettre en prison ou à exterminer ceux qui ne veulent pas comprendre – du génocide vendéen au Français moyen d’aujourd’hui, incarcéré quand il se défend avec un peu trop de véhémence contre les multiples agressions des « jeunes ») a donc pris le pouvoir en 1789. Après quelques périodes de flux et de (relatif) reflux, elle a acquis un pouvoir de nocivité maximale en s’emparant des médias à partir de 1968 – on ne dira jamais assez combien l’accaparement du média télévisuel par la gauche, dans le même temps où la petite lucarne devenait la principale source d’information de 90 % de la population, a été l’élément primordial d’un « totalitarisme total », c’est-à-dire touchant directement le cerveau humain, un bourrage de crâne permanent, un camp de rééducation à domicile.
Il faut lui ôter ce pouvoir exorbitant de juge moral qu’elle n’aurait jamais du avoir. Il sera impossible, sans cela, d’enrayer la submersion démographique de notre territoire par des populations étrangères (à notre culture, à notre civilisation, à notre mode de vie, à toutes ces choses qui nous semblent aller de soi et qui nous ont permis de vivre ensemble en paix depuis la fin des guerres de religion). Même si elle le voulait, la caste qui s’est érigé en garante de l’ordre moral ne pourrait pas soutenir la lutte contre ce remplacement progressif de notre peuple par un autre. Elle a enclenché un mouvement qu’elle ne peut plus arrêter, tenue par cette nouvelle religion de substitution, avec ses dogmes « anti-racistes », égalitaristes, anti-exclusionnistes, qui la corsètent impitoyablement. Rien ne sauvera la Gaule et les Gaulois si ce n’est l’écrasement total du système idéologique qui est en train de nous tuer lentement.
La punition du pêché demandée par le pêcheur
Le discours sous-jacent des classes dirigeantes et d’une bonne partie du peuple français peut se résumer ainsi : la nation et le peuple français, coupables l’un comme l’autre d’avoir commis ou laissé commettre sous leurs yeux l’irréparable, c’est-à-dire la Shoah, doivent disparaître soit par dilution raciale (dilution qui n’est pas dérangeante en soi – un Noir éduqué par des Français de souche ou d’origine européenne se comportera en général comme les autres – mais en ce que les métissages raciaux de masse s’accompagnent évidemment toujours de l’altération culturelle du groupe le plus faible), soit par dilution dans une Union européenne qui rejette tout ce qui pourrait faire sa raison d’être, c’est-à-dire son existence en tant qu’entité géo-civilisationnelle cohérente se constituant en force politique unifiée, et qui n’est par-là même qu’un avatar du mondialisme.
Dans les années Trente, les nazis prônaient la pureté de la race; dans les années 2000, on prône son impureté : être métissé, c’est mieux que de ne pas l’être. Associé à la volonté de dissolution dans un état européen, ce processus expiatoire a comme but ultime l’autodestruction.
André Waroch http://www.europemaxima.com