Mardi dernier, la troupe de théâtre de l’hôtel de ville parisien donnait une matinée enfantine devant, justement, un parterre d’enfants en sortie scolaire désireux de voir comment fonctionne notre belle démocratie. De quoi devenir royaliste, à en juger de la suite des événements.
En effet, tout commence très fort avec Francis Szpiner, maire du XVIe arrondissement et candidat battu par son homologue macroniste aux dernières élections législatives, qui entame la séance par la lecture d’un mail que lui a envoyé, par erreur, Christophe Nadjovski, un des adjoints écologistes en charge de l’Espace public d’Anne Hidalgo. Morceau choisi : « Szpiner joue les législatives, d’où sa demande de maintenir le stationnement gratuit aux abords des grandes concessions du bois de Boulogne. » Et le même d’ajouter : « Vu le prix que paient les membres de ces concessions pour leurs activités, ils peuvent payer du stationnement, surtout pour leurs SUV. »
D’où ce conseil prudent, mais imprudemment transféré, consistant à « décaler » le vote du texte après les mêmes élections législatives. Cet ancien proche de Jacques Chirac a donc beau jeu de dénoncer de bas « calculs politiciens » tandis qu’Anne Hidalgo lui fait remarquer qu’il n’est pas forcément opportun de faire lecture en public d’un courrier privé. Bref, ça commence tôt à tourner au vinaigre. Avant d’ensuite virer au roussi quand Notre Dame de Paris, après un interminable discours sur l’état des finances de la capitale, annonce tout de go : « La parole est à Mme Dati qui, je le rappelle, n’a toujours pas gagné d’élection », sauf celle l’ayant conduit au siège de maire du VIIe arrondissement, oublie-t-elle de préciser.
Il est vrai qu’aucun candidat LR à Paris n’a, non plus, été élu à la députation ; mais aussi que même Nicolas Dupont-Aignan a fait plus de voix à Paris qu’Anne Hidalgo, lors du dernier scrutin présidentiel. Il n’empêche, le ton est donné. Et Rachida Dati d’aussitôt répliquer : « Quand vous gagnerez une élection sur votre nom, surtout, vous nous alertez ! Parce que nous, les 1,7 %, on n’y est pas abonnés… »
Pas faux, mais à peine moins que les 4,78 % de Valérie Pécresse, la candidate soutenue par Rachida Dati, quitte à demeurer dans la bataille des pourcentages de bas étage. Dans ce combat de titans, Anne Hidalgo paraît un temps reprendre la main, assenant un grand coup de sac à main, façon uppercut, à sa meilleure ennemie : « Cela fait vingt ans que vous perdez… » Il est vrai que la Ville Lumière est aux mains de la gauche depuis maintenant quatre mandats. Ce qui permet à Rachida Dati d’illico sortir un crayon à rimmel façon stylet : « Nous sommes là aussi. Vous, vous étiez à Abidjan, en Arménie, partout sauf à Paris. »
Il est vrai que préoccupée par le rayonnement international de la capitale, de ses rats, de ses travaux sans fin, de ses sans-abri et de ses commerces de crack, au détail comme en gros, Anne Hidalgo a souvent séché les derniers conseils municipaux. Et de tirer un penalty, tout escarpin brandi, direct dans le tibia : « C’est difficile pour vous d’aller dans ces endroits-là, surtout en Arménie. » Allusion aux rapports que la très tonique Rachida entretiendrait avec l’Azerbaïdjan, république musulmane ayant mené une guerre contre la très chrétienne Arménie à l’automne 2020 ? Il n’y a pas à dire, à ce niveau de mutuelle admiration, ce n’est plus de l’amour mais de la rage. Un peu comme Statler et Waldorf, les deux vieux schnocks du Muppet Show, mais version catch féminin dans la boue. Avant de se mesurer lors d’un prochain match de tee-shirts mouillés à la bière devant une assemblée de bikers ?
En attendant, il n’est pas sûr qu’il faille montrer de tels spectacles aux enfants.
Nicolas Gauthier
https://www.bvoltaire.fr/entre-anne-hidalgo-et-rachida-dati-ca-setripe-au-conseil-de-paris/