Emmanuel Macron était hier en compagnie de quatre ministres en déplacement au centre d’accueil pour immigrés clandestins (migrants) de Croisilles (Pas-de-Calais) puis à Calais, à la rencontre des habitants, des policiers pour délivrer un message de fermeté et en même temps d’humanité. Une visite qui ne doit rien au hasard, les conseillers de M. Macron lisant comme tout le monde les sondages. Nous rapportions ainsi les résultats de la dernière enquête de l’Ifop qui indique que «72 % des Français – dont 62 % de l’électorat d’Emmanuel Macron – sont tout à fait d’accord avec l’idée que l’immigration est un processus inquiétant, qui cause des problèmes de coexistence entre des cultures très différentes et menace à terme (leur) mode de vie (…). » Au registre fermeté appartient la dénonciation par le chef de l’Etat des ONG coupables de mensonges, qui encouragent les clandestins à rester sur notre territoire. Mais aussi son soutien à l’énième loi en chantier sur la réforme de l’immigration qui prévoit notamment une extension de la durée de détention, des reconduites plus systématiques à la frontière pour trier le bon grain de l’ivraie entre ceux qui peuvent prétendre à l’asile et les autres – autres qui comme le notait Marine hier, ne sont pas dans les centres de rétention mais ce se sont évanouis dans la nature. Au registre humanité, Emmanuel Macron a appelé les forces de l’ordre sur le terrain à être exemplaires dans leur rapport avec les immigrés en situation irrégulière – ce qui se conçoit parfaitement, même si les comportements violents et délictueux de nombreux clandestins n’ont pas été évoqués par lui – et a souligné que la France devra rester fidèle à sa tradition d’accueil. A cette aune, 267 000 titres de séjour ont été distribués à des immigrés en 2017 (+13,7% en un an).
Bien évidemment constate Bruno Gollnisch, la loi en gestation ne propose pas d’en finir avec le principe même de l’immigration de peuplement dans un pays comme le notre qui compte huit millions de pauvres, de faire cesser le regroupement familial, de couper plus largement les différentes pompes aspirantes de l’immigration, dite légale ou illégale, de réformer notre code de la nationalité.Toutes choses qui démonteraient la sincérité de la démarche d’Emmanuel Macron et le fait qu’il ait pris conscience de l’ampleur du problème qui ne se résume pas en France comme en Allemagne à l’antisémitisme réel ou supposé des populations que nous accueillons . Les foudres de Jupiter ne font d’ailleurs pas peur à grand monde et se révèlent même singulièrement inefficaces à une petite poignée de kilomètres de la cour de l’Elysée. Les médias relataient ces dernières heures la dégradation de la sécurité sur les lignes nord du métro parisien traversant les quartiers multiculturels de la capitale. « Station Marcadet-Poissonnier, ligne 4, ou station Marx Dormoy, ligne 12, les fumeurs de crack sont omniprésents. Dans certaines stations de métro , dealers et toxicomanes côtoient chaque jour les usagers. Quelques conducteurs ont du coup décidé de ne plus s’arrêter à certaines stations… »
Le macronisme se veut aussi en marche pour une meilleure justice fiscale et là aussi il y aurait beaucoup à dire. Dans son éditorial paru dans Les échos , Etienne Lefebvre s’arrête sur la suppression prévue à l’horizon 2020 de la taxe d’habitation qui « suscite déjà une poussée de fièvre au sein du gouvernement ». « L’étape consistant à exonérer les 20 % de foyers fiscaux qui la paieront encore à cette échéance représente plus de 8 milliards d’euros, et nul ne sait comment elle sera financée. L’enjeu n’est pas mince : Emmanuel Macron s’est engagé à diminuer la pression fiscale d’une vingtaine de milliards d’euros sur le quinquennat, et ces 8 milliards ne figurent pas dans le total (…). Le rapport mis à la disposition du gouvernement visant à remettre à plat la fiscalité locale (…) n’est pas éclairant sur les moyens de financer la suppression totale de la taxe d’habitation. Les scénarios avancés visent avant tout à garantir les ressources des collectivités locales - hausse des dotations de l’Etat, transferts de CSG, de TVA ou d’impôts locaux… - mais il manque toujours 8 milliards à l’arrivée. Et on ne voit pas en quoi la fiscalité locale serait profondément réformée, comme revendiqué par l’Elysée, dans ce jeu de bonneteau. »
Irréfléchies également les autres volets fiscaux de la politique gouvernementale? Le Monde a relayé le rapport de l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE) , qui explique que «Les mesures nouvelles pour les ménages [seront] en 2018 largement au bénéfice des 2 % de ménages du haut de la distribution des revenus, détenant l’essentiel du capital mobilier. Pour les ménages du bas de la distribution, les revalorisations en fin d’année des minima sociaux ne compensent pas les hausses de la fiscalité indirecte (fiscalité écologique et tabac). Cette année, les 5 % de Français les plus modestes devraient ainsi voir leur niveau de vie reculer de 0,6 % en moyenne, soit 60 euros par ménage, tandis que les 5 % les plus aisés verront le leur augmenter de 1,6 % (1 730 euros par ménage)(…). Mathieu Plane, économiste à l’OFCE indique qu’ à eux seuls, les 5 % de ménages les plus aisés capteraient 42 % des gains. Il n’y a pas que les riches qui gagnent, mais ce sont eux qui gagnent le plus , résume M. Plane. Quant aux classes moyennes, les mesures de l’exécutif devraient peu influer sur leur niveau de vie : l’abattement de 30 % de la taxe d’habitation et l’élargissement du crédit d’impôt pour les emplois à domicile voté par la précédente majorité compenseront les hausses de fiscalité écologique et sur le tabac ainsi que les effets de la hausse de la CSG pour les retraités. »
«Reste une interrogation : l’étude ne tient pas compte des coupes dans la dépense publique aux effets non directement quantifiables pour les Français. A fin 2019, quelque 8 milliards d’euros de mesures ne sont pas encore financés. Ils le seront vraisemblablement par une réduction de la dépense publique, qui amputera le pouvoir d’achat des ménages, notamment des moins aisés (dépenses des collectivités locales, rémunération des fonctionnaires, économies sur le logement…), avance Mathieu Plane. »
Dans son livre Voir Macron – que nous n’avons pas (encore) lu – Michel Drac évoque les différents scénarios socio-économiques et géopolitiques qui pourraient prévaloir d’ici 2022, lesquels éclairent aussi en partie les mesures fiscales décidées actuellement par l’équipe Macron. Il rappelle que l’élection de l’ex banquier, soutenue et voulue par l’ensemble des différents lobbies antinationaux, a pour enjeu principal « l’ajustement de la société française aux exigences de la mondialisation telles qu’elles vont encore se durcir dans les années qui viennent, dans le cadre de la redéfinition d’une construction européenne qui en l’état est une impasse.» Constat assez général, chez les anti comme chez les pro bruxellois, comme le soulignait notamment Christophe Bouillaud, spécialiste de la vie politique européenne que nous citions hier sur notre blogue.
M. Drac constate que la France « ne peut pas être à l’intérieur du libre-échange mondialisé avec une économie qui dégrade structurellement sa compétitivité du fait entre autres choses du vieillissement de sa population. Dans l’esprit technocratique de Macron et des gens qui travaillent avec lui cela veut dire qu’il va falloir raboter un sacré coup le pouvoir d’achat des classes moyennes tout simplement parce qu’il n’y a plus rien à prendre aux classes populaires. Ce sont les enjeux réels, de fond du quinquennat Macron, toutes les autres questions y ramènent, y compris des questions importantes comme la question migratoire mais qui sera finalement pensée en fonction des enjeux géopolitiques et socio-économiques. »
Quelles seront les marges de manœuvres de ce gouvernement arc-bouté et inféodé à l’idéologie bruxelloise alors que le partenaire allemand ne parvient toujours pas à former une coalition gouvernement et surtout en cas d’explosion de la zone euro ? Une hypothèse possible « si les législatives italiennes se passent mal pour les européistes dans quelques mois », en cas de succès du Mouvement cinq étoiles. Une victoire des populistes anti euro avance Michel Drac qui pourrait permettre paradoxalement une refondation sur des bases saines de l’idée d’Europe, l’émergence d’une véritable Europe des nations et des coopérations libres, rejetant dans les oubliettes le constructivisme technocratique que nous subissons actuellement. Dans cette configuration, à l’aune des nuages qui s’amoncellent à l’horizon – « un choc majeur externe: krach économique, explosion de la zone euro, voire une guerre » sont des hypothèses rationnellement envisageables- « le quinquennat Macron à moins d’une chance sur deux de ne pas être un long fleuve tranquille vers la mort douce », l’euthanasie de la nation française. Le devoir de lucidité nous impose en effet, d’anticiper, de nous préparer à tous les cas de figure.
https://gollnisch.com/2018/01/17/de-quoi-quinquennat-macron-nom/