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culture et histoire - Page 1541

  • « L’Effacement du politique » de Pierre Le Vigan

    Impuissance et inexistence de l’Union européenne

    Le livre de Pierre Le Vigan est consacré au nihilisme qui sévit dans l’Union européenne à un tel point que toute référence à une identité autre qu’individuelle y est interdite ; or, comme l’écrit l’auteur, il ne peut y avoir de politique en l’absence d’identité collective. C’est sans doute la raison pour laquelle cette Union, qui se veut la seule patrie des droits de l’homme, est incapable d’avoir quelque politique que ce soit :

    « Partons de la situation que nous connaissons, en Europe. Notre continent est sans existence politique, sans volonté, sans défense. Un embryon de gouvernement européen existe, mais en fait, ce sont des équipes de technocrates. Le pouvoir européen n’a pas de légitimité démocratique. Il n’a pas non plus acquis une légitimité par son efficacité. Il a beaucoup réglementé mais n’a guère construit. Il est de plus en plus contesté par les peuples (…) Le pouvoir européen prétend faire de l’économie, mais pas de politique. En conséquence, en politique internationale l’Europe n’existe pas. Elle agit, quand elle agit, en éclaireur de la superpuissance américaine. »

    Et il ajoute :

    « Elle n’existe pas pour plusieurs raisons. Pour exister, il faut être porteur d’une certaine idée de soi. Or, l’Europe actuelle se veut d’abord universaliste. Sa seule identité serait d’être le réceptacle des identités des autres. »

    C’est le politique qui doit trancher

    Pour Pierre Le Vigan, il n’y a pas d’essence de la culture européenne :

    « Il n’y a pas d’essence de la culture européenne. Il y a certes des traits communs à l’Europe : ce n’est pas une terre où l’islam ne s’est imposé autrement que par la force, lors des conquêtes de l’Empire ottoman, mais c’est aussi une terre où la christianisation ne s’est pas faite sans violence. L’Europe est une terre de grands philosophes, mais qui n’étaient en général d’accord sur rien. Ils n’ont en aucune façon développé une “philosophie européenne”, à moins d’appeler ainsi un champ de bataille intellectuelle. Il y a eu certes des créations littéraires spécifiques à l’Europe, telles celles d’Homère, mais sont-elles d’abord grecques ou d’abord européennes ? C’est là toute la question. N’est-il pas abusif (bien que séduisant) d’en faire l’emblème de l’Europe ?’ »

    En effet, s’il est vrai qu’il n’y a pas plus proche d’un peuple européen qu’un autre peuple européen, il n’en reste pas moins vrai qu’il n’y a pas plus de culture européenne que de peuple européen. Les cultures des peuples européens se sont différenciées depuis fort longtemps (au moins depuis l’expansion des peuples indo-européens) mais elles ont conservé un air de famille parce qu’elles se sont influencées mutuellement quoique de manière inégale et partielle ; ce qui fait que les cultures européennes forment un patchwork assez harmonieux malgré l’existence de différences parfois importantes.

    « Revenons à la définition de l’Europe par la “culture européenne”, c’est-à-dire à la thèse que les Européens sont tout d’abord des Européens, puis des Croates, des Finlandais, des Ecossais, des Danois, etc. Qu’est-ce qui caractérise cette culture européenne ? Nos “ancêtres” indo-européens ? Mais “indo-européen” désigne un groupe de langues bien plus qu’une race ou un groupe de peuples. Si l’appartenance au rameau (ethnique ou linguistique, qu’importe à ce stade) indo-européen est le critère, alors pourquoi ne pas intégrer à l’Europe Indiens, Sri-lankais (sauf les Tamouls), Afghans, Arméniens, et bien sûr Kurdes et Tziganes (Roms) ? Notons encore que l’un des principaux foyers des langues indo-européennes fut l’Anatolie, dans l’actuelle Turquie, ce qui décidément ne plaide pas pour une Turquie hors d’Europe. On se demande d’ailleurs pourquoi cette origine culturelle commune, puisqu’elle est censée exister et influer, ne produit pas une grande facilité d’intégration des Roms, authentiques indo-européens ? Tandis que nous constaterions d’incessantes difficultés d’intégration avec les Basques ou les Hongrois qui ne sont pas indo-européens ? A moins que ce critère d’indo-européanité n’ait finalement aucun sens actuel, et ne relève du simple plaisir de l’érudition. »

    Il n’y a pas non plus d’essence religieuse de l’Europe, car s’il est vrai que le christianisme a marqué profondément la culture européenne, il n’en est pas moins vrai qu’il a éclaté en plusieurs rameaux qui se sont très souvent opposés de manière très violente. De plus, le christianisme n’est plus une caractéristique propre aux Européens parce qu’il a été adopté par de nombreuses populations dans le reste du monde ; il est impossible de le considérer comme étant la base d’une identité européenne et ce, d’autant plus que la déchristianisation progresse très régulièrement sur notre continent.

    « Cette religion par définition universelle a essaimé hors d’Europe, sachant au demeurant qu’elle n’est pas née en Europe, et dès lors on ne voit pas très bien comment une culture européenne pourrait se définir principalement par rapport au christianisme devenu largement non européen. »

    Existe-t-il une essence géographique de l’Europe qui imposerait l’union de tous les peuples vivant dans le territoire bordé par l’Atlantique, la mer du Nord, l’océan Arctique, l’Oural, le Caucase, les détroits et la Méditerranée ? Si oui, il faut considérer alors qu’une partie de la Turquie est européenne et que la partie de la Russie située au-delà de l’Oural ne l’est pas ; ce qui n’est pas très pertinent.

    De même, il est impossible de faire de la démocratie, de l’idéologie des droits de l’homme ou des Lumières des éléments d’une essence européenne, car dans ce cas il faudrait considérer que les Turcs inspirés par la Révolution française, les Australiens et les Africains du Sud qui vivent dans des pays démocratiques sont aussi des Européens.

    Pierre Le Vigan conclut très justement en disant que l’Europe ne peut être qu’une construction politique alors que la création de la CEE, puis celle de l’UE, ont été conçues dès l’origine comme une sortie du politique :

    « On a en quelque sorte voulu faire l’Europe non seulement pour sortir des guerres intra-européennes (et on n’y est même pas arrivé – voir les Balkans) mais pour sortir du politique. On constate au contraire que si l’Europe se fait, elle se fera par la politique et ni par l’économie ni par la culture. »

    Vers l’Empire ?

    Pierre Le Vigan conclut son livre en plaidant pour la création d’un « Empire européen » mais la notion d’Empire présente l’inconvénient de manquer de précision et de recouvrir des réalités très différentes. De l’Empire romain à l’Empire américain en passant par l’Empire de Charlemagne, le Saint-Empire romain germanique, l’Empire des Habsbourg, le deuxième et le troisième Reich, l’Empire napoléonien, celui de Napoléon III et les empires coloniaux, il y en a pour tous les goûts. Pierre Le Vigan conclut son livre en écrivant :

     « L’Empire c’est le nom ancien, et, pour mieux dire, c’est le nom de toujours du principe fédératif (…) Il faut ouvrir la voie à autre chose : l’association entre nos patries, la coopération sans l’uniformité, la souveraineté commune. Cela porte un nom, et c’est l’idée d’Empire, et cela repose sur un principe, c’est la subsidiarité, et c’est donc la fédération des peuples d’Europe. »

    Pierre Le Vigan ne précise pas ce qu’il entend par fédération ni d’ailleurs s’il pense à une fédération de tous les peuples (ce qui semble ambitieux) ou de certains d’entre eux seulement (ce qui serait plus raisonnable). Par ailleurs, que la notion d’empire et celle de fédération soient synonymes ne va pas de soi. Ainsi Olivier Beaud a écrit que ce sont des notions radicalement différentes parce que les empires ont toujours été coercitifs :

     « Par là, elle se distingue de la notion d’empire, qui agrège des unités politiques par la force et non par un consentement mutuel. »

    Olivier Beaud distingue aussi la fédération, dans laquelle les peuples ne se fusionnent pas, de l’Etat fédéral qui est un Etat unitaire (dans lequel il n’y a pas une pluralité de communautés souveraines) respectant le principe « althusien » selon lequel les décisions doivent être prises au niveau le plus « bas » possible. Pierre Le Vigan écrit que l’Empire devra reposer sur le principe de subsidiarité et que la souveraineté deviendra commune mais Althusius, qui est le grand penseur de la subsidiarité, considérait que dans ce qu’il a appelé la « consociatio symbiotica », chacune des communautés associées conserve son entière souveraineté et délègue, sous condition, une partie seulement de celle-ci tout en en demeurant la seule détentrice (elle ne la partage pas) ; en conséquence, elle conserve la possibilité de mettre un terme à cette délégation.

    Alors, fédération, empire, confédération, état fédéral ou alliance interétatique ? Il y a là un sujet pour un ouvrage passionnant.

     Bruno Guillard, 10/06/2014

    Pierre Le Vigan, L’Effacement du politique / La philosophie politique et la genèse de l’impuissance de l’Europe, préface d’Eric Maulin, éditions La Barque d’Or, 164 pages.

    Source et compléments: Polémia

    http://cerclenonconforme.hautetfort.com/

  • L'enfer des camps de la mort du Vietminh

    Monde et Vie a évoqué, dans un récent numéro, l'héroïque combat des défenseurs de Dien Bien Phu. Dans son livre Convoi 42, Erwan Bergot, qui prit part à cette bataille et partit en captivité après le cessez-le-feu du 7 mai 1954, écrit : « Rien, pourtant, n'était terminé vraiment et si certains soldats avaient cru parfois toucher le fond de l'enfer, tous se trompaient. Le pire était à venir. »

    Au terme d'une marche épuisante et meurtrière, les défenseurs de Dien Bien Phu allaient rejoindre dans les quelque 130 camps de « rééducation » du vietminh - euphémisme pour désigner des camps de la mort - leurs camarades capturés antérieurement, notamment lors de la bataille de la Route Coloniale 4 et de l'anéantissement des colonnes Le Page et Charton en octobre 1950.

    Cette marche constitue une première mise en condition des « tu binh » (prisonniers de guerre), qu'il s'agit d'affaiblir à la fois physiquement et moralement pour atteindre le but que le vietminh s'est fixé : utiliser ces soldats contre le corps expéditionnaire français, au moins aux fins de propagande en les contraignant à signer des pétitions et des manifestes pacifistes, au mieux en renvoyant ceux que l'on parviendra à « convertir » à la cause de l'anticolonialisme porter la bonne parole dans les rangs du CEFEO (1).

    Normalisation

    Pour y parvenir, les techniques de lavage de cerveau mises en œuvre dans les camps sont d'autant plus efficaces que les sujets ciblés sont fragilisés, physiquement par le manque de nourriture et la maladie, et moralement par la perte des repères, la solitude et le désespoir. La suppression des grades, le manque total d'informations extérieures, le regroupement de la majorité des officiers au sein du camp numéro 1 (les hommes de troupes, plus jeunes et moins solidaires, sont plus malléables), l'absence de médecins (sauf au camp numéro 1, puisqu'ils sont officiers) et de médicaments, l'incitation à la délation, le faible espoir de bénéficier d'une « libération inconditionnelle », la crainte d'une diminution des rations de riz déjà faméliques, la présence permanente de la mort, contribuent, entre autres, à obtenir ces résultats et à briser les résistances.

    Lavages de cerveau sur des hommes à bout de force

    Les têtes les plus dures et ceux qui désertent le « camp de la paix » en tentant de s'évader s'exposent à de rudes châtiments, y compris à être exécutés, les captifs n'étant pas considérés comme des prisonniers de guerre, mais comme des criminels de guerre redevables de la vie à la « grande clémence » de Hô chi Minh. As peuvent aussi être mis « aux buffles » : lié à un poteau dans une étable à buffle, sous une maison sur pilotis, au milieu des excréments des bêtes, le puni est offert aux piqûres de milliers de maringouins, moustiques porteurs de maladies diverses. Dans Les soldats oubliés, Louis Stien, officier du 1er BEP capturé sur la RC4 et auteur de deux tentatives d'évasion, a laissé de ce supplice auquel il fut soumis une description impressionnante. Certains prisonniers en deviennent fous ou meurent.

    C'est sur ces misérables à bout de forces, affamés, parfois blessés, souffrant de la dysenterie, du béribéri, du paludisme, de pathologies neuropsychiatriques, rongés par la vermine et par les parasites (dont les ascaris, répugnants vers rouges de 25 centimètres qui se développent dans l'appareil digestif), que les can bô, cadres chargés de la rééducation, appliquent le lavage de cerveau, par l'endoctrinement, la dépersonnalisation de l'individu, l'espoir le plus souvent illusoire de la libération, l'autocritique et la délation qui sèment la zizanie et la haine parmi les « Tu Binh ».

    Le bilan est terrifiant : plus des deux tiers des quelque 40000 prisonniers de guerre détenus dans les camps du vietminh y sont morts. Concernant les prisonniers de Dien Bien Phu, la mortalité, en quatre mois de captivité, a atteint 72 %. Un chiffre insuffisant pour émouvoir, en France, les belles âmes des intellectuels de gauche.    

    Hervé Bizien monde & vie  11 juin 2014 

    1) CEFEO : Corps expéditionnaire français en Extrême Orient.

  • Georges Boudarel, traître et bourreau

    De la trahison et du meurtre à l'Université et aux honneurs, le parcours sanglant d'un commissaire politique communiste.

    Le 13 février 1991, lors d'un colloque au Sénat consacré à l'actualité vietnamienne, éclata une « affaire » qui a éclaboussé l'université française et illustre la puissante influence qu'y exercèrent les réseaux et les intellectuels communistes. Ce jour-là, en effet, l'ancien secrétaire d'Etat aux anciens combattants Jean-Jacques Beucler, vétéran de la guerre d'Indochine au cours de laquelle il fut fait prisonnier et interné, quatre années durant, au camp 113, se leva et apostropha durement l'un des universitaires qui devait prendre la parole : « Vous avez du sang sur les mains ! Votre présence à cette tribune est indécente ! »

    Sous les traits grassouillets de Georges Boudarel, honorable maître de conférences à l'université Paris VII-Jussieu et « spécialiste » de l'Extrême-Orient, Beucler avait reconnu « Dai Dông », l’ ancien « conseiller technique pour l'action psychologique », autrement dit commissaire politique, au camp 113, traître à son pays et bourreau de ses compatriotes.

    Bon militant communiste

    L'itinéraire de Boudarel est celui d'un « bon » militant du parti communiste dit français, auquel il adhère à l'âge de 19 ans, en 1945. En 1948, il s'embarque pour l'Indochine, où, devenu professeur, il enseigne la philosophie au lycée de Dalat, puis au lycée Marie-Curie de Saigon, tout en animant la section indochinoise du PCF.

    Cependant, l'heure vient où il est appelé sous les drapeaux. Refusant de servir son pays, le futur Dai Dông déserte : « Opposé à toutes formes d'impérialisme et de colonialisme, j'ai aussitôt rejoint, grâce à mes contacts communistes, la résistance vietminh », racontera-t-il en 1991 à des journalistes de Minute, d'ailleurs sidérés à l'issue de cet entretien de l'absence de remords qu'avait montré l'ancien bourreau. Car Boudarel, ayant gagné le nord du Tonkin, y prend en main, de février 1953 à février 1954, la rééducation politique des prisonniers français détenus au camp 113(1).

    « Mon rôle, a-t-il expliqué aux journalistes de Minute, consistait chaque jour à enseigner les principes de la révolution culturelle aux prisonniers. À leur inculquer les bases d'une éducation politique afin qu'une fois rentrés en France, ils interpellent l'opinion pour que cesse cette guerre injuste. » Autrement dit, à appliquer les techniques marxistes du lavage de cerveau sur des malheureux à bout de force. Comme dans tous les camps viets, même les plus faibles sont tenus d'assister à ses « cours », les techniques de critique et d'autocritique mises en œuvre créent un climat de délation et de méfiance entre les prisonniers. Pour ces derniers, le fait que le commissaire politique soit français est un facteur aggravant, puisqu'il est plus à même que les vietminh de comprendre leur psychologie.

    Un pouvoir de vie et de mort

    Dai Dông-Boudarel dispose d'un pouvoir de vie et de mort sur les détenus. En 1991, un survivant du camp 113 témoignait dans Minute : « Nous étions souvent interrogés pour voir si nous suivions assidûment les cours. Ceux qui répondaient mal ou ne voulaient pas suivre les cours eurent leurs rations qui diminuaient de telle sorte que, s'ils étaient déjà affaiblis, ils ne tardaient pas à mourir. »

    Même les mesures d'hygiène lui donnent l'occasion d'humilier et de punir, comme lorsqu'il décide de lutter contre les innombrables mouches qui, selon ses propres termes, font un « pont aérien » entre les latrines et les cuisines : « Chacun d'entre nous devait en tuer un nombre déterminé par jour, les mettre dans un bambou coupé en deux qui servait de boîte et les montrer au responsable du camp... Certains d'entre nous ne parvenaient pas à en attraper suffisamment. Ils étaient obligés d'échanger leurs rations de riz contre des cadavres de mouches que d'autres prisonniers, plus habiles, parvenaient à attraper en grand nombre. Et ils ont fini par mourir... »

    Inhumanité

    Par ailleurs, le traitre confisque au profit du vietminh les médicaments parachutés par la Croix rouge pour les soldats prisonniers, qui auraient sans doute pu sauver des vies.

    Décidant des « libérations inconditionnelles », qui représentent pour les détenus l'espoir d'échapper à cet enfer, Dai Dông enjoué pour briser les volontés et jusqu'aux plus élémentaires sentiments d'humanité. Accompagnant un groupe de « libérables » squelettiques, il les réunit, au bout de quelques jours de marche : « L'un d'entre nous avait volé un œuf dans un village, a raconté Claude Baylé, auteur de Prisonnier au camp 113. Boudarel nous a obligés à le dénoncer, à le juger, à le renvoyer au 113. Nous étions tellement obsédés par notre libération que nous ne tenions même plus compte de l'amitié. Impensable ce que nous étions devenus ! »

    Le bilan du commissaire politique communiste est éloquent : en un an, 278 captifs meurent, sur un effectif de 320. Le taux de mortalité est plus élevé au camp 113 que dans les camps de concentration nazis. Boudarel n'en sera pourtant jamais châtié (voir page suivante). Condamné à mort par contumace pour trahison en 1953, il séjourne en URSS, puis en Tchécoslovaquie avant de rentrer en France en 1966, à la faveur d'une loi d'amnistie.

    Une « expérience » validée par l'Université

    Grâce aux réseaux rouges, il devient le collaborateur de l'historien communiste Jean Chesneaux, est recruté comme maître assistant par l'université de Jussieu et comme chercheur (spécialiste de l'histoire du Vietnam...) par le CNRS. Songeant déjà à sa retraite bien méritée, il parvient même à faire valider ses années d'« expérience » courant du 19 décembre 1950 au 30 septembre 1967, en indiquant pour la période 1951-1954 - comprenant donc son activité au camp 113 : « Voyage d'études en Extrême-Orient » !

    Boudarel mourra le 26 décembre 2003, âgéde 77 ans, sans jamais avoir payé pour ses crimes.

    Hervé Bizien monde & vie 11 juin 2014

    I. L'une de ses victimes l'a accusé d'avoir également sévi au camp 122, ce qu'il a nié. 

  • [Lyon] Session de formation régionale et barbecue de fin d’année, à Lyon le week-end prochain !

    L’Action française Lyon organise une session régionale de le 21 et 22 juin sur le thème du "capital ou la tradition" ouverte aux militants et sympathisants de la région.

    Elle sera suivie d’un barbecue de fin d’année.

     

    Renseignements complémentaires : lieu, inscriptions, etc... au 06 82 83 92 00

  • L'éternel féminin sur Radio Courtoisie

    Dimanche midi, Grégoire Boucher recevra dans son émission sur Lumière de l'Espérance, la radio du dimanche de Radio Courtoisie, Anne Brassié et Stéphanie Bignon pour leur ouvrage "Cessez de nous libérer" et Marie-Christine Arnautu, Vice-Présidente du Front National et Député européen.

    Sujet : L'éternel féminin.

    Michel Janva

  • La nation et l’œuf de Colomb : Jean-Louis Harouel réhabilite l’identité

    Lorsque Christophe Colomb, en route vers l’Amérique, démontre à son équipage médusé qu’on peut faire tenir un œuf sur une table, qu’il suffit pour cela d’en briser la coquille, il ignore qu’il vient d’inventer une méthode presque aussi révolutionnaire que ce qu’il découvrira bientôt au bout de sa longue-vue.

    Une méthode qui consiste à trouver à portée de main la solution d’un problème qui semblait insoluble. Tel l’œuf de Colomb, l’essai de Jean-Louis Harouel, Revenir à la nation, sera sans nul doute accusé de simplisme par ceux qu’il dérange et feignent d’oublier que la simplicité est la marque des grands livres. Celui-ci, de fait, ne s’embarrasse pas de circonlocutions, et il suffit de lire le titre pour comprendre où il veut en venir. Ou en revenir.

    À la nation : c’est que celle-ci, bien qu’elle paraisse définitivement ringarde à certains, demeure la cellule fondamentale de l’ordre politique. La nation, qui renvoie à l’idée de naissance, est en effet le lieu de l’héritage : c’est elle qui relie le passé au présent et à l’avenir par l’intermédiaire de la culture et de la mémoire − et Jean-Louis Harouel de rappeler, à ce propos, que même la conception « républicaine » d’Ernest Renan ne se borne pas à une approche volontariste et individualiste : elle la combine à une dimension collective et historique. Si la nation selon Renan peut être « un plébiscite de chaque jour », c’est parce qu’elle traduit « la volonté de continuer à faire valoir l’héritage qu’on a reçu », le désir de prolonger un enracinement dans une appartenance commune qui se situe dans le temps pas moins que dans l’espace. [...]

    Frédéric Rouvillois - La suite sur Causeur

    RAPPELONS QUE JEAN-LOUIS HAROUEL A RÉCEMMENT ACCORDÉ UN ENTRETIEN À L’ACTION FRANÇAISE. LIRE ICI

    http://www.actionfrancaise.net/craf/?La-nation-et-l-oeuf-de-Colomb-Jean

  • De Leibniz à Herder et de Herder au romantisme

    Archives 1985

    Chers amis, ce texte constitue les trois premiers sous-chapitres d'un livre en projet dans les années 80. Il est resté inachevé.

    1.1 Notions philosophiques de base.

    1.1.1 La leçon de Leibniz; les monades:

    Prédécesseur de Leibniz, Christian Thomasius (1655-1728), fondateur de l'Université de Halle, développe un sys­tème éthique/philosophique, selon lequel nos croyances doivent être sanctionnées à partir de notre seule intério­rité et non à partir d'une autorité extérieure. L'individu, dans ce système fondé par Thomasius, doit être capable (et donc s'efforcer) de suivre sa propre lumière, sa propre "raison". De cette vision de la nature et de l'agir humains, dé­coule automatiquement un relativisme, donc une acception des différences qui constituent la trame du monde, une acception inconditionnelle du pluriel, de la diversité. Pour Thomasius, son système et ses retombées, comme tout autre espèce de savoir, doit déboucher sur des applications pratiques in vita civilis . Cette figure de l'histoire des idées philosophiques, dont la personne constitue le lien entre la Renaissance et les Lumières, nous lègue ici des principes clairs, une éthique de l'action: la diversité est telle et l'on ne saurait la contourner. De ce fait, nos juge­ments doivent se laisser diriger par une approche relativiste, non mutilante et non réductionniste du monde et des hommes. Ce relativisme doit déboucher ensuite sur un agir respectueux de ces différences qui font le monde. Indubitablement, notre volonté de donner un autre visage à l'Europe, s'inspire de cette démarche vieille de presque trois siècles. Dans notre optique, les Lumières ne constituent nullement un programme rigide, un catéchisme stéré­lisateur, une religion sèche de la Raison (comme avaient voulu l'instaurer les Jacobins français) mais bien plutôt l'attention au monde, le respect des créations spontanées de l'esprit et de l'histoire, la sagesse du jardinier qui har­monise, dans ses parterres, les fleurs les plus diverses... Mais cette attention doit être couplée à une vigilance, une milice spirituelle qui veille à ce que les mutilateurs de toutes obédiences, les réductionnistes de tous acabits ne viennent troubler cette splendide harmonie du monde.

    Avec Leibniz, les intuitions de Thomasius, les prolégomènes que ce fondateur de l'Université de Halle a posés, s'affineront. L'orientation rationaliste de sa pensée ne l'a nullement empêché de jeter les bases de la grande syn­thèse organiciste que furent le Sturm und Drang  et le Romantisme. Le rationalsime cartésien et spinozien descen­dent, chez Leibniz, au niveau des monades. Celles-ci sont chacune différente: il n'y en a pas deux d'identiques. Et chacune de ces monades acquiert continuellement un "état" nouveau. Leibniz découvre ainsi un devenir  constant, un développement incessant de forces et d'énergies intérieures, une continuité ininterrompue. L'état présent d'une monade est le résultat d'un état antérieur et, par suite, tout état présent est gros de son avenir. L'univers de Leibniz, contrairement à celui de Descartes, n'est plus une somme de parties, mais un tout qui déploie ses divers aspects .  Le concert international, pour nous, est également une globalité politique qui déploie, sous l'impulsion d'agirs hu­mains, des perspectives, des possibles divers. Cette variété infinie constitue une richesse et notre humanisme veillera à ce que cette richesse ne s'épuise pas. C'est là que s'inscrit la liberté: dans la capacité de déployer collecti­vement un possible original, d'inscrire dans l'histoire une geste unique à côté d'autres gestes uniques. In vita civi­lis , pour reprendre l'expression latine de Thomasius, cette vision implique l'organisation fédéraliste des grands ensembles civilisationnels (chaque monade peut ainsi assumer son devenir sans contraintes extérieures) et le dia­logue fraternel entre les diverses civilisations du globe. Dialogue d'attention et non de prosélytisme mutilant...

    1.1.2. Herder: des monades aux peuples

    Herder va dépasser Leibniz. De l'œuvre de ce dernier, Herder avait retenu l'énergie interne des monades, génératrice de devenirs spécifiques. Mais, pour Leibniz, chaque monade, activée de l'intérieur, n'avait aucune "fenêtre" exté­rieure, aucune ouverture sur le monde. Leibniz dépassait certes l'atomisme qui voyait des particules sans énergie in­térieure, mais ne concevait pas encore des monades en interaction les unes avec les autres. Cet isolement des mo­nades disparaît chez Herder. Dans sa vision philosophique, chaque unité (un individu ou un peuple) entre en interac­tion avec d'autres unités. Toute individualité singulière ou collective, loin d'être renfermée sur elle-même, dérive la conscience intérieure qu'elle possède d'elle-même de l'extérieur, c'est-à-dire du contact d'avec le monde qui l'entoure. Si ce monde était absent, cette conscience ne pourrait jamais s'éveiller. Herder nous propose ainsi une image du monde où les diverses parties constituantes sont toutes activement liées les unes aux autres au sein d'un réseau dynamique de réciprocité. Cela signifie qu'aucune individualité ne peut, dans l'univers, ni exister indépen­demment du contexte de ses inter-relations ni être comprise comme en dehors de celles-ci. En restant au niveau de développement conceptuel de Leibniz, on risquait de concevoir le concert international comme un ensemble de na­tions repliées sur elles-mêmes et jalouses de leurs petites particularités. On risquait l'albanisation ou, pire, l'incompréhension réciproque. On risquait d'asseoir une image du monde justifiant les nationalismes ou les particu­larismes d'exclusion, les réflexes identitaires de rejet. Et, donc, les bellicismes stériles... Avec Herder, ce risque s'évanouit, dans le sens où la diversité est production hétérogène et incessante d'un fond de monde, rationnelle­ment indéfinissable. Les éléments divers ont pour tâche de mettre en exergue le maximum de possibles, de "colorier" sans relâche le monde, d'échapper sans cesse à la grisaille de l'uniformité. Le respect des identités pos­tule la solidarité et la réciprocité. En termes politiques actualisés, nous dirions que la défense des identités régio­nales, nationales, culturelles, civilisationnelles, etc. exige comme indispensable corollaire la solidarité inter-ré­gionale, internationale, inter-culturelle, inter-civilisationnelle, etc.

    L'objectif d'une Europe alternative serait donc de valoriser les peuples avec les productions littéraires, culturelles et politiques qu'ils forgent et de lutter contre l'arasement des spécificités qu'entament automatiquement les sys­tèmes niveleurs, en tout temps et en tout lieu, quelle que soient d'ailleurs leurs orgines et leurs référentiels philo­sophiques ou idéologiques.

    1.1.2.1. La tradition romantique

    Le système philosophique de Herder constitue indubitablement une réaction à l'encontre d'un certain despotisme éclairé, qui ne se donnait plus pour objet, comme dans le chef d'un Frédéric II, de défendre un pays en tant que havre de liberté religieuse par tous les moyens militaires modernes, mais un despotisme éclairé, transformé par l'érosion du temps en fonctionnarisme uniformisant, en praxis de mise au pas des libertés locales. Ce despotisme, perçu sous l'angle d'une praxis générale et définitive et non plus comme praxis postulée par l'Ernstfall permanent que vit une société contestataire (la Prusse de Frédéric était le havre des Huguenots et des Protestants de Salzbourg, de bon nombre de "non conformists" britanniques et d'Israëlites, de piétistes) menacée par ses voisines conservatrices, renforce l'autocratie au lieu de l'assouplir et la justifie, en dernière instance, au nom du progrès ou de la raison, se donnant, dans la foulée, l'aura d'un "humanisme". La vision organique de Herder génère, elle, un humanisme radica­lement autre. Le peuple, la population, le paysannat, chez Herder, n'est pas le "cheptel" taillable et corvéable à merci d'une machine étatique, d'un appareil de pouvoir, qui justifie son fonctionnement par référence à la raison mécaniste. L'humanisme herdérien ne nie pas la vie intérieure, le devenir créatif, de cette population, de ce peuple. La substance populaire n'est pas déterminée, dans cette optique, par des ukases venus d'en-haut, promulgués par le pouvoir de l'autocrate ou d'une oligarchie détachée du gros de la population, mais se justifie d'en-bas, c'est-à-dire au départ des phénomènes de créativité littéraire ou scientifique, économique ou religieux que suscite la collectivité, le peuple. En un mot: c'est le Travail global du peuple qui justifie, doit ou devrait justifier, son existence politique ainsi que le mode de fonctionnement qui régirait cette même existence politique.

    La tradition romantique procède donc d'un recentrement ontologique, écrit le grand spécialiste français du roman­tisme allemand, Georges Gusdorf. Ce recentrement, Thomasius l'avait déjà tenté, en réfutant toute détermination venue de l'extérieur. Le message démocratique et identitaire du romantisme postule ipso facto un système de repré­sentation impliquant, comme en Suisse, le référendum, la participation directe des citoyens à la défense de la Cité, l'autonomie locale (cantonale, en l'occurrence) et la neutralité armée. Ces pratiques politiques et administratives éliminent les despotismes autocratiques, oligarchiques et partitocratiques, tout en tarissant à la source les vélléités impérialistes, les visées hégémoniques et les chimères conquérantes. En outre, le recentrement ontologique ro­mantique, in vita civilis et à l'âge de l'économisme, signifie une protection du travail local, national (au sens de confédéral) contre les manipulations et les fluctuations des marchés extérieurs. La tradition romantique nous lègue un réflexe d'auto-défense serein et harmonieux qu'oublient, nient et boycottent les idéologies missionnaires et prosélytes qui régentent le monde d'aujourd'hui et colonisent les médias, dans l'espoir d'uniformiser le monde sous prétexte de l'humaniser selon les critères de l'humanisme mécanique. La soif d'alternative passe inmanquablement par un nouveau choix d'humanisme qui, à l'absence de sens observable à notre époque de désenchantement post-moderne (c'est-à-dire postérieur aux séductions actives de l'humanisme mécaniste), reconférera au monde une sura­bondance de sens. Au niveau des individus comme au niveau des individualités collectives que sont les peuples, l'existence n'a de sens que si elle permet le déploiement d'une spécificité ou, mieux, une participation active, con­crète et tangible à la geste humaine totale. 

    http://robertsteuckers.blogspot.fr/2014/06/de-leibniz-herder-et-de-herder-au.html