Qui est donc ce Nabil Ennasri ? Celui qui se dit « docteur en sciences po » est un personnage bien connu des journalistes. Pendant la Coupe du monde de foot au Qatar, en 2022, ce diplômé de l’IEP d’Aix-en-Provence s’était offert une jolie exposition médiatique. On avait notamment pu découvrir ses analyses dans la matinale de RMC, le 3 octobre 2022. C’est d’ailleurs à la suite de cette émission que Damien Rieu avait publié le fameux montage qui lui avait valu d’être traîné devant les tribunaux. « Il est sur le plateau d’Apolline de Malherbe, mais cette dernière ne précise pas qu’il s’agit d’un islamiste des Frères musulmans qui est connu, entre autres, pour avoir défendu la présomption d’innocence de Mohamed Merah !, explique le lanceur d’alerte à BV. En fait, il fait semblant d’être un petit peu critique, à 10 %, tout en défendant le Qatar à 90 %, ce qui est assez malin. »
Un personnage plus que trouble
Il faut dire qu’en 2022, Nabil Ennasri faisait encore le tour des médias en toute impunité. Du Monde à Libération en passant par 20 Minutes et L’Obs, partout, il était présenté comme un innocent écrivain, un éminent politologue, spécialisé sur la question sensible de l’émirat qatari. Pourtant, dix ans auparavant, ce n’est pas franchement sous les traits d’un expert qu’il était dépeint dans la presse. En 2013, Libération le qualifiait en effet de « relais de la parole qatarie en France », proche de Tariq Ramadan et de la mouvance frériste.
Soupçonné d’avoir joué les agents d’influence pour le Qatar, Nabil Ennasri a finalement été mis en examen en octobre 2023, dans le cadre d’une enquête ouverte par le parquet national financier, des chefs d’abus de confiance, corruption privée, blanchiment, blanchiment de fraude fiscale aggravée, corruption d’agent public et trafic d’influence. Des faits d’une telle gravité que notre « politologue » a été placé en détention provisoire il y a un an. [À l'heure de publier ces lignes, BV n'a pu vérifier s'il est ou non toujours en détention provisoire, NDLR.]
Cette relaxe constitue une source d’espérance pour Damien Rieu. « C’est évidemment une victoire pour la liberté d’expression, le droit des lanceurs d’alerte d’informer, de dire qui est Frère musulman, confie-t-il. C’est une bonne chose que la Justice ait reconnu que j’avais le droit de faire un montage le qualifiant de Frère musulman alors que c’était de notoriété publique. »
La fin des ennuis pour le lanceur d’alerte ?
Mais cette victoire ne signe, hélas, pas la fin du « djihad judiciaire » subi par le militant patriote. « Non, ce n’est pas la fin, déplore-t-il. J’ai trois procès par an. À chaque fois, je fais des appels aux dons pour financer les frais de justice. Je suis soutenu par des donateurs qui m’aident, même si c’est de plus en plus difficile… »
En France, la lutte contre l’islamisme a un coût. Celui-ci peut-être social, physique, judiciaire ou financier. Mais Damien Rieu en a parfaitement conscience et, à l’attention de ceux qui tentent de le bâillonner, il prévient : « Je ne lâcherai rien. »