Le bloc-notes de Jean-Claude Rolinat
Pour le président de la République, il semble que l’horizon indépassable de la lutte contre l’islamisme, soit la publication ad vitam aeternamdes caricatures de « Charlie Hebdo » sur le Prophète. Pense-t-il guérir ainsi la fièvre musulmane qui s’est emparée du monde arabe, mais pas que ?
Est-il opportun d’agiter le chiffon rouge devant une communauté prompte à s’embraser, dès que l’on touche aux « poils de la barbe du Prophète » ? (Barbe supposée, car dans le monde musulman, il n’y a pas de représentation graphique des visages…). Surtout, alors que l’on est incapable, par manque de volonté politique, de faire régner l’ordre dans les zones de non droit et autres quartiers difficiles, il est inutile d’exciter la haine des fidèles. Des prédicateurs sournois et autres imams autoproclamés n’attendent que cela.
Un laxisme inexcusable
Et puis, comment ne pas s’interroger sur le laxisme qui a permis à des étrangers potentiellement dangereux, de pénétrer sur le territoire national ? Le tueur de Romans-sur-Isère était un Soudanais, l’agresseur des deux personnes sortant des anciens locaux de « Charlie hebdo » était pakistanais, et le coupeur de tête de Conflans-Sainte-Honorine, un Tchétchène. Si les frontières étaient bien gardées, si le droit d’asile n’était pas galvaudé, tous ces agitateurs islamistes, assassins potentiels et avérés, ne seraient pas entrés en France, et un petit garçon de cinq ans aurait encore son papa. Que pensera cet enfant, devenu, adulte, de la République française qui l’aura, indirectement, privé de père ?
Un droit au blasphème ?
Cette affaire pose aussi la question du « blasphème ». En France, ce délit n’existe pas, et le magazine satyrique, par exemple, outre Mahomet, ne s’est jamais privé de caricaturer le Christ, offensant ainsi des millions de chrétiens. Mais, que je sache, aucun catholique n’a tranché la gorge des dessinateurs de « Charlie », ou mitraillé sa rédaction.
Il faut savoir que dans le monde, il y a, au sens propre comme au sens figuré, des « vaches sacrées », et que l’on ne peut pas impunément se moquer de croyances ancestrales, même si cela nous parait dépassé. C’est comme ça, et il faut l’admettre et le respecter. Qui se souvient des affaires de la dent de Bouddha, du temple Sikh d’Amritsar ? Que penser de la haine anti-chrétienne au Pakistan, en Égypte contre les Coptes, du fragile équilibre libanais où les Maronites sont minoritaires, de l’affrontement gréco-turc à Chypre, de la chasse aux Rohyngas islamisés au Myanmar, des massacres entre Hindous et Musulmans en Inde en 1947, lors de l’indépendance ? Sait-on que la personnalité du Roi de Thaïlande est sacrée, intouchable, et que rudes sont les punitions pour celles ou ceux qui attenteraient à son image ? Pareil, dans une moindre mesure, au Japon.
Chez nous, sans remonter jusqu’à la Saint-Barthélemy en 1572, aux Croisades ou aux temps de l’Inquisition, force est bien d’admettre que le religieux est un carburant terriblement inflammable ! Donc Monsieur Macron, vous qui avez, - provisoirement, nous l’espérons -, la charge de ce pays, réservez plutôt vos coups pour empêcher que la charia ne règne sur nos banlieues, qu’une contre-société ne s’installe durablement, plutôt que de vous cramponner sur la possibilité de publier des dessins offensants pour des croyants sincères.
Certes, après-tout, si des Musulmans en France ne se plaisent pas dans notre pays, personne ne les oblige à y rester. Mais ceux de nos compatriotes mahométans qui se sentent sincèrement « Français », ont le droit au respect de leurs croyances, quoique l’on puisse en penser. La foi est une affaire intime, c’est justement ce que la laïcité nous permet. Ne fixons pas nos regards sur l’arbre qui cache la forêt. Dans la lutte contre le terrorisme islamiste, défendre et imposer les caricatures, est une faute politique et psychologique !