Sur son blogue hébergé par Le Figaro, Ivan Rioufol doute comme beaucoup de la sincérité du Grand débat cornaqué par Emmanuel Macron : « N’y-a-t-il pas danger à laisser le peuple s’exprimer librement ?, interrogeait la journaliste Audrey Crespo-Mara, (le 7 janvier) sur Europe 1, en recevant Chantal Jouanno, avant que la présidente de la Commission nationale du débat public (CNDP) ne démissionne le lendemain de son rôle d’organisatrice. De fait, le pouvoir semble redouter les effets d’une libération des opinions, actuellement entravées par la pensée conforme et le politiquement correct. (Le 8 janvier) le porte-parole du gouvernement, Benjamin Griveaux, a rappelé l’exigence d’un encadrement, en excluant par exemple la remise en cause du mariage homosexuel (revendication prioritaire qui ressort de la consultation en ligne lancée par le Conseil économique, social et environnemental), mais aussi l’immigration ou la PMA pour toutes. Ce carcan idéologique ne peut qu’être rejeté par des Gilets jaunes, qui remettent justement en cause le jacobinisme, le pouvoir vertical et le fait du prince. »
L’instauration de la PMA (Procréation médicalement assistée) pour toutes était une promesse de campagne du candidat Macron, qui devrait être votée cet été ou à l’automne. En septembre dernier, la très grande majorité de la quarantaine de membres du Comité consultatif national d’éthique (CCNE) a donné un avis favorable à l’extension de la PMA aux couples de femmes et aux femmes seules « pour pallier une souffrance induite par une infécondité résultant d’orientations personnelles». Deux membres du CCNE y étaient cependant opposés arguant des « conséquences pour l’enfant d’une institutionnalisation de l’absence de père, donc de l’absence de l’altérité masculin-féminin dans la diversité de sa construction psychique».
Cette question de la PMA n’est pas anodine si sa généralisation a pour effet demain d’accentuer encore un peu plus la déconstruction du modèle familial traditionnel, sur lequel s’est largement bâtie notre civilisation, destruction d’un pilier essentiel que les sociétés occidentales payent déjà aux prix fort. Nous le rappelions sur ce blogue, 73% des adhérents du Front National étaient opposés à l’extension de la PMA, selon le résultat du questionnaire qui leur avait été envoyé dans le cadre du XVIe congrès du FN. Nicolas Bay, le co-président du groupe ENL au parlement européen soulignait que «Si demain on accepte la PMA, dans la foulée, au nom de l’égalité des droits on va nous expliquer que ce qu’on donne à des couples de femmes, il faut le donner aux hommes et demain on aura la GPA. » Et Marie-Christine Arnautu d’ajouter que «si la France tarde, la Cour européenne des Droits de l’Homme l’y forcera en vertu du principe de non-discrimination. » Bruno Gollnisch a maint fois rappelé pareillement que «l’enfant n’est pas objet de droits, il en est le sujet. L’enfant a droit à un père et une mère. Lui refuser cette double et fondamentale référence pour la satisfaction de personnes dont le mode de vie, librement choisi, exclut la procréation, serait en quelque sorte lui imposer une double peine. Ce serait une grave dérive de notre civilisation.»
Dérive qui n’a pas l’assentiment d’Agnés Thill, député LREM de l’Oise, elle qui en novembre dernier, dénonçait l’existence d’un « lobby LGBT à l’Assemblée nationale. » Elle a récidivé hier dans son refus de la PMA, constate Le Monde, par une lettre adressée aux élus LREM en « (critiquant) le rapport parlementaire, présenté mardi, qui recommande la procréation médicalement assistée pour toutes.» Pour sa faire entendre de ses collègues, Mme Thill a choisi des exemples aptes à les interpeller. Du moins devait elle le penser. Elle estime notamment que l’extension de la PMA à toutes « permet la multiplication des parents , et que le mot parent n’a alors plus aucun sens . Il en découle politiquement, que cette absence de sens de genre dans le mot “parent” favorise l’éclosion d’écoles coraniques et le départ de nos élèves vers celles-ci.»
« Nos amis musulmans, que nous savons opposés à cet éloignement progressif des concepts de père-mère, homme-femme (…) ne vont point dans la rue, ni dans les urnes, pour exprimer leur conception, avance-t-elle. Mais ils vivent en créant un monde parallèle dans la République, où les choses sont comme ils veulent (…). Il n’y a pas chez nos amis musulmans de parent 1 et de parent 2, ajoute Mme Thill, qui cite dans sa lettre, parmi les experts qui se sont prononcés sur l’extension de la PMA, des juristes , des scientifiques , des associations mais aussi des francs-maçons». Bigre ! Elle pourra toujours plaider pour sa défense qu’Alain Minc himself explique dans Le Point que le Système n’existe pas, que l’influence des Soros, Rothschild, Bilderberg sont des fantasmes de complotistes bas de plafond, mais que les Francs-maçons eux, sont une force enfouie toujours puissante , bref que « les francs-maçons, ce n’est pas un fantasme. C’est une réalité, y compris dans le monde économique. »
Pour le reste de ses propos, Mme Thill aura du mal à trouver des oreilles compatissantes à gauche, chez les libéraux progressistes et chez les lâches de droite mais qui n’en pensent pas moins. Porte-parole du groupe LRM, Marie Lebec «dénonce une lettre caricaturale, comme Agnès Thill peut l’être ». « Les gens ont besoin de mettre leurs convictions sur la table. Ça va être un point de crispation au sein du groupe. Pour peu que ça arrive dans un moment de tensions… » Le socialo-macroniste et très immigrationniste Aurélien Taché a de nouveau exigé la démission de Mme Thill exigeant qu’elle soit exclue du groupe LREM « sans plus attendre » : « Stop. Homophobie, islamophobie (…) », écrit-il sur Twitter. Sa collègue Laurence Vanceunebrock-Mialon, millitante LGBT assumée a crié elle, aussi au blasphème : « Marre qu’une députée LRM puisse prononcer des propos homophobes et islamophobes aussi librement… Le courrier reçu par mes collègues et moi-même est un tapis de sottises qui stigmatise inutilement deux minorités. En France, il n’y a pas de parallèle à la République. »
Mme Vanceunebrock-Mialon n’est pas très informée ou confond son vœu pieu et la France telle qu’elle dérive, ce qui n’est pas plus rassurant. En France, oui, hélas, une contre-société s’est installée dans de très nombreux quartiers pluriels, vit en parallèle à la République, est nourrie par une immigration massive, développe des revendications ethnico-religieuses, communautaristes. Mme Thill craint à l’évidence que soit atteint le point de non retour, estime que l’adoption de la PMA comporte un risque supplémentaire de fracture, voire même de « partition » avec les populations issues de l’immigration musulmane comme le disait François Hollande. Pour autant, Agnès Thill qui à notre connaissance n’est pas musulmane, oublie curieusement de citer tous les Français non mahométans, chrétiens ou non, qui comme elle, sont également opposés à la PMA. Et ils sont, en terme non pas statistique mais purement comptable, plus nombreux que les musulmans vivant en France. Oui, ils sont même de plus en plus nombreux ceux qui refusent de se soumettre aux propagandistes du sens de l’histoire, des sociétés liquides sans frontières, sans repères, sans identités; tous ceux qui ne se cachent pas non plus derrière le risque islamiste pour dénoncer les mots d’ordre frelatés de la pseudo modernité, le militantisme sociétal des lobbies qui ont (aussi) contribué à l’élection de M Macron.