Le gouvernement met en place une série de mesures visant à dissuader les particuliers d’installer des panneaux solaires chez eux. Une alternative pourtant séduisante en cette période de crise.
S’éclairer grâce à l’électricité produite par un panneau photovoltaïque personnel coûtera bientôt plus cher que se connecter au réseau traditionnel. C’est ce que révèle un projet de décret sur l’autoconsommation énergétique – autrement dit sur la production d’énergie par une entité pour elle-même – rendu public par le gouvernement espagnol le 18 juillet dernier.
Ce décret met en avant une série de mesures visant à décourager les particuliers et les entreprises de produire leur propre électricité grâce à l’installation de panneaux photovoltaïques ou de mini-éoliennes. Le gouvernement annonce, entre autres, la mise en place d’un “péage” pour les propriétaires de ce type d’installation. Un péage particulièrement dissuasif puisqu’il augmentera la note d’électricité de 27% par rapport à une connexion classique au réseau.
Cette mesure ayant, par ailleurs, un effet rétroactif, les 50.000 familles qui ont déjà investi dans un tel équipement auront douze mois pour s’enregistrer auprès du Ministère de l’Industrie et s’acquitter de la taxe. Pour ces gens-là, les rêves d’indépendance énergétique s’écroulent mais le remboursement des emprunts reste.
Pression des fournisseurs d’énergie
La crainte des grandes entreprises de distribution d’électricité de voir leurs revenus chuter aura donc poussé le Partido Popular (le droite conservatrice au pouvoir) à instaurer des mesures afin de freiner l’expansion de l’autoconsommation. En effet, même si les producteurs particuliers n’avaient pas la possibilité de vendre ou de stocker leur surplus d’électricité comme cela se fait dans d’autres pays (on appelle cela l’autoconsommation instantanée).
Même si les aides au photovoltaïque ont été supprimées depuis longtemps, l’autoconsommation remportait un certain succès. Grâce au développement technologique, le prix d’une installation a baissé de 80% au cours des cinq dernières années alors que, parallèlement, le prix de l’électricité n’a cessé d’augmenter. Avec la crise, les énergies vertes devenaient une alternative encore plus intéressante.
Du côté du Ministère de l’Industrie, on justifie le décret en rappelant que, si certains citoyens consomment moins d’électricité publique, les coûts d’entretien du réseau, eux, ne diminuent pas et qu’il est normal de compenser le manque à gagner des fournisseurs d’énergie. C’est d’ailleurs en concertation avec ces derniers que le montant du péage a été décidé.
30 millions d’euros d’amende
Selon les calculs de l’Association pour l’épargne et l’efficacité énergétique, il faudra désormais 17 ans pour amortir une installation contre 5,7 ans avant la réforme. Le secteur du photovoltaïque s’inquiète également pour son avenir, lui qui emploie aujourd’hui 7.000 travailleurs alors qu’il en employait 40.000 en 2008. D’autres secteurs aussi se plaignent, comme ceux de l’hôtellerie et de la viande qui économisaient entre 20% et 30% sur leur consommation d’électricité après s’être dotés de panneaux solaires et d’éoliennes pour faire fonctionner leurs chambres froides. Et puis il y a bien sûr l’impact environnemental, dénoncé par de nombreuses associations écologiques.
Quant à la tentation de l’illégalité, elle pourrait s’avérer fatale puisque les propriétaires d’installations pirates risquent une amende allant de 6 à 30 millions d’euros! Les inspecteurs du ministère auront d’ailleurs l’autorisation d’entrer chez les gens sans ordonnance judiciaire pour vérifier si leur connexion est légale ou illégale.