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culture et histoire - Page 1317

  • Alfred Thayer Mahan, théoricien de la thalassocratie américaine

    Amiral, historien et professeur à l’US Naval Academy, Alfred Thayer Mahan est né le 27 septembre 1840 à West Point, où son père enseignait à l’Académie militaire. Il fréquente l’US Naval Academy d’Annapolis, sert l’Union pendant la Guerre de Sécession et entame une carrière de professeur d’histoire et de stratégie navales. De 1886 à 1889, il préside le Naval War College. De 1893 à 1895, il commande le croiseur Chicago dans les eaux européennes. Il sert à l'état-major de la marine pendant la guerre hispano-américaine de 1898. En 1902, il est nommé Président de l’American Historical Association. Il meurt à Quogue, dans l’État de New York, le 1erdécembre 1914. L'œuvre de Mahan démontre l'importance stratégique vitale des mers et des océans. Leur domination permet d’accéder à tous les pays de la planète, parce que la mer est res nullius, espace libre ouvert à tous, donc surtout à la flotte la plus puissante et la plus nombreuse. Le Sea Power, tel que le définit Mahan, n'est pas exclusivement le résultat d'une politique et d'une stratégie militaires mais aussi du commerce international qui s'insinue dans tous les pays du monde. Guerre et commerce constituent, aux yeux de Mahan, deux moyens d'obtenir ce que l'on désire : soit la puissance et toutes sortes d'autres avantages. Ses travaux ont eu un impact de premier ordre sur la politique navale de l'empereur allemand Guillaume II, qui affirmait « dévorer ses ouvrages ».

    ◘ The Influence of Sea Power upon History 1660-1783

    (L'influence de la puissance maritime sur l'histoire 1660-1783), 1890

    Examen général de l'histoire européenne et américaine, dans la perspective de la puissance maritime et de ses influences sur le cours de l'histoire. Pour Mahan, les historiens n'ont jamais approfondi cette perspective maritime car ils n'ont pas les connaissances navales pratiques nécessaires pour l'étayer assez solidement. La maîtrise de la mer décide du sort de la guerre : telle est la thèse principale de l'ouvrage. Les Romains contrôlaient la mer : ils ont battu Hannibal. L'Angleterre contrôlait la mer : elle a vaincu Napoléon. L'examen de Mahan porte sur la période qui va de 1660 à 1783, ère de la marine à voile. Outre son analyse historique extrêmement fouillée, Mahan nous énumère les éléments à garder à l'esprit quand on analyse le rapport entre la puissance politique et la puissance maritime. Ces éléments sont les suivants :

    • 1) la mer est à la fois res nullius et territoire commun à toute l'humanité ;
    • 2) le transport par mer est plus rapide et moins onéreux que le transport par terre ;
    • 3) les marines protègent le commerce; 4) le commerce dépend de ports maritimes sûrs ;
    • 5) les colonies sont des postes avancés qui doivent être protégés par la flotte ;
    • 6) la puissance maritime implique une production suffisante pour financer des chantiers navals et pour organiser des colonies ;
    • 7) les conditions générales qui déterminent la puissance maritime sont la position géographique du territoire métropolitain, la géographie physique de ce territoire, l'étendue du territoire, le nombre de la population, le caractère national, le caractère du gouvernement et la politique qu'il suit (politiques qui, dans l'histoire, ont été fort différentes en Angleterre, en Hollande et en France).


    Après avoir passé en revue l'histoire maritimes des pays européens, Mahan constate la faiblesse des États-Unis sur mer. Une faiblesse qui est due à la priorité que les gouvernements américains successifs ont accordé au développement intérieur du pays. Les États-Unis, faibles sur les océans, risquent de subir un blocus. C'est la raison pour laquelle il faut développer une flotte. Telle a été l'ambition de Mahan quand il militait dans les cercles navals américains.

    ◘ The Influence of Sea Power upon the French Revolution and Empire, 1793-1812

    (L'influence de la puissance maritime sur la Révolution française et l'Empire français, 1793-1812), 2 vol., 1892

    Ce livre d'histoire maritime est la succession du précédent. Il montre comment l'Angleterre, en armant sa marine, a fini par triompher de la France. En 1792, l’Angleterre n'est pas du tout prête à faire la guerre ni sur terre ni sur mer. En France, les révolutionnaires souhaitent s'allier à l’Angleterre qu'ils jugent démocratique et éclairée. Mais, explique Mahan, cet engouement des révolutionnaires français ne trouvait pas d'écho auprès des Anglais, car la conception que se faisaient ces derniers de la liberté était radicalement différente. Pour Mahan, conservateur de tradition anglo-saxonne, l’Angleterre respecte ses traditions et pratique la politique avec calme. Les révolutionnaires français, eux, détruisent toutes les traditions et se livrent à tous les excès. La rupture, explique le stratège Mahan, survient quand la République annexe les Pays-Bas autrichiens, s’emparent d’Anvers et réouvrent l’Escaut. La France révolutionnaire a touché aux intérêts de l'Angleterre aux Pays-Bas.

    Le blocus continental, décrété plus tard par Napoléon, ne ruine pas le commerce anglais. Car en 1795, la France avait abandonné toute tentative de contrôler les océans. Dans son ouvrage, Mahan analyse minutieusement la politique de Pitt, premier instigateur génial des pratiques et stratégies de la thalassocratie britannique.

    ► Robert Steuckers, Vouloir n°137/141, 1997.

    http://www.archiveseroe.eu/mahan-a117737864

  • Périco Légasse : pourquoi la France est devenue moche

    Ronds-points, parkings, zones commerciales...pour Périco Légasse, l'enlaidissement de la France est une conséquence de la mondialisation qui uniformise le territoire sous la bannière du double impératif produire/consommer. 
    FigaroVox : Les paysages français ont-ils beaucoup changé ces 30 dernières années du fait de la multiplication des zones commerciales et industrielles à l'entrée des villes ? 
    Périco Légasse : C'est même l'un des phénomènes marquants, voire déchirants, de la morphologie contemporaine française. La France n'est pas qu'une entité culturelle de dimension internationale, c'est aussi un territoire culturel de réputation mondiale. Son visage participe de son image. Or nous assistons depuis trente années à un massacre organisé de ce tableau sur lequel s'est bâti, non seulement le renom touristique et pittoresque de ce pays, mais aussi sa légende de pays de l'art de vivre. Il y a une quarantaine d'années, le journaliste Michel Péricard, avant qu'il ne soit élu député-maire de Saint-Germain-en-Laye, animait sur «la deuxième chaine» de l'ORTF une émission intitulée «La France défigurée». Il dénonçait déjà les ravages - que l'on appelle aujourd'hui environnementaux - d'un urbanisme brutal, de la mercantilisation sauvage des faubourgs de grandes villes et de «L'expansion économique» telle qu'elle est croquée dans la Soupe au chou, de Claude Zidi (1976) où Louis de Funés et Jean Carmet, symboles de la «France fossile» étaient confinés dans leur ferme comme des primates pour s'être opposés à l'ouverture d'un centre d'attraction autour de chez eux. Caricature ? Hélas non, prémonition, car la réalité est bien pire. Et de voir ces abords d'agglomérations ainsi transformés en boulevards de la surconsommation dans un concours de laideur fait mal au ventre. On a abîmé, souillé, détruit, violé des paysages magnifiques pour les remplacer par des enfers multicolores bétonnés ou métallisés afin que les citoyens viennent y accélérer la dynamique de défiguration de leur pays. Il faut bien vivre, certes, et donner du travail à tout le monde, mais quand le remède consiste à enclencher un processus qui ruine l'économie nationale par un abaissement systématique des prix via une mutilation organisée du cadre de vie et de l'esthétique des espaces urbains, on se demande si la facture n'est pas chère payée. Je me promène en Europe, et il est vrai que peu de pays échappent à cette dégradation environnementale, toutefois, j'ai l'impression qu'en France, certains élus locaux ont lancé un concours de mauvais goût pour rendre les choses encore plus moches. Il faut avouer que l'horreur dépasse parfois la fiction. 
    Quelles sont les causes profondes de ces mutations ? 
    Le besoin de transformer le citoyen en consommateur puis, la mécanique du profit à grande vitesse aidant, de le transformer en sur-consommateur d'une surproduction générée à cet effet. Et comme il ne s'agit pas de le faire attendre ou se déplacer trop loin, on lui met tout, du rayon de surgelé à la salle de bain en passant par la voiture, le bricolage, la décoration, le sport et le jardinage, à portée de la main. En fait, les fameuses «zones» (d'activités commerciales, industrielles ou économiques), si bien nommées, ne sont que la reproduction à échelle «agglomérative» de la grande surface. L'urbanisation obéit aujourd'hui à la logique de la grande distribution: d'un côté la ville avec sa population, que l'on pourrait qualifier de «zone clientèle», en barres de HLM ou en zone pavillonnaire, et, à côté, l'étalage à grande échelle des produits que l'on pourrait qualifier de «zone consommation». La masse clientélisée à côté du supermarché. Comme dans les élevages industriels de poulet, on apporte son granulé à la volaille sur un tapis. Pour cela il faut aménager le cadre de vie en circuit. 
    De Lille à Marseille, on trouve les mêmes restaurants, les mêmes ronds-points, le même urbanisme : pourquoi une telle uniformisation ? 
    Et si j'étais un brin provocateur, j'ajouterai: les mêmes goûts, les mêmes infos, les mêmes idées, les mêmes dogmes et les mêmes envies… Ce sont les joies de la mondialisation, que nos experts appellent pudiquement la globalisation. Quand vous avez une grosse usine qui produit de gros besoins avec de gros moyens il faut que ce bien de consommation là convienne au plus grand nombre possible de demandeurs. Donc les mêmes enseignes proposant les mêmes marques sur les mêmes critères de choix. Au cas où l'on tenterait d'y échapper, la publicité télévisée, plus colossal instrument de propagande de tous les temps, vous martèle le cerveau sans relâche en vous expliquant, à la façon de la Rolex de Jacques Séguéla: «si t'as pas ça à ton âge, tu as raté ta vie», en le déclinant à toutes les sauces. Et comme il faut reconnaître très vite le logo, la couleur, la forme, le design, le style, le slogan, on le reproduit à l'infini et à l'identique sur tous les espaces suburbains. Normal, car ce gigantesque besoin artificiel ne peut être assouvi et commercialisé que si un immense territoire marchand est mis à disposition du système. Les consommateurs étant rassemblés dans des villes on concentre tout ça autour de la ville. En d'autres termes ça s'appelle un marché de concentration. Je maintiens la formule et je l'assume. 
    Comment expliquer que le remplacement progressif du patrimoine par des habitats fonctionnels se fasse dans la plus complète indifférence ? Les Français auraient-ils perdu le sens de l'esthétique ? 
    Non, car, pour l'heure, ils ne l'on pas tous perdu, même si l'on assiste à un phénomène de masse. Mais si l'on explique que le summum du summum de l'épanouissement social, c'est d'avoir sa maison, et que l'on fait en sorte que l'on puisse acheter une maison d'usine à bas prix, ce qui est le cas de l'habitat préfabriqué, on donne à chacun le moyen d'être propriétaire. Tout cela est parfaitement louable car posséder son logement est une aspiration légitime. Et un droit inaliénable. Sauf que l'usine à maisons fabrique la même maison pour tous et que tout cela est concentré sur un territoire délimité. En fait on reproduit le phénomène de l'appartement, mais sur une base individuelle et séparée du voisin. La voirie devient une méga cage d'escalier. Les conséquences urbanistiques sont donc calamiteuses. A partir d'un certain seuil de concentration, je ne vois pas la différence avec le coron. Et comme la sociologie démographique va dans ce sens, les agglomérations françaises sont condamnées à répondre et à satisfaire cette attente là. Cela a t-il donné des cadres de vie où l'être humain s'améliore ou s'épanouit ? C'est une autre affaire. Hélas, la «mochitude» est aujourd'hui la norme, pour ne pas dire la règle, pour n'être que le reflet d'une logique économique elle même très moche puisqu'elle ne met plus l'homme au centre de sa finalité mais le fric. 
    Que pensez-vous du développement des éoliennes et des panneaux solaires dans les campagnes françaises ? L'écologie ne mérite-elle pas qu'on lui sacrifie un peu de laideur ? 
    Question douloureuse, car l'écologie est la défense de l'environnement, et le premier environnement, c'est le paysage. Les éoliennes et les panneaux solaires sont des remèdes à un système excessif, avec les mêmes objectifs : produire. Ils ne sont donc que la bonne conscience de ce système, pas un progrès écologique en lui même. Certes, ce sont des moyens «idéaux» de production d'énergie durable, enjeu fondamental de notre civilisation. Mais à quel prix ? Ai je vraiment envie de vivre «proprement» et «durablement» dans un tel univers visuel ? Est ce si «propre» de défigurer un paysage légendaire, une vallée, ou un village, avec ces prouesses de l'éco-technologie ? Ai-je envie de vivre dans un environnement transformé en base spatiale de film de science-fiction sous prétexte que je limite la casse d'une logique que je ne remets par ailleurs pas en cause puisque je continue à consommer de l'énergie. Le serpent se mord la queue, bien sûr, mais le problème est de savoir quel avenir je réserve à la planète. Je pars du principe un peu simpliste que se pourrir la vue c'est déjà se pourrir la vie. 
    Un pays abimé, défiguré, mais vivant, ne vaut-il pas mieux qu'une France muséale et figée dans un bucolisme attirant les touristes ? La France peut-elle échapper à l'un de ces deux destins : celui de la France des parkings et celui de la France des chambres d'hôtes ? 
    Et si les Aztèques et les Incas, pérennisés dans leur civilisation, n'avaient pas été éradiqués par l'Occident chrétien «au nom des Evangiles», le monde s'en porterait-il plus mal ? Dirions nous aujourd'hui aux Indiens d'Amazonie qu'ils s'accrochent à un monde «muséal» figé dans son «bucolisme tropical» sous prétexte que leur archaïsme primitif s'oppose à la transformation de leur paradis en enfer industriel de progrès ? Tristes tropiques que la France des parkings. A quel drôle de choix nous voici confrontés. Riches et pollués à mort ou pauvres mais en bonne santé ? Il existe peut-être un juste milieu. De la tomate hors sol pleine de pesticides et sans goût toute l'année ou un peu de bonne tomate de juillet à septembre ? 
    «Notre bonne vieille mère la Terre» comme disait le général de Gaulle dans son discours de Bayeux en 1946 ne pourra pas supporter longtemps la forme de consommation qui régit l'humanité depuis trente ans. A ce train là, le parking c'est l'antichambre du cimetière. C'est un choix philosophique de civilisation. Je le redis, mourir riches et puissants en pleine croissance ou durer dans le bon sens décroissant ? Vaste débat. Moi j'ai ma réponse.

  • Le retour à l’identité

    1. La publication du livre de Sylvain Gouguenheim : « Aristote au Mont Saint-Michel » (mars 2008)

    Ce livre édité par Le Seuil, maison plutôt réputée comme « de gauche », est significativement sous-titré : « Les racines grecques de l’Europe chrétienne ». Il a donné lieu à une présentation très flatteuse dans « Le Monde des livres » du vendredi 4 avril 2008 : un article favorable de trois quarts de page de Roger-Pol Droit sous le titre « Et si l’Europe ne devait pas ses savoirs à l’islam ? », complété d’un appel en première page : « Essais. L’Occident sans l’islam. Remettant en cause une idée solidement installée, l’historien médiéviste Sylvain Gouguenheim conteste que le savoir des Grecs ait été transmis à l’Europe par le monde musulman ». On ne peut pas être plus clair.

    Le samedi suivant, 5 avril 2008, ce livre n’était déjà plus disponible chez Gibert, l’une des principales librairies du Quartier latin à Paris. Il n’en restait que quelques exemplaires à la FNAC des Halles. On notera que la publication de cet ouvrage coïncide par ailleurs avec une année universitaire 2007-2008 où Aristote figure au programme de l’agrégation de philosophie.

    Le contenu du livre est excellent. Non seulement parce qu’il réfute de façon nette et cinglante les thèses historiques politiquement correctes devenues aujourd’hui dominantes sur la transmission de la culture grecque au Moyen Age et sur la glorification d’un islam médiéval tolérant, protecteur et diffuseur de la culture antique. Mais aussi parce qu’il affirme sans détour :

    que les notions d’identité et de racines ont un sens : les cultures ne sont pas interchangeables ; il y a en elles des structures de pensée profondes, permanentes et durables ; la langue est souvent le véhicule et le révélateur de ces structures mentales ;

    qu’il y a une incompatibilité culturelle majeure entre l’Europe gréco-chrétienne et le monde islamique ;

    qu’au contraire le christianisme européen baigne dans la culture grecque, qu’il en est d’une certaine façon l’héritier ; à juste raison, l’auteur insiste à ce propos sur la notion d’incarnation et sur la distinction entre le temporel et le spirituel.

    2. L’article de Jerry Z. Muller, « Us and Them. The Enduring Power of Ethnic Nationalism » (Foreign Affairs, mars-avril 2008) (*)

    Dans « Le Monde » du 11 avril 2008, la chronique de Thomas Ferenczi (journaliste spécialiste de l’Europe et ne cachant guère ses sympathies « européistes ») rend compte de cet article sous le titre « Le retour de l’ethnonationalisme ». Ce compte rendu est formulé de manière neutre et presque compréhensive pour la thèse défendue par Jerry Z. Muller. Celui-ci enseigne l’histoire à l’Université catholique d’Amérique. Il a notamment publié en 1997 « Conservatism: An Anthology of Social and Political Thought from David Hume to the Present » (Le Conservatisme : une anthologie de la pensée sociale et politique de David Hume à nos jours) et en 2002 « The Mind and the Market: Capitalism in Modern European Thought » (L’Esprit et le marché. Le capitalisme dans la pensée européenne moderne).

    Or que dit Jerry Z. Muller dans cet article ? Des choses radicalement contraires à l’idéologie de la gauche américaine et d’une large partie des élites dominantes européennes :

    « Qu’il soit ou non politiquement correct, l’ethnonationalisme (**) va continuer de modeler le monde au cours du XXIe siècle » ;

    « La dislocation de la Yougoslavie ne fut que le dernier acte d’une longue pièce. Mais le nœud de l’intrigue de cette pièce – la désagrégation des peuples et le triomphe de l’ethnonationalisme dans l’Europe contemporaine – est rarement identifié, de sorte qu’une histoire dont l’importance est comparable à la diffusion de la démocratie ou du capitalisme reste largement ignorée et négligée » ;

    « Les analystes de la désagrégation ethnique se focalisent habituellement sur ses effets destructifs, ce qui se comprend au vu des souffrances humaines qui en ont souvent directement résulté. Mais de telles attitudes peuvent produire une mise en perspective biaisée de la réalité, en négligeant de voir les coûts moins visibles et, surtout, les bénéfices importants que la séparation ethnique a engendrés » ;

    « La démocratie libérale et l’homogénéité ethnique ne sont pas seulement compatibles. Elles peuvent être complémentaires » ;

    « On pourrait arguer que si l’Europe a été aussi harmonieuse depuis la fin de la seconde guerre mondiale, ce n’est pas à cause de l’échec du nationalisme ethnique mais à cause de son succès, qui a éliminé quelques-unes des principales sources de conflits tant entre les pays qu’au sein de chacun d’eux.  Le fait que les frontières ethniques et étatiques coïncident aujourd’hui largement a signifié qu’il y a moins de différends au sujet des frontières ou des communautés expatriées, ce qui a conduit à la configuration territoriale la plus stable jamais connue dans l’histoire européenne » ;

    « Au cas où les immigrants musulmans ne s’assimileraient pas (should not assimilate) et où, au lieu de cela, se développerait chez eux une forte identification communautaire selon des principes religieux, une conséquence pourrait être la résurgence des identités ethnonationales traditionnelles dans certains Etats, ou le développement d’une nouvelle identité européenne se définissant en partie contre l’islam » ;

    « La partition peut être la solution ultime la plus humaine dans les cas d’intenses conflits communautaires. Elle crée inévitablement de nouveaux flux de réfugiés, mais au moins elle répond au problème posé » ;

    « Dès lors que l’ethnonationalisme est une conséquence directe d’éléments clés de la modernisation, il a toutes chances de gagner en importance dans les sociétés engagées dans un tel processus » ;

    « Ce serait une erreur de penser que le nationalisme, puisqu’il est en partie une construction de l’esprit, serait une chose fragile ou indéfiniment malléable. L’ethnonationalisme n’a pas été un accident de l’histoire de l’Europe : il correspond à des ressorts permanents de l’esprit humain qui sont activés par le processus de création des Etats modernes ; il est une source essentielle à la fois de solidarité et d’affrontement et, sous une forme ou sous une autre, il se maintiendra encore pendant de nombreuses générations. On ne peut que gagner à voir cette réalité en face. »

    Ce point de vue s’inscrit en rupture avec le traitement habituel, manichéen et politiquement correct des courants de pensée et des mouvements ethniques ou identitaires : l’ethnonationalisme n’est plus diabolisé mais considéré comme une force politique rationnelle, liée à la modernité, ayant d’importants aspects bénéfiques et pouvant même aller « dans le sens de l’histoire » ! C’est en quelque sorte une réhabilitation du « mouvement des nationalités » qui, au XIXe siècle, fut souvent considéré comme une force progressiste…

    La publication de cette étude dans la prestigieuse revue « Foreign Affairs », dont l’influence intellectuelle auprès des élites américaines et internationales n’est plus à démontrer, est en elle-même un événement. Rappelons que « Foreign Affairs » fut la première à énoncer la doctrine de l’endiguement (containment) du communisme, élément-clé de la « guerre froide » (article de George F. Kennan, juillet 1947) et qu’elle publia la première formulation par Samuel Huntington du concept de « choc des civilisations » (été 1993). L’article de Jerry Z. Muller n’est-il pas destiné à avoir une portée comparable ?

    3. Le lancement par Rita Verdonk du parti Trots op Nederland (en abrégé ToN), « Fier des Pays-Bas » (3 avril 2008)

    « Le Monde » du 11 avril 2008 rend compte de façon neutre de la création de ce nouveau parti, à l’initiative de l’ancienne ministre de l’Intégration et de l’Immigration du gouvernement néerlandais de 2003 à 2007, Rita Verdonk.

    Le parcours de Mme Verdonk, surnommée « Rita de fer », est significatif. D’abord membre du Parti socialiste pacifiste, elle a adhéré en 2002 au parti libéral VVD. Elle est devenue populaire – et controversée – comme ministre par ses positions fermes en matière d’immigration et d’intégration. Elle a échoué de peu à prendre la direction de son parti en 2006 et elle en a été exclue en octobre 2007.

    Son programme politique actuel allie un libéralisme économique et politique (dénonciation de la bureaucratie et des entraves à la liberté d’expression, réduction du nombre des fonctionnaires, exaltation de la responsabilité des citoyens), une affirmation des valeurs et de l’identité nationales face à l’immigration (réduction de l’aide au développement, « contrat de droits et de devoirs » à imposer à tous les étrangers, restriction de l’accueil des demandeurs d’asile) et une orientation « sécuritaire » (rétablissement de la peine de mort). « Nous ne pouvons constamment faire place et nous adapter à d’autres cultures », affirme-t-elle notamment. A ces traits qui l’apparentent respectivement, en cherchant dans le personnel politique féminin, à la Britannique Margaret Thatcher et à la Danoise Pia Kjaersgaard s’ajoute une forme d’organisation politique « à la Ségolène Royal », avec participation des électeurs à l’élaboration du programme.

    « Son discours, qui mélange libéralisme, conservatisme et populisme, s’adresse aux nombreux déçus des partis traditionnels », conclut « Le Monde ». Rita Verdonk viserait 20% des sièges à la Chambre des députés aux élections de 2010 et serait en mesure, selon les sondages actuels, d’en obtenir de l’ordre de 15%. Le positionnement de cette nouvelle force politique ne l’assimile ni aux partis conservateurs ou centristes classiques, ni aux partis populistes ou nationalistes ayant connu des fortunes diverses en Europe au cours de ces dernières années. Pour cette raison, son évolution mérite d’être suivie avec la plus extrême attention.

    Ces trois événements se situent à des niveaux de réflexion et d’action très différents : fondements philosophiques et culturels pour le premier ; doctrine politique pour le deuxième ; formulation d’une offre politique pour le troisième, en vue de répondre à une demande et de gagner des « parts de marché » (ici parts de l’électorat) au détriment d’autres offres. Ces trois niveaux correspondent, sur un autre terrain, à la recherche fondamentale, à la recherche appliquée et à l’offre de produits nouveaux sur le marché. Ils sont liés les uns aux autres. Tout véritable changement politique, comme tout changement technique et matériel, est précédé par des évolutions sur ces différents plans. Le changement de la vue du monde prépare celui de la doctrine politique, qui prépare lui-même celui des programmes, des partis et des personnels politiques. Au terme de ce processus, c’est l’action politique elle-même qui est transformée et, avec elle, la vie en commun des hommes.

    Trois hirondelles, certes, ne font pas le printemps. Mais la convergence de leur envol est surprenante et de bon augure.

    (*) « Nous et eux. L’emprise durable du nationalisme ethnique », en ligne sur Internet : http://www.foreignaffairs.org
    (**) « Le cœur de l’idée ethnonationaliste est que les nations se définissent par un héritage commun, comprenant en général une langue commune, une foi commune, et une origine ethnique commune ».

    voir également :

    – L’identité vue par Samuel Huntington et Alain de Benoist
    http://www.polemia.com/contenu.php?iddoc=1380&cat_id=36

    – L’identité nationale selon Huntington
    http://www.polemia.com/contenu.php?iddoc=1392&cat_id=36

    –  Les négateurs de l’identité française
    http://www.polemia.com/contenu.php?iddoc=1389&cat_id=36

    – Lire Samuel Huntington
    http://www.polemia.com/contenu.php?iddoc=1043&cat_id=34

    http://www.polemia.com/le-retour-a-lidentite/

  • Laurent Glauzy présente son dernier livre

    Pédo-satanisme et franc-maçonnerie (disponible ici)

    http://www.contre-info.com/

  • Les Germains (doc en 4 épisodes)

    De leur première confrontation avec les Romains en 58 av. J.-C. jusqu’au baptême de Clovis à la fin du Ve siècle, une série de quatre documentaires-fiction pour découvrir la véritable histoire des Germains, loin de l’image de barbares incultes inventée par César.

    1/4 : Barbares contre Romains

    Où l’on découvre comment les Romains et les Germains se sont rencontrés, à travers le destin du personnage fictif de Basena, prêtresse issue du peuple suève (Germains d’Europe centrale). Après la défaite de son roi Ariovist face à Jules César en 58 avant J.-C., elle se réfugie chez les Chérusques, où elle est chargée des affaires religieuses. Elle assiste à la conquête progressive des territoires germaniques par les Romains…

    2/4 : La bataille de Varus

    Personnage historique réel, Arminius, fils d’un chef de guerre chérusque, est enlevé à son père pour être éduqué à Rome. Devenu officier romain, il est renvoyé en Germanie en l’an 7 ou 8 après J.-C. pour aider le gouverneur romain Varus à étendre l’autorité de l’empire vers le nord. De retour dans son pays natal, il constate que, même si les deux peuples se sont désormais habitués à vivre ensemble, le droit germain ancestral est bafoué par les Romains. Arminius parvient alors à fédérer plusieurs peuples germaniques et organise la rébellion contre les Romains. Lors de la bataille l’opposant aux légions de Varus, en l’an 9, dans la forêt de Teutoburg, inflige à l’Empire romain l’une de ses plus sévères défaites…

    3/4 : Pax romana

    Après la terrible défaite de Varus, les Romains se sont retirés de l’autre côté du Rhin. Pour maintenir les “Barbares” à distance, ils construisent le limes. Cette ligne de démarcation n’est pourtant pas une frontière étanche. C’est aussi un point de passage, autant pour les échanges commerciaux que pour la circulation des idées et des hommes. C’est ainsi que vers le milieu du IIIe siècle, le jeune Germain Grifo – le protagoniste fictif de ce troisième épisode – décide de se réfugier du côté romain du limes après avoir échappé de justesse à l’attaque d’une tribu voisine sur son village. Comme il refuse d’abandonner ses armes, il est fait prisonnier et vendu à un organisateur de combats de gladiateurs. Son expérience de guerrier lui permet de gagner un combat spectaculaire et de recouvrer la liberté…

    4/4 : Sous le signe de la croix

    Les grandes invasions ont bouleversé la carte de l’Europe et considérablement réduit le pouvoir de Rome. À la bataille de Tolbiac contre les Alamans en 496, Clovis, roi des Francs, implore le dieu des chrétiens de lui donner la victoire – et l’obtient. Désormais, à côté de ses guerriers, il fait une place de plus en plus grande aux évêques, les représentants de ce christianisme qui est religion d’État à Rome depuis plus d’un siècle déjà.

    Son vassal Radulf – le narrateur fictif du dernier épisode – a grandi dans la croyance aux dieux des Germains et refuse cette évolution. Des rencontres personnelles avec des fidèles de la nouvelle religion l’amènent peu à peu à changer l’image qu’il s’en était faite. Lorsque Clovis se fait baptiser à Reims, un peu avant l’an 500, Radulf s’est rallié à la position de son suzerain et il est chargé d’une nouvelle mission : propager la foi chrétienne dans tout le royaume des Francs.

    Arte – 2013

    http://fortune.fdesouche.com/387625-les-germains-doc-en-4-episodes#more-387625

  • Les Vikings n'étaient pas les explorateurs solitaires qu'on pensait

    Selon une nouvelle étude génétique, les femmes scandinaves ont fait partie intégrante de la colonisation viking. Une étude plus ancienne avait montré l’inverse dans le cas particulier de l’Islande.

    Les Vikings faisaient de nombreuses choses en famille, y compris l’exploration et la colonisation. Contrairement aux clichés selon lesquels ils ne partaient en raids qu’en groupes d’hommes, les anciens Scandinaves emmenaient leurs femmes avec eux.

     

     
    C’est ce que révèle une étude génétique de l’université d’Oslo, publiée le 7 décembre dans la revue Philosophical Transactions of the Royal Society B.
    La question de la présence des femmes dans la grande aventure viking n’est pas anodine, une première étude publiée en 2001 avait révélé que les Scandinaves avaient ramené avec eux des femmes gaéliques lors de la colonisation de l’Islande.
     
    Cela soutenait l’idée qu’ils partaient en raids et en exploration entre hommes et ne faisaient venir des femmes que plus tard, et pas forcément celles de leur pays.
     
    Mais l’équipe d’Erika Hagelberg, de l’université d’Oslo, a montré des résultats différents en menant une nouvelle étude.
     
    Plongée dans l’ADN mitochondrial.
     
    Les chercheurs ont commencé par étudier les ossements de 45 vikings retrouvés en Norvège. Ils datent tous d’entre 796 et 1066, c’est-à-dire, à trois ans près, de l’ensemble de la période Viking. Celle-ci s’étend du pillage de Lindisfarne en 793 à la défaite de Stamford Bridge en 1066.
     
    L’équipe s’est plus précisément intéressée à l’ADN mitochondrial des squelettes, puisque celui-ci n’est transmis que par la mère.
    Il révèle donc des informations sur la lignée maternelle.
     
    Ces résultats ont été comparés à l’analyse génétique de 68 habitants de l’Islande médiévale, puis de 5191 Européens d’aujourd’hui.
     
    Le matériel génétique des anciennes populations nordiques et islandaises s’est révélé très proche de celui des populations actuelles de l’Atlantique Nord.
     
    Une proximité renforcée entre les anciens scandinaves et les habitants des archipels des Orcades et des Shetland, dont l’histoire est très liée à celle des Vikings.
     
    Des résultats qui suggèrent que les femmes vikings auraient aussi voyagé.
     
    Un rôle plus important que prévu
    « Il semble que les femmes ont joué un rôle plus important que prévu dans la colonisation », explique à LiveScience Jan Bill, archéologue à l’université d’Oslo mais qui n’a pas participé à l’étude.
     
    « Dans l’image que nous avons des raids vikings il n’y a bien sûr pas de place pour des familles, mais quand ces activités ont commencé à devenir plus pérennes, les familles ont fini par voyager également et à rester dans les campements », conclut-il.

    maxisciences.com

    http://www.fdesouche.com/610209-les-vikings-netaient-pas-les-explorateurs-solitaires-quon-pensait#more-368441