C'est déjà plutôt généreux, mais le groupe Renew Europe au Parlement européen, de sensibilité libérale-libertaire, dirons-nous, estime que cela ne suffit pas. Rappelons que le président de ce groupe n'est autre que Stéphane Séjourné, macroniste historique : on peut donc supposer que ses positions politiques recoupent peu ou prou celles du gouvernement français. Eh bien, Renew Europe, donc, suggère que le permis « unique » permette aussi de passer plus facilement du statut de réfugié ou de demandeur d'asile à celui d'immigrant légal. On sait que le statut de réfugié ou de demandeur d'asile est souvent, de nos jours, très généreusement accordé à des gens qui ne fuient pas nécessairement des pays en guerre. Cette facilité administrative permettrait donc de les faire devenir travailleurs de longue durée, voire permanents, dans une Europe qui leur serait intégralement ouverte.
On note la prudence de Beate Gminden, de la Commission aux affaires intérieures, pour qui ce genre de décision relève (pour une fois) de la souveraineté des États membres. Toutefois, les coups de boutoir des macrono-compatibles de tous les pays ne devraient pas manquer de s'intensifier. Le problème, comme le révèle l'article précité du site Euractiv qui se fait l'écho de ces débats législatifs, c'est que la main-d'œuvre qui manque en Europe est une main-d'œuvre qualifiée... et ce que les membres de la Commission ne disent pas, mais qu'on lit sans peine entre les lignes, c'est que cette main-d'œuvre très qualifiée ne constitue pas le pourcentage le plus important des migrants extra-européens. Une solution existerait avec la plate-forme « Talent Pool », qui a été utilisée pour sélectionner les migrants ukrainiens en fonction de leur secteur d'activité.
Et on se demande bien, au passage, pourquoi cette plate-forme, qui a pour but d'attirer les talents dans leur pays d'origine en leur faisant savoir qu'il y a des postes à pourvoir, n'est pas utilisée pour les migrants africains qui arrivent par centaines de milliers en Europe ? C'est peut-être cela, la question fondamentale que la Commission européenne devrait se poser, non ? Sans même parler de rehausser le niveau de l'éducation ou d'encourager la natalité autochtone. Car ne rêvons pas, si l'on veut recréer des élites, il faut commencer par sélectionner ceux que l'on accueille. Avons-nous besoin de davantage de nouveaux esclaves, de plus de marchands de tours Eiffel ou de plus de dealers de crack ? Pas sûr.
Arnaud Florac