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Roland Dumas : un ancien ministre dénonce la dérive américaine et coloniale de la diplomatie française

 

par Nicolas Bonnal

 

 

:: Texte en russe

 

Roland Dumas est un homme très connu en France et dans le monde de la diplomatie, même s’il est mis à l’écart par les sbires du nouvel ordre mondial. Héros de la Résistance à l’Allemagne nazie, il a ensuite été un très grand avocat qui s’est illustré dans la défense des peuples colonisés. Homme de gauche à l’époque où ce mot avait un sens, il fut l’ami et le ministre du Président Mitterrand, qui exerça ses fonctions en France de 1981 à 1995. Roland Dumas exerça quant à lui de nombreuses fonctions importantes, et notamment celle de Ministre des Affaires étrangères de 1988 à 1993. Sa politique était marquée par son équilibre, son humanisme et ses positions amicales envers le monde arabe et musulman, que la France sur ordre d’Israël et des Etats-Unis achève de détruire aujourd’hui, comme à l’époque de l’expédition du Canal de Suez en 1957. Ses positions lui ont valu l’opposition farouche du « lobby qui n’existe pas » (Serge de Beketch) et de la presse qu’il contrôle. Mais M. Dumas a insisté bravement et résisté, comme pendant la Guerre. Cet homme de culture amateur d’art a gardé le courage du mousquetaire.

 

Roland Dumas s’insurge donc depuis 2007 surtout contre l’incroyable inflexion de la diplomatie française qui a pris un tour fascisant et colonialiste avec Nicolas Sarkozy, actuellement conférencier pour Goldman Sachs et voyageur de commerce du Qatar (au sens strict du terme). La France a fait la guerre partout pour des intérêts privés et coloniaux qui ne sont pas les siens. On retrouve le virage néo-totalitaire de l’Europe actuelle : on travaille pour les banquiers contre les peuples.

 

Dans son dernier livre intitulé "Coups et blessures : 50 ans de secrets partagés avec François Mitterrand", l’ancien Ministre des Affaires étrangères Roland Dumas parlait déjà de ses souvenirs auprès de l’homme, mais dénonce également l’ingérence israélienne dans les affaires françaises : « Les Israéliens en font à leur guise en France, et manipulent les services de renseignements français (DST) comme bon leur semble ». Il évoquait ensuite les circonstances qui ont entouré la visite du chef de l’Organisation de la Libération de la Palestine (OLP) Yasser Arafat en France à la fin des années 80, assurant être lui-même l’architecte des relations avec le leader palestinien. Selon Roland Dumas, Mitterrand n’était pas contre l’idée de le rencontrer mais craignait la réaction du « lobby juif » : « Le lobby juif, comme l’appelait Mitterrand, oeuvrait ardemment. Les pressions étaient très fortes lorsque j’ai annoncé que je comptais rencontrer Arafat durant sa visite au Parlement européen en septembre 1988. J’ai obtenu du président Mitterrand, après de pénibles tractations, la permission de l’accueillir. Après m’avoir répété ses mises en garde, il m’a dit : "bon d’accord, mais tu en assumeras la responsabilité..." Peut-être voulait-il insinuer par-là ma démission si les choses tournaient mal ». M. Dumas ajoute : « Je ne suis pas d’accord avec la politique israélienne, j’ai toujours été fidèle au principe d’équilibre instauré par le général de Gaulle au Moyen-Orient. Les peuples arabes ont droit au respect. La politique israélienne actuelle, inspirée des activités proches des sionistes, ne suit pas le bon chemin ».

 

Dans son livre "Coups et blessures" paru il y a deux ans, Roland Dumas estimait que les révolutions arabes sont l’événement le plus important après la fin du colonialisme et la chute du Mur de Berlin. Leur impact sur Israël serait formidable. Selon lui, l’Egypte était en train de payer le prix de l’humiliation qu’elle avait fait subir au peuple palestinien, et ce, par son laxisme avec les Américains et les Israéliens. L’ancien Ministre des Affaires étrangères s’est aussi longuement attardé sur la Syrie. Il révèle avoir rendu visite à l’ancien Président syrien Hafez al-Assad en 1992, sur une suggestion de Shimon Perez qui était alors chef de la diplomatie israélienne. Il rapporte leur longue discussion sur le Liban, durant laquelle Hafez al-Assad s’était attelé à lui expliquer que le Liban est une terre syrienne et que les problèmes sont dus aux Britanniques et aux Français qui avaient opéré un partage injuste. Dumas affirme qu’il sentait qu’Assad voulait le taquiner sans aller pour autant jusqu’à remettre en question les frontières léguées par le colonialisme. « Bien au contraire, c’est une chose qu’il a refusée, lorsque certains leaders maronites la lui ont suggérée, comme l’a rapporté Karim Bakradouni », un ancien responsable des Phalanges libanaises (Kataëb). Dumas dit aussi avoir connu le Président syrien actuel Bachar al-Assad. Il le qualifie d’ « homme charmant qui détient un esprit plus ouvert que celui de son père, un esprit pétillant, qui ne récuse pas les questions embarrassantes », estimant que les Israéliens se trompent de ne pas négocier avec lui.

 

 

Je ne crois pas à la bombe iranienne.
Tout cela n’est que de l’intoxication.

 

Dans son ouvrage, Roland Dumas consacre tout un chapitre à l’Iran qu’il a, par ailleurs, visité plusieurs fois et où il a rencontré son ancien homologue Ali Wilayati et l’ancien Président Ali Akbar Hachemi Rafsandjani. « La bombe nucléaire iranienne est, à mon avis, à l’instar des armes de destructions massives de Saddam Hussein, c’est-à-dire que je n’y crois pas. Tout ce qui se passe n’est que de l’intoxication. Les tergiversations de la politique française sont dues à des immixtions aux origines connues », a-t-il précisé, signalant que la présence d’Israël aux portes rend toute analyse différente suspecte. Dumas défend le point de vue iranien selon lequel il est nécessaire d’édifier des réacteurs nucléaires pour ses besoins énergétiques puisque son stock en pétrole devrait se tarir dans 60 ans. « Ce qui est vrai est que les Iraniens veulent poursuivre leur programme nucléaire civil et que tous les rapports indiquent qu’il n’y a pas d’armes nucléaires », conclut-il.

 

Récemment M. Dumas a publié un livre "Sarkozy sous BHL", qui dénonce la criminelle diplomatie de Sarkozy et son inféodation aux desiderata impérieux du NOM. Il l’a fait avec maître Vergès, un autre prestigieux avocat spécialisé dans la défense des peuples coloniaux aussi et dans les causes de droit. Les deux pamphlétaires critiquent le tout-argent de la politique française (qui a toujours existé mais s’est systématisé avec Sarkozy), le retour à la brutalité colonialiste (« nous sommes ramenés des siècles en arrière »), l’influence regrettable de BHL (qui existait aussi selon nous sous Mitterrand !) baptisé « mouche du coche » (La Fontaine), et la dimension irresponsable de personnages comme Sarkozy - son successeur socialiste ne valant hélas pas mieux que lui.

 

Sur la Palestine, je laisse à ces deux nobles esprits le soin de conclure : « L’humanité se déshonore en laissant tomber le peuple palestinien qui est raisonnable, paisible et ne demande pour lui que ce que les Israéliens ont obtenu pour eux-mêmes. »

 

Enfin, il est bon d’indiquer que l’un des prochaines cibles de la folle diplomatie française sera l’Algérie : Monsieur Dumas écrit : « Le contentieux entre la France et l’Algérie est durable. Quand vous imaginez que les Français n’ont pas encore souscrit à la proposition de négociations avec l’Algérie sur un contrat d’amitié, parce que trop de blessures sont encore saignantes... Tout est à craindre pour l’Algérie, mais ce sera pour M. Sarkozy un autre "morceau" »...

 

De la France actuelle, on pourrait dire comme Sartre de l’Amérique, qu’elle a la rage.

http://www.france-courtoise.info

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