Les réveils doivent être de plus en plus difficiles pour les prophètes du vivre ensemble, eux qui estiment que si l’immigration n’est pas sans poser quelques menus soucis, c’est seulement à cause du chômage, d’une mauvaise intégration sociale et, accessoirement, du racisme plus ou moins rampant des primo-habitants.
Ainsi, Dijon à peine remis de nuits de guérilla urbaine ayant opposé, en juin dernier, voyous maghrébins et tchétchènes, voit, ce 28 octobre, une soixantaine de Turcs remettre un peu d’ambiance dans la ville, poings levés et au cri d’« Allah akbar ». Même si les forces de l’ordre doivent disperser ce joli petit monde à coups de lacrymogènes, la Préfecture de Côte-d’Or est formelle : « Il s’agit d’une manifestation, rien de plus. »
En revanche, dans la banlieue lyonnaise, c’est peut-être un peu plus qu’une « manifestation », que cette bataille ayant éclaté le lendemain et au péage de l’A7, à Vienne-Reventin, entre Turcs et Arméniens. La preuve en est que Laurence Fautra, maire LR de Décines, ordonne illico aux commerçants de baisser le rideau et aux dirigeants du Centre national de la mémoire arménienne d’en faire autant de ses portes. En effet, cette commune de trente mille habitants a pour surnom la « Petite Arménie », ceci expliquant sûrement cela.
Le soir même, alors que quelques dizaines d’Arméniens tentent d’alerter les passants sur la situation de leurs frères du Haut-Karabakh, c’est un cortège de véhicules arborant le drapeau ottoman qui vient exposer le point de vue d’Ankara. Les échanges, non point verbaux, mais à coups de couteaux et de marteaux, font quatre blessés équitablement répartis entre les deux factions en présence, tandis que soixante-cinq procès-verbaux sont dressés pour… non-respect du couvre-feu.
Heureusement, une autre Préfecture, celle d’Auvergne-Rhône-Alpes, est là pour rassurer les populations : « Les tentatives d’intimidation et les actions communautaires hostiles n’ont pas leur place dans notre République. » Il est pourtant à craindre qu’elles l’aient déjà, cette « place » ; et ce depuis longtemps.
D’ailleurs, histoire de faire bonne mesure, encore faut-il ajouter qu’à l’occasion de certaines manifestations arméniennes en France, les Kurdes viennent également en masse. Non point par amour de l’Arménie, mais par détestation de la Turquie : ce que l’on appelle des alliés objectifs. Bref, l’Azerbaïdjan est désormais au bout de la rue et Istanbul au rond-point d’à côté.
Le plus fort à ce jeu est évidemment le président Erdoğan qui n’a que l’embarras du choix dans les fers au feu dont il dispose en France. Les militants de l’AKP islamo-nationalistes, ceux de son parti, bien sûr. Mais également les Loups gris, kémalo-nationalistes, ces ultra-laïcs avec lesquels il vient de conclure une alliance au sommet. Comme quoi, malgré la chute de Constantinople, les finasseries byzantines demeurent.
L’origine de ces Loups gris remonte à 1938, mais ce n’est que dans les années soixante qu’ils adoptent le nom de « loups », en référence à la mythologie turco-mongole antéislamique. Professant un nationalisme confinant à la pathologie lourde, ils haïssent, dans le désordre, chrétiens, Kurdes, alévis, Arméniens, communistes, juifs ; soit tout ce qui n’est pas turc.
Étroitement liés à la mafia locale, ils ont longtemps loué leurs services à la CIA tout en assurant de la sous-traitance pour le KGB : Mehmet Ali Agça, qui a tenté d’assassiner le pape Jean-Paul II en 1981, était un Loup gris. Aujourd’hui, en échange d’une amnistie pour nombre de leurs cadres, emprisonnés pour crimes de droit commun et divers trafics, ils ont récemment rallié l’AKP.
Particulièrement actifs en France, et surtout dans les manifestations plus haut évoquées, on nous dit qu’ils seraient étroitement surveillés par la DGSI. Il ne reste plus qu’à espérer que nos services soient un peu moins naïfs que nos préfets.
PS : La Licra vient de saisir la justice à propos de « ces agressions racistes » tout en exigeant « la dissolution de ces mouvements ». C’est sûr que ça va tout changer.
Nicolas Gauthier
https://www.bvoltaire.fr/vivre-ensemble-apres-les-tchetchenes-les-turcs-et-les-armeniens/