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La Grande-Bretagne va-t-elle faire faillite à cause de la dette ukrainienne?

Un char britannique Challenger détruit par l’artillerie russe

La clé des événements en Ukraine se trouve-t-elle à Londres? Il faut sans doute moins s’interroger sur les objectifs actuels de la stratégie ukrainienne que sur les raisons, internes ou externes, qui ont pu conduire à lancer une opération comme celle de Koursk. Nous avons déjà évoqué des incitations venues des Etats-Unis. Il y a aussi, bien entendu, le souci de Zelensky de conserver son pouvoir. Mais une motivation plus importante encore pourrait se trouver dans la crise de la dette ukrainienne et les dangers qu’elle fait courir plus spécifiquement à la Grande-Bretagne. Sommes-nous au bord d’une crise majeure des finances britanniques, due à l’exposition du pays à la dette ukrainienne ? La bataille de Koursk a-t-elle été une tentative anglo-ukrainienne désespérée de repousser l’échéance du défaut de paiement ukrainien ? 

La dette ukrainienne, talon d’Achille de la Grande-Bretagne ?

Alex Krainer, auteur d’un blog très réputé parmi les investisseurs, se demandait, il y a deux jours, si :

« la Grande-Bretagne pourrait être confrontée à une crise financière imminente qui pourrait accélérer son effondrement économique et social. Je soupçonne que cela pouvait être lié au fait que la Grande-Bretagne s’est surendettée en Ukraine en essayant de retrouver le leadership, la richesse et le prestige qu’elle n’a cessé de perdre au cours des dernières décennies. »

La Grande-Bretagne est en effet parmi les pays qui ont le plus contribué à soutenir l’Ukraine, non seulement par un soutien militaire mais aussi par un soutien financier :

« La Grande-Bretagne a été le principal soutien et sponsor de ce conflit, et il semble qu’elle en ait fait trop. En plus de fournir au moins 7,5 milliards de livres sterling d’aide militaire (près de 10 milliards de dollars), la Grande-Bretagne a donné 5 milliards de livres sterling (6,5 milliards de dollars) supplémentaires à l’Ukraine sous forme de soutien financier. En outre, la Grande-Bretagne a également garanti plusieurs tranches de prêts de la Banque mondiale à l’Ukraine et de nombreuses institutions financières britanniques ont acheté des obligations ukrainiennes d’une valeur de plusieurs milliards. D’autres ont réalisé d’importants investissements directs dans ce pays ».

Endettement britannique

Le tableau ci-dessus permet de mieux comprendre : les États-Unis et l’Allemagne ont fait plus que la Grande-Bretagne en termes de soutiens cumulés. Mais la Grande-Bretagne a plus fait en ce qui concerne le soutien financier. Ajoutons que le gouvernement Sunak avait, au mois d’avril 2024, annoncé une augmentation du budget de la défense ; Comme l’explique Les Echos :

« Le Royaume-Uni a annoncé mardi une nouvelle augmentation de son budget militaire , pour le porter progressivement à 2,5 % de son PIB à horizon 2030. À l’occasion d’un déplacement à Varsovie, le Premier ministre britannique, Rishi Sunak, a vanté « le renforcement le plus important de notre défense nationale depuis une génération ». « Dans un monde qui n’a jamais été aussi dangereux depuis la fin de la guerre froide, nous ne pouvons pas rester complaisants », a-t-il déclaré lors d’une conférence de presse avec le secrétaire général de l’Otan, Jens Stoltenberg.

En valeur absolue, cette annonce correspond à une augmentation des dépenses de 75 milliards de livres sur six ans. A cette occasion, le locataire de Downing Street a confirmé une nouvelle contribution de 500 millions de livres (580 millions d’euros) à l’effort de guerre ukrainien contre l’invasion russe.

Londres avait déjà fait part de son intention de porter son budget militaire à 2,5 % du PIB, mais n’avait pas donné d’échéance. Le gouvernement britannique avait annoncé vouloir atteindre cet objectif, dès que « les conditions économiques » le permettraient. Les finances publiques britanniques sont sous pression, avec un déficit à 5,1 % du PIB et une dette publique à 96 % du PIB en 2023 »

Bras de fer en juillet 2024 sur la dette ukrainienne

Depuis le début de la Guerre d’Ukraine, l’économie ukrainienne s’est effondrée de 25 %. Les recettes fiscales diminuant, le déficit budgétaire de l’Ukraine pour 2024 devrait atteindre près de 44 milliards de dollars. Si Kiev devait assurer le service de sa dette, celle-ci absorberait 15 % de son PIB, soit le deuxième poste de dépenses après la défense (qui représente 31,3 % du PIB). Selon Alex Krainer, toujours :

« Le maintien en activité du gouvernement et de l’armée ukrainiens est devenu entièrement dépendant de ses bailleurs de fonds occidentaux. Fin mars 2024, alors que le programme d’aide américain de 61 milliards de dollars était toujours bloqué au Congrès américain, la Banque mondiale a approuvé une aide financière de 1,5 milliard de dollars pour l’Ukraine. Le projet de document sur l’allocation de ces fonds souligne l’état « catastrophique » des finances publiques ukrainiennes et reconnaît le risque « extrêmement élevé » de coopérer avec l’Ukraine.
Un fonctionnaire de la Banque mondiale impliqué dans le dossier
 a noté que l’Ukraine était au bord de la faillite. Il a ajouté que, comme pour les transactions précédentes, la Banque mondiale n’a pas fourni ses propres fonds à Kiev, mais a « une fois de plus profité » des garanties de deux des donateurs de l’Ukraine, principalement le Japon et le Royaume-Uni. Le Premier ministre ukrainien, Denis Shmigal, a révélé que sur les 1,5 milliard de dollars accordés à l’Ukraine, 984 millions provenaient du Japon et 516 millions de la Grande-Bretagne. Mais l’Ukraine est aujourd’hui incapable d’honorer ses dettes extérieures croissantes ».

La question du crédit dont peut encore disposer Kiev a pris une tournure dramatique à la mi-juillet 2024 :

+ Vladimir Zelensky a été admis à une des premières séances du nouveau cabinet Starmer. Derrière les déclarations sur l’importance historique du moment, se cachait l’inquiétude quant à la situation militaire et financière de l’Ukraine.

« Presque aussitôt après la fin de la visite de Zelensky à Londres, le gouvernement ukrainien a annoncé [le 22 juillet] qu’un accord avait été conclu avec ses principaux détenteurs d’obligations pour restructurer les obligations du pays d’une valeur de près de 20 milliards de dollars, y compris une réduction de 37 % des montants dus. Mais il ne s’agissait que d’un « accord de principe » conclu avec un « comité ad hoc de créanciers », et il n’était pas contraignant pour tous les détenteurs d’obligations. (…) L’Ukraine était censée courir après ses créanciers et les supplier d’accepter l’accord, en leur offrant même une « commission de consentement » de 1,25 % ».

+ « [Le 24 juillet], deux jours seulement après l’annonce par l’Ukraine de l’accord conclu avec ses détenteurs d’obligations, Fitch a abaissé la note de crédit de l’Ukraine de CC à C, reflétant un risque de crédit extrême réservé aux pays qui « sont entrés en défaut de paiement ou dans un processus de type défaut de paiement. (…) Pour l’Ukraine, la (…) date de révision était fixée au 6 décembre 2024. Cependant, Fitch a déterminé qu’il y avait eu un « changement important dans la solvabilité de l’émetteur » qui aurait rendu « inapproprié d’attendre… » ».

+ Le mercredi 31 juillet 2024, en réaction, Vladimir Zelensky suspendait « temporairement » le remboursement de la dette, décision qui entrait en vigueur dès le 1er août, pour deux mois – renouvelables.
L’opération de Koursk : une opération conjointe anglo-ukrainienne à objectif financier ?

En se plaçant du point de vue de la dette ukrainienne et de l’exposition britannique à cette dette, Alex Krainer propose un point de vue intéressant sur les motivations de l’opération contre Koursk :

« L’Ukraine a lancé l’incursion 18 jours seulement après la visite de Zelensky à Londres. Le conseiller en sécurité de Zelensky , Mikhailo Podolyak, a admis que l’invasion de Koursk avait été discutée avec les BritanniquesLe 18 août, le Sunday Times de Londres révèle que la Grande-Bretagne a joué un rôle central dans l’opération :
« Invisible pour le monde, l’équipement britannique, y compris les drones, a joué un rôle central dans la nouvelle offensive de l’Ukraine et le personnel britannique a conseillé étroitement l’armée ukrainienne… à une échelle qu’aucun autre pays n’a égalée. »

ZeroHedge a déclaré que l’opération était « un plan britannique avec des armes britanniques ». (…)

L’opération a donné à l’Occident l’occasion de parler du grand succès militaire de l’Ukraine, qui pourrait s’avérer être un tournant dans la guerre. Sans perdre de temps, le même mardi 6 août, le Conseil européen a approuvé une aide financière de 4,2 milliards d’euros pour l’Ukraine.

La Commission européenne a transféré 4,2 milliards d’euros à l’Ukraine dans le cadre de la première tranche du programme de facilité pour l’Ukraine [dès le 13 août] ».

Un répit en attendant une crise inéluctable ?

Dans son « Market Report » du 28 août, Tom Luongo souligne que le différentiel des taux pour les obligations à 10 ans redevient défavorable à la Grande-Bretagne. Et le graphique ci-dessous rappelle les deux moments de fortes tensions : lorsque Liz Truss était Premier ministre et au plus fort des tensions, en 2023, entre les Etats-Unis et la Chine. La question : la Grande-Bretagne résistera-t-elle à une nouvelle poussée du « spread » avec les États-Unis ?

Alex Krainer insiste quant à lui sur l’inquiétude de la Banque d’Angleterre :

« Le 22 juillet, le jour même de l’annonce de l’accord entre le gouvernement ukrainien et le « comité ad hoc » de ses créanciers privés, la Banque d’Angleterre a également annoncé un séminaire intitulé « The Future Bank of England Balance Sheet – managing its transition towards a new system for supplying reserves » (Le futur bilan de la Banque d’Angleterre – gérer sa transition vers un nouveau système d’approvisionnement en réserves). Le séminaire a eu lieu le même jour (un peu court pour la plupart des gens) et a comporté un discours de Victoria Saporta, directrice exécutive de la direction des marchés de la banque. Dans son communiqué, la Banque d’Angleterre explique que son « bilan joue un rôle clé en aidant la banque à atteindre ses objectifs de stabilité financière et de politique monétaire ».

Le discours de Madame Saporta, intitulé « Let’s Get Ready to Repo ! », a présenté les dernières réflexions de la Banque sur l’avenir de son bilan, qui devrait évoluer vers un système d’approvisionnement en réserves axé sur la demande. Mme Saporta a suggéré que la Banque devrait accepter une « gamme plus large d’actifs » comme garantie afin de rendre le système « utilisable pour le plus grand nombre de modèles d’entreprise ». (…)

Voici comment Simon White, stratège macroéconomique chez Bloomberg, l’explique : dans un système axé sur la demande, « ce que les banques utilisent pour régler les soldes chaque jour doit pouvoir être transféré sur le bilan de la banque centrale en cas de crise. Si ce n’est pas le cas, les liquidités risquent de se tarir complètement. Ainsi, en cas de crise, aucun actif ne pourra être refusé dans le cadre de ce système ». Cela pourrait même inclure les obligations ukrainiennes.
Ce qui ressort clairement de ces propos et du langage de la BOE, c’est que la banque craint désormais l’effondrement du système financier britannique et qu’elle a décidé d’éviter cet effondrement de la pire façon possible : en assouplissant ses normes de crédit et en acceptant des garanties de mauvaise qualité en échange d’argent liquide. C’est le signe le plus évident que le système est sur le point de s’effondrer ».

Rappelons-nous qu’en septembre 2022, le système financier et bancaire britannique a été, selon les aveux ultérieurs de la Bank of England, « à quelques heures » de s’effondrer : les « gilts » (ou obligations d’Etat britannique) de long terme ne trpouvaient plus d’acheteurs. La Banque d’Angleterre est intervenue en achetant jusqu’à 40 milliards de livres de gilts.

Cette situation pourrait-elle se reproduire ?

Source :  https://lecourrierdesstrateges.fr/2024/08/29/la-grande-bretagne-va-t-elle-faire-faillite-a-cause-de-la-dette-ukrainienne/?

Publié par Paul

30 août 2024

https://numidia-liberum.blogspot.com/2024/09/la-grande-bretagne-va-t-elle-faire.html

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