Communiqué de la Fondation pour l’Ecole :
La Fondation pour l’école était une nouvelle fois présente lors de la deuxième visioconférence organisée le 27 novembre par Monsieur Richard Senghor, Conseiller spécial de Monsieur Jean-Michel BLANQUER, pour répondre aux questions relatives au projet de loi confortant les principes républicains (anciennement dénommé projet de loi « séparatisme »).
L’Instruction en famille (IEF)
Concernant l’IEF, le ministère de l’éducation n’a malheureusement pas souhaité produire de chiffres pour justifier l’utilité de sa suppression. Le Ministère a de nouveau renvoyé à l’étude d’impact qui n’est toujours pas connue à ce jour et qui, en amont, n’a donné lieu à aucun échange avec les associations de défense de l’IEF.
Ces dernières et leurs partenaires restent donc légitimement persuadés que l’IEF reste un bouc-émissaire et que son interdiction de principe porterait gravement atteinte à la liberté d’enseignement, constitutionnellement protégée, sans pour autant régler la question de la dérive radicale de certaines familles.
Les cours d’enseignement à distance et par correspondance
Alors que les cours d’enseignement à distance (ou par correspondance) sont bien assimilés à des établissements d’enseignement et déclarés comme tels, la Fondation pour l’école déplore qu’ils ne soient considérés que comme de simples supports pédagogiques pour l’IEF.
Si le Ministère considère qu’ils pourront conserver leur activité au profit des seuls enfants scolarisés en famille pour des raisons de santé et de handicap, c’est en fait tout le modèle économique de ces cours qui serait remis en cause par l’interdiction de principe de l’IEF.
Ces cours ont pourtant acquis une très solide expertise en matière de scolarisation à distance, sur laquelle il serait possible de s’appuyer pour favoriser l’éclosion d’acteurs français majeurs en matière de homeschooling.
Les écoles indépendantes
La Fondation pour l’école a pu obtenir confirmation que les fermetures administratives des établissements hors contrat pourraient faire l’objet d’un recours devant la juridiction administrative, dans le cadre de la procédure d’urgence du « référé liberté », ce qui devrait permettre la réouverture rapide des écoles fermées de manière abusive.
Répondant à l’interrogation de la Fondation pour l’école sur la nécessaire prise en compte d’enfants qui n’auraient connu que l’IEF et seraient scolarisés du jour au lendemain dans un collège ou lycée qu’ils n’auront souvent pas pu choisir, le Ministère a indiqué que des mesures transitoires seraient prévues pour ces élèves.
Or la Fondation pour l’école s’inquiète des tracasseries administratives d’ores et déjà rencontrées par des familles désirant choisir l’IEF auprès d’académies qui semblent vouloir appliquer dès à présent une interdiction qui n’a même pas encore été discutée devant le Parlement…
Enfin, la Fondation a demandé s’il était envisagé d’élargir les conditions pour pouvoir diriger un établissement scolaire indépendant, de nombreux parents, ne pouvant plus instruire leurs enfants à domicile, seront en effet nécessairement amenés à créer des écoles indépendantes.
Dans certains territoires la création d’écoles pourrait même s’avérer être la seule alternative possible. Mais quid si les conditions pour diriger une école restent inchangées ?
Au regard des conséquences qu’entrainerait immanquablement la suppression de l’IEF, il est plus que jamais nécessaire d’élargir le champ d’expérience actuellement requis pour être directeur d’école indépendante.
La Fondation pour l’école va mener ce nouveau combat pour permettre l’accès à la fonction de directeur d’établissement à des personnes pouvant se prévaloir d’une solide expérience professionnelle par ailleurs.
Communiqué des associations et des représentants de l’ief (instruction en famille), des professionnels de l’enseignement à distance, et des écoles libres hors contrat :
Non, l’interdiction de l’IEF ne réglera pas le problème de la radicalisation !
Oui à l’affirmation des libertés fondamentales comme bouclier démocratique !
Depuis l’annonce du président de la République de rendre l’école obligatoire pour tous les enfants de 3 à 16 ans, nous, organisations, professionnels et représentants de la société civile,
n’avons eu de cesse d’affirmer l’absence de corrélation entre radicalisme et liberté de l’enseignement.
La réponse du ministère de l’Éducation nationale, à l’occasion du second volet de la présentation du projet de loi pour le renforcement des principes républicains, est claire et ne souffre d’aucune ambiguïté : « Ce serait simple si la restriction de l’IEF permettait de régler les problèmes de radicalisation. Nous en serions ravis, ce n’est pas du tout le sujet. Ce n’est pas du tout le problème. »
Pourquoi alors parmi tous « les outils divers et variés » qu’a envisagés le gouvernement pour lutter contre les séparatismes a-t-il choisi le seul qui ne permettra pas de régler cette problématique ? Par ailleurs, celui-ci nous refuse l’accès à l’étude d’impact – qui justifierait le lien entre séparatisme et IEF – et ce, malgré nos demandes insistantes.
Nous nous interrogeons également sur l’aspect éminemment anticonstitutionnel de cette mesure qui ne concerne pas seulement l’IEF mais aussi les écoles hors contrat en présentiel ou à distance. À l’approche de l’Assemblée générale du Conseil d’État, nous attendons1 de celui-ci qu’il réaffirme le principe constitutionnel de la liberté de l’enseignement comme il l’a fait en 2017 et avant lui, le Conseil constitutionnel en 1977.
Nous posons donc la question de la véritable finalité d’une telle interdiction qui aurait pour conséquence de contraindre des milliers d’enfants à subir un mode d’instruction qui ne correspond ni à leur choix ni à celui de leurs parents. Elle pénaliserait toutes les familles qui pourraient avoir recours à ce mode d’instruction pour répondre momentanément à des problématiques particulières liées à la scolarisation (phobie, harcèlement…).
Pour le Président de la République, en France, « un enfant va à l’école ».
Et seulement à l’école de la République ?
La réponse du cabinet du ministère de l’Éducation nationale est sans équivoque sur l’intention du gouvernement de ne pas faciliter l’ouverture des écoles libres. Les changements que le gouvernement entend apporter dans les modalités de fermeture des établissements mettent en place des dispositions et un niveau de sanctions pénales si dissuasifs qu’ils corsètent la liberté de l’enseignement de manière disproportionnée, et ont de quoi dissuader les directeurs d’assumer encore la responsabilité de diriger une école libre déclarée. Ils se traduiront mécaniquement par l’explosion des formes clandestines d’instruction, ce qui est le contraire du but recherché.
Ce projet de loi étend, en violation du principe de la séparation des pouvoirs, la prépotence du ministère de l’Éducation nationale qui se substituerait à la juridiction administrative pour fermer une école, alors qu’à l’heure actuelle une école déclarée ou non peut déjà être vidée de ses élèves du jour au lendemain.
Depuis des années, et en particulier depuis 2017, il est devenu quasi impossible pour un établissement privé qui le souhaite de passer sous contrat.
De plus, l’Éducation nationale refuse aux Établissements à distance le statut d’école alors qu’ils sont des « acteurs importants de l’éducation » comme le reconnaît paradoxalement le ministère. De ce fait, il entérine la disparition à venir de professionnels d’expérience, œuvrant et concourant pourtant à ses côtés, à la réussite et au bien-être des enfants.
Nous regrettons l’annonce de telles mesures, inutiles et contre-productives, qui viennent s’ajouter à une longue série de mesures liberticides depuis l’adoption en 1998 de la loi sur le renforcement de l’obligation scolaire et qui réduisent la liberté de l’enseignement à sa portion la plus congrue, la logique scolaire étatique.
Plutôt que de mobiliser et d’associer tous les acteurs de l’Éducation, plutôt que de favoriser le débat démocratique, valoriser les partages d’expériences et la pluralité éducative, le gouvernement a fait le choix de la restriction des libertés, de l’autoritarisme, de l’unilatéralité. Il se prive ainsi de la contribution d’une partie de la société civile dont l’engagement en faveur de la démocratie et de nos droits pleins et entiers n’est pas près de faiblir.