Nous évoquions en janvier l’humiliation faite à l’UE par l’administration Trump qui avait « rétrogradé le statut diplomatique de la délégation de l’Union européenne à Washington au rang d’organisation internationale, et non plus d’Etat. Elle n’avait pas jugé bon d’en informer l’ambassadeur de l’UE aux Etats-Unis, David O’Sullivan. » Devant les plaintes de l’UE, rapportait Euractiv mardi, « le département d’État des États-Unis a déclaré qu’il reconnaîtra désormais la représentation de l’UE à Washington en tant que mission bilatérale dans l’ordre de préséance du corps diplomatique et que le secrétaire d’État Mike Pompeo avait demandé au Chef du protocole de prendre les mesures nécessaires à ce rétablissement ». «Les diplomates européens (avaient) interprété cette décision (de rétrogradation) comme le reflet d’une tension entre Washington et Bruxelles, l’administration américaine n’ayant pas notifié l’UE au préalable, comme le requiert la courtoisie diplomatique. » « Le rétablissement du statut de l’ambassadeur européen correspond toutefois à l’entrée en fonctions du nouvel ambassadeur de l’UE à Washington. » Il s’agit du socialiste, Stavros Lambrinidis, ancien eurodéputé grec, ex ministre des affaires étrangères du gouvernement Papandréou, ancien représentant de l’Union Européenne pour les droits de l’Homme. « Lors d’une visite à Bruxelles en février, une délégation de haut-rang de législateurs américains dirigée par la présidente de la Chambre des représentants Nancy Pelosi, a tenu à rassurer l’UE de l’engagement continu de Washington dans les relations transatlantiques et l’OTAN. » Une promesse en effet apte à rassurer tous nos impeccables européistes qui n’oublient pas que l’Europe bruxelloise est une création américaine et qui se satisfont pleinement de cette vassalité.
La laisse est courte, la soumission bien intégrée, mais quand elle est contestée dans sa légitimité, la caste européiste est aussi capable d’une grande violence qu’elle n’hésiterait pas à qualifier de fasciste si elle s’appliquait contre des manifestants dans les rues de Moscou ou de Téhéran. La Chilienne et femme de gauche Michelle Bachelet, Haut-Commissaire aux droits de l’Homme de l’ONU lit-elle David Dufresne ? Le journaliste a compilé entre l’acte I et l’Acte XVII de la mobilisation des Gilets Jaunes 500 signalements de blessures attribuées aux policiers et CRS agissant sur ordre de Christophe Castaner, 483 cas de violences policières, 202 blessures et 21 personnes éborgnées par des tirs de LBD. Hier sur LCI, Ivan Rioufol du Figaro, s’indignait de nouveau de «l’extrême brutalité» de la répression policière contre les Gilets Jaunes, « qui n’est pas à la mesure d’une démocratie se disant ouverte et bienveillante » et qui contraste « « avec le maintien de l’ordre dans les cités en ébullition ». L’actualité brûlante en apporte la démonstration à Grenoble avec les émeutes en cours depuis trois jours suite à la mort de deux « jeunes » dans un accident de deux roues alors qu’ils tentaient d’échapper à un contrôle de police.
Or, Mme Bachelet a demandé au gouvernement français « une enquête approfondie » sur « l’usage excessif de la force » depuis la mi-novembre contre les GJ, ce qui a fait bondir Edouard Philippe, invité hier soir de BFMTV. Le Premier ministre a préféré insisté sur « (les) violences commises à l’égard des forces de l’ordre », certes parfaitement condamnables mais aux conséquences corporelles fort heureusement moins dramatiques que celles dont ont été victimes de nombreux Gilets jaunes manifestant pourtant pacifiquement . « J’ai beaucoup de respect pour l’ONU en général et pour la Haut-commissaire a assuré M. Philippe, mais je voudrais rappeler à tout le monde que, en France, nous sommes un Etat de droit: quand il y a une plainte, elle est instruite, et à chaque fois que nous avons considéré qu’il y avait des faits qui justifiaient l’ouverture d’une enquête administrative – je ne parle même pas des enquêtes judiciaires – nous l’avons fait ». Une affirmation fortement contestée par beaucoup d’observateurs et de manifestants.
« En France, on est un Etat de droit, et (…) la République, à la fin, est la plus forte » a encore assuré M. Philippe. Mais apparemment pas plus forte avec l’Europe et la monnaie unique. L’Organisation de Coopération et de Développement Économiques (OCDE) vient ainsi d’annoncer mercredi que la zone euro ne confirme toujours pas les espoirs placés en elle. L’économie mondiale devrait progresser au rythme de 3,3% en 2019, et de 3,4% 2020 mais l’OCDE a revu fortement à la baisse, « de 0,8 point de pourcentage, sa prévision de croissance pour la zone euro en 2019, un ralentissement plus prononcé pour l‘Allemagne (-0,9 point) et l’Italie (-1,1 point) que pour la France (-0,3 point). « La croissance dans la zone euro a brutalement ralenti en 2018 et devrait rester faible, à environ 1% en 2019 et 1,2% en 2020. » « La croissance a été revue très fortement en baisse en Allemagne et en Italie, reflétant des expositions relativement élevées au ralentissement du commerce mondial comparées à celle de la France », moins dépendante des exportations, est-il expliqué.
Plus largement, l’OCDE semble anticiper une crise majeure qui pourrait se profiler à un horizon très proche: « Au regard des précédentes projections, les perspectives macroéconomiques dénotent un fléchissement de l’activité dans la quasi-totalité des pays du G20. Les vulnérabilités liées à la conjoncture chinoise et à la perte de dynamisme de l’économie européenne s’inscrivent dans un contexte marqué par le ralentissement des échanges et du secteur manufacturier mondial, par de fortes incertitudes quant à l’action publique, et par des risques élevés sur les marchés financiers, et pourraient compromettre l’atteinte d’une croissance mondiale soutenue et durable sur le moyen terme. »
Un contexte que n’ignore pas Emmanuel Macron. Dans les Echos, Guillaume Maujean s’inquiète lui aussi de la pérennité de cette UE et de ce système qui tourne en déconfiture : « il y a ce Brexit qui semble foncer toujours plus vite dans le mur. Au point que dans trois semaines, le Royaume-Uni pourrait quitter l’UE sans aucun accord de divorce. Il y a ces populismes qui continuent de remuer le fer dans la plaie et qui pourraient encore gagner du terrain après les élections européennes de mai (…). Les nuages s’accumulent, les vents contraires s’intensifient. Et les économistes de l’OCDE mettent en garde : la conjoncture se dégradera davantage en cas d’effets collatéraux sur les marchés financiers. »
Pourtant note Stéphane Dupont avec une pointe d’admiration dans ce même quotidien, M Macron « entend bien continuer à se faire entendre et à réformer la France comme l’Europe, avec ses grands projets de relance de la construction européenne ».« Face à la vague populiste et nationaliste, il reste le seul à se dresser et à proposer une alternative. Depuis son élection, Emmanuel Macron s’est beaucoup démené pour faire bouger l’Europe (…). Sans grand résultat jusqu’à présent, faute en partie de répondant du côté allemand. Et ce chantier demeure l’une des matrices d’En marche. Réussir le 26 mai est aussi crucial de ce point de vue. »
Dans un entretien accordé au quotidien belge Le Soir et relayé par le blog Les crises , le philosophe Marcel Gauchet espère lui que la crainte (qu’il partage) du danger populiste permettra un sursaut d’une Europe totalement bloquée et incapable de se réformer : « Si les autres Européens ont soudain très peur de ce qui se passe en France, peut-être que Macron obtiendra des concessions. Les autres Européens n’ont pas plus envie que nous d’un scénario à l’italienne, avec une alliance Mélenchon-Le Pen. Il n’est pas exclu que l’Europe évolue sous la pression d’un danger. »
« Le vrai problème de fond note cependant M Gauchet, c’est le fait que « Sarkozy, Hollande et Macron ont tous mené une politique de l’offre, constituée autour de l’adhésion au cadre européen. Mais le projet de changer l’Europe tout en redonnant à l’économie française son dynamisme et sa compétitivité perdue, c’est une folie. Tant que l’on est dans ce schéma, toutes les politiques françaises sont vouées à l’échec. Parce que l’euro est surévalué par rapport aux capacités productives. Alors l’appareil productif s’enfonce inexorablement. Un abîme sépare l’économie française de l’économie allemande et même de l’économie du Nord de l’Italie. Le pari économique est intenable. Et l’idée d’une refondation de l’Europe dans un sens qui plairait aux Français est aussi une fiction. Personne n’en veut. Macron a échoué sur tout. Le premier échec date de l’été 2017, avec la négociation sur le travail détaché. Si Macron avait réussi à arracher aux Européens une réforme significative, il aurait marqué un point décisif. Mais il n’a obtenu que des micro-aménagements qui n’entreront en vigueur qu’en 2022. »
Autant d’échecs, note Bruno Gollnisch, qui loin d’ouvrir les yeux des européistes, poussent au contraire sa frange la plus radicale, à laquelle appartient M Macron, à militer pour une intégration européenne encore plus forte. L’avènement d’un fédéralisme européen multiculturaliste et grand ouvert sur le monde, construit sur les débris de nos nations. C’est un objectif rarement assumé publiquement, mais il reste plus que jamais d’actualité au sein des réseaux euromondialistes.