
Bruno Thouzellier*
« En tout État qui s’est dissous, il se forme des bandes conquérantes et souveraines », écrivait en 1875 l’historien Hippolyte Taine dans Les Origines de la France contemporaine. Les signes de l’abîme dans lequel la France est plongée ne manquent pas : massacres de masse du Bataclan et de Nice, enseignant décapité en pleine rue par un ressortissant tchétchène, prêtre et fidèles égorgés dans leurs églises, explosion des exactions commises par des étrangers sous OQTF, toute-puissance décomplexée d’une « DZ mafia » narcotrafiquante à Marseille, afflux de (faux) mineurs inexpulsables, et enfin impunité des émeutiers d’ultragauche dans les manifestations et les cortèges.
Pas un jour sans qu’un commissariat, des policiers en patrouille, des pompiers en intervention soient atta- qués au cocktail molotov ou au mortier d’artifice par des bandes armées. Ce qu’on appelle pudiquement les « quartiers sensibles » sont entrés en lutte frontale contre l’autorité étatique française. Si l’État a perdu le contrôle de nombreux quartiers périphériques, ce phénomène ne relève pas d’une délinquance « traditionnelle », mais d’une guérilla séditieuse ethnico-religieuse sur fond de trafic de drogue à grande échelle. Il s’agit bien d’une guérilla antifrançaise destinée à substituer à l’autorité républicaine et laïque un autre ordre de nature mi-théocratique, mi-narcotrafiquante. Si les Français subissent passivement cette violence endémique devenue incontrôlable, c’est que la société est pacifique et désarmée.
Désarmement moral des élites
Parler d’ensauvagement de la société permet de noyer le poisson en faisant porter à une masse informe la responsabilité de ce déchaînement, qui est en réalité le fait de quelques-uns qu’il est interdit de nommer sous peine de poursuites pour « incitation à la haine ». Ce constat calamiteux est d’abord la conséquence du désarmement moral des « élites » politico- médiatiques au pouvoir depuis des décennies, de la lâcheté d’une droite somnambule dite « de gouvernement » et de l’activisme d’une extrême gauche désormais représentée au Parlement.
Pire encore, les questions de sécurité et d’immigration sont traitées avec légèreté et insouciance au plus haut sommet de l’État. À cela s’ajoute une dangereuse et immature repentance présidentielle des « crimes » commis par une « France coloniale » présentée comme génocidaire, laquelle a pour effet dissolvant d’encourager la sécession intérieure de communautés déjà passablement hostiles. Face à cette guérilla quotidienne, police et justice sont désarmées, car la chaîne pénale est rompue par une législation pénale paralysante et par un manque flagrant de places de prison.
Sous l’égide du trio Cour européenne des droits de l’homme, Conseil constitutionnel et Conseil d’État, tout est fait pour désarmer l’État. À tel point que l’État de droit est devenu le principal obstacle au rétablissement de la sécurité publique. Le constat est sans appel : la France, en perdant sa souveraineté juridique et le contrôle de l’accès à son territoire, ne maîtrise plus sa sécurité intérieure.
(*) magistrat honoraire et ancien président de l’Union syndicale des magistrats (USM).
Source : Journal du dimanche 14/12/2025