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entretiens et videos - Page 786

  • Immigration – « Si les Etats ne protègent pas leurs concitoyens, ceux-ci devront s’organiser », explique le président du NPD allemand


    npd-allemagne

    Le site Egalité & Réconciliation a publié un entretien avec Frank Franz, président du NPD (propos reccueillis par Alimuddin Usmani).

    La politique migratoire est au centre du débat en Allemagne, particulièrement depuis la spectaculaire augmentation de l’afflux de migrants cet été. Ces derniers passent à travers les Balkans, notamment pour rejoindre l’eldorado allemand. Frank Franz, le président du Parti national-démocrate, parti nationaliste fortement opposé à la politique du gouvernement Merkel, nous a accordé un entretien exclusif.

    Le ministre fédéral allemand de l’Intérieur, Thomas de Maizière, a annoncé que le nombre de réfugiés arrivant en Allemagne pourrait atteindre cette année 800 000. Comment le gouvernement Merkel gère-t-il cette crise ?

    L’Allemagne soutient les guerres des États-Unis qui conduisent à l’afflux de réfugiés. À cet égard, le gouvernement est dans une position difficile. La solution serait cependant facile. Les gouvernements européens devraient, en fin de compte, suivre leur propre chemin et dire aux États-Unis de rentrer chez eux. Ensuite, nous ne devons également pas nous soucier des conséquences des guerres américaines auxquelles le gouvernement fédéral participe de manière plus ou moins forcée. 

    L’économie allemande voit, dans le flot des réfugiés, une chance pour combler les lacunes sur le marché de l’emploi. Par conséquent, Ingo Kramer, le patron des patrons allemands, souhaiterait considérablement accélérer les procédures d’asile. Que pensez-vous de cette déclaration ?

    L’économie ne se soucie que des bilans et des actionnaires. Bien entendu, les responsables de l’économie souhaitent obtenir une force de travail qui soit la moins chère possible. Cependant, en cas de chômage, l’économie de va pas contribuer aux coûts. Les coûts engendrés par les millions de chômeurs immigrés sans qualification demeureront à la charge du contribuable. Ainsi, les profits seront privatisés et les pertes et les coûts socialisés. La politique doit mettre un terme à tout ça. 

    Il y a eu plusieurs incidents à proximité du centre de requérants d’asile à Heidenau. Comment vous positionnez-vous face à la violence ?

    Le NPD rejette strictement la violence en tant que moyen dans le débat politique. Nous reconnaissons le monopole de la violence exercée par l’État sans y mettre de condition. L’État doit cependant être capable et désireux de protéger ses citoyens. Si les citoyens sentent – et c’est de plus en plus le cas – que l’État ne veut pas les protéger, alors ils prennent eux-mêmes les choses en main. 

    L’année passée, la République tchèque a fait face à environ 1000 demandes d’asile. La politique sociale allemande n’est-elle pas trop attractive comparée aux autres pays européens ?

    Oui, tandis que les autres pays disent clairement qu’il n’y a pas de place pour ceux qui abusent du droit d’asile, l’Allemagne fait pratiquement la promotion de celui-ci à l’aide de films à l’étranger. C’est une position grotesque. L’Allemagne ne peut pas jouer le rôle de service social à destination du monde entier. À un moment donné nous devons dire : Maintenant ça suffit ! 

    Le média Info Direkt a écrit que des organismes américains payaient des passeurs pour qu’ils acheminent quotidiennement plusieurs milliers de réfugiés vers l’Europe [1]. Pensez-vous que cette information est crédible ?

    Je crois que ces informations sont crédibles. Les États-Unis ont un intérêt géopolitique à déstabiliser politiquement l’Allemagne et l’Europe. C’est-à-dire de recréer les Etats-Unis partout dans le monde. Il serait temps que les gouvernements européens disent finalement aux Etats-Unis qu’ils s’occupent de leur propre continent et qu’ils laissent les autres nations vivre en paix.

     

    http://www.medias-presse.info/immigration-si-les-etats-ne-protegent-pas-leurs-concitoyens-ceux-ci-devront-sorganiser-explique-le-president-du-npd-allemand/37897

  • 2015-08-31 Julien Langella: La jeunesse déclare la guerre à la génération de mai 68 au pouvoir !

  • Entrevue du C.N.C. #22 : Michel Drac et Maurice Gendre

    Michel Drac et Maurice Gendre seront à Lille le 12 septembre 2015 pour une conférence sur le Traité transtlantique. Nous avons sollicité nos deux prochains intervenants pour une courte entrevue qui donnera quelques clefs à nos lecteurs en perspective de la conférence à venir.

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    1) Le Cercle Non Conforme : Merci d'avoir accepté de répondre à quelques questions et de venir le 12 septembre à Lille pour une conférence sur les enjeux et les menaces du Traité transatlantique. Pouvez-vous vous présenter rapidement pour nos lecteurs ?

    Michel Drac : J’ai commis quelques textes dont certains m’ont valu l’intérêt de lecteurs partageant mes préoccupations. Mon message général est simple : il n’y a rien à espérer à l’intérieur du système, donc s’il reste un espoir, c’est en dehors. Je suggère aux dissidents de s’organiser entre eux, pour incuber la matrice d’une contre-société libératrice. Par ailleurs, ayant une formation en finance d’entreprise, je m’intéresse particulièrement aux questions économiques.

    Maurice Gendre : Je suis chroniqueur sur Méridien Zéro, l'émission francophone de Radio Bandera Nera.

    J'ai participé depuis une dizaine d'années à différents media de la sphère dite "alternative" : Ringle Gri-gri internationalTant pis pour VousScriptoblog,Agence info libre et MZ.

    J'ai toujours tenu dans ces différents organes de presse la même ligne : anti-immigration, souverainiste mais favorable à une Europe boréale des peuples et des Nations libres et indépendantes, contre les interventions militaires "humanitaires" en Afrique ou au Moyen-Orient, anti-libérale et anti-libertaire.

    J'ai pu tenir cette "ligne" (fruit de convictions profondes et très ancrées) y compris au sein de la rédaction de Ring, à l'époque où celle-ci était fortement marquée par un atlantisme et un sionisme forcenés (ce n'est plus vrai aujourd'hui), du fait de la présence tutélaire de l'écrivain Maurice G.Dantec.

    En relisant très récemment des articles et des entretiens rédigés à l'époque, il m'a immédiatement sauté aux yeux que premièrement mon ami David Serra n'était définitivement pas un censeur et que tout ce à quoi nous assistons dramatiquement aujourd'hui était au minimum prévisible il y a dix ans déjà.

    Je ne tire aucune gloire d'avoir eu cette lucidité (il suffisait d'ouvrir les yeux), en revanche je me désole que les traîtres, les couards et les salauds qui nous servent de dirigeants n'aient rien fait pour changer de cap.

    2) Le C.N.C. : Quelle est votre actualité militante actuelle. Êtes-vous encore engagés dans l'édition ? Prévoyez-vous d'éditer ou de rédiger prochainement un ouvrage ?

    M. D. : Depuis que j’ai quitté E&R en 2009, je ne milite plus nulle part. J’ai cofondé les éditions du Retour aux Sources en 2007, mais je n’y travaille pas. Un ouvrage regroupant les textes de trois conférences prononcées en 2014, complétés par environ 200 pages de notes, va sortir dans les semaines qui viennent. Il fait en quelque sorte un point de situation sur l’état de la France et propose quelques pistes de réflexion.

    M. G. : En dehors de mon activité syndicale prenante, mon militantisme repose de plus en plus sur la réinformation : articles, conférences, émissions radio etc.

    Désormais, je suis partenaire des éditions du Rubicon. Le dernier ouvrage paru :La jeunesse au pouvoir de Julien Langella est un manifeste salutaire à la gloire des Anciens et contre les vieux cons de la génération 68.

    Cet ouvrage appelle au sursaut les jeunes Français et les jeunes Européens et les invite à tout faire pour sortir de l'apathie et à se lever contre l'effacement du Destin.

    3) Le C.N.C. : Sans livrer la substantifique moelle de votre venue du 12 septembre, pourquoi lutter contre le Traité transatlantique ? En quelques lignes ?

    M. D. : Il faut informer la population. Nous n’empêcherons pas l’adoption de ce traité, s’il doit être adopté. En l’occurrence, la décision sera prise au plus haut niveau, et n’aura évidemment rien de démocratique. Mais en informant la population, nous nous préparons à rebondir politiquement et culturellement sur les conséquences d’une éventuelle adoption, et cela peut d’ailleurs peser indirectement sur le contexte général au sein duquel notre classe dirigeante devra définir ses choix.

    M. G. : Le TAFTA c'est la Bête sauvage. Si on considère que le mondialisme est le stade suprême de l'impérialisme, il faut envisager le TAFTA comme le stade suprême d'un des segments du mondialisme, en l’occurrence l'occidentalisme. > Dimension parfaitement illustrée par le projet de Fédération transatlantique et de Parlement transatlantique.

    4) Le C.N.C. : Allez-vous au cours de votre intervention nous présenter des optiques concrètes de lutte contre le TAFTA ? Nous avons pu constater au M.A.S. que l'affichage public était très insuffisant par exemple.

    M. D. : Ce n’est pas mon rôle a priori, mais si on me pose la question, je suggérerai sans doute de repérer les urticants et de leur donner la plus grande publicité possible. Les gens, en général, ne réagissent que quand leurs intérêts personnels sont engagés à court terme. Il faut donc construire une stratégie de communication segmentée, et pour cela mettre en lumière les points qui fâchent telle ou telle catégorie de la population. Incidemment, j’aimerais pouvoir vous dire qu’il faut parler d’indépendance nationale et de souveraineté populaire, mais soyons lucide : pour la majorité de nos contemporains, ces mots ne signifient plus rien. A la rigueur, une fois qu’on les aura réveillés en leur parlant de leurs petits sous, on pourra élargir le propos.

    M. G. : La seule chose que nous puissions faire à notre modeste niveau est d'informer, informer, informer, informer et... informer. Faire circuler des vidéos sur la Toile, donner des conférences, ne pas négliger le tractage (pénible mais parfois payant). C'est peu ? Oui fort peu malheureusement au regard des enjeux qui sont absolument gigantesques. Mais je crains que nous ne puissions pour le moment faire plus. Nous ne devons jamais oublier que nous avons le Devoir de le faire. C'est un impératif catégorique. Ne serait-ce que pour pouvoir être en paix avec notre conscience et pouvoir dire : "Cette immense saloperie n'aura pas été faite en notre nom". Mon véritable espoir de voir ce projet funeste capoter vient d'une fronde - peu médiatisée bien évidemment - de certains congressistes US contre le TAFTA. Ils viennent essentiellement des rangs des Démocrates populistes et des Républicains isolationnistes qui eux non plus ne veulent pas voir les États-Unis disparaître dans un magma informe et dépourvu d'âme. A moins que cette opposition ne soit elle aussi parfaitement contrôlée. Un virus que la matrice aurait injecté pour mieux le maîtriser. Malheureusement, ce n'est pas du tout inconcevable. Des députés européens je n'attends en revanche rigoureusement rien. Si ce n'est un à-plat-ventrisme de tous les instants.

    5) Le C.N.C. : Pour conclure, pouvez-vous nous dire quelques mots sur la situation économique à prévoir pour la rentrée de septembre ?

    M. D. : La conjoncture est en train de dessiner la configuration de base d’une tempête parfaite. On ne s’en rend pas forcément compte, parce que la classe dirigeante truque désormais tous les compteurs avec la complicité active des médias, mais pour qui prend le temps d’étudier sereinement les données objectives, c’est clair et net : avis de gros temps. La crise de l’euro est maintenant entrée en phase critique. L’agonie promet d’être longue et douloureuse. J’espère qu’elle sera suffisamment spectaculaire pour anéantir les derniers reliquats de légitimité qui restent à nos dirigeants déconsidérés. Je fonde cet espoir sur la nullité des dirigeants français, la psychorigidité des Allemands, la perfidie des Britanniques, le cynisme des Américains et l’irresponsabilité des Grecs. Un casting de rêve, n’est-ce pas ? De toute façon, au-delà de l’euro, c’est tout le système monétaire international qui est en train de sombrer, dans la foulée d’un système financier complètement déséquilibré. Tôt ou tard, nous allons traverser une convulsion globale monstrueuse. Nos dirigeants s’y préparent. Les Grecs leur servent de cobayes, à mon avis. Dans ce contexte, l’économie française est à l’arrêt. Elle sous-performe pratiquement dans tous les domaines. Nous allons vers un climat social très détérioré, qui pourrait dessiner une toile de fond intéressante pour les échéances politiques 2017.

    M. G. : Pour ne rien vous cacher, je crains infiniment l'automne qui arrive. La dégringolade des bourses chinoises constitue peut-être un des prolégomènes de la Grande Catastrophe à venir. La question semble être désormais : d'où le chaos va-t-il partir ? L'étranglement de la Grèce se poursuit et reposera inéluctablement la question de la viabilité de l'euro, l'Ukraine est dans une situation calamiteuse (et je ne parle que de la dimension économique), les banques régionales allemandes sont toujours truffées d'actifs toxiques, des bulles immobilières restent menaçantes (au Royaume-Uni notamment), la valeur notionnelle des produits dérivés a très largement dépassé son niveau d'avant la crise des subprimes, on assiste à des choix totalement délirants qui sombrent dans l’irrationnel le plus complet (récemment le Mexique a emprunté à 100 ans !), mais le plus grave reste évidemment la politique "accommodante" des banques centrales qui finira inéluctablement par nous exploser à la figure et entraînera un effondrement incontrôlable des monnaies. Il faut ajouter à cela, un déferlement migratoire cataclysmique dont les conséquences prochaines seront ravageuses. 

    http://cerclenonconforme.hautetfort.com/

  • Jérôme Sainte-Marie: «En 2017 le clivage droite-gauche laissera la place au clivage peuple- élite»

    Spécialiste de l'opinion et analyste politique Jérôme Sainte-Marie publie un passionnant essai sur la recomposition politique à laquelle nous assistons en France et en Europe.

    En 1992, Charles Pasqua déclarait après la défaite du traité de Maastricht, «plus rien ne sera jamais comme avant». Il est mort au juillet 2015 et le clivage droite /gauche domine toujours la politique française...

    L'invariant dans une démocratie représentative, c'est la présence d'une majorité au pouvoir et d'une minorité dans l'opposition. Il s'agit d'un dispositif résultant de la logique électorale, rien de plus. Quant au clivage entre une gauche et une droite, s'il a structuré la vie politique européenne sur l'essentiel du XXème siècle, il n'a rien d'inévitable. Sur la durée, il est frappant de constater la variation du contenu idéologique de cette opposition formelle. Cependant, ce clivage s'est à peu près maintenu tant que les principaux partis de gauche et de droite ont réussi à persuader les citoyens qu'ils étaient en conflit sur les principaux enjeux. Le problème aujourd'hui est que l'opinion française a de plus en plus le sentiment qu'ils sont d'accord sur l'essentiel, tout en se disputant sur l'accessoire. La succession rapide des alternances à la tête du pays a favorisé cette perception, car les différences entre les politiques publiques réellement menées ont semblé très proches, et leurs résultats décevants. A l'inverse, une troisième force, qui est tenue en lisière du pouvoir, propose une vision du monde et une politique alternatives. En s'emparant de sujets sur lesquels la gauche et la droite de gouvernement ne se dissocient plus guère, le Front national déstabilise l'ordre électoral ancien.

    Vous considérez comme très probable la présence du FN au second tour en 2017. Pourquoi ?

    Tout d'abord, depuis des mois les sondages d'intentions de vote indiquent tous la qualification de Marine Le Pen pour le second tour. Si certains d'entre eux enregistrent qu'elle serait talonnée ou même dépassée par le candidat principal de la droite, selon la personnalité testée comme candidat des Républicains, à chaque fois la candidate frontiste serait hors de portée du candidat socialiste. Cette raison n'est bien sûr pas suffisante, car l'on sait la fragilité d'un choix politique exprimé hors contexte électorale, et à près de deux ans de l'échéance. C'est pourquoi il faut se pencher sur les élections qui ont eu lieu depuis 2012, et à chaque fois l'affaissement de la gauche sur elle-même s'est amplifié, cependant que le Front national raffermissait son emprise. Par exemple, le fait que les listes lepénistes aient rassemblé un quart des suffrages exprimés aux européennes comme aux départementales constitue un indice révélateur, car il s'agit dans les deux cas de scrutins moins favorables au Front national que ne l'est l'élection présidentielle. Enfin, si l'on considère les facteurs explicatifs de ses succès, et des revers de la gauche, on ne voit pas de raisons à ce qu'ils disparaissent d'ici au printemps 2017.

    Les querelles de famille peuvent- elles freiner cette ascension ?

    Le vote pour le Front national n'est pas un mouvement d'humeur, mais un choix mûri et réitéré, autant que celui en faveur du Parti socialiste ou des Républicains. De plus, une majorité de Français estiment aujourd'hui que le parti dirigé par Marine Le Pen devrait être considéré comme «un parti comme les autres». A tort ou à raison, les positions frontistes sur l'immigration, l'identité nationale ou la sécurité sont largement approuvées. Il s'agit d'un socle solide. De plus, depuis plus d'un an, la quasi-totalité des sympathisants frontistes interrogés dans les sondages voient en Jean-Marie Le Pen un obstacle plutôt qu'un atout. Certes, la forme qu'a pris le conflit interne entre lui et la direction du parti aura troublé plus d'un militant. Le prix à payer pour Marine Le Pen pour son émancipation politique paraît cependant faible. Sur la durée, ces épisodes tumultueux favoriseront l'idée d'un profond renouvellement idéologique, et rendront intenable l'ostracisme dont ce parti fait l'objet. En fait, le principal risque électoral serait plutôt que la normalisation du Front national aille trop loin, alors que son attractivité repose en partie sur son opposition affichée au système politique.

    A vous lire la gauche a perdu beaucoup d' intellectuels, d'ouvriers, une partie des professeurs, que lui reste-t-il ?

    Le secret des renaissances successives de la gauche réside dans la croyance qu'elle était la protectrice du salariat, contre une droite qui aurait défendu la rente et le profit. Aussi près qu'en 2012, François Hollande avait réussi à se faire élire en brocardant son adversaire comme «Président des riches». Au second tour, parmi les ouvriers, 58% des suffrages exprimés se sont portés sur le candidat socialiste. Cette croyance en la gauche s'est aujourd'hui effondrée, le monde du travail ne se sentant guère défendu contre les assauts du chômage et la concurrence de la main d'œuvre étrangère, y compris dans le cadre européen. Les ouvriers et les employés sont bien plus critique à l'égard du pouvoir socialiste que ne le sont les cadres ou les retraités. Autre pilier, les fonctionnaires sont atteints par le doute, y compris les enseignants. Enfin le monde de la culture et du spectacle, très dépendant de la dépense publique, redoute la contraction de celle-ci et se sent moins défendu par la gauche. Les fidélités électorales envers le parti socialiste se défont, comme l'atteste lors des scrutins récents la sur-abstention de ses anciens électeurs. Or, si la gauche ne parvient plus à être identifiée comme la défenseuse de larges groupes sociaux, elle risque d'être ballotée au fil des élections comme un bateau sans quille. La proclamation de «valeurs» abstraites, hors sol, ne lui serait pas alors d'un grand secours.

    Hollande est-il le fossoyeur de la gauche ?

    Le tournant qu'a imposé à la gauche François Hollande avec la proclamation du «pacte de responsabilité» doit être pris au sérieux. Même si la concrétisation de celui-ci devait être modeste, le traumatisme subi par son électorat est considérable. La nouvelle ligne proclamée par le pouvoir socialiste revient à considérer que la gauche a eu tort durant des décennies en matière de politique économique et sociale. Son problème est qu'il n'a pas d'électorat de rechange. Il faut voir plus loin: c'est tout le clivage gauche-droite qui est miné par cette reddition idéologique. Et le recul annoncé de l'Etat amène les catégories sociales les plus vulnérables vers d'autres horizons que la sociale-démocratie, par exemple vers la préférence nationale. J'insiste sur le fait que l'aveu que constitue le «pacte de responsabilité» atteint la crédibilité du projet social de toute la gauche, et pas seulement du Parti socialiste.

    Les gauches type Syriza ou Podemos ont- elles un avenir en France ? Si ce n'est pas le cas, pourquoi ?

    Vu la crise sociale et politique que connaît la France, le recul de toute la mouvance à gauche du Parti socialiste suscite l'interrogation. Beaucoup plus que les différences entre les systèmes électoraux ou bien entre les personnalités, je crois que la clef de cette énigme se trouve dans l'histoire politique des différents pays. Entre France, depuis 1945, l'extrême-gauche, à commencer par le Parti communiste, a été intégré au régime, participant à la construction de notre système social, et parfois même au gouvernement. A l'inverse, l'extrême-droite en a été tenu à l'écart. La situation est tout autre, et même symétriquement opposée, en Espagne ou en Grèce. Le sentiment que la société française est dans l'impasse atteint pour cela toute la gauche, mais non le Front national, justement parce qu'il n'a pas de bilan à justifier. A l'inverse, ailleurs, Podemos ou Syriza peuvent prétendre constituer des alternatives nouvelles.

    Vous écrivez que la gauche fixe sa doctrine sur l'égalité et la droite sur l'identité, pouvez-vous préciser cette classification ?

    En réalité l'une comme l'autre se sont d'abord attachés à promouvoir l'égalité, mais tandis que la droite mettait l'accent sur l'égalité civile entre les individus, la gauche se proposait d'établir l'égalité sociale entre les groupes. Il en va tout autrement aujourd'hui. L'identité nationale ou l'identité de classe ont été délaissées au profit d'une identité européenne évanescente, et d'identités religieuses, ethniques ou sexuelles virulentes. On reconnaît ici l'obsession contemporaine pour la «diversité» ou pour la «parité». L'imaginaire national et républicain s'en trouve bouleversé. Tout se passe comme si les reculs en matière économique et social devaient être compensés par la distribution de privilèges à des groupes ciblés, selon un modèle anglo-saxon. Les élites applaudissent, mais les catégories populaires s'inquiètent de cette reformulation du discours politique français, autrefois universaliste. Comme elle est au pouvoir et comme elle beaucoup plus engagé dans cette voie, la gauche est particulièrement déstabilisée par le «marché aux identités» qu'elle a ouvert.

    Vous ne croyez pas à la tripartition. A quoi peut ressembler la nouvelle bipolarité ?

    A défaut de proportionnelle aux législatives et avec une élection du président de la République au scrutin universel direct, la tendance au clivage binaire est la plus forte. Sous le mandat de François Hollande, le Front national s'est hissé à un niveau électoral proche de celui de la gauche ou de la droite. Le génie est sorti du flacon où il avait été maintenu durant trente ans, avec des scores significatifs mais éloignés de la qualification pour le second tour, l'accident du 21 avril 2002 mis à part. Désormais, comme l'ont montré les élections départementales, le Front national impose sa présence au tour décisif. Telle est aussi l'hypothèse vraisemblable pour la présidentielle de 2017. Ce sera le moment de vérité. Le courant politique qui sera éliminé à l'issue du premier tour, la droite ou plus probablement la gauche, entrera dans une crise sans précédent. Contre le Front national, les débris de la force vaincue s'agrègeront à la force victorieuse, sur le modèle de l'union des tenants du «oui» contre ceux du «non» lors du référendum de 2005 à propos de l'Europe. Comme cela s'esquisse dans plusieurs pays européens, et comme cela s'observe dans nombre de villes et départements français, où le Parti socialiste a pratiquement disparu, le clivage gauche-droite aurait alors vécu.

    Comment définir le nouvel ordre démocratique ?

    En premier lieu comme un ordre cohérent et moderne, correspondant bien mieux aux différences d'intérêts sociaux et d'émotions partagées que ne le fait l'ordre électoral actuel. De fait, si l'abstention atteint des hauteurs vertigineuses, c'est d'abord parce que le clivage entre la gauche et la droite ne renvoie plus aux représentations dominantes parmi les électeurs. Ensuite, le nouvel ordre décrit est avant tout vertical, opposant les catégories populaires aux élites, au sens très large, perpendiculairement au clivage gauche-droite. Ce nouvel ordre démocratique oppose deux forces, l'une dominée par le Front national, sous un vocable quelconque, l'autre faisant la synthèse de ce qu'il y a de commun au libéralisme économique et culturel professé dans les partis de gouvernement à gauche ou à droite. Selon ce schéma, le rapport à l'Europe, à la mondialisation et à l'identité nationale est bien sûr décisif dans le reclassement des uns et des autres. Le contexte actuel de paupérisation et de désarroi favorise l'émergence de ce nouvel ordre démocratique. Il est déjà présent par fragments, dans l'opinion publique, dans les résultats électoraux, et sur les territoires locaux. Mais l'opportunité de sa concrétisation complète et nationale en est le scrutin présidentiel de 2017.

    Vincent Tremolet de Villers

    notes

    Diplômé de Sciences Po Paris et d'une licence d'histoire, Jérôme Sainte-Marie a travaillé au Service d'Information du Gouvernement et à l'institut Louis Harris. Il a ensuite dirigé ensuite BVA Opinion de 1998 à 2008 puis CSA Opinion de 2010 à 2013. Il a fondé en parallèle l'institut iSAMA en 2008.

    Il dirige actuellement Pollingvox, une société d'études et de conseil spécialisée dans les enjeux d'opinion, fondée en 2013. Il publie ces jours- ci, Le nouvel ordre démocratique (Editions du Moment).

    source : Le Figaro :: lien

    http://www.voxnr.com/cc/politique/EuuplEEFFlcjmKEIuO.shtml

  • Interviews de Mgr Olivier Ribadeau-Dumas et Marion Maréchal-Le Pen

    En raison de la "polémique" soulevée par les médias à propos de l'inviation de Marion Maréchel-Le Pen à une université d'été organisée par le diocèse de Fréjus-Toulon (voir communiqué), il est interessant de mettre en perspective ces deux interviews parues le même jour.

    Tout d'abord, celle de Mgr Olivier Ribadeau-Dumas, porte-parole de la Conférence des évêque de France, dans La Croix où il affirme à propos du FN qu' "un certain nombre de ses idées sont clairement en opposition avec l’Évangile et avec la vision chrétienne de la société"...mais sans vraiment les préciser ni aborder les points non négociables (voir interview à Do Rzeczy) :

    1420623174094726322"La position de l’Église en France sur le Front national n’a pas varié. Les déclarations de 1985 du cardinal Decourtray restent toujours valables, ainsi que celles qui ont suivi les années d’après. Nous continuons de dire que le rejet de l’étranger, le refus de l’accueil de l’autre, une conception et une vision de la société renfermées sur la peur, posent problème.Un certain nombre de points développés par le Front national ne sont pas conformes à la vision que l’Évangile nous invite à défendre (...)

    D’un point de vue juridique, le FN est un parti politique comme les autres.Mais un certain nombre de ses idées sont clairement en opposition avec l’Évangile et avec la vision chrétienne de la société. Cependant, le fait que des catholiques se tournent vers le FN pose question et nous invite à leur parler (...)

    La société dans laquelle nous vivons est, que nous le voulions ou non, que nous le regrettions ou non, marquée par la mondialisation. Elle est multiculturelle. C’est dans cette société, également frappée par l’injustice, que nous sommes amenés à agir. Et comme le pape François ne cesse de le dire, nous sommes invités à avoir sur elle un regard de bonté et de miséricorde, plutôt qu’un regard de rejet. Construisons ensemble cette société."

    De son côté, Marion Maréchal-Le Pen s'affiche dans Famille Chrétienne en catholique décomplexée d'une nouvelle génération :

    Marion-Marechal-Le-Pen1-470x327"Les seules personnes choquées par cette affaire sont les journalistes ! C’est une illustration de la fracture entre le monde médiatique et le monde réel. Pour le public catholique du Var la question ne se pose plus ! (...) Ce qui est remarquable dans ce rassemblement c’est la volonté de voir ce qui nous rassemble avant de focaliser sur ce qui nous divise. Il y a une capacité de cohabitation étonnante entre des gens qui viennent d’horizons politiques très différents. Cela change des plateaux télé ! L’état d’esprit est serein. Il consiste à mettre en commun l’essentiel, comme le respect de la vie humaine (...)

    Nous sommes face à une génération décomplexée par rapport à leurs aînés. Les jeunes catholiques ne s’encombrent plus avec l’autocensure et la culpabilité. Ils en ont assez de devoir en permanence s’excuser. Ils sont libres et veulent sortir du malaise. Les chrétiens en politique avaient pris l’habitude de se faire discrets de peur d’être taxés de conservateurs. Ils étaient diabolisés (...)

    Les catholiques ont été victimes de christianophobie à la Révolution française. Après un temps d’accalmie, ce phénomène est en train de revenir. J’observe une forme d’agressivité manifeste à leur égard. Cela pousse la nouvelle génération à agir (...) Je fais partie de cette génération anti Mai-68 (...) Ma génération a vécu en première ligne les conséquences de ce travail de sape éthique et moral.

    Il y a toujours eu des catholiques au FN et des personnalités de premier plan. Le choix d’un parti politique est toujours un choix par défaut (...) Au FN (...) les catholiques n’ont pas vraiment besoin de changer la ligne qui leur convient. Je crois que sur la bioéthique et les questions du mariage et de la filiation, le FN est déjà en cohérence avec leurs attentes (...)

    C’est très difficile d’être catholique tout seul ! Je suis assez seule dans mon combat politique. C’est pour moi important de rencontrer des catholiques qui défendent des valeurs auxquelles je tiens. Cela renforce mes convictions en adéquation avec ma foi (...)"

    Philippe Carhon

    http://lesalonbeige.blogs.com/my_weblog/web.html

  • Amiens, 4 septembre : conférence sur la guerre en Ukraine

    A l'invitation de Thomas Joly, Secrétaire général du Parti de la France, Guillaume Cuvelier, militant nationaliste français qui est parti se battre au Donbass aux côtés des forces pro-russes, donnera une conférence vendredi 4 septembre à Amiens (19h30) sur le thème Ukraine, les nationalistes face au retour de la guerre en Europe.

    Erreur

    L'objectif de cette conférence ne sera pas de faire de la propagande pour un camp ou un autre mais de partager l'expérience de quelqu'un qui a vécu sur le terrain une guerre civile européenne moderne et d'en tirer les conséquences pour les nationalistes français qui risquent, eux aussi, d'y être un jour confrontés.

    La participation aux frais est de 10 € par personne et comprend un apéritif avec amuse-gueules.

    La réservation est obligatoire au 07.83.52.55.83 ou pdfdu80@yahoo.fr

    http://synthesenationale.hautetfort.com/archive/2015/08/26/amiens-4-septembre-conference-sur-la-guerre-en-ukraine-5675401.html

  • Michel Drac : « La crise commencée en 2007 avec les subprimes n’est qu’un détonateur, la véritable charge n’a pas encore explosée » | Entretien pour Le Cercle Curiosa.

    En février 2013, nos concurrents et amis des éditions Alexipharmaque publiaient « Entretiens avec des hommes remarquables », un recueil d'entretiens réalisés par le Cercle Curiosa, avec Luc-Olivier d'Algange, Christian Bouchet, Klaus Charnier, Francis Cousin, Alexandre Douguine, Michel Drac, Arnaud Guyot-Jeannin, Thibaut Isabel et Laurent James. L'ouvrage est préfacé par Alain de Benoist.

    Avec leur aimable autorisation, nous publions aujourd'hui l'entretien de Michel Drac tout en vous proposant de vous procurer l'ouvrage en ebook pour découvrir les riches écrits des autres contributeurs...


    Le Cercle Curiosa : Dans la profession de foi de Scriptoblog, le site dont vous êtes un des fondateurs, nous pouvons lire la chose suivante : « L’esprit Internet, mis au service de la création littéraire. […] Ce site est destiné à tous ceux qui veulent, en écrivant, en lisant, en échangeant, refaire un sens, retrouver le goût du combat, refuser la passivité. […] Rejoignez-nous, restez vivant. » Au milieu des ruines du spectacle mondial, Internet peut donc nous aider à rester vivant et autonome ?

    Michel Drac : D’abord c’est mieux que rien. Ensuite, l’important, c’est d’en sortir si on y rentre. Il faut se méfier du tout Internet, parce que le pouvoir peut couper l’Internet ou le mettre sous contrôle, à la Chinoise, n’importe quand. Mais pour l’instant, c’est un bon moyen de faire circuler l’information et de construire du sens collectivement.

    La décroissance, en invitant chacun à la frugalité matérielle, peut-elle générer une ascèse spirituelle, un Retour aux Sources, et nous relié ainsi, tel un chaînon invisible, aux « principes immuables et éternels » (Guénon) ?

    L’actuel culte de la croissance n’est rien d’autre qu’une paraphrénie cherchant à se cautionner elle-même. Vous avez vu le film Shutter Island ? Eh bien DiCaprio dans ce film, c’est l’Occident contemporain. Ce que nous appelons la « croissance », c’est le mécanisme qui consiste à recycler le réel dans le cadre paraphrénique. La seule chose que mesure désormais la « croissance », c’est le territoire codé par le signe monétaire. Si demain on établissait la taxe carbone, « l’activité économique » des entreprises chargées de répercuter à leurs clients le poids de cette taxe entrerait dans le calcul du PIB ! Soyons clair, c’est un délire paraphrénique, et bientôt une paranoïa pure et simple. Donc, évidemment, il faut sortir de la « croissance » telle qu’on la mesure aujourd’hui. Faut-il pour autant sortir de la croissance réelle, c’est-à-dire l’expansion de la production ? Sur ce point-là, j’aurais tendance à donner une réponse plus nuancée. Il est clair que nous produisons beaucoup de choses inutiles voire nuisibles. Objectivement, si on fabriquait moins de téléviseurs, on ne se porterait pas plus mal. Par contre, nous manquons de biens de première nécessité, ou en tout d’une utilité manifeste.

    Je ne verrais pas d’inconvénients, par exemple, à ce qu’on fasse croître la production de nourriture saine, de logements décents, de vêtements solides et esthétiques à la fois. Et, n’en déplaise aux rêveurs, avec les densités de population contemporaines, ce ne sera possible que dans le cadre industriel. Je crois que nous avons besoin d’une autre croissance, pas forcément d’une décroissance. Il s’agit de sortir de la paraphrénie pseudo-productiviste induite par l’économie capitaliste contemporaine, qui se cherche constamment des débouchés, même insolvables à moyen terme, pour employer un énorme capital sur-accumulé. Qu’une autre mesure de la production intègre, dans ses paramètres, la nécessité de préserver, entre autres choses, le lien entre l’homme et la nature, entre l’homme et sa lignée, entre l’homme et le règne animal, n’est en rien incompatible avec la poursuite de la croissance, la vraie, celle de ce qui nous sert, celle de ce qui nous rend plus humains. Concernant maintenant la nécessité de l’ascèse, je pense, comme pas mal de monde avant moi, qu’il y a plusieurs types d’hommes dans l’humanité. Il est évident que les méditatifs se portent d’autant mieux qu’ils possèdent moins : ils recherchent les avantages spirituels de la non possession, condition sine qua non du non attachement. C’est une chose. Mais vous ne pouvez pas demander la même chose aux gens ordinaires. Eux, ils veulent « prendre du bon temps », « ne pas s’en faire ». Il n’y a aucun mal à ça, cette diversité humaine est une bonne chose. Il faut en tenir compte si on veut formuler un projet crédible et qui puisse être accepté par les masses – surtout après le conditionnement consumériste qu’elles ont subi.
    Donc, en résumé : pour une autre croissance, qualitative plus que quantitative, réelle et non virtuelle – avec, pour des minorités qui en feraient le choix, la possibilité d’une décroissance soutenable. Mais seulement pour ces minorités. Si tout le monde pouvait atteindre au non attachement, depuis le temps, ça se serait vu.

    Notre monde ne commence-t-il pas à ressembler à celui du film Resident Evil avec ses zombies, ses derniers humains et un virus qui aurait échappé au contrôle d’une hyperclasse refugiée sous terre, en Enfer ?

    Ce qui est sûr, c’est que notre monde commence à ressembler à l’Enfer tel que Bernanos le définissait : « L’Enfer, c’est de ne plus aimer. » C’est un enfer comique, d’ailleurs, parce que les damnés affectent souvent de s’y réjouir, n’ayant majoritairement pas conscience de leur condition. Cela étant, où est l’hyperclasse ? Je crois qu’ici, il faut, avant de répondre, définir le terme. Si par hyperclasse on entend, comme Jacques Attali, disons le 0,01 % le plus riche de l’humanité, les « hypernomades » titulaires d’un droit de résidence dans toutes les grandes capitales, je ne suis pas vraiment sûr que ces gens-là soient réfugiés sous terre, ni qu’ils aient perdu le contrôle de leur virus. On dirait plutôt qu’ils entendent se réfugier en altitude ; ils font du ski à Gstaad ou à Megève, et se moquent bien de ce qui peut se passer dans les plaines, là où l’air est pollué. Au fond, ils sont, à ce stade, plutôt contents de ce qui se passe, je suppose. Leur refuge, ils ne le vivent pas comme un enfer. Après tout, pour les démons, l’Enfer fait figure de paradis. Ensuite, si on s’intéresse au 0,000001 % de la population qui forme la vraie hyperclasse, c’est-à-dire ceux qui décident, et voient à long terme, là, il est possible que ces gens-là commencent à s’inquiéter pour de bon. Parce que, voyez-vous, la perte de contrôle, elle n’est pas là, mais on la sent venir. On n’est pas dans Resident Evil, on en plante juste le décor, pour l’instant. Ça viendra. Notre monde, à ce stade, me fait plutôt penser à La compagnie des glaces, pour prendre une autre référence grand public. Il y a les privilégiés, les actionnaires de la « Compagnie », qui ont des bulles chauffées où ils boivent des martinis à côté de plages artificielles paradisiaques ; il y a le populo, qui grelotte sur une terre frigorifiée, et se fait déplacer de force, le long de voies ferrées plus ou moins sûres ; et puis, tout en haut, chez les vrais patrons, il y a une angoisse diffuse, tandis que la « Sécurité » prend le contrôle de la « Compagnie ». Lisez ce vieux bouquin des 70’s. C’est terriblement daté sur certains plans, mais l’allégorie est bien vue, quand même.

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  • Les Etats-Unis auront le dessous face à l’axe Moscou–Pékin

    Interview de Folker Hellmeyer,* analyste en chef de la Bremer Landesbank

    Folker Hellmeyer, analyste en chef de la Bremer Landesbank, n’a aucun doute à propos de l’avenir du système économique mondial: l’axe Moscou–Pékin l’emportera sur l’ancien dominateur que furent les Etats-Unis. Ces deux capitales élaborent une stratégie à long terme et ne recherchent pas de profit à court terme. En raison de son obéissance aveugle, l’Union européenne pourrait compter parmi les perdants. Aujourd’hui déjà, les sanctions causent des dommages considérables à l’Allemagne et aux autres Etats de l’Union européenne.

    Deutsche Wirtschaftsnachrichten: Les Etats de l’Union annoncent toujours de nouvelles pertes en raison des sanctions contre la Russie. A votre avis, quel dommage les sanctions ont-elles déjà causé?

    Folker Hellmeyer: Le dommage dépasse de loin les chiffres suggérés par les statistiques. Commençons par l’économie et par le dommage enregistré jusqu’à maintenant. La diminution annuelle des exportations allemandes en Russie, qui s’est chiffrée à 18% en 2014 et à 34% durant les deux premiers mois de 2015, ne reflète qu’un effet primaire. Il y a aussi des effets secondaires. Les pays européens qui commercent beaucoup avec la Russie, tels la Finlande et l’Autriche, accusent un refroidissement sensible de leur conjoncture. Par conséquent, ces pays passent moins de commandes en Allemagne. Pour éluder les sanctions, de grands groupes européens envisagent d’implanter des sites de production particulièrement efficients en Russie. Nous perdons ainsi des capitaux potentiels, qui constituent la base de notre bien-être et qui échoient à la Russie.

    Il n’est pas encore possible d’envisager une fin prochaine des sanctions. Quel pourrait être le montant de la facture que devra régler l’industrie allemande d’exportation?

    Envers la Russie, l’Allemagne et l’Union européenne ont mis en péril leur crédibilité économique. Elles ont ébranlé la confiance mise en elles. Il faudra plusieurs années pour rétablir cette confiance. Entre la signature et la livraison d’exportations de biens d’équipement allemands et européens s’écoulent jusqu’à cinq ans. Pour cette raison, Siemens vient de faire son deuil d’un gros projet. Alstom n’a pas reçu commande du trajet Moscou–Pékin. Non seulement pour l’Allemagne, mais aussi pour l’UE dans son ensemble, les dommages potentiels sont donc beaucoup plus importants que les données actuelles ne l’indiquent. Les dommages futurs ne peuvent être évalués avec précision, mais ils sont considérables.
    De plus, l’axe Moscou–Pékin constitue, dans le cadre de l’Organisation de coopération de Shanghai (OCS) et des pays BRICS, le plus grand projet de croissance des temps modernes, l’établissement de l’infrastructure eurasienne de Moscou à Vladivostok, à la Chine méridionale et à l’Inde. On apprendra ultérieurement dans quelle mesure ces pays en pleine expansion considèrent, dans le cadre de ces projets énormes, la politique des sanctions comme un affront non limité à la Russie.
    Visiblement, la capacité d’abstraction fait défaut à quelques protagonistes de la politique européenne dans leur action en notre nom.

    Qui supportera finalement le dommage?

    Le dommage mesurable consiste en une croissance non réalisée, en des salaires non perçus, au manque de contribution aux assurances sociales ainsi que de recettes fiscales. Il en va ainsi des derniers douze mois et des prochaines années. Les citoyens allemands et des autres pays de l’UE payent ce prix par la limitation de leur bien-être et de leur stabilité. Le dommage non mesurable consiste en risques géopolitiques accrus que courent les habitants de l’UE.

    Considérons maintenant la situation en Ukraine de façon terre-à-terre. Le gouvernement de Kiev semble avoir pour intérêt primordial de maintenir une situation telle qu’il reçoive toujours de nouveaux crédits. Quand se décidera un politicien occidental à parler clairement?

    En fait, c’est énervant. Les gens qui ne sont pas axés seulement sur les «médias occidentaux de qualité» s’étonnent que les médias cachent les agressions de Kiev et les lois discriminatoires adoptées par le gouvernement de Kiev, qui ne correspondent pas du tout aux valeurs et à la démocratie occidentale. Je veux bien croire que M. Steinmeier s’exprime sans ambages à portes fermées. Décisif est toutefois si le comportement au-delà de l’Atlantique le soutient. A cet égard, j’attire l’attention sur les propos curieux tenus par Mme Victoria Nuland, représentant les intérêts des Etats-Unis en Europe orientale. C’est un fait que, lors du coup fomenté en Ukraine, une oligarchie de tendance amicale envers Moscou a été remplacée par une oligarchie favorable aux Etats-Unis. Il s’agissait de géopolitique qui servait des forces tierces, mais assurément ni l’Allemagne, ni l’UE, ni la Russie, ni l’Ukraine.

    La ministre des Finances Natalie Jaresko est une ancienne collaboratrice du ministère des Affaires étrangères américain, qui n’a acquis la citoyenneté ukrainienne qu’un jour avant sa prestation de serment. L’ancienne employée de banque en placements est-elle simplement imbattable ou y a-t-il un plan de maître à l’arrière-plan?

    Je ne la connais pas personnellement. Elle a fait l’objet de nombreux écrits, dont l’expression «imbattable» ne provient pas forcément. Le fait que des postes importants de l’administration ukrainienne soient occupés par des personnes externes, extrêmement proches des Etats-Unis et de leurs institutions, reflète le caractère géopolitique du coup d’Etat. La notion de «plan de maître» peut donc s’utiliser en l’espèce.
    Une personnalité importante de la politique allemande récente qui n’est plus en fonctions disait, lors d’un entretien bilatéral, que ce qui décrit le mieux la géopolitique américaine sur l’échiquier ukrainien est le sang de «pions» ukrainiens, les champs de la bande extérieure de l’échiquier formée par Moscou et les attaques contre le centre de pouvoir de Pékin. Je partage cette opinion.
    C’est un fait que les pays en pleine expansion se dérobent à l’hégémonie des Etats-Unis. La fondation par ces pays d’institutions concurrençant la Banque mondiale (BAII) et le FMI (Nouvelle banque de développement) le manifestent clairement, ce qui déplaît au dominateur encore en fonctions. Les centres actuels de crises internationales tels que l’Afghanistan, l’Irak, la Syrie, la Libye, l’Egypte et l’Ukraine reflètent ces luttes de pouvoir. Ne voulions-nous pas établir partout la démocratie et la liberté? Voyons les succès remportés …

    Divers Etats de l’UE, parmi lesquels figurent l’Italie, l’Autriche et la Hongrie, bougonnent de plus en plus contre les sanctions. En revanche, une unanimité presque fantomatique règne en Allemagne. Quelles en sont les raisons?

    Le citoyen allemand est rassasié. Malgré les affaires qui lui échappent, il va bien, les prochaines vacances sont toutes proches. Pour s’exprimer de manière politiquement correcte, son attitude envers la géopolitique des Etats-Unis est fort polie, notre politique aussi. Le nivellement politique et médiatique de cet ensemble de thèmes exerce ses effets.

    Quels effets exercent les sanctions dans les relations germano-russes? 

    Les relations sont ébranlées sur le plan politique. Toutefois, les deux parties poursuivent leur dialogue, ce qui est fondamentalement positif. Moscou est très déçu de la politique allemande. La Russie estime de manière très réaliste la capacité allemande de formuler et de réaliser, dans l’intérêt de l’Allemagne et de l’Europe, une politique indépendante des intérêts américains. La situation semble meilleure sur le plan des entreprises. On recourt pleinement aux divers niveaux d’entretien. On se prépare au jour X après les sanctions. Toutefois, un rapide essor au niveau d’avant la crise est peu vraisemblable. La Russie est un ours. De nouvelles voies d’approvisionnement sont construites maintenant, qui ne seront pas simplement abandonnées après la fin des sanctions. Les choix fixés sans réflexion semblent en vogue à l’Ouest, mais non à Moscou. Chaque jour marqué par la politique des sanctions nous éloigne d’un avenir commun.

    Quelles conséquences ont les sanctions dans les économies de l’UE?

    Une croissance des exportations et un dividende de paix font défaut. Nous réformons les pays faibles de la zone euro et rétablissons, au prix de sacrifices importants, leur compétitivité internationale, avant de leur dérober des marchés. La main gauche de la politique de l’Allemagne et de l’UE sait-elle ce que fait la main droite?

    Quels sont les risques courus par les banques européennes?

    Ces risques sont calculables en grande partie. Le contrôle qu’effectuent et qu’ont effectué à cet égard les autorités de surveillance est efficace et ne tolère aucun accident durable.

    Pourquoi les grandes associations, tel le BDI [Fédération de l’industrie allemande], plient-elles les genoux? On croit naïvement que leur existence se justifie par leur représentation des intérêts de l’industrie.

    Il y a une différence sensible entre les communiqués officiels des associations et leur situation matérielle et humeur internes. Dans les entreprises, les protestations sont sensibles. Néanmoins, je suis déçu des prises de position officielles des associations, qui agissent de manière politiquement correcte. Cette attitude consiste en une correction limitée, et donc incorrecte par définition.
    Dans les branches axées sur l’exportation, la politique des sanctions est d’une importance considérable, voir existentielle. Invoquer en la matière le primat de la politique est, compte tenu de la mission de ces associations, un refus partiel de prendre ses responsabilités.

    Le mépris qu’affiche le gouvernement des Etats-Unis à l’égard des Européens est remarquable, eu égard à la NSA et au «Fuck the UE.» Les politiciens européens n’ont-ils aucun amour-propre ou sont-ils trop lâches?

    Le vrai démocrate qui prend au sérieux ses devoirs de politicien envers la res publica et ne foule pas aux pieds son droit d’autodétermination doit tirer les conséquences de ces déclarations. S’il s’en abstient, il accuse un déficit par rapport au canon de valeurs susmentionné. Je ne suis donc pas le bon interlocuteur. Vous devriez poser ces questions à nos responsables politiques.

    La tendance à faire des courbettes à Washington est inversement proportionnelle à l’agressivité intérieure. Tout d’abord, les partisans d’une autre opinion sont diffamés comme admirateurs de Poutine et, plus récemment, comme trolls de Poutine, s’ils n’aboient pas avec les loups. La guerre froide nous coûte-t-elle déjà une part de nos libertés individuelles?

    Dans l’avant-propos de mon livre intitulé «Endlich Klartext» [Enfin exprimé clairement], publié fin 2007, j’écrivais: «Les marchés libres meurent les premiers, puis décède la démocratie!» Cet ouvrage analysait aussi le système hégémonique des Etats-Unis. Il est recouru aux débats géopolitiques actuels pour abolir les libertés individuelles démocratiques du pays. Le rythme de ce démantèlement s’accélère. Je suis plus inquiet que jamais. Pour l’heure, je m’occupe de la notion de «terreur du courant dominant». Nous nous prétendons tolérants et pluralistes. Cependant, celui qui s’écarte, à propos de thèmes sensibles, de l’opinion dominante, s’expose à l’isolation ou à la diffamation. Cette évolution est en opposition flagrante avec la prétention à la démocratie et à la liberté. Oui, les conflits actuels se paient sous forme de démocratie.

    Contrairement à l’Allemagne, les Etats-Unis connaissent de vifs débats, à gauche comme à droite, sur le comportement hégémonique du gouvernement. Pourquoi n’en est-il rien en Allemagne? 

    C’est vrai, mais ces débats n’ont aucun effet sur la composition du Parlement des Etats-Unis. Si, chez nous, les débats sont moins spectaculaires, le Parlement compte davantage de couleurs, même si la grande coalition limite l’efficacité de l’opposition. En fin de compte, beaucoup d’Allemands ne confondent-ils pas bien-être et liberté d’établissement avec la notion de liberté?

    Comment le conflit évoluera-t-il? Peut-on envisager que les Américains et les Russes se rassemblent – en raison de l’IS ou de la Syrie – et que les Européens suivent et paient?

    A mon avis, les vainqueurs du conflit sont déjà devant nous. L’axe Moscou–Pékin–BRICS est gagnant. Or il en a assez de l’Occident. En 1990, ces pays avaient quelque 25% du produit intérieur brut mondial. Aujourd’hui, ils en ont 56% et 85% de la population mondiale. Ils contrôlent quelque 70% des réserves de devises mondiales et leur croissance moyenne est de 4 à 5% par année. Les Etats-Unis n’étant pas disposés à partager la puissance mondiale (répartition des voix au FMI et à la Banque mondiale notamment), les pays en pleine expansion érigent leur propre système financier. L’avenir est là.
    Actuellement, l’UE est mêlée au conflit que les Etats-Unis ont déclenché en refusant de partager leur puissance et bloque ainsi ses possibilités de développement. Plus longtemps elle mène cette politique, plus haut en monte le prix, moins l’UE est prise au sérieux.
    Aucun problème ne peut être résolu dans le monde sans la contribution de Moscou et de Pékin. En fait, les Etats-Unis pourraient agir de façon beaucoup plus pragmatique qu’il nous semble aujourd’hui. Le manque de programme de l’UE et de l’Allemagne fait de nous un perdant.

    Que doit-il se passer pour que l’Allemagne ait de nouveau sa propre politique extérieure et économique?

    A cette question, je passe, et vous prie de m’en excuser.

    Quelle influence exerce sur un lieu d’exploitation le fait que le gouvernement se livre à de petits jeux géopolitiques plutôt que de défendre bec et ongles les intérêts du pays?

    Le lieu d’exploitation subira des dommages.

    Le parlementaire moyen comprend-il les effets réciproques de la politique et de l’économie?

    Je ne vous cacherai pas un certain scepticisme à cet égard.

    La politique s’améliore-t-elle quand les politiciens comprennent toujours moins l’économie, mais que leur nombre s’accroît toujours davantage?

    Certainement pas. La stabilité d’une démocratie dépend de celle de son économie. Si l’économie subit durablement des dommages, la radicalisation de sa société augmente. L’empire allemand a fait cette expérience en 1933. Outre cette variante, il y a celle dans laquelle la démocratie se transforme en démocrature, pour finir en oligarchie. A ce sujet, la version originale d’une étude publiée par l’Université de Princeton proclame: «Les Etats-Unis ne sont plus une démocratie, ce sont une oligarchie! Hoppla, ce n’était pas politiquement correct …»
    Actuellement, il y a plus en jeu que ce que le petit homme perçoit ou veut percevoir. Vous m’en voyez fort inquiet.     •

    Source: Deutsche Wirtschaftsnachrichten du 24/7/15

    (Traduction Horizons et débats)

    *     Folker Hellmeyer, né en 1961, est analyste en chef de la Bremer Landesbank depuis avril 2002. Auparavant, il avait été notamment courtier senior à la Deutsche Bank, à Hambourg et à Londres, ainsi qu’analyste en chef de la Landesbank Hessen-Thüringen. Il intervient régulièrement dans les médias au sujet des marchés internationaux.

    http://www.horizons-et-debats.ch/index.php?id=4688

  • Histoire, culture, islam…Alain Finkielkraut : « L’école des savoirs cède la place à l’école de la thérapie par le mensonge »

    Le philosophe Alain Finkielkraut dénonce la dernière réforme des programmes scolaires.

    Au sujet de la réforme du collège, Najat Vallaud-Belkacem a affirmé dans Le Point: «il y a une différence essentielle entre les progressistes et les conservateurs. Les premiers combattent les inégalités quand les seconds en théorisent la nécessité». La réforme qu’elle promeut est-elle selon vous conservatrice ou progressiste ?

    Il n’appartient pas à l’école républicaine de combattre toutes les inégalités, mais d’assurer, autant que faire se peut, l’égalité des chances pour donner à chacun sa juste place selon ses aptitudes et son mérite.

    Mais il ne s’agit plus de cela : c’est au scandale ontologique d’un partage inégal de la pensée entre les hommes que s’attaque, depuis quelques décennies, l’Éducation nationale.

    Confondant l’ordre de l’esprit, où prévaut la hiérarchie la plus stricte, et l’ordre de la charité, où règne l’amour universel, elle promet la réussite pour tous et rabaisse continuellement le niveau d’exigence afin de ne pas déroger à son serment. Les sociologues lui ayant de surcroît révélé que les «héritiers» avaient accès par droit de naissance à la culture que l’école a pour mission de transmettre au plus grand nombre, l’institution a pris le taureau par les cornes et décidé de mettre l’essentiel de cette culture au rebut. L’école est devenue la nuit du 4 Août permanente de ce que Malraux appelait «l’héritage de la noblesse du monde».

    Voici, une fois cet héritage liquidé, la liste d’objectifs assignés aux classes de français de 4e et de 3e: «se chercher, se cons-truire» ; «vivre en société, participer à la société» ; «regarder le monde, inventer des mondes» ; «agir sur le monde».

    Et François Dubet, l’un des initiateurs de ce remplacement, prévient : «On ne peut concevoir que certains élèves aient plus de culture commune que d’autres.»

    [...]
    L’interdisciplinarité a pour objet d’apprendre aux élèves à «mener ensemble des projets». Les disciplines appartiennent-elles au passé ?

    La télévision a donné en exemple deux professeurs d’histoire et d’espagnol invitant ensemble leur classe à rédiger un tract sur les vertus du développement durable. Là où il y avait les œuvres, il y a maintenant les tracts. Mais on aurait tort de s’inquiéter: c’est pour la bonne cause. [...]

    Les programmes d’histoire conservent l’étude obligatoire de l’islam quand celles de la chrétienté médiévale et des Lumières deviendront facultatives. Que vous inspire ce choix ?

    Il ne s’agit pas simplement d’imposer l’étude de l’islam, mais de lutter contre «l’islamophobie», à travers une présentation embellissante de la religion et de la civilisation musulmanes.

    Convaincus, avec Emmanuel Todd, que Mahomet est «le personnage central d’un groupe faible et discriminé» et que le vivre-ensemble passe par le redressement de l’image de ce groupe dans l’esprit des autres Français, nos gouvernants proposent, en guise de formation, un endoctrinement aussi précoce que possible des élèves. On ne veut plus les instruire, mais les édifier afin de les rendre meilleurs. Le reste – l’essor des villes, l’éducation au Moyen Âge ou la pensée humaniste – est facultatif. |…]

    L’accent est mis aussi sur les périodes sombres de l’histoire de France. Comment aimer et faire aimer un pays toujours coupable ?

    Les nouveaux programmes ne se préoccupent absolument pas de faire aimer la France. Ils appliquent à la lettre le dogme de la critique sociale: le mal dans le monde résulte de l’oppression ; c’est l’inégalité qui est la source de toute violence. Le fanatisme islamique, autrement dit, est le produit de la malfaisance coloniale et de sa continuation postcoloniale.

    Si l’on aborde l’histoire du XVIIIe et du XIXe siècle sous l’angle: «Un monde dominé par l’Europe, empires coloniaux, échanges commerciaux, traites négrières», le nouveau public scolaire retrouvera sa «self-esteem», l’ancien perdra son arrogance et tous les problèmes seront réglés. L’école des savoirs cède ainsi la place à l’école de la thérapie par le mensonge.

    Que peuvent encore dire à notre temps Racine, Baudelaire ou Mauriac ? Quand la connaissance est accessible en un «clic», l’idée de transmission n’appartient-elle pas au passé ?

    Ce que peuvent dire à notre temps Racine, Baudelaire ou Mauriac c’est qu’il y a autre chose que lui-même: d’autres mots, d’autres formes, d’autres visages. Ce temps qui se prétend si ouvert ne veut rien savoir. Allergique à l’altérité, il ordonne aux enseignants de choisir des «problématiques» proches des élèves.

    source

    http://www.fdesouche.com/637953-histoire-culture-alain-finkielkraut-lecole-des-savoirs-cede-la-place-lecole-de-la-therapie-par-le-mensonge