culture et histoire - Page 1321
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Entrevue #21 : "Adriano Scianca, responsable culturel de CasaPound Italia"
1) Le Cercle Non Conforme : Merci Adriano d'avoir accepté cet entretien. Pouvez-vous présenter votre parcours militant et intellectuel à nos lecteurs? Comment êtes-vous devenu le responsable des affaires culturelles au sein de Casapound et en quoi consiste cette fonction?
Adriano Scianca : Mon parcours militant est très simple, car avant d'entrer à CasaPound je n'ai eu absolument aucune autre expérience politique. J'ai commencé à fréquenter ce mouvement en tant que simple sympathisant, en prenant immédiatement conscience de sa force, de son énergie ainsi que de la clairvoyance de son programme et de son idéologie. Ensuite j'ai amplifié au fur et à mesure mon engagement et mon implication.
Mon parcours intellectuel est évidemment plus complexe, je suis passé par une forte identification de jeunesse à la doctrine de Julius Evola et puis, dans un second temps, par une découverte des thèses de la Nouvelle Droite française et de celles de Giorgio Locchi, ce génial intellectuel italien qui a longtemps vécu à Paris.
Être le responsable culturel de CPI [CasaPound Italia] consiste à superviser l'organisation des conférences de notre section principale, à Rome, mais aussi à coordonner celles qui se déroulent dans toutes les sections d'Italie, et enfin à s'occuper de tout ce qui à trait à la formation, à l'information et à la communication entre les militants de CPI.2) Le C.N.C. : Comment a été reçu l'ouvrage Casapound, une terrible beauté est née en Italie et en Europe ? A l'heure actuelle peut-on dire que cet ouvrage a contribué à fortifier l'image et la doctrine de Casapound ?
A.S. : J'espère en effet que le livre a contribué à l'image et à la doctrine de CasaPound. Quant à sa réception, je dois dire qu'en France elle a été plus marquée qu'en Italie. Chez nous il a été beaucoup lu surtout par les militants, et du reste j'ai fait des présentations dans quasiment chaque section de CPI. Il n'y a toutefois qu'en France que ce livre a généré un véritable débat, parfois de manière assez virulente. C'est parce que votre pays a un rapport différent à la culture et aussi parce que les milieux identitaires donnent une grande importance aux discours doctrinaux.
3) Le C.N.C. : Casapound est perçu en France comme un mouvement social adossé à un projet métapolitique (radio, musique, esthétique, …). ZetaZeroAlfa et son leader, Gianluca Iannone, sont pour beaucoup dans cette impulsion initiale. Quel bilan tirez-vous de l'action culturelle du mouvement depuis son origine ?
A. S. : Je crois que l'activité culturelle de CasaPound est sans aucun doute un succès. En peu d'années nous avons organisé une centaine de conférences rien qu'à Rome (auxquelles il faut ajouter toutes celles faites dans le reste de l'Italie), et certaines d'entre elles ont occupé les premières pages des journaux nationaux. Nous avons été les premiers en Italie à recevoir et à donner la parole aux Grecs d'Aube Dorée, hélas ostracisés comme d'autres mouvements nationalistes européens. Nous avons été l'unique mouvement nationaliste en Europe à faire face – tout en restant fermes sur nos positions – à un ancien terroriste communiste comme Valerio Morucci (auteur de l'enlèvement et de l'assassinat de l'homme d'Etat démocrate chrétien Aldo Moro) ou aux associations homosexuelles. Nous avons accueilli dans notre local des parlementaires de tous les partis, des intellectuels de toutes opinions. Nous avons fait des conférences sur des auteurs surprenants comme Kerouac ou Bukowski.
En plus du mien, je renvoie aussi aux deux livres (un essai et un roman) que Domenico Di Tullio, notre avocat et ami, a dédié à CPI. Et enfin aux livres sur CasaPound, écrits par des étudiants, des sociologues, des journalistes, quasiment toujours de gauche.4) Le C.N.C : Lors du colloque de l'Institut ILIADE, vous êtes intervenu pour vous exprimer au sujet du mont Palatin, un « haut lieu européen ». Y a-t-il pour vous d'autres lieux dans la ville de Rome où vibrent l'âme européenne et notre plus longue mémoire ?
A. S. : Étant à tout point de vue une ville sacrée, Rome est parsemée de lieux de ce type. Si l'on doit en citer un, nous pouvons parler de l'Ara Pacis, l'autel dédié à Auguste en 9 av. JC à la déesse de la Paix, originellement situé dans une zone du Champ de Mars consacrée à la célébration des victoires. Monument évocateur, aujourd'hui malheureusement mis en cage dans une horrible architecture moderne, qui démontre de façon plastique l'incapacité de notre époque à sauvegarder son meilleur héritage. D'un point de vue profane, j'ai plaisir à rendre hommage aux quartiers entiers qui portent l'empreinte du style fasciste : de l'EUR au Forum Italique jusqu'à la Cité Universitaire.
5) Le C.N.C. : Le futurisme est une référence qui revient fréquemment dans l'univers de Casapound de même que l'esprit d'avant-garde. Comment définiriez-vous l'avant-garde culturelle pour le XXIeme siècle ?
A. S. : Il est difficile de fixer les contours exacts d'une avant-garde avant qu'elle ne prenne corps. Mais nous pouvons déterminer certaines de ses caractéristiques possibles. L'avant-garde du XXIeme siècle devra être caractérisée par une pensée forte, elle devra être en lien avec l'élémentaire, avec l'essentiel. Ce sera une pensée vitaliste et constructive. Son objectif principal sera de repenser l'identité européenne, qui ne peut plus se limiter aux seules images de Stonehenge et du Parthenon grec, elle doit dire quelque chose aux jeunes d'aujourd'hui et surtout de demain.
6) Le C.N.C. : Dans le parc du Pincio, nous pouvons admirer de nombreux bustes de personnages célèbres de l'histoire italienne et européenne, si vous deviez vous référer à un seul des personnages présents dans ce parc, lequel serait-il et pourquoi ?
A. S. : Si je dois en choisir un seul je parlerai de Nicolas Machiavel, qui est aujourd'hui dépeint comme le théoricien d'un cynisme politique à la House of Cards, alors qu'il fut en réalité un bon patriote, partisan des forces (virtù) républicaines (romaines NDT) et de l'héritage romain. Machiavel a parlé de la necessité de reconnaître l'autonomie du politique plusieurs siècles avant Carl Schmitt, et a rêvé d'une Italie libre et souveraine bien avant que notre nation trouve l'unité et l'indépendance.
7) Quels seraient pour vous les dix livres incontournables de la bibliothèques idéale de tout européen ?
Étant donné que les listes de ce type sont toujours arbitraires et dans une certaine mesure « symboliques », je vais essayer d'établir avec une liste qui reflète en quelque sorte ma sensibilité :
1) Homère, l'Iliade et l'Odyssée ; 2) Virgile, l'Enéide ; 3) Friedrich Nietzsche, Ainsi parlait Zarathoustra; 4) Martin Heidegger, L'auto-affirmation de l'université allemande ; 5) Giorgio Locchi, Wagner, Nietzsche et le mythe surhumaniste ; 6) Jean Raspail, Le camp des Saints; 7) Alain de Benoist, Comment peut-on être païen ?; 8) Filippo Tommaso Marinetti, Mafarka le futuriste ; 9) Ezra Pound, Cantos; 10) Dominique Venner, Un Samouraï d'Occident.
Traduction : Aymeric
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Politique éco n°52 : Histoire secrète de l’oligarchie anglo- américaine
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Cinq cents mots pour la dissidence (Avant-propos et première section, A-B)
Avant-propos
Les mots sont des armes.
Le Novlangue orwellien est, avec la diabolisation des mal pensants, l’arme principale du Système dominant pour stériliser les intelligences et priver les âmes de courage. Polémia y a consacré une première étude. Mais en contrepoint du Novlangue, le franc-parler politique est une arme pour libérer les esprits et leur donner des outils pour mieux comprendre le monde.
C’est le but de ce dictionnaire de la réinformation, de ce lexique de la dissidence.
Il ne comprend qu’un peu plus de 400 mots : il ne prétend donc pas à l’exhaustivité ni même à l’impartialité, encore moins à l’unicité de points de vue exprimés : car tout ce qui peut nourrir de forces la dissidence est bienvenu. Dissidents de toutes sensibilités, unissez-vous !
Aussi, nul besoin d’être d’accord avec chacune de ces 464 définitions pour participer à la bataille. Il s’agit juste ici pour Polémia d’ouvrir la réflexion et d’inciter chacun à la poursuivre pour ouvrir des brèches dans le mur de l’idéologie unique… avant de le faire tomber !
Dans cette première ébauche le lecteur trouvera :
– des mots libérateurs, pour dévoiler ce que le politiquement correct et la censure médiatique veulent cacher ;
– des mots accusateurs, pour comprendre les ressorts du Système mondialiste dominant qui conduit les Européens sur la route de la servitude et de la décadence, afin de mieux le combattre ;
– des mots oubliés, qu’il faut invoquer pour retrouver notre identité et la voie du renouveau de notre civilisation ;
– des mots clés, pour interpréter les réalités et les forces de domination en œuvre.
A chacun de poursuivre ! Car « Chaque Philoctète sait que sans son arc et ses flèches Troie ne sera pas conquise ».
Les Cinq Cents Mots sont présentés en neuf sections successives ainsi réparties : A-B — C — D — E-F — G-I — J-M — N-P — Q-S —T-Z.
L’intégralité est consultable en pdf à :
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Il y a 3500 ans en Crète, une invention provoque l’exode d’une civilisation
Des palais détruits, puis reconstruits, puis à nouveau détruits. Des habitations abandonnées par dizaines. Qu’est-il donc arrivé aux Minoens, brillante civilisation crétoise il y a plus de trois mille ans ? Une étude lève un coin du voile.
Pendant longtemps, l’histoire était simple. Précédant la Grèce antique, une merveilleuse et impressionnante civilisation crétoise établie aux III-IIe millénaires av. J.-C., celle des Minoens, aurait été balayée par une éruption terrifiante : celle du Santorin, supervolcan dont l’effondrement a envoyé un tsunami meurtrier dans l’est de la Méditerranée.
Mais avec l’affinement progressif des datations, il a fallu se rendre à l’évidence : cela n’avait rien à voir. Le volcan a explosé au moins soixante-dix ans après la toute première destruction des palais minoens, survenue vers 1700 av. J.-C. Reconstruits entre-temps, les palais sont cette fois définitivement détruits autour de 1450 ans av. J.-C. Seule exception, le plus gros d’entre eux, celui de Cnossos sur la côte nord de l’île, qui se maintient encore quatre-vingt ans. Puis il tombe à son tour.
Pour retracer cette mystérieuse histoire, impossible de se passer de l’archéologie. Car les Minoens ont beau avoir laissé des inscriptions, celles qui datent d’avant la destruction des palais sont rédigées dans une langue à ce jour toujours inconnue. Pas de trace non plus d’éventuels souverains dans les splendides fresques et décorations de cette époque.
L’archéologie, elle, est plus bavarde. Surtout depuis la découverte de nombreux sites dans les campagnes aux alentours des palais. Ces travaux mettent en évidence de curieuses évolutions du peuplement dans l’île. Excepté de rares cas, le nombre de sites occupés par les Minoens a tendance à diminuer, voire à franchement chuter au moment de l’émergence des seconds palais.La plupart du temps, les spécialistes du monde minoen ont fait de ces phénomènes une lecture essentiellement politique. Ces changements traduiraient, par exemple, des luttes entre palais concurrents, qui aurait fini par tourner à l’avantage de l’un d’eux, Cnossos, réussissant alors à exercer sa domination sur une grande partie de la Crète.
Mais une équipe d’archéologues de l’École française d’Athènes dirigée par Sylvie Müller Celka, du CNRS, a fait une découverte intrigante. Elle a constaté que le phénomène d’abandon des sites était particulièrement marqué dans la région de Malia, sur la côte nord-est de la Crète. Elle a montré qu’entre la période des premiers palais (ceux détruits vers 1700 ans av. J.-C. ) et celle des seconds (ceux détruits avant 1450 av. J.-C.), les Minoens n’ont abandonné définitivement que des sites bien particuliers : presque tous ceux qu’ils occupaient sur les pentes de la montagne qui domine Malia.
Pour comprendre cet abandon, les chercheurs ont examiné en détail la géographie des lieux et la nature des terres qui s’y trouvent. Ils ont mis en évidence trois grandes zones. En bas, ce sont les plaines de la côte, chaudes et plutôt sèches, habitées tout au long de la période minoenne. Le rendement des terres, sans apport important d’eau, y est faible. Tout en haut se trouve la zone d’altitude quasi-inhabitée, où la culture des oliviers et de la vigne est difficile, voire impossible (au-delà de 900 mètres).
Entre les deux se placent les pentes de la montagne (entre 300 et 900 mètres d’altitude). C’est principalement cette zone que les Minoens ont quittée à la période des seconds palais. Ces pentes sont beaucoup plus arrosées que la plaine, et recouvertes en haut par des forêts. Les recherches de l’équipe montrent que les populations y occupaient alors des sites plutôt petits par rapport à ceux de la plaine. Elles y élevaient des chèvres et des moutons, cultivaient de la vigne, des arbres fruitiers, un peu de céréales et produisaient du miel. Dans ces pentes en proie à l’érosion, elles exploitaient de petites parcelles proches de leurs maisons. Elles captaient sans doute l’eau des sources ou des torrents avec des canalisations en terre cuite, dont les archéologues ont trouvé de nombreux fragments.
Mais alors, pourquoi cette soudaine ruée vers la plaine ? Pourquoi quitter un milieu dont ils savaient tirer parti, pour des terres sèches et a priori peu accueillantes ? Peut-être, proposent les chercheurs, parce que les Minoens avaient trouvé la clé pour accéder aux énormes réserves en eau du sous-sol crétois. Ils auraient découvert ou importé de l’étranger le moyen de pomper la nappe phréatique. Et par là, celui d’irriguer massivement les plaines de la côte. Donc d’améliorer considérablement le rendement des terres basses, pour y cultiver oliviers, vignes et légumineuses (la famille des fèves, pois, etc.). Autrement dit, ce serait peut-être une innovation agricole aurait lancé le signal de cet exode vers la plaine.
Mais cette hypothèse est-elle plausible ? Peut-être, car c’est justement au début de la période des seconds palais que les Minoens semblent avoir développé un intérêt pour tout ce qui touche à l’hydraulique. Ces dernières années, des archéologues ont découvert des barrages placés sur des torrents de montagne, datant de cette époque. Ils se trouvent dans l’est de la Crète, dans la vallée de Choiromandres et sur l’îlot de Pseira. Ces dispositifs semblent clairement avoir pour but l’irrigation, répandant leur trop-plein dans des terrasses agricoles situées juste à côté des barrages.
En outre, c’est à peu près à la même époque que les Minoens commencent à creuser des puits, et donc à atteindre la nappe phréatique. Les systèmes qu’ils utilisaient pour amener l’eau à la surface ne nous sont pas parvenus. Étaient-ils suffisamment efficaces pour alimenter un dispositif d’irrigation en plaine ? C’est possible, car au moins un système rudimentaire pour pomper l’eau du sous-sol est alors connu depuis plus d’un millénaire en Mésopotamie. C’est le puits à balancier, où un contrepoids facilite l’ascension du seau. Il est attesté également en Égypte durant la période correspondant aux seconds palais, alors qu’existent justement des relations commerciales avec la Crète.
Cette intense activité hydraulique pourrait aussi être liée à une lente détérioration du climat en Crète, ayant débuté deux mille ans plus tôt. Des études suggèrent en effet que les étés sont devenus de plus en plus secs. Les pluies calmes de l’hiver se seraient progressivement décalées au début de l’automne, devenant torrentielles, entraînant érosion des pentes et manque d’eau pour la végétation au printemps. Dans ces conditions, la vie sur les pentes de la montagne était peut-être devenue de plus en plus difficile avec le temps.
Si cette hypothèse est correcte, alors le phénomène d’abandon des sites d’altitude ne devrait pas être limité à la région de Malia. Tout semble indiquer que c’est bien le cas. En règle générale, à l’arrivée des seconds palais, il y a nettement moins de sites occupés dans les zones d’altitude ou à relief accidenté, alors qu’ils se développent dans les zones de plaine (ou dont le relief permet l’irrigation et l’agriculture intensive).
En outre, si les causes de ces déplacements étaient politiques, les populations auraient normalement fini par revenir. Or ces sites de montagne ne seront jamais réoccupés, ou alors bien après, plus d’un millénaire plus tard.
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Le Schisme de 1054
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« Crise du capitalisme et gouvernance par le chaos », l’actualité brûlante d’Oliganarchy | Par Nicolas Bourgoin.
« Nicolas Bourgoin, le démographe, m'a fait l'honneur d'une recension d'Oliganarchy sur son blog.
J'ai eu son autorisation pour qu'elle soit reprise sur Scriptoblog... ».
Lucien Cerise.Lucien vit à Paris chez sa mère dans un quartier populaire parisien. Diplômé et au chômage, son existence ressemble à celle de beaucoup de ses contemporains : terne, vide et sans horizon. A quelques heures d’avion de là, William, spin doctor renommé et ami intime du président des Etats-Unis, écume les hautes sphères internationales où il met son talent au service des plus grands de ce monde. Difficile d’imaginer univers plus dissemblables : anarchie ou chaos d’un côté, oligarchie de l’autre. De fait, quand Lucien croisera ponctuellement le chemin de William, ce sera de manière purement accidentelle, à l’occasion d’une promenade dans les beaux quartiers. Et pourtant ces deux mondes socialement aux antipodes, en apparence totalement étrangers l’un à l’autre, sont en réalité étroitement dépendants.
Le bonheur des uns fait le malheur des autres. La précarité affective, économique et sociale dont souffre Lucien n’est en rien le fait du hasard mais le résultat d’un sytème qui oppresse la majorité au profit d’une extrême minorité. Et ça ne risque pas de changer : dans notre monde capitaliste, leshappy few peuvent compter sur une armée de consultants qui bataillent sans relâche pour faire accepter au reste du monde son triste sort. Une propagande déversée par le système au moyen des canaux de communications (télévisions, radios et presses écrites) détenus par les grands groupes financiers. Abruti par les mass media, Lucien ne connaît pas l’origine de ses malheurs et devra faire un travail de déconditionnement pour la découvrir, travail qu’il entamera à l’occasion de contacts noués avec le mouvement localiste. A l’autre bout du monde, William sera confronté à un grain de sable inattendu menaçant de gripper la belle machine qu’il a conçue pour ravaler l’humanité au rang de bétail…
Didactique et intelligent, Oliganarchy prend appui sur ces histoires parallèles pour décortiquer le projet et les méthodes de l’ingénierie sociale, du conditionnement des masses, qui évoquent par certains aspects l’univers décrit par Aldous Huxley dans Le meilleur des mondes. Une plongée dans les arcanes de ce microcosme opaque pour saisir l’esprit (au sens wébérien du terme) du Nouvel Ordre Mondial, nécessaire pour qui veut se libérer de l’aliénation produite par la société de consommation. Connaître les déterminants cachés de sa propre conduite au moyen d’un travail deréinformation est le meilleur moyen de s’en libérer. Il suppose de rompre avec l’idéologie libérale de la responsabilité individuelle qui renvoie chacun à son propre malheur, et de remonter la chaîne de causalité reliant la vie quotidienne des classes populaires aux décisions prises dans les plus hautes sphères dirigeantes. La misère et les difficultés ne tombent pas du ciel. Cette prise de connaissance suppose un travail de déconditionnement – « moins on regarde la télévision et moins on est sous son influence, donc plus on récupère une vision du monde autonome »dira à un moment Lucien (p.161) – puis de réinformation (le vrai pouvoir est opaque et s’exerce dans le secret, hors de portée des médias officiels).
Le problème auquel est confrontée l’oligarchie mondialiste tient en une simple équation : comment perpétuer un système qui plonge l’humanité dans des conditions d’existence de plus en plus dégradées ? Les méthodes ne manquent pas, à commencer par la plus indolore : le marketing idéologique. La fabrication de faux problèmes ou de fausses menaces, voire de fausses informations, pour détourner l’attention des vrais tout en divisant pour mieux régner sont des recettes qui marchent toujours bien si l’on en juge par le récent succès du modèle du « choc des civilisations » . Masquer la question sociale par la question ethnique en recourant à la stratégie du bouc émissaire est une méthode éprouvée depuis le lancement de SOS Racisme, consistant à introduire une ligne de fracture dans la classe populaire, séparant « Français de souche » et « Français issus de l’immigration » pour in fine la désorganiser et l’affaiblir.
Laminer l’esprit critique des masses en les dépolitisant, rabaisser leur intelligence et leur niveau culturel, les infantiliser en réduisant leur autonomie, favoriser les conduites addictives et la recherche de la satisfaction immédiate des désirs, le tout au moyen des loisirs de masse abrutissants et de la publicité omniprésente, renvoie à ce qu’Herbert Marcuse appelait la désublimation répressive : une soumission aveugle aux pulsions primaires, consuméristes ou sexuelles, qui abolit la pensée critique ou négative et favorise ainsi une plus grande acceptation de l’ordre établi. Cette conscience heureuse régressive fabriquée par le système et qui en nie les méfaits sert la domination : « la satisfaction se fait sous une forme qui engendre la soumission et affaiblit la rationalité de la protestation ». (L’homme unidimensionnel, p.99). Gagner le consentement des masses par la mécanique de la servitude volontaire reste encore le moyen le plus efficace pour gouverner.
Mais dans le contexte actuel de durcissement des contradictions du capitalisme parvenu à son stade de pourrissement, l’oligarchie est passée à la vitesse supérieure. Au conditionnement médiatique de l’opinion et au contrôle social par le consumérisme, fragilisés par l’effondrement économique, s’ajoutent d’autres méthodes plus agressives pour domestiquer les classes populaires et automatiser leurs conduites : le puçage de masse en vue d’instaurer une surveillance panoptique des populations, la déconstruction programmée de leurs structures sociales et culturelles visant à les plonger dans le chaos pour mieux les contrôler en neutralisant leurs capacités de réflexion, ainsi que les opérations psychologiques de manipulation dont la célèbre « stratégie du choc » (tirer partie ou même provoquer une crise grave pour faire passer des mesures impopulaires en contournant les garde-fous démocratiques et les résistances au changement).
De fait, l’équation du problème est aussi démographique : « les élites dominantes étant minoritaires par rapport à la majorité dominée, elles avaient toujours été menacées de disparaître sous la pression du nombre et des soulèvements populaires » (p.48). D’où la nécessité pour l’oligarchie depurger l’humanité de ses éléments jugés surnuméraires, enjeu crucial à l’heure où la population mondiale dépasse les 7 milliards d’habitants dont près de la moitié vit avec moins de deux dollars par jour. Les moyens techniques ne manquent pas, notamment les bombes sanitaires : la diffusion massive d’OGM, la pollution par les ondes électromagnétique, la promotion de la junk food qui rend obèse, l’épandage de pesticides et l’usage de produits chimiques désormais omniprésents dans la vie quotidienne sont à l’origine de nombreux cancers, sans parler de la consommation massive de psychotropes liée à l’explosion des pathologies dépressives provoquées par la souffrance sociale. Seulement moins de 10 % des tumeurs ont une cause endogène. Combinée à la privatisation des systèmes de santé et à la paupérisation massive des populations, la dégradation sanitaire de l’environnement constitue un cocktail explosif. Appauvrir les populations et les rendre malades tout en leur faisant payer l’accès aux soins médicaux : la Grèce qui a déjà perdu près de 350.000 habitants depuis 2007 est le laboratoire par excellence où sont expérimentées ces méthodes malthusiennes de réduction de la population généralisables à l’échelle de l’Europe. Le tableau dressé par la revue médicale The Lancet est éloquent : une espérance de vie en baisse de trois ans, un taux de natalité qui a régressé au niveau des années 1950, un taux de mortalité infantile qui a augmenté (officiellement) de moitié, près de 20 % d’enfants qui naissent avec un poids inférieur à la normale, 21 % de morts nés et 40 % de suicides en plus depuis le début de la crise.
La minorité oligarchique mène de fait une guerre de basse intensité contre les populations qu’elle plonge dans un chaos organisé afin de mieux les asservir pour in fine continuer à capter la majeure partie des richesses mondiales. Comme le déclare sans ambages l’un des plus grands oligarques, Warren Buffett, « il y a une guerre des classes et c’est ma classe, la classe des riches, qui mène cette guerre et qui est en train de la gagner ». La victoire de cette politique de prédation globalisée a un coût de plus en plus élevé pour les populations et leur environnement. Le capitalisme mondialisé détruit littéralement la planète pour permettre à une minorité de privilégiés de maintenir ses standards de consommation en dépit de l’épuisement accéléré des ressources planétaires. Promouvant l’abolition des frontières et la mise en place d’un gouvernement mondial, il s’attaque à la notion même d’identité.
Second livre d’une trilogie (qui fait suite à Photographies d’un hamburger), Oliganarchy est sorti début 2013, au moment des prémices du tournant liberticide et néoconservateur de l’État français. Se présentant comme une mise en fiction des thèses développées dans Gouverner par le chaos, il est d’une étonnante actualité. Les impostures des grandes mobilisations pour la liberté d’expression ou contre le racisme ou l’antisémitisme, l’instrumentalisation de la « menace terroriste » à des fins sécuritaires justifiant le vote d’un cortège de lois qui ne cessent de réduire les libertés publiques et instaurent une justice actuarielle (loi sur le renseignement, loi de programmation militaire, loi relative à la sécurité et à la lutte contre le terrorisme, loi renforçant les dispositions relatives à la lutte contre le terrorisme,…), les attaques contre la notion même de filiation avec la marchandisation du vivant par la GPA ou encore la libéralisation du contrat de travail avec les lois Macron qui va condamner les salariés à une précarité sans fin, prennent tout leur sens à la lumière des analyses présentées dans Oliganarchy. Les contradictions manifestes de ces politiques (en appeler à la liberté d’expression pendant qu’on bâillonne le journalisme d’investigation ou qu’on censure toujours plus la parole publique, prétendre lutter contre contre le racisme alors qu’on stigmatise les musulmans ou encore prétendre s’engager contre la finance alors qu’on mène une politique ultralibérale et qu’on abandonne la Grèce à ses créanciers) révèlent la stratégie du pouvoir socialiste qui tient en quelques mots : surveiller et contrôler, dépolitiser et désinformer, manipuler et terroriser.
Nicolas Bourgoin. -
La lutte des classes (des riches)