Interrogée sur LCI, ce dimanche midi, Mme Belloubet a eu un lapsus très révélateur : « Je parle à mes procureurs… pardon, aux procureurs. » Elle évoquait l’indépendance du parquet…
Pour rappel, Mme Belloubet utilise couramment ce terme « mes procureurs », cas unique pour un garde des Sceaux, et elle s’est reprise en la circonstance, vu la question posée…
Simple lapsus ? Jugez plutôt le reste de l’entretien.
– Sur Balkany : « Il serait malvenu de changer de position quant à la remise en liberté du maire de Levallois. » Un garde des Sceaux qui donne son avis sur une affaire jugée et pour laquelle l’intéressé va faire appel. Qui plus est sur un dossier éminemment politique. Vous voyez les juges statuer en toute quiétude, après cela ? Rendre une décision contraire ?
– Sur Richard Ferrand, dont il faut rappeler que les juges ont relancé le dossier après que le parquet de Brest l’avait enterré il y a deux ans : « Il est mis en examen, donc pas coupable définitivement, il n’a pas à démissionner. Un député, ce n’est pas comme un ministre. » Peu importe, donc, que les députés soient probes ou pas, leur implication judiciaire n’est pas de nature à nuire à leur image, donc à leur fonction… Allez comprendre ! En tout cas, chacun pourra apprécier cette réflexion au regard de l’assainissement de la vie politique, auquel le « nouveau monde » devait aboutir. Rappelons que, sur ce dossier, c’est Macron qui a directement pris position pour Richard Ferrand : que faudrait-il faire de plus si on voulait intimider les juges ? Mme Belloubet a juré ses grands dieux qu’il n’y a pas de justiciable privilégié.
– Sur son oubli de mentionner une maison et deux appartements lors de sa déclaration de patrimoine : « C’est une omission, ce n’est pas volontaire et, d’ailleurs, la Haute Autorité a dit qu’il n’y avait rien de douteux. » Évidemment, la Haute Autorité est totalement indépendante, elle aussi, et cette décision en atteste formellement.
– Au sujet du procès Fillon, qui sera audiencé juste avant les élections municipales, le ministre a affirmé qu’il fallait y voir une simple coïncidence de calendrier, rien de plus ! Comme le déclenchement des affaires Fillon et Marine Le Pen, en février 2017, devaient l’être aussi… Au vu de ce qui précède, si j’étais à la place de M. et Mme Fillon, je m’inquiéterais sérieusement…
En réalité, jamais la Justice n’a été à ce point aux ordres, et les succès électoraux de Macron ne reposent que sur une instrumentalisation de la Justice contre l’opposition. Voila trois ans que Macron est apparu sur l’avant-scène du pays, l’actualité politique se résume, depuis, à une litanie d’affaires judiciaires, poussées à fond et surmédiatisées lorsqu’il s’agit d’opposants, absoutes ou euphémisées quand il s’agit des proches du pouvoir…
Olivier Piacentini pour bvoltaire.fr