L’enregistrement diffusé fait état d’un échange entre un homme proche du Premier ministre, affirmant à Malika Sorel que François Bayrou aurait pensé à elle « pour un poste de secrétariat d'État chargé de la citoyenneté et de la Lutte contre les discriminations ». Loin de décliner, l’élue se dit « très touchée » et prête à « travailler pour l'intérêt général et non pas pour des intérêts partisans ». Des propos surprenants, pour un parlementaire RN, numéro 2 sur la liste menée par Jordan Bardella aux dernières élections européennes. Face à cette proposition inattendue, Malika Sorel fait part de ses hésitations : « Ce n'est pas quelque chose qui se refuse si facilement », mais elle préfère finalement proposer de « rendre service » en présidant « une agence ou un haut conseil qui pourrait éclairer l'action gouvernementale sur le sujet stratégique de la citoyenneté ». Elle déclinera, le lendemain, l’offre qui lui était faite « la mort dans l’âme », confirmant sa disponibilité pour « conseiller, aider » le gouvernement sans pour autant l’intégrer, tout en renouvelant à François Bayrou son « intérêt pour plus tard ». Un Premier ministre encouragé à « tenir », ce que la parlementaire « souhaite vraiment de tout cœur pour la France ».
« Elle a négocié un poste auprès de la Macronie ! »
Contactée par BV, Malika Sorel n’a pas souhaité réagir. En revanche, du côté du RN, ça coince. À travers X, de nombreux parlementaires s’expriment. « Ces enregistrements sont une honte, affirme Jean-Philippe Tanguy, député RN de la Somme, il ne s’agit pas seulement de rendre votre mandat : quittez la vie publique ! », demande-t-il. Sébastien Chenu, député du Nord, accuse Malika Sorel de « trahir nos idées, nos militants, nos électeurs ». Auprès de BV, Jean-Paul Garraud, président de la délégation RN au Parlement européen, évoque un témoignage « accablant ». « Elle a négocié un poste auprès de la Macronie, c’est scandaleux », fustige-t-il, en se disant « stupéfait », sans pour autant sembler très étonné. On comprend que, depuis longtemps, le temps n’était plus au beau fixe, entre Malika Sorel et le parti avec lequel elle est entrée au Parlement européen. Jean-Paul Garraud insiste : « Nous avons pris l’initiative de demander à Malika Sorel de quitter notre délégation. » Une version qui contredit celle de l’intéressée. Malika Sorel semblait affirmer, dans son message du 19 avril, qu'elle partait de sa propre volonté, face « à une logique de groupe oppressante qui impose de renoncer à tout degré de liberté et annihile toute possibilité de réflexion intellectuelle ».
Pas dans la ligne du RN
En réalité, le 7 avril dernier, le bureau exécutif du Rassemblement national, composé de douze personnes, présidé par Marine Le Pen et Jordan Bardella, a décidé de lancer une procédure d’exclusion du groupe des Patriotes à l’encontre de Malika Sorel. Jean-Paul Garraud, en tant que président de la délégation RN et membre du bureau exécutif, rencontre alors Malika Sorel pour lui exposer la situation. L’eurodéputée aurait reconnu un certain nombre de griefs. Sur nombre de votes, Malika Sorel n’était pas dans la ligne du Rassemblement national, mais elle n'aurait prévenu personne. « Un aspect de déloyauté était remarqué », indique Jean-Paul Garraud. « Bien sûr, il peut y avoir des discussions et des oppositions, mais qui s’expriment en réunion de délégation. Mais quand, à la fin, une position de groupe est décidée, elle doit être respectée. » Sur l’Algérie, sur le Maroc, sur la question palestinienne, des dissensions sont apparues. Sur la cause de Boualem Sansal, Malika Sorel lançait, en novembre 2024, dans l’hémicycle du Parlement : « Ceux qui utilisent ce drame pour exprimer leur hostilité envers l'Algérie et les Algériens desservent la cause de Boualem Sansal. »
Malika Sorel enverra finalement une lettre de démission à la présidence du Parlement européen. Un compromis qui lui évite la procédure d’exclusion du bureau exécutif. Situation étrange, pour une femme qui a toujours revendiqué de ne pas appartenir au RN, au point de ne pas vouloir figurer sur le site du Parlement européen parmi la liste des députés ayant été élus sous l’étiquette RN.
Malika Sorel ne siège désormais plus parmi le groupe des Patriotes. Elle ne compte pas pour autant démissionner, bien au contraire. Plusieurs sources en interne affirment que l’eurodéputée a des contacts avec d’autres groupes parlementaires européens, dont Renew ou le PPE. Pour Malika Sorel, l’éphémère parenthèse RN est refermée.