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[EDITO] Scandale Shein : la France et l’UE, un espace fantastique pour… les Chinois !

JULIE SEBADELHA / AFP
JULIE SEBADELHA / AFP
Il y a deux scandales Shein, celui des poupées sexuelles proposées au marché, d’une immoralité telle que tous les partis pour une fois sont d’accord, et l’emprise croissante de cette entreprise sur l’économie française. Le premier scandale est facile à régler : il suffit d’interdire ces produits. Le second volet du scandale Shein donne lieu, comme d’habitude en Macronie et dans l’UE, à des duos de clowns et des exercices de souplesse dorsale dignes d’un numéro de contorsionniste au Cirque du Soleil.

Le duo de clowns, d'abord. L’ancien ministre Olivia Grégoire, parlant de Shein, fait mine de découvrir brutalement les ravages de la mondialisation : « Depuis plusieurs années, notre pays assiste impuissant à la montée d’un géant sans foi, sans loi, qui piétine l’intégralité des règles de notre commerce, qui dévore un par un nos emplois comme nos entreprises d’habillement et qui trompe délibérément les consommateurs », s’alarme-t-elle. Diable ! Que d’eau, que d’eau ! La mondialisation sans frontières ne mènerait donc pas si aisément au nirvana de l’Humanité ? Quelle déception... Face aux députés, ce 4 novembre, l’ancien ministre décrit fort bien les ravages du géant chinois : ruine de nos commerçants, artisans et créateurs qui s’échinent à payer les taxes et charges et à respecter la forêt de normes européennes délirantes, désertification de nos centres-villes. La croissance de Shein atteint 58 %, en 2023, tandis que les défaillances de nos commerces d’habillement bondissent de 52 %, explique, toujours, Olivia Grégoire, qui déplore ainsi le lait renversé.

 

Roland Lescure : retenez-le ou il fait un malheur !

Et pourtant, on a fait ce qu’on sait faire de mieux : taxer - amendes record de 40 millions d’euros pour pratiques commerciales trompeuses, non-respect des droits de l'homme, engagements non tenus sur l’environnement, « transparence insuffisante », etc. « Ce n’est pas à ces géants de faire la loi, c’est aux représentants du peuple français », clame Olivia Grégoire. Alors, on y va, Madame le Ministre ? On siffle l’arrêt de la demolition party made in China ? « Qu’attendons-nous pour interdire définitivement l’accès de Shein à notre pays ? », lance-t-elle. Décidément, le macronisme recouvre tous les visages : « Je suis oiseau : voyez mes ailes ; je suis souris : vivent les rats », lançait La Fontaine (La Chauve-souris et les deux Belettes).

Mais voilà, le duo macroniste est rodé. Car du côté du ministre de l’Économie Roland Lescure, on fait certes des moulinets en criant très fort : « Shein a dépassé les bornes ! »« Si ces comportements sont répétés, je demanderai qu’on interdise l’accès de la plate-forme Shein au marché français ». En somme, retenez-le ou il fait un malheur. Mais en attendant, il tempère : « On est tous gênés par l’explosion de la fast fashion et ce sujet a été pris à bras-le-corps par le gouvernement », assure notre bon apôtre, qui cite « la taxe sur les petits colis ».

Parlons-en, de la taxe sur les petits colis. Selon France Info« une taxe de 2 euros pourrait bientôt s'appliquer sur chaque article contenu dans les petits colis livrés par des entreprises établies hors de l'UE. Le gouvernement souhaite l'instaurer dès le 1er janvier prochain, et elle concernerait notamment des sites comme Temu ou Shein. » « Une somme jugée pas forcément dissuasive par les consommateurs », admet France Info, qui n’ose pas dire que tout le monde s’en fiche, surtout Shein et son concurrent Temu. D’autant que « cette taxe sera en réalité réglée par les sites de commerce en ligne ». On ne saurait mieux résumer la pensée macroniste : de grands moulinets pour accoucher d’une nouvelle taxe inutile dans un pays qui croule sous les taxes.

L'UE, l'empire des naïfs

À ce stade, il faut faire un détour au pays de Donald Trump. Les fameux petits colis, notamment ceux de Shein, Trump les soigne au lance-flammes : « Depuis le 29 août, les produits de moins de 800 dollars entrant par la poste aux États-Unis sont censés être taxés de 80 à 200 dollars, dans le cadre de la fin de l'exemption dite « de minimis » qui permettait jusqu'à présent à ces petits paquets de contourner les droits de douane »écrivent Les Échos du 10 septembre.

En avril dernier, Trump avait montré un sens de l'accueil à la hauteur en… triplant les droits de douane sur ces mêmes petits colis de Shein et Temu. Les droits de douane imposés par Trump aux Chinois vont baisser de 57 % à 47 % (135 % en avril…), après l’accord signé récemment sur les terres rares. Mais ils ont déjà produit leur effet : une brutale et grosse augmentation des prix pour les produits de Shein et Temu, dont les ventes ont du coup chuté outre-Atlantique. Et, plus globalement, une « chute massive des exportations chinoises vers les États-Unis, en recul de près de 25 % sur la période juin-août 2025 par rapport aux mêmes mois de 2024 »selon The Conversation.

Mais voilà, comme la nature, l’industriel chinois a horreur du vide : nos amis de Shein et Temu se sont donc rabattus, pour écouler leurs produits, sur nous, sur l’empire des naïfs, le paradis des derniers benêts de la mondialisation, sur le terrain vague européen où l’on entre comme dans un moulin, pour ramasser le chiffre d'affaires comme la manne du désert. L’UE et la France macroniste ont raison : ils ont créé des espaces de commerce fantastiques… pour les Chinois !

Marc Baudriller

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