Cette tribune - signée d'un des dirigeants de l'Action Française - a été publiée hier, 13 septembre, dans Boulevard Votaire. Il est bon que l'influence persistance de Maurras sur la vie politique française y ait été soulignée et même qu'y soit évoquée une certaine « maurrassisation » des esprits. Constat un rien optimiste et audacieux que nous préférons de beaucoup ici à la présentation victimaire habituelle de Maurras comme le maudit, ce qu'il n'est qu'en apparence. LFAR
culture et histoire - Page 964
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Valérie Pécresse n'a jamais lu Maurras
http://lafautearousseau.hautetfort.com/archive/2017/09/14/valerie-pecresse-n-a-jamais-lu-maurras-5979412.html -
Sur ADG de Thierry Bouclier, édité dans la collection Qui suis-je ? chez Pardès
Camille Galic Polémia cliquez ici
Disparu à l’âge de 56 ans, A.D.G. révolutionna le polar mais il fut aussi l’inventeur d’une forme de journalisme mêlant critique acérée de la scène politique, fiabilité de l’information et recherche d’un style extrêmement travaillé sous une apparence rigolarde et populiste, comme on ne disait pas encore.
C’est donc un homme et un auteur assez inclassable que Thierry Bouclier présente dans l’excellente collection Qui suis-je ?
Fin des années 1990 de l’autre siècle. De l’atelier jouxtant mon bureau fusent des éclats de rire. Inutile d’en demander la cause : Jacques Dupuy Le Doublet, notre maquettiste, est en train de formater la chronique d’Alain Fournier, alias Alain Camille, alias Alain Dreux-Gallou, alias A.D.G.– dont Thierry Bouclier, avocat de son état, vient de publier la chaleureuse et dense biographie (1).
Petit-fils d’un ouvrier tourangeau militant communiste, frère d’un prêtre très conciliaire mais aussi ancien enfant de troupe, expérience dont il était fier, A.D.G., qui tâta du socialisme avant de rejoindre la droite radicale par la voie de l’anarchisme et la découverte de Céline, est arrivé à Rivarol en avril 1996, en provenance du Libre Journal de Serge de Beketch (ancien enfant de troupe lui aussi) où il signait des chroniques papoues assez hilarantes. Dans l’hebdomadaire « de l’Opposition nationale et européenne », il se fait plus sérieux, commentant au fil des semaines un remaniement ministériel, une bourde présidentielle comme il n’en manqua pas sous Chirac ou encore un congrès des Verts, mais toujours avec l’inimitable « patte » qui, à Minute dont il fut un collaborateur vedette de 1973 à 1985 ainsi qu’à la Série noire, dont il était le seul auteur « réac» face à une horde de gauchistes, avait fait son succès. Ses romans policiers sont drolatiques, parfois patoisants, grouillant d’une faune étrange et goûteux à souhait : Le Grand Môme, Pour venger Pépère, Cradoque’s Band, La Nuit des grands chiens malades dont Georges Lautner tira le film Quelques messieurs trop tranquilles sur un scénario de Michel Audiard (excusez du peu), etc. Avec son double inversé Jean-Pierre Manchette, comme lui pilier de la Série noire et « lecteur boulimique » mais très proche pour sa part de l’Internationale situationniste, A.D.G. a donné, ainsi que l’écrivit Dominique Venner cité par Bouclier, « un terrible coup de vieux à tout un pan du polar à la française… Impossible après eux d’écrire comme avant ».
Entre Minute, où ses billets intitulés « Minute babillons » sont très prisés, et la « Noire », le Tourangeau (qui défendait férocement les rillettes de sa ville contre celles du Mans et se faisait le champion des vins de Loire) est devenu une célébrité, invité partout et notamment – la Pensée unique ne régissait pas encore totalement l’audiovisuel – à plusieurs émissions de Bernard Pivot ou de Michel Polac, sur le plateau duquel il se castagne avec le dessinateur Siné. La belle vie pour celui qui se définit comme « un peu anar mais royaliste légitimiste, d’extrême droite ».
Toutefois, une actualité plus sombre le rattrape. Deux reportages au Liban, aux côtés des Kataïeb chrétiens, le marquent profondément avant qu’il ne s’envole en 1982 pour la Nouvelle-Calédonie où s’affrontent Caldoches et Canaques et y fonde, en même temps qu’une nouvelle famille – et, ami de Jean Raspail, qu’un vice-consulat de Patagonie ! – l’hebdomadaire loyaliste Combat calédonien. Le journal portait bien son nom : très offensif et… très favorable au Front national dont, responsable local, il accueillera le président Le Pen, Jean-Marie de son prénom, prénom qu’Alain donnera à son fils né sur « le Caillou ».
Comme le dit son biographe, « jeux de mots laids et calembours bons » abondent dans les papiers de sa période rivarolienne comme naguère dans ses polars, mais aussi gallicismes cocasses et mots-valises ; certains étaient géniaux et d’ailleurs pillés sans vergogne ensuite par des confrères, tel ce « bobardement » figurant dans le titre de son article de mars 2003 sur l’invasion de l’Irak par les Etats-Unis, agression précédée depuis des mois par la scandaleuse et surtout mensongère campagne d’intoxication menée de Washington sur la prétendue détention par Saddam Hussein d’un redoutable arsenal d’armes « de destruction massive » – mensonge reconnu sans la moindre gêne, dès le mois de mai suivant, dans le magazine Vanity Fair par Paul Wolfowitz, numéro deux du ministère américain de la Défense.
Alain, qui, ayant des amis dans les deux camps, avait été durement affecté à partir de décembre 1998 par la crise du Front national, était déjà très affaibli par sa lutte contre le Crabe. Les séances de chimio le terrassaient. Souvent, allant dans son bureau, je le trouvais endormi, la tête sur le clavier de son ordinateur d’où, n’ayant pas été enregistrées à temps, les dernières lignes de son article avaient sauté. L’actualité ne le passionnait plus comme autrefois mais cette année 2003 lui fut pourtant propice avec la réédition de La Nuit myope, très joli livre aux antipodes (c’est le cas de le dire) de son ambitieuse fresque néo-calédonienne Le Grand Sud, dont il affirmait lui-même qu’elle « puait des pieds » pour souligner son ancrage dans la réalité parfois sordide des bagnards, et la publication de Kangouroad Movie (2) – encore un terme valise. Ce roman d’aventures très enlevé se déroulant dans l’Outback australien, très loin de son petit Liré, fut presque unanimement salué par la presse, dont Libération, une revanche sur trois lustres d’ostracisme. Dans son malheur, il pouvait surtout compter sur l’assistance et le dévouement de Martine Joulié, une jeune femme exceptionnelle par l’intelligence, la culture et la générosité, qu’il devait épouser le 5 juillet 2004 lors d’une cérémonie célébrée à Saint-Eugène, ce qui lui plut à double titre : d’une part, c’est là que Jules Verne s’était marié en 1857 et, d’autre part, l’abbé François Potez qui officiait était un prêtre selon son cœur, puisque ancien officier de marine.
Nous étions voisins de palier. Quatre mois plus tard, en revenant du journal au soir du 1er novembre, je tombai sur l’équipe du Samu qui, appelée par Martine, tentait de sauver Alain de l’étouffement. Sans succès. Il avait 56 ans.
A.D.G., dont la verve – qui est souvent la politesse des pessimistes et des natures inquiètes, et Alain n’était un joyeux drille qu’en apparence – nous avait tant fait rire, nous faisait maintenant pleurer. Merci à Thierry Bouclier d’avoir ressuscité l’œuvre et la personnalité d’un auteur profondément original, incarnation d’une littérature et d’un journalisme si authentiquement français. Et même identitaires.
Notes :
- Thierry Bouclier, A.D.G., coll. Qui suis-je ?, éditions Pardès, 11/08/2017,128 pages.
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De Gaulle et Maurras : la leçon de Paul-Marie Coûteaux à Valérie Pécresse
« Ce qui fait la force d’âme de la droite, c’est d’avoir toujours préféré Charles de Gaulle à Charles Maurras », a déclaré dimanche Valérie Pécresse. Mais quelle gourde ! Dans le numéro de Minute paru ce matin, l’ancien député Paul-Marie Coûteaux, membre de la Fondation Charles-de-Gaulle et directeur des Cahiers de l’indépendance, lui répond. Sous forme de cours magistral d’histoire politique. Extrait.
« Que dire devant une telle ineptie ? D’abord que la droite française n’a pas « toujours » préféré de Gaulle à Maurras, notamment à l’époque où l’école d’Action française, que Maurras a fondée et inspirée pendant des décennies, a dominé la jeunesse intellectuelle française, la droite bien sûr mais au delà – l’AF soutint d’ailleurs tous les gouvernements de la Grande Guerre. Parmi tant d‘autres, le jeune Charles de Gaulle dont les parents ont lu et financé l’Action française, journal que, selon le témoignage qu’en a donné sa sœur Agnès, le jeune Charles, puis l’encombrant officier contestataire a constamment lu jusqu’à la seconde guerre.
« Entre autres choses, il en empruntera les conceptions de défense nationale, notamment « l’Armée de métier », et bien sûr sa politique étrangère, « capétienne », de même son obsession d’un exécutif fort et son choix « du pouvoir personnel plutôt que de l’impuissance impersonnelle » comme il le dira à Peyrefitte – c’est d’ailleurs à bon droit que l’on souligne le caractère monarchique de la Ve République, monarchie certes imparfaite comme son fondateur l’a plusieurs fois éprouvé et avoué, tentant des années durant de pousser le Comte de Paris à se présenter à l’élection présidentielle dont il jugeait l’onction indispensable après « une si longue interruption »…
« Sur l’inspiration politique, notamment diplomatique et institutionnelle du Général (qui fut souvent décrit comme royaliste, y compris à l’étranger, de Staline à Roosevelt qui en prirent prétexte pour tenter cent fois de l’écarter), les faits et témoignages sont si multiples qu’il est impossible de tous les reprendre ici : rappelons que, dans les années 1920, de Gaulle donna ses premières conférences au Cercle Fustel de Coulanges, furieusement royaliste, qu’il entretint une longue correspondance avec le Comte de Paris dans laquelle il témoigna envers Lui (il mettait toujours la majuscule !), d’une déférence sans équivoque, et que, quand, un jour, à l’Elysée, Philippe de Saint Robert évoqua son monarchisme, il rectifia de lui-même : non, royalisme ! (cf. Philippe de Saint Robert, Le Secret des jours, Lattès, 1996).
« Pour ce qui est de Maurras, on sait (mais apparemment Mme Pécresse ne sait pas) que de Gaulle dédicaça la plupart de ses ouvrages au « maître de Martigues », qu’il reprit souvent son fameux, et très profond « politique d’abord » et s’entendit plus tard avec Malraux sur cette formule qui va loin : « Marras eut tellement raison qu’il en est devenu fou. » Des divergences, certes, mais entre qui n’y en a-t-il pas (comme avec Péguy ou Barrès, leurs grands mécontemporains) ? Surtout, que de points communs, y compris, comme le montre Stéphane Blanchonnet dans son récent « petit dictionnaire maurassien » sur la République elle-même, que l’un et l’autre entendaient comme Res-Publica, ce que Péguy nommait « Notre Royaume de France » en un beau souci de syncrétisme.
« Et que de détestations communes […] »
Extrait de « Pour instruire Mme Pécresse sur Maurras et sur De Gaulle » par Paul-Marie Coûteaux paru dans Minute n° 2838 daté du 13 septembre 2017
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