Au cœur de la vallée de Chevreuse, dans les Yvelines, la commune de Magny-les-Hameaux est secouée par une sombre affaire. Le 8 décembre, un jeune père a fui son domicile avec femme et enfants pour avoir simplement, assure-t-il, «posé des questions» sur la construction d’une mosquée dans un quartier résidentiel. Sur fond d’opacité de la communication du maire divers gauche et d’accusations de «racisme« et d’«islamophobie», les vives réactions sur les réseaux sociaux sont allées jusqu’aux menaces de mort. «Notre tract posait uniquement des questions, parce que le sujet était opaque. Le maire faisait ça dans le dos de tous les habitants», affirme Pierre-Louis Brière qui, trois semaines après son départ et face à un climat délétère, n’a toujours pas réintégré la commune.
Tout commence en novembre, lorsque la mairie se porte acquéreur, auprès de l’agglomération de Saint-Quentin-en-Yvelines, d’une parcelle destinée à l’usage de l’association des musulmans de Magny-les-Hameaux (A2MH). L’objectif est de construire, dans cette commune de 10.000 âmes, un lieu «d’apprentissage de l’arabe et de pratique du culte musulman», paraphrase l’association sur son site. La communauté musulmane doit pour le moment se rabattre sur les mosquées voisines de Trappes ou de La Verrière. Durant le mois de ramadan, des tentes sont dressées sur un terrain prêté par la commune.
L’opposition n’a jamais été saisie sur le projet. Or, l’érection d’un lieu de culte dans ce quartier résidentiel n’est pas du goût de tous les Magnycois. Le terrain, situé au 24 rue André-Hodebourg, est voisin d’une école, du centre d’orientation pour adolescents «Cap Ados» et d’une aire de jeu. «C’est déjà très compliqué de circuler autour de l’école», nous confie une mère de famille, membre de l’association «Magny tranquille». Cette association, la première, lance une pétition mi-novembre, avançant des problèmes d’urbanisme. «Ce terrain, aujourd’hui un espace vert public, est situé dans un quartier pavillonnaire, calme dont la voirie est une impasse déjà largement occupée par le stationnement des véhicules des riverains ainsi que par le passage des usagers – principalement des enfants – à vélo, à trottinette ou à pied», souligne l’appel à signatures.
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Départ dans la nuit
Levée de boucliers sur les réseaux sociaux. Sous le post du comité, près de 200 commentaires affluent, pour la plupart indignés. «Vous pouvez chialler (sic), on va vous remplacer», «Nous les maghrébins et noirs sommes ceux qui détenons le pouvoir», «J’aurais tout lu avec ce comité de dégénérés», etc. Des profils aux contenus parfois inquiétants, comme celui affichant une photo de deux hommes tenant des têtes de mannequins décapités, légendée «Daesh en vacances». Le post particulièrement véhément d’un habitant de Magny, qui qualifie les membres du collectif citoyen de «racistes» et de «paranos islamophobes», et parle d’«amicale des joyeux nazis» avec des «tronches d’aryens sympathiques», est republié… par la première adjointe à la mairie.
Sur le groupe WhatsApp qui regroupe les membres du comité, Pierre-Louis reçoit chaque jour de nouvelles demandes d’ajout. Pour l’administrateur, difficile de garder le contrôle sur les centaines de participants aux numéros inconnus. Ainsi, raconte-t-il, «un soir où j’ajoute une quinzaine de nouveaux membres, des messages véhéments sont postés, disant que l’on n’est plus en France, qu’il y a trop de mosquées, etc. J’essaye de les calmer, de leur dire que ce n’est pas l’endroit. Rien à faire. Finalement, je supprime tous leurs messages et les appelle pour leur dire d’arrêter».
Trop tard. Des partisans de la mosquée, introduits dans le groupe, ont fait des captures d’écrans des messages. Pierre-Louis Brière, en tant que fondateur du comité, voit son nom diffusé avec les qualificatifs de «raciste», d’«islamophobe», accompagné de son numéro. Les détracteurs reprochent notamment une «fausse information» sur le tract, qui cite une phrase tirée du site de A2MH : «Aujourd’hui, nous sommes 200 familles, demain, grâce à votre aide, nous serons 100.000». En consultant à nouveau le site, Pierre-Louis voit que la phrase a été modifiée. Pour prouver sa bonne foi, il publie les captures d’écrans.
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22/12/23
Membre d’un comité de citoyens à Magny-les-Hameaux (Yvelines), Pierre-Louis Brière, questionne sur le projet d’une mosquée : il doit fuir son domicile avec sa famille.
Très engagé dans la vie locale – il se bat pour l’enfouissement des lignes à haute tension par exemple – il se retrouve depuis quelque temps au cœur d’une polémique et fait même l’objet de menaces après avoir pris publiquement position autour d’un projet de mosquée.
(…) Avec son Comité citoyen de Magny-les-Hameaux, il s’est exprimé avec transparence sur le sujet : « Il y a une véritable opacité autour du projet. Cela nous a alertés, confie-t-il. Nous voulions connaître l’emplacement de cette mosquée, par qui elle serait construite. Nous avons sorti un tract en posant toutes les questions qui nous semblaient légitimes. Nous demandions une consultation au maire sur cette mosquée. »
(…) Ce canal de communication aurait vu s’échanger des propos déplacés. Un déferlement de haine, que l’intéressé a dû modérer. Mais le mal était fait. Certains l’auraient tenu responsable de ces propos.
« Des partisans de la mosquée, membres du groupe, ont fait des captures d’écrans de la discussion. J’ai pourtant supprimé ces propos déplacés et tout de suite modéré la conversation », assure Pierre-Louis Brière.
La haine s’est ensuite répandue sur les réseaux sociaux où les deux camps se sont opposés. Pierre-Louis Brière, en sa qualité de fondateur du comité, s’est retrouvé ainsi qualifié « d’islamophobe » et « de raciste ». Son numéro de téléphone aurait fuité.
(…) L’affaire a pris également une dimension politique. Bertrand Houillon, le maire (DVG), a distribué une lettre à ses administrés où il évoque le « principe de laïcité » et dénonce le déferlement de haine à l’égard du projet.
L’élu estime d’ailleurs que la campagne menée sur les réseaux sociaux contre le lieu de culte est « orchestrée par une opposition très politique qui cherche à s’implanter sur notre commune en attisant les peurs, sur fond de xénophobie ».
« J’ai une cible dans le dos »
De son côté, Pierre-Louis Brière estime qu’avec de telles déclarations, le maire le met encore plus en difficulté : « Il ne défend pas ses citoyens menacés de mort. J’ai une cible dans le dos ! »