Source : Boulevard Voltaire – « Migrants : on les balade, et nous avec ! «
L’évacuation de la jungle de Calais est en passe de s’achever, mais déjà des migrants rappliquent en nombre d’Allemagne et de Belgique. Ils y voient, comme Hollande, « un trou de souris » pour tenter le passage vers l’Angleterre. Une fenêtre temporelle, un créneau à saisir : pendant qu’on remplit les cars et qu’on passe la pelleteuse sur les gourbis des malheureux, il y a, croient-ils, moins de vigilance à l’entrée du tunnel. Erreur, bien sûr. Et ceux-là, qui nous arrivent de l’Est, vont rester, c’est certain. Et recréer une poche de misère comme il s’en recrée dans le nord de Paris à chaque évacuation des campements de fortune.
28 évacuations depuis le début de l’année ! La dernière date de septembre. Le ministre Emmanuelle Cosse se félicitait alors, assurant que l’évacuation du camp de Stalingrad avait permis « la mise à l’abri de 2.083 migrants ». Pour combien de temps ? Une nuit, deux peut-être ?
Car ceux qu’on évacuait en septembre, on les avait déjà jetés sur d’autres trottoirs trois semaines auparavant. Ainsi, le 11 août, j’écrivais déjà dans ces pages : « À Paris, on balade les migrants tout le long du métro aérien. Pas dessus, par-dessous : La Chapelle, Stalingrad, Jaurès, Colonel-Fabien, La Villette […], et puis la ronde reprend : La Villette, Colonel-Fabien, Jaurès, Stalingrad, La Chapelle… La dernière évacuation date du 26 juillet. C’était la vingt-sixième en un an ! »
Une évacuation par mois, puis une par quinzaine, puis une par semaine… On chasse les malheureux, les familles, les gosses en haillons.
On amène dix cars de CRS et les balayeuses de la mairie de Paris, on passe un coup de jet, on détruit les hardes des miséreux et, quelquefois, leurs papiers avec, et puis… et puis quoi ?
Depuis mardi qu’a commencé, en Technicolor et en mondovision, l’éradication de la jungle calaisienne, 1.000 personnes sont venues gonfler le camp de Stalingrad, qui en comptait déjà 2.000. Ça grouille de paumés autour des écluses du canal Saint-Martin. Des gens qu’on a volontairement laissés quitter Calais pour la capitale avant de faire défiler les bus devant les caméras. C’est parce que l’ouverture du « centre humanitaire de La Chapelle » est imminente, disent fièrement les autorités. Un centre qui offrira… 400 places !
Pudiquement, on évoque « une situation compliquée dans le nord de la capitale ». Compliquée ? Inextricable serait plus juste. Car, bien sûr, on parque les pauvres chez les pauvres. Entre « sans-dents », ils devraient pouvoir se comprendre. Et puis, n’est-ce pas, ce sont déjà de jolis quartiers très cosmopolites. Alors, quelques centaines d’Érythréens ou d’Afghans de plus ou de moins, qu’est-ce que ça change pour tous ces abonnés aux minima sociaux ? Quand il y a de la misère pour dix, il y en a pour douze. Ou quinze.
Circuler dans Paris devient un déchirement, à maints égards. Parce que ce n’est pas supportable de croiser tous ces enfants sans enfance, ces familles qui mendient leur pitance à chaque coin de rue, ces estropiés allongés dans les couloirs du métro, les bidonvilles au kilomètre, la crasse, la saleté, la puanteur, les malheureux effondrés sur leur baluchon en travers des trottoirs, dont on ne sait s’ils sont morts ou vifs, et qu’on enjambe en priant Dieu qu’ils ne lèvent pas les yeux vers nous. On a ses pauvres, ceux qu’on finit par connaître, à qui l’on donne une pièce et un sourire, mais ils se multiplient comme les feuilles mortes en automne.
Alors on n’a plus qu’une envie : fuir ! Fuir la ville et ses abcès, fuir la misère qui explose, surtout fuir l’hypocrisie des politiques, à commencer par madame Hidalgo, notre maire qui préfère s’occuper des camps de nudistes plutôt que des camps de migrants.
Marie Delarue
http://fr.novopress.info/201385/migrants-on-les-balade-et-nous-avec/