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Expulsion ordinaire

Mercredi 26 juin. 13h, pause déjeuner. Ne travaillant pas très loin, je file Place Vendôme me sustenter là-bas et apporter une galette et un petit pot de beurre aux veilleurs debout qui s’y trouvent déjà.

Las… c’était sans compter sur la diligente bravoure des agents de la maréchaussée, toujours prêts à transcender leur noble travail par des actes forts et qui ont du sens. En arrivant sur place, je vois un cordon de policiers entourant une douzaine de civils près de la colonne. L’habitude aidant, plus besoin de se poser des questions quant à la nature du dialogue entre les deux groupes. Je m’approche tout de même, histoire de prendre quelques photos.

« Veuillez vous rassembler, pour votre sécurité ». Tiens, encore cette éternelle sécurité… ça me rappelle un bouquin de Tocqueville qui traîne dans ma bibliothèque.

De loin, j’entends un homme lisant à haute voix les articles du Code Pénal relatifs à la liberté de circulation et à l’obéissance aux ordres illégaux (art 432.4, art 122.4). Aux alentours, quelques témoins déjà au courant de l’affaire expliquent aux passants de quoi il retourne.

Après quelques minutes, les policiers (plus nombreux que les veilleurs) expulsent tout ce beau monde de la place, direction rue de la Paix. Les interpellés n’opposent aucune résistance. À quelque distance, je filme la scène.

 

Soudain, un policier s’approche de moi. Ce foudre de guerre a du remarquer quelque chose de pas bien citoyen dans mon activité. S’ensuit le dialogue suivant :

«  Monsieur, vous filmez ?
-          Je filmais. Ca se voit, non ?
-          Tout à fait. Veuillez me suivre maintenant.
-          Non. Pourquoi donc ?
-          Veuillez me suivre sans discuter, on va rejoindre le groupe.
-          Je n’ai rien fait. Vous pouvez m’indiquer la raison ?
-          Monsieur rangez votre appareil et venez avec le groupe
-          Ça c’est une destination, ce n’est pas une raison.

[je finis par le suivre]

-          Vous ne m’avez toujours pas donné de raison, c’est manifestement illégal vous savez.
-          On vous la notifiera plus tard.
-          Plus tard ??? Vous n’avez pas le sentiment que c’est un peu particulier comme procédure ?
-          Vous aviez l’air très intéressé par ce groupe alors on va les rejoindre
-          Je suis moins intéressé par « leur » groupe que par le vôtre.
-          Je ne suis pas un groupe, je suis seul
-          Ah oui, et moi j’étais combien alors ? Et vos collègues ?
-          Bon ne faites pas d’histoire, allez hop rentrez dans le cercle.

Bref, je rentre sans faire trop d’esbrouffe. La plupart de mes désormais camarades sont plutôt des adultes, hommes d’affaires, moins de jeunes qu’en soirée. On patiente un peu, quelques-uns continuent de mettre les policiers face à leurs responsabilités, sans grand espoir et sans succès, évidemment, puisqu’ils n’écoutent pas. On échange quelques coordonnées, pour porter plainte en bonne et due forme.

Finalement, le verdict tombe : « Messieurs-dames, vous allez être autorisés à vous disperser (« aaaaaaaah ») mais uniquement par petits groupes de deux, et direction Opéra. Pas vers la place ». Voilà voilà, entrave à la liberté de circulation, patin couffin, on ne va pas jouer les naïfs indignés avec emphase dans les colonnes du blog, on est un peu habitué. La reprise du boulot approche, j’ai le sentiment que personne parmi nous n’est vraiment très en avance sur l’horaire. Deux par deux, on se quitte bons amis.

On vit une époque formidable.

Par Camille http://latableronde.wordpress.com

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