culture et histoire - Page 1018
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LE PHARAON RAMSÈS II | 2000 ANS D’HISTOIRE | FRANCE INTER
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Une émission de la télévision Suisse allemande sur Les Brigandes
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Roland Hélie invité ce mardi à la matinale de Radio Libertés
Roland Hélie, directeur de Synthèse nationale, était ce matin invité par Arnaud Menu à donner son avis sur la Présidentielle lors de "la matinale" de Radio Libertés.
Pour écouter cette émission cliquez ici
(l'entretien avec Roland Hélie débute à 28,50 mn).
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Note sur la suppression générale des partis politiques
Le mot parti est pris ici dans la signification qu’il a sur le continent européen. Le même mot dans les pays anglo-saxons désigne une réalité tout autre. Elle a sa racine dans la tradition anglaise et n’est pas transplantable. Un siècle et demi d’expérience le montre assez. Il y a dans les partis anglo-saxons un élément de jeu, de sport, qui ne peut exister que dans une institution d’origine aristocratique; tout est sérieux dans une institution qui, au départ, est plébéienne.
L’idée de parti n’entrait pas dans la conception politique française de 1789, sinon comme mal à éviter. Mais il y eut le club des Jacobins. C’était d’abord seulement un lieu de libre discussion. Ce ne fut aucune espèce de mécanisme fatal qui le transforma. C’est uniquement la pression de la guerre et de la guillotine qui en fit un parti totalitaire.
Les luttes des factions sous la Terreur furent gouvernées par la pensée si bien formulée par Tomski : « Un parti au pouvoir et tous les autres en prison. » Ainsi sur le continent d’Europe le totalitarisme est le péché originel des partis. C’est d’une part l’héritage de la Terreur, d’autre part l’influence de l’exemple anglais, qui installa les partis dans la vie publique européenne. Le fait qu’ils existent n’est nullement un motif de les conserver. Seul le bien est un motif légitime de conservation. Le mal des partis politiques saute aux yeux. Le problème à examiner, c’est s’il y a en eux un bien qui l’emporte sur le mal et rende ainsi leur existence désirable.
Mais il est beaucoup plus à propos de demander : y a-t-il en eux même une parcelle infinitésimale de bien ? Ne sont-ils pas du mal à l’état pur ou presque ? S’ils sont du mal, il est certain qu’en fait et dans la pratique ils ne peuvent produire que du mal. C’est un article de foi. « Un bon arbre ne peut jamais porter de mauvais fruits, ni un arbre pourri de beaux fruits. »
Mais il faut d’abord reconnaître quel est le critère du bien.
Ce ne peut être que la vérité, la justice, et, en second lieu, l’utilité publique. La démocratie, le pouvoir du plus grand nombre, ne sont pas des biens. Ce sont des moyens en vue du bien, estimés efficaces à tort ou à raison. Si la République de Weimar, au lieu de Hitler, avait décidé par les voies les plus rigoureusement parlementaires et légales de mettre les juifs dans des camps de concentration et de les torturer avec raffinement jusqu’à la mort, les tortures n’auraient pas eu un atome de légitimité de plus qu’elles n’ont maintenant. Or pareille chose n’est nullement inconcevable. Seul ce qui est juste est légitime. Le crime et le mensonge ne le sont en aucun cas.
Notre idéal républicain procède entièrement de la notion de volonté générale due à Rousseau, Mais le sens de la notion a été perdu presque tout de suite, parce qu’elle est complexe et demande un degré d’attention élevé.
Quelques chapitres mis à part, peu de livres sont beaux, forts, lucides et clairs comme Le Contrat Social. On dit que peu de livres ont eu autant d’influence. Mais en fait tout s’est passé et se passe encore comme s’il n’avait jamais été lu. Rousseau partait de deux évidences. L’une, que la raison discerne et choisit la justice et l’utilité innocente, et que tout crime a pour mobile la passion. L’autre, que la raison est identique chez tous les hommes, au lieu que les passions, le plus souvent, diffèrent. Par suite si, sur un problème général, chacun réfléchit tout seul et exprime une opinion, et si ensuite les opinions sont comparées entre elles, probablement elles coïncideront par la partie juste et raisonnable de chacune et différeront par les injustices et les erreurs.
C’est uniquement en vertu d’un raisonnement de ce genre qu’on admet que le consensus universel indique la vérité.
La vérité est une. La justice est une. Les erreurs, les injustices sont indéfiniment variables.
Ainsi les hommes convergent dans le juste et le vrai, au lieu que le mensonge et le crime les font indéfiniment diverger. L’union étant une force matérielle, on peut espérer trouver là une ressource pour rendre ici-bas la vérité et la justice matériellement plus fortes que le crime et l’erreur.
Il y faut un mécanisme convenable. Si la démocratie constitue un tel mécanisme, elle est bonne. Autrement non.
Un vouloir injuste commun à toute la nation n’était aucunement supérieur aux yeux de Rousseau — et il était dans le vrai — au vouloir injuste d’un homme. Rousseau pensait seulement que le plus souvent un vouloir commun à tout un peuple est en fait conforme à la justice, par la neutralisation mutuelle et la compensation des passions particulières. C’était là pour lui l’unique motif de préférer le vouloir du peuple à un vouloir particulier.
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Culture • Le Mystère Le Nain
Famille de paysans dans un intérieur
Par Edouard de Saint Blimont
Il paraît qu’Emmanuel Macron, à peine élu, ira fêter sa victoire, sur la place du Louvre.
Qu’il en passe les portes ou qu’il se déplace jusqu’au Louvre Lens pour recevoir quelques leçons des frères Le Nain dont les tableaux sont exposés en ce moment. Mais cet ancien rédacteur du rapport Attali qui soutient que l’homme n’existe que pour produire et consommer, qui prône la nomadisation des peuples, et dont le programme exclut toute allusion à une éventuelle transcendance est-il capable de se laisser instruire par la peinture des Le Nain ? Quand nous regardons les scènes paysannes de Louis Le Nain, que nous sommes loin pourtant de l’univers décrit par Jacques Attali, dans sa Brève histoire de l’Aveniroù « les hommes se vendent comme des machines et où [ils] ne s'intéressent pas à leur progéniture à laquelle ils ne laissent ni fortune, ni héritage étant eux même issus de familles décomposées, recomposées, mobiles géographiquement. »
Il est donc urgent de s’interroger sur le mystère Le Nain pour reprendre le titre que le conservateur du Louvre, Nicolas Milovanovic, a voulu donner à son exposition. On sait qu’il a fallu beaucoup de science et de patience aux experts pour attribuer à chacun des frères Le Nain les tableaux que chacun a effectués en propre. Ce fut déjà un premier mystère mais on sait un peu mieux aujourd’hui ce qui revient à Louis, à Antoine, ou à Matthieu.
Des tableaux à la signification énigmatique.
Mais le vrai mystère de cette peinture est ailleurs. Si l’on se borne aux productions géniales de Louis, et si l’on se focalise sur son tableau le plus célèbre, Famille de paysans dans un intérieur, force est de reconnaître que sa signification reste énigmatique. S’agit-il de donner une représentation embellie de la condition paysanne, susceptible de satisfaire la bourgeoisie qui achète des terres, en conférant aux modèles une dignité remarquable ? S’agit-il, plus profondément d’y voir la manifestation du mystère Eucharistique ? La présence du pain sur une nappe et du vin, dans un verre de cristal, seuls éléments précieux au sein d’un univers marqué par la pauvreté le laisserait aisément supposer chez ce peintre d’origine protestante, converti au catholicisme. Il serait tentant déjà de « réduire » cette scène à une telle signification religieuse. Elle confère une dignité à l’ensemble des personnages. Mais l’on a remarqué à juste titre que ce tableau, comme beaucoup d’autres n’a pas de sujet défini. Dans l’émission de France Culture qui a été donnée au sujet de cette exposition, Nicolas Milovanovic indique qu’un enfant joue du flageolet mais ce n’est pas autour de ce détail que s’organise l’audition éventuelle d’un petit concert ; un repas semble se préparer mais les indices qui l’attestent font défaut. En bref, aucun sujet ne structure cet « intérieur » et le ferait-il qu’il serait impuissant à déterminer le sens profond de ce qui nous est montré : dans un autre tableau, La Forge, qui représente un forgeron qui s’active à sa forge tandis que sa famille se tient à ses côtés, l’activité artisanale semble déterminer le sujet du tableau, beaucoup plus que cette scène paysanne où l’on ne sait trop à quoi s’affairent les sujets présents. Mais dans la Forge, on ne saurait réduire ce que l’on voit à l’activité propre de l’artisan, qui se détourne de sa tâche pour regarder vers nous. C’est une constante dans les tableaux de Louis Le Nain : le sens de la scène représentée donne l’impression de transcender les motifs qui semblent, au départ, orienter l’esprit dans une interprétation précise. Aucune scène ne se laisse réduire aux motifs qui semblent pourtant décider de la représentation. Les scènes mythologiques, dépeintes par Louis ne dérogent pas à ce principe : l’interprétation du tableau représentant Vénus demandant à Vulcain des armes pour Enéene se laisse pas enfermer dans la démarche de la déesse.
Au fond, les êtres représentés dans ces scènes transcendent les activités auxquelles ils s’adonnent, leur humanité ne se limite pas à leur condition, l’humanité de l’homme déborde de toutes parts les sens divers auxquels on prétend la réduire. D’ailleurs, les tableaux de Louis mettent en perspective l’être humain par rapport aux activités auxquelles il peut s’adonner. On a souvent l’impression que si la représentation de l’activité humaine y est présente, c’est pour mettre en valeur, du fait de la présence d’être au repos, l’idée précisément que l’homme ne s’abîme pas strictement en elles. Mais il faut aller au-delà de ces remarques.
Les regards des personnages
Les grands critiques d’art et surtout les grands écrivains nous laissent à la porte de ce mystère qui nous permet de comprendre à quoi tient l’irréductibilité de l’humanité des êtres représentés chez Le Nain. Champfleury, un critique d’art du XIXème siècle, se focalisant sur la personnalité des personnages représentés indique qu’ils semblent prendre la pose et de fait l’intensité des regards que certains personnages dirigent vers nous le laisserait presque supposer : cela semble être le cas de trois des personnages de cette famille de paysans : de la vieille femme qui tient le verre de cristal, de l’homme assis à la table et qui s’apprête à couper la miche de pain, et de la femme plus jeune, à la droite du tableau. N’est-ce pas le cas de ce père de la Famille heureuse ou le retour du baptême, qui lève son verre et s’immobilise en nous regardant en souriant …comme on le ferait aujourd’hui, tandis qu’on nous photographie ? N’est-ce pas le cas de la femme du forgeron de La Forge qui nous regarde bien en face ?
Mais précisément, s’ils sont occupés à nous regarder, c’est qu’ils ne songent pas à prendre la pose et Sainte Beuve est plus près de la vérité quand il fait remarquer qu’ils nous regardent, c’est-à-dire, qu’ils semblent s’interroger sur la présence de ceux qui pénètrent par effraction dans leur univers.
Mais son interprétation reste au milieu du gué : d’une part, bien des personnages ne prennent même pas la peine de diriger leur regard vers nous. Ils regardent ailleurs, soit qu’une scène située hors champ attire leur regard comme dans La Forge, soit qu’ils nous tournent carrément le dos, comme l’enfant qui contemple le feu dans la Famille de paysans, ou le personnage qui s’affaire à ranimer le feu dans La Tabagie, soit encore qu’ils soient plongés dans un profond sommeil comme le dormeur situé au premier plan dans La Tabagie, ou cette magnifique Ariane, plongée dans le sommeil le plus profond que contemple avec émotion Bacchus dans Bacchus découvrant Ariane à Naxos.
Restent tous ceux qui semblent regarder le spectateur. Ils semblent frappés par une mélancolie rêveuse. Mais prêtez plus d’attention encore à la façon dont les personnages regardent : la vieille femme qui tient le verre de cristal, la jeune femme à la droite, l’enfant lui-même qui est assis sur le sol ; mais aussi Vénus s’adressant à Vulcain, ou Bacchus contemplant Ariane endormie… : en réalité, ils regardent sans regarder vraiment, leur regard donne l’impression de ne pas s’abîmer dans l’objet qu’ils sont censés voir, ce n’est par sur lui (être ou objet) qu’ils arrêtent leur pensée parce que tout en regardant ce qu’ils regardent, les personnages pensent à autre chose, ils sont comme on dit, plongés dans leur méditation. Pas plus que l’activité n’est leur définitive raison d’être, pas plus le monde qu’ils contemplent n’est de nature à arrêter suffisamment leur pensée.
Qu’on ne s’étonne donc plus si, par cette mise en scène du regard, le peintre leur confère une infinie profondeur, si, de manière tout à fait congruente, on retrouve dans leurs mains un verre de cristal rempli d’un vin rubis, et si l’on a, du coup, envie d’y voir représentée quelque cène eucharistique : ce regard nous ouvre sur le mystère de l’humanité de l’homme, sa profondeur ne trahit pas seulement une disposition à la mélancolie rêveuse ou plutôt cette mélancolie rêveuse est promesse d’une ouverture, au-delà de l’ici et du maintenant… à quoi les maîtres présents de notre monde, dans leur ardeur à nier toute transcendance, s’emploient à nous réduire.
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LE PHARAON RAMSÈS II | 2000 ANS D’HISTOIRE | FRANCE INTER
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Rébellion 79 : Face au système tous les coups sont permis
Au sommaire du numéro 79 de Rébellion :
Editorial : Tous les coups sont permis !
Société : Entretien avec Ingrid Riocreux par David l’Epée
Journalisme, de la formation au formatage
Actualité : La victoire en trollant. Petite histoire de l’Alt-Right ( Anon Frog)
Macron, la divine surprise ( David L’Epée)
Pensée : Sortir de l’aliénation par la philosophie. Entretien Charles Robin
L’extrême radicalité de notre époque. Entretien avec Francis Cousin ( Pierre Lucius)
La Syrie de Bachar, dernier bastion du panarabique François-Christian SOURY
Commande 5 euros (port compris) par courrier : Rébellion c/o RSE BP 62124 31020 TOULOUSE cedex 02
http://www.voxnr.com/8925/rebellion-79-face-au-systeme-tous-les-coups-sont-permis
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LES MOMIES ÉGYPTIENNES | 2000 ANS DʼHISTOIRE | FRANCE INTER
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Fin de la Ve République Vers une nouvelle révolution nationale ?
Le titre de cet article n'est pas une plaisanterie, mais une question que nous devons nous poser après une réflexion mûrie sur la séquence historique que nous traversons et qui touche à sa fin.
L'examen de l'histoire républicaine depuis la fin du XIXe siècle jusqu'à nos jours, me mène à croire que la République vit à nouveau sa crise chronique. Et je vais tâcher, à quelques jours du premier tour de l'élection présidentielle, de vous proposer un diagnostic de l'état de santé de la Ve République.
La période actuelle, comme je vais le montrer, ressemble étrangement à la fin du XIXe siècle où la République avait été remise en cause, notamment parles ligues, et plus encore à la fin des années trente.
Fin du XIXe siècle: la IIIe République tremble dès sa naissance
Contrairement à ce que l'on pourrait spontanément croire, les débuts de la IIIe République ne sont pas ceux d'un régime solide. C'est un régime vicié, qui est mort, à la fin des années 1930 de ses péchés originels.
L'année suivant son établissement (1870), lors des élections de février 1871, les Français élisent une écrasante majorité de monarchistes. Les républicains n'obtiennent la majorité à la Chambre qu’en 1876 et 1877 et au Sénat en 1879, après voir pris la présidence, ils font un score de 50,50 % aux élections législatives de 1881, avec 451 sièges contre 90 aux monarchistes bénéficièrent d'un vote protestataire qui affaiblit (temporairement) les républicains.
L’historien Christophe Prochasson expliquera ce « miracle politique » par l'entrée enjeu des instances économiques, sociales ou politiques et il ajoute : « il n’en demeure pas moins vrai que la célérité avec laquelle la République s'est installée au niveau de la représentation nationale et de l'appareil d’État ne laisse pas d'étonner et conduit à s'interroger sur la vigueur et la profondeur de cet enracinement. Si les républicains remportèrent ces victoires politiques, ni les valeurs ni même le fonctionnement de la République n'étaient encore bien établis. Les références anciennes prévalaient encore. L'histoire a vu se reproduire ces décollages entre l'avènement de forces politiques et l'état idéologique des sociétés dont elles font la conquête presque par malentendu »(1).
Il s'agit bien d’une conquête du pouvoir que les Républicains ont entamée à partir de 1789, et ils n’ont fini par atteindre leur qu’à la suite de près d’un siècle de lutte acharnée contre l’esprit français.
Et lorsqu’ils l’ont enfin conquis, comme les socialistes contemporains, cela n’a été que pour répandre la corruption au sommet de l'appareil d’État.
En voici un exemple, rapporté par Prochasson : « la prétendue intégrité de M. Grévy, cet austère républicain, vétéran à la présidence de la République, n'échappa guère à la tentation. Les frasques de son gendre, Daniel Wilson, richissime homme d'affaires et député radical, agioteur et trafiquant de décoration, ne le dédouanent pas du profit personnel qu'il tira de son honorable fonction. Jules Grévy s'enrichit très notablement durant sa présidence. En 1881, lorsqu'il maria sa fille à Wilson, il ne pouvait encore allouer à celle-ci qu'une fraction de l'indemnité présidentielle. À sa mort, en en septembre 1891, il laissa à sa descendance une succession de 7 millions, ce qui revient à placer Grévy "parmi les Français les plus riches de son temps" ». Et ce n'est pas tout ! Le même Grévy, président de la République usa et abusa de pratiques népotistes, constitua et renforça un authentique clan Grévy. Le cadet, Paul, devint sénateur du Jura en 1880, grâce à des pressions exercées sur les maires et les conseillers généraux. Le puîné, Albert, connut lui aussi une ascension fulgurante : vice-président de la Chambre en 1879, il fut nommé, en mars, gouverneur général de l'Algérie à titre provisoire pour pouvoir cumuler les deux traitements de sa nouvelle et de son ancienne fonction. L'affaire Grévy et son entourage n’étaient pas une exception, mais, une parmi tant d'autres qui éclataient les unes après les autres : le scandale du Panama, des faillites à répétition (celle du Comptoir d’escompte de Paris, celle des cuivres...). Il y avait, comme de nos jours, une interaction malsaine entre les hommes politiques et le monde de la finance, bref une corruption consubstantielle au régime républicain(2).
Les ligues antirépublicaine et anti-juives
Les adversaires de la République n'avaient pas de gros efforts à faire pour trouver des arguments contre ce Régime de corrompus.
En réaction à cet état de fait, dans les années 1890, les royalistes en particulier et les nationalistes en général, créèrent les ligues qui s'attaquèrent virulemment à la République et à ses soutiens, à savoir les juifs, les francs-maçons et les protestants. La principale ligue, l'Union nationale, catholique et nationaliste, fondée en 1893, accepta la stratégie de Ralliement des différentes ligues.
Les ligues sont nées, certes en opposition à la République, mais plus profondément, pour redéfinir une identité nationale - perturbée par ce corps étranger : la République et ses sectes -, refondée sur la base du catholicisme, en en traçant les contours.
La définition d'une identité nationale, si elle est inclusive, est aussi nécessairement exclusive , dès lors, pointer du doigt l'étranger à exclure est mécanique. Les nationalistes, monarchistes, et même bonapartistes - Charles Maurras, Maurice Barrés, Jules Lemaître et d'autres comme Edouard Drumont qui créa en 1901 le Comité national antijuif qui devint en 1903 la Fédération nationale antijuive qui propose de « combattre les influences pernicieuses de l'Oligarchie judéo-financière au complot occulte » -, désignèrent, pour tracer le contour de l'identité française, ses ennemis les groupes et communautés soutenant la République et la laïcisation de la société les francs-maçons, les juifs et les protestants.
Avant de poursuivre, et afin d'évacuer la thèse de l'antisémitisme hystérique qui ne se fonderait que sur une « haine du juif parce que juif » et une théorie infondée du complot judéo-maçonnique, il faut souligner l'action des juifs dans l'édification de la République dès les débuts de la Révolution.
En effet, comme je l'ai exposé dans un article du 16 février 2017 dans les colonnes de RIVAROL, les juifs ont contribué par des apports idéologiques(3) et matériels à la Révolution française. Je ne reprendrai pas ici tout mon propos, mais je citerai à nouveau le penseur et révolutionnaire Anacharsis Cloots (1755-1794), député de l'Oise à la Convention - d'origine prussienne mais qui fut proclamé citoyen français par l'Assemblée nationale législative le 26 août 1792 - qui écrivit dans son fameux ouvrage La République universelle (1792) que « Nous (les Révolutionnaires) trouverons encore de puissants auxiliaires, de fervents apôtres dans les tribus judaïques, qui regardent la France comme une seconde Palestine. Nos concitoyens circoncis nous bénissent dans toutes les synagogues de la captivité. Le juif, avili dans le reste du monde, est devenu citoyen français, citoyen du monde, par nos décrets philosophiques. Cette fraternisation alarme beaucoup les princes allemands, d'autant plus que la guerre ne saurait ni commencer ni durer en Allemagne, sans l'activité, l'intelligence, l'économie et le numéraire des juifs. Les magasins, les munitions de toute espèce sont fournis par les capitalistes hébreux, et tous les agents subalternes de l'approvisionnement militaire sont de la même nation. Il ne faudra que s'entendre avec nos frères les rabbins, pour produire des effets étonnants, miraculeux. J’ai reçu à cet égard des des réponses infiniment satisfaisant dèmes commettants du Nord. La cause des tyrans est tellement désespérée, que les aliments les plus sains se changent pour eux en poison subtil. On accusa les juifs, dans les siècles des ténèbres d'empoisonner les sources ou les puits ; et voici que dans notre, siècle lumineux, les juifs, en fournissant viandes pures, aideront l'humanité à exterminer la tyrannie.»(4)
Par ailleurs, l'écrivain et journaliste politique juif (et au-dessus de tout soupçon), Bernard Lazare (1865-1903), dans son livre L'antisémitisme, son histoire et ses causes, après avoir mentionné l'émancipation des juifs le 27 septembre 1791 par l'Assemblée constituante, souligna à propos de la révolution de 1848 que « de nouveau, ils (les juifs) durent leur indépendance à l'esprit révolutionnaire qui, une fois encore, vint de France. Nous verrons du reste qu'ils ne furent pas étrangers à ce grand mouvement qui agita toute l'Europe, en certains pays, notamment en Allemagne, ils aidèrent à le préparer, et ils furent les défenseurs de la liberté. Ils furent aussi parmi les premiers à en bénéficier, car on peut dire qu'après 1848 l’antijudaïsme légal est fini en Occident ; peu à peu les dernières entraves tombent, et les dernières restrictions sont abolies. En 1870, la chute du pouvoir temporel des papes fit disparaître le dernier ghetto occidental, et les Juifs purent être des citoyens même dans la ville de saint Pierre »(5).
Malgré la disparition du l'antijudaïsme légal, l'antijudaïsme réel (que l'on ne peut contenir par des lois !) ressurgit en France, quatre ans après la parution du livre de Bernard Lazare. À partir de 1897, via les ligues, éclatent des violences antisémites d'ampleur variable dans la France métropolitaine. À partir de janvier 1898, dans 55 villes se propagent dés violences, en trois vagues successives : la première concerne 23 villes, la seconde 19 villes et une troisième durant la dernière semaine de février. D'autres plus importantes éclatent en octobre à Paris, mais aussi à Marseille, Nantes, Rouen, Lyon ou Nancy, et ensuite en Algérie (d'une extrême violence), à Alger, Oran, Constantine, Blida, Sétif, Mostaganem...
Aux ligues nationalistes, se mêlent, et il faut le souligner, la Ligue radicale socialiste antijuive créée en 1892 qui devint en 1897 la Ligue antijuive d'Alger. Max Régis, le futur maire d'Alger élu en novembre 1898, en était le président(6).
Ces violences ponctuent (et ne concluent pas) cette lutte qui oppose depuis 1789 la France catholique à ses ennemis que sont les francs-maçons, les juifs et les protestants qui sont d'ailleurs surreprésentés dans la haute administration(7) et qui travaillent à laïciser la société française en chassant l’Église (fermeture de 125 écoles libres et expulsions des congrégations à la suite de la loi de 1905). En 1911, le sénateur de la Manche, Adrien Gaudin de Vilaine, déclare. « Autrefois l'université n'était pas ce qu'elle est aujourd'hui, elle était libre, maintenant elle est livrée, pieds et poings liés, à quelques renégats juifs mal blanchis et protestants sectaires. Je remarque et je dois à la vérité de dire que tous les directeurs de l'enseignement, lorsqu'ils ne sont pas juifs, sont protestants, aussi ne suis-je pas étonné du programme établi à l'heure actuelle. Au nom de la dignité française, je dois dire aussi que ces hommes ne sont pas français. »(8)
Les années 1930 : de troublantes similitudes avec les années 2010
Les années 1930 se caractérisent, comme la fin du XIXe siècle, par une délégitimation du pouvoir corrompu, entraînant une crise de régime et qui a culminé, cette fois, à sa chute à la suite de la débâcle militaire face à l'Allemagne à qui elle a déclaré la guerre. La question juive, comme dans les années 1890, a resurgi en même temps que la crise du régime, et ce n'est pas un hasard. Souvenons-nous de l'affaire Stavisky qui éclata en 1934 ; Serge Alexandre Stavisky était un banquier juif et escroc qui, avec la complicité d'hommes politiques, avait organisé une énorme fraude qui lui permit d'empocher 200 millions de francs. Cette affaire avait conduit à l'émeute antiparlementaire du 6 février 1934 qui a failli faire tomber la République.
Si donc la révolution nationale du Maréchal Pétain a pu arriver, malgré l’occupation dont sont directement responsables les dirigeants de la IIIe République peuple français, étourdi par 70 ans républicanisme, avait perdu ses repères politiques et sociaux, à quoi s’est ajoutée une débandade de la classe politique républicaine. Le peuple français des années 1930, comme aujourd'hui, vivait une crise d’identité majeure.
Le rôle historique de la révolution national fut alors d'accomplir ce qu'avaient entamé les ligues, et plus particulièrement Charles Maurras (qui qualifia de « divine surprise » l'avènement de Pétain), à savoir une redéfinition de l'identité française, lui fixant des repères stables, ce qui faisait et fait toujours défaut à la République.
Inutile de dresser ici la liste des affaires qui ont éclaté ces 20 dernières années. Inutile aussi de faire le décompte des hommes politiques corrompus aujourd'hui et qui sont à la tête de l’État en interaction directe avec les banques juives. Macron est à lui seul une synthèse.
La déligitimation du pouvoir est au moins aussi importante que dans les années 1930, et la Crise du régime ne saurait tarder...
Vraisemblablement, d’une manière ou d'une autre, la Ve République s'effondrera comme la IIIe s'est effondrée : par pourrissement. C'est le destin de la République.
Mais une question reste en suspens quelle force politique et sociale sera capable, sur les ruines de cette République déjà mourante, de faire une révolution nationale qui fixera des repères stables aux Français ?
Il est probable que plusieurs années s'écouleront avant qu'un personnage et une force émergent du chaos qui nous attend.
Jean TERRIEN. Rivarol du 20 avril 2017
1). Christophe Prochasson, dans Histoire de l'extrême droite en France, sous la direction de Michel Winock, 2015, Seuil, p. 52.
2). Christophe Prochasson, op. cit. pp. 57-58.
3). Sur les origines kabbalistiques de la religion de la République, voir : Youssef Hindi, La mystique de la laïcité. Généalogie de la religion républicaine, de Junius Frey à Vincent Peillon, Editions Sigest, 2017
4). Anacharsis Cloots, La République universelle, ou Adresse aux tyrannicides, 1752, pp. 186-187
5). Bernard Lazare, L'antisémitisme, son histoire et ses causes, 1894, éditions KontreKulture, 2012, p. 119.
6). Pierre Birnbaum, dans Histoire de l'extrême droite en France, pp. 108-109.
7 Voir la proportion de protestants dans la haute administration sous la IIIe République dans Vincent Peillon, Une religion pour la République, 2010, Le Seuil, pp. 118-119. 8. Rapporté par Pierre Birnbaum, op. cit.
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Le crépuscule des rois (Louis XV - Louis XVI) | Au cœur de l’histoire | Europe 1