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[ANIMAUX] Dermatose nodulaire : et maintenant, on abat des bêtes vaccinées

© Christian Convers Coordination rurale
© Christian Convers Coordination rurale
Le 13 novembre, BV révélait l’abattage, au fusil, de vaches qui fuyaient une euthanasie vétérinaire liée à un foyer de dermatose nodulaire contagieuse (DNC). L’événement se passait dans les Pyrénées-Orientales. Ce 2 décembre, c’est dans le Doubs, à Pouilley-Français, non loin de Besançon, qu’un nouvel épisode regrettable s’est produit : 83 vaches vaccinées ont été abattues, pour une seule atteinte par la maladie.

Gaz et matraques contre les éleveurs

Christian Convers, membre de la Coordination rurale, a vécu l’événement. « Nous avons d'abord demandé que l’ensemble des bêtes soient testées, explique-t-il à BVOn nous a répondu que cela ne fait pas partie du protocole. » En même temps, un recours était discuté devant le tribunal administratif. « Nous contestions le caractère d’urgence de l’abattage dans la mesure où les mouches, vecteurs de la maladie, ne sont plus là et où les bêtes ne sortent plus à cette période de l’année. Le caractère d’urgence, que l’État n’a jamais pu justifier, a été maintenu, et le recours rejeté. »

À la ferme, la situation s’envenimait. 300 manifestants d’un côté, éleveurs et agriculteurs venus soutenir leur collègue. De l’autre, une mobilisation des forces de l’ordre comme si le sort de la République en dépendait : des camions grues pour enlever les tracteurs et 200 CRS. Ceux-ci, raconte Christian Convers, « nous ont chargés avec gaz lacrymogènes et matraques jusque dans les bâtiments et, forcément, ils ont eu le dessus ». Dans la France du macronisme finissant, mieux vaut être narcotrafiquant qu’éleveur. « La prochaine fois, nous répondrons, prévient notre témoin. Nos tracteurs contre leurs camions, ce sera réglé en dix minutes. On ne peut pas accepter de se faire matraquer chez nous. » Des procédés tellement inacceptables, et à l’égard des animaux, et à l’égard des éleveurs, qu’Annie Genevard, ministre de l’Agriculture, a publié un long message de justification… qui ne convaincra personne.

Avis vétérinaires

Selon la World Organisation for Animal Health (WOAH), la solution à la DNC repose « sur la biosécurité, le dépistage précoce et le contrôle des déplacements, suivis d'une vaccination rapide et généralisée ». Il faut fouiller davantage dans les documents pour trouver mention de l’abattage des troupeaux (p. 4 de ce texte), expressément mentionné en complément de la vaccination. Dans le cas du troupeau de Pouilley-Français, les animaux ont été et vaccinés et abattus…

Contactée par BV, Kristel Gache, vétérinaire et directrice de GDS France (Groupement de défense sanitaire), nous explique, de son côté, que le vaccin n’empêche pas la survenue de la maladie (à cause de la durée d’incubation « à laquelle peut s’ajouter la durée de mise en place complète de l’immunité », sans oublier que la vaccination peut avoir été imparfaitement effectuée). Pour elle, il faut maintenir le cap : « Garder un troupeau dans lequel on n’abattrait que les animaux malades, ce serait laisser en place une bombe à retardement épidémiologique et, donc, faire courir un risque important aux élevages voisins et faire perdurer les mesures de restriction qui coûtent chers à la filière. »

L’ombre du Pacte vert et du Mercosur

Seule satisfaction, du côté de la Coordination rurale : la Direction générale de l'alimentation (DGAL) a enfin accepté de recevoir des vétérinaires qui ont des avis différents sur le traitement à apporter pour qu’il y ait une confrontation d’idées. Des vétérinaires qui n’aient pas peur d’être intimidés. « Les seuls qui osent sont ceux qui arrivent à la retraite, précise Christian Convers. Car ceux qui contredisent le discours officiel se retrouvent convoqués devant l’Ordre des vétérinaires. Les jeunes ne s’y risquent pas. » Du côté de GDS, Kristel Gache nous répond que, bien sûr, « si des avancées (diagnostic, maîtrise vectorielle, traitement…) devaient permettre d’éviter cette mesure [d’abattage], les GDS y seraient favorables, bien évidemment ».

Selon Christian Convers, ce qui s’est passé à Pouilley-Français dépasse le dispositif sanitaire. « Nous sommes devant une volonté politique, qui tue à l’aveugle. » Est-ce pur complotisme de croiser cela avec d’autres projets, comme la recommandation, en 2023, de la Cour des comptes de diminuer le nombre de bovins pour réduire l’empreinte carbone ? « Cela rejoint la consigne du Pacte vert d’une baisse de 20 % du cheptel et la volonté d’importer davantage avec le Mercosur, analyse Christian Convers. On ne voulait pas y croire au début, mais cela devient cohérent avec la volonté d’abattre qui est aujourd’hui très claire. » Le gouvernement se retrouve avec deux épidémies à gérer : la DNC… et la colère des éleveurs.

Samuel Martin

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