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Agression sexuelle : l’avocat de la défense plaide l’écart culturel

©Shutterstock
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C'est un procès en comparution immédiate comme il en existe malheureusement des dizaines. Ce 9 septembre, en fin de journée, des magistrats du tribunal judiciaire de Créteil (Val-de-Marne) ont à juger une affaire d’agression sexuelle survenue quelques jours plus tôt dans le parc de Choisy. À la barre, un Pakistanais en situation irrégulière, déjà passé quelques semaines plus tôt devant le tribunal pour une affaire de stupéfiants. Il avait alors écopé d’une amende de 300 euros.

Des « aveux poussifs »

Le jour de l’agression, la victime quitte des amis dans le parc de Choisy et rentre chez elle. C’est alors qu’elle se sent suivie. Elle se retourne. Aussitôt, un homme commence à « [toucher] avec sa main ses parties génitales en insistant sur ses fesses, sans pénétration »rapporte le site Actu juridique. La victime se défend et appelle son mari resté dans le parc. Ce dernier, voulant défendre sa femme, devient la cible de l’agresseur. Le couple réussit tout de même à contacter la police. L’individu, qui se révèle être alcoolisé, est alors interpellé. La femme victime de cette agression sexuelle reçoit six jours d’ITT (incapacité totale de travail, NDLR) en raison des « répercussions psychologiques ». Son mari, quant à lui, légèrement blessé au poignet, se voit prescrire un jour d’ITT.

Le prévenu, interrogé à la barre, reconnaît qu’il a « peut-être » « touché » cette femme qui était, dans ses souvenirs, « habillée très court » et « très belle », mais ne donne pas la même version des faits. Selon lui, alors qu’il sortait du parc pour attraper son bus, il aurait été pris à partie. « Je suis sur mon téléphone, il y a un gars qui vient par-derrière. Il me demande si j’ai touché sa femme et me donne un coup de poing », raconte-t-il. Le juge lui demande ce qu’il regardait sur son téléphone. « Une chanson sur YouTube », assure le présumé agresseur. Le magistrat poursuit : « Dans la fouille du téléphone, les enquêteurs sont tout de suite tombés sur une application de videochat avec des jeunes femmes dénudées et avenantes. Quand on voit ça, on peut imaginer que, quand vous voyez cette jeune femme passer, vous vous dites qu’elle aussi est avenante. » Il ajoute : « On a trouvé d’autres sites avec des photos de jeunes femmes. » Face à ces éléments, le prévenu « assume ». Interrogé par son avocat, l’individu d’origine pakistanaise finit par reconnaître les faits (c'est-à-dire « avoir mis une main aux fesses de cette dame ») et présente ses excuses.

Différence culturelle

« Soulagé par ces aveux, certes poussifs », et face au risque de réitération, le parquet requiert dix mois de prison avec mandat de dépôt. La procureur demande également, « dans l’intérêt de la société », une interdiction du territoire français. C’est alors que l’avocat de la défense se lève et invoque la clémence des magistrats. « Il reste beaucoup de chemin à parcourir dans l’éducation des hommes, surtout quand ils viennent du Pakistan. Celui-là est le fruit d’un système patriarcal, de cette culture où on pratique encore le mariage forcé », avance-t-il. Pendant « plusieurs minutes », si l'on en croit le site Actu juridique, l’avocat aurait alors démontré l’écart culturel qui existe entre la France et le Pakistan pour tenter de justifier, ou du moins d’expliquer et de contextualiser, le geste de son client. Une ligne de défense qui ne convaincra pas le tribunal. Il condamnera en première instance l’individu à huit mois de prison avec mandat de dépôt, ainsi qu’à une interdiction de séjour sur le territoire français pendant dix ans et à des dommages et intérêts pour les victimes qui devraient être versés, à en croire le juge, par le service d’aide au recouvrement des victimes d’infractions. Nous ne savons pas, à ce stade, si le prévenu compte faire appel de cette décision.

Cette affaire n’est pas sans en rappeler une autre, jugée en 2018, qui avait à l’époque suscité une vague d’indignation et fait couler beaucoup d’encre. Saisie pour le viol d’une lycéenne et l’agression sexuelle d’une autre jeune fille, la cour d’assises de la Manche avait finalement acquitté le prévenu d’origine bangladaise pour ce qui concerne le viol. Dans sa plaidoirie, l’avocat de la défense avait alors mentionné que son client n’avait pas « les codes culturels » pour comprendre que l’adolescente ne consentait pas au rapport sexuel. Si cet argument n’avait vraisemblablement pas motivé l’acquittement de l’individu pour cette affaire - cet acquittement, semble-t-il, était davantage lié à un manque de preuves -, la plaidoirie de l’avocat avait tout de même indigné une partie de la classe politique. Valérie Boyer, à l’époque députée Les Républicains, s’était émue : « Allons-nous laisser admettre qu’il existe une culture qui permet aux hommes de violer les femmes ? »

Clémence de Longraye

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