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OQTF trop coûteuses ? Quand Bardella rive son clou à Lapix

Capture écran France 2
Capture écran France 2
Anne-Sophie Lapix avait tout prévu. Tout bien fait. Elle se souvenait encore probablement de cette interview de 2012, quand elle avait coincé Marine Le Pen sur les incohérences de son programme économique. La candidate, qui était alors présidente du RN, s’était un peu pris les pieds dans le tapis. La dédiabolisation par les mots était sans doute, comme il arrive souvent à droite, plus facile que la professionnalisation par les chiffres. Seulement, la journaliste avait oublié un menu détail : douze ans se sont écoulés depuis.

Coût de la vie

Le RN a recruté des gens brillants en « back office », il a 123 députés à l’Assemblée nationale et ses 16 alliés ciottistes, et l’actualité, sécuritaire comme économique, est malheureusement un argument qui travaille tout seul. Marine Le Pen a, quant à elle, passé la main à Jordan Bardella. Plus jeune que Marine, militant historique du RN, issu d’un milieu modeste, il n'est pas issu de la famille Le Pen et n’a plus grand-chose en commun avec la tonitruante PME à grande gueule montée par l’indestructible Menhir, un jour de 1972.

Anne-Sophie Lapix, elle, n’a pas changé de logiciel. Comme en 2012, elle a pris son ardoise et sa craie pour passer au crible rigoureux des quatre opérations le programme de Jordan Bardella. Cette fois, le coût de l’application des expulsions d’étrangers. 13.800 euros, multiplié par 130.000 OQTF, « ça fait à peu près 1,8 milliard ». Bardella écoute patiemment. Et là, l’estocade : « Comment vous financez ? »

Le président du Rassemblement national aurait pu dire que l’aide médicale d’État était un gouffre, que les allocations familiales pourraient être supprimées pour les parents de délinquants mineurs, qu’il existait des marges importantes au sein de la très généreuse fonction publique. Il aurait pu rester sur le terrain, froid et factuel, de la comptabilité.

Action... réaction

Il a choisi de parler avec son cœur, d’une manière qui fait probablement écho à ce que pensent des millions de Français en ce moment même : « Et le coût de la vie de Philippine, Madame ? » C’est plutôt une bonne question, non ? 13.800 euros pour mettre dehors un Marocain violeur sous OQTF afin qu’il ne tue pas une jeune fille de 19 ans qui était sur le point de se marier, ça semble plutôt honnête, du point de vue du bilan comptable, si on reprend les grosses lunettes rébarbatives de la journaliste… laquelle, à cette heure-ci, doit jurer (mais un peu tard) qu’on ne l’y reprendra plus.

On pourra interpréter comme on voudra ce court extrait d’une interview par ailleurs sans grande surprise. On pourra y voir le symbole de la déconnexion entre la caste médiatique et le peuple qui souffre, ou celui de la différence entre la froide rationalité de ceux qui croient tout savoir et le pathos des braves gens qui en ont ras le bol. C’est comme on veut. Ce qui est certain, c’est qu’aucune poignée d’euros, en effet, ne peut être mise en parallèle avec la vie, pleine de promesses, de cette pauvre demoiselle, massacrée par un barbare alors qu’elle rentrait tranquillement chez elle.

On ne sait pas si les temps sont en train de changer. Après Axelle, après Lola, après Thomas et tant d’autres, les meurtres semblent laisser notre peuple dans un état d’hébétude résignée. « C’est bien triste, mais bon, on n’y peut rien », semblent dire des Français impuissants, que l’on prie de bien vouloir se taire pour ne pas « faire le jeu des extrêmes ». Peut-être est-ce fini. On verra. Bravo, en tous les cas, à Jordan Bardella, qui remet les choses à leur place.

Arnaud Florac

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