Suite de l'entretien avec le père Jan Sikorski, aumônier de Solidarnosc, qui donne des conseils à la résistance française.
En France, un formidable mouvement d’opposition se structure et est même décrit par certains analystes comme un « anti-mai 68 ». L’actuel gouvernement réagit par le mépris en falsifiant par exemple le nombre de manifestants, en interdisant dans la rue le port de vêtements au logo de LMPT, en déployant une répression policière contre les manifestants, souvent sur la base de rapports de police mensongers, avec la complicité des grands médias. Comment combattre le mensonge, le mépris et la répression ?
La situation en France me fait penser à notre système totalitaire qui était le seul à détenir la vérité. Et il est vrai que lorsqu’une majorité s’oppose, il est difficile de la contredire… Un humoriste polonais chantait une chanson qui disait « Fais-ce que tu dois faire et va ton chemin, il y a plus d’une paranoïa à subir dans la vie »… puis, prenant l’exemple de Christophe Colomb, Noé ou Nobel il nous invitait à continuer le chemin… Il y a un proverbe polonais qui dit encore : « le chien aboie, mais la caravane va plus loin ». Il faut faire comme cela : ne pas se laisser provoquer et continuer ce qui a commencé en France. Et ce Bien, il faut, avec beaucoup de patience et de détermination, l’opposer à tout ce qui se passe. Ne pas se laisser provoquer afin que le feu n’éteigne pas le feu ! Le feu, on l’éteint avec de l’eau, son élément opposé. La haine, il faut l’éteindre avec la fidélité à ses convictions, la persévérance… C’est ça qui est primordial. La patience, la persévérance, mais on change d’abord ce qu’on peut changer. Il faut se souvenir que la vérité libère. On peut perdre une bataille à court terme, mais à long terme il faut garder l’espoir qu’on va gagner.
Quelles doivent être les qualités et les valeurs d’un résistant et jusqu’où est-il possible d’aller ?
Il faut vaincre le Mal par le Bien, comme disait le P. Popieluszko. Il ne faut pas adopter la technique de l’adversaire qui est parfois plus fort et immoral. Il ne faut pas utiliser les mêmes armes que l’adversaire. A vouloir se battre contre un monstre, on peut devenir soi-même un monstre. Il ne faut pas accepter cela. Il faut s’appuyer sur les valeurs de la Vérité, profondément chrétiennes et ne pas se laisser dévier de ce chemin par les autres.
Comment faire pour que cette résistance ne sombre pas dans l’activisme ?
C’est un grand danger. Chaque mouvement quasi-révolutionnaire libère souvent une énergie d’action débordante chez des gens qui n’ont pas forcément ces principes-là. Il faut donc s’en tenir à ces principes fondamentaux qui sont enracinés dans le christianisme : la Vérité, le Bien, la Beauté… Tous ces principes fondamentaux doivent exister et être très fermes, même si à un certain moment on perd. Ce n’est pas grave. On peut perdre une bataille, mais on ne perdra jamais la guerre si on s’en tient à ces principes. Encore une fois, la fidélité à ces principes. Il faut être très vigilant.
Est-il possible moralement d’accepter une loi injuste qui, par exemple, prive des enfants d’un père ou d’une mère, quand elle est votée démocratiquement ?
Le christianisme a établi très clairement les bases du droit et en premier lieu il pose le droit naturel, le droit de Dieu, naturel et positif. Ce droit doit émerger de l’observation du droit naturel et du droit positif que Dieu nous a donné : le Décalogue. Ce droit oblige « semper et pro semper ». Dans n’importe quel cas, on ne peut y déroger. Le droit humain doit seulement veiller à ce que le droit naturel et le droit de Dieu soient gardés. Le droit peut être juste si et seulement si il s’enracine dans le droit naturel et respecte le Décalogue. Il ne peut pas y avoir de compromis en ce domaine ! Quand on voit ce qui ce passe en France où l’on remet en question le droit naturel, on ne peut jamais être d’accord. Il faut l’affirmer très clairement. Il y a certains mouvements dans l’Eglise qui visent à adoucir le droit et obéir à l’esprit du temps, mais comme on a pu le dire, « si l’Eglise épouse l’esprit du temps, elle deviendra veuve très vite ! » Encore une fois : fidélité, fidélité, il ne faut pas céder d’un pouce ! Au nom du droit naturel et du droit positif. Ce qui est écrit dans l’Evangile, le Décalogue, ça ne se discute pas.
Quels conseils et messages d’encouragement pourriez-vous donner à tous les français qui s’opposent à cette loi injuste ?
Tout d’abord, j’aimerais féliciter tous les Français, pas seulement de la part des Polonais, mais au nom de toute l’Europe, pour ce qu’ils ont fait ces derniers temps parce qu’ils ont prouvé qu’ils pensaient autrement que ceux qui les gouvernent, inspirés par on ne sait trop qui… La situation française ressemble beaucoup à celle de la Pologne quand Jean-Paul II est venu. Tout à coup les Polonais se sont rendu compte qu’ils avaient une force énorme. Ils ont pris leur élan pour accroître cette force. Il me semble que les Français ont montré la grandeur des gens qui pensent sainement. Il faut tenir, continuer les marches, les manifestations pour alimenter ce mouvement. Aucun compromis avec le Mal, aucune reculade, pas de discussion inutile à ce sujet ! Il faut dire Non de toutes ses forces. Il me semble qu’il y a un proverbe français qui dit « la Patience obtient tout » ! Il faut donc que les Français continuent ce qu’ils ont commencé. Il ne faut pas perdre la ferveur et la force.
Vous êtes le sel et la lumière et le sel doit garder sa saveur et sa force. Il faut être fidèle et avoir un but bien défini qui ne justifie jamais les moyens. Aucun compromis avec le Mal. C’est le feu qui consume le Mal. Toutes ces actions qui ont commencé doivent se poursuivre sans relâche et sans succomber à la fatigue. Mais il faut s’appuyer bien sûr sur la Foi et la prière qui vont détruire tous les obstacles.