« Des hommes politiques exigent : les chrétiens doivent chanter des chants musulmans à l’office de Noël ». C’était le titre initial de Bild, le plus grand quotidien allemand, dans l’édition papier. Devant la polémique, il a été changé en un moins agressif : « Proposition de réconciliation : des chants musulmans dans l’office de Noël ».
Omid Nouripour, « expert en droits de l’homme du Parti des Verts » (et titulaire de la nationalité allemande depuis 2002), explique ainsi l’idée à Bild : « Ce serait un signe merveilleux de la cohabitation pacifique des religions, si un chant islamique était chanté à l’église » lors des différents offices chrétiens de Noël (pour les catholiques, à la messe de minuit). Le député social-démocrate Thomas Funk est séduit : « Nous avons besoin de compréhension, de respect et de tolérance ».
Aiman Mazyek, chef du conseil central des musulmans d’Allemagne, a même son idée sur le chant qui s’imposerait : « Tala’a al-badru alayna du chanteur Yusuf Islam » (nouveau nom de Cat Stevens depuis sa conversion à l’Islam).
La proposition a été immédiatement relayée avec enthousiasme par tous les gros médias. Pour le Spiegel, ce serait une réponse « au mouvement islamophobe Pegida » : « des hommes politiques incitent à chanter un chant musulman à l’office de Noël en signe de solidarité avec les musulmans ».
Certains, plus lucides sur l’état de l’opinion publique, ont cependant compris que ce genre de provocations risquaient d’être contre-productives. Pour Christian Lindner, président du Parti libéral-démocrate (FDP), « ceux qui exigent des chants musulmans à l’office de Noël jettent les gens dans les bras des populistes dePegida. Le respect et la tolérance ne doivent pas être confondus avec l’effacement des différences et la perte de l’identité ».
De fait, les commentaires sur le site de Bild et les réactions sur les réseaux sociauxont été très majoritairement hostiles. Par exemple : « Je préfère aller chanter des chants allemands avec Pegida ». Ou bien : « Nous sommes encore en Allemagne ou pas ? Nous devrions protéger notre culture au lieu de nous adapter aux autres dans notre propre pays ». Et encore : « Comme le disait un certain Sarrazin : “L’Allemagne disparaît” ».
Omid Nouripour a alors expliqué qu’on l’avait mal compris. Il s’est plaint que les journaux « aient donné l’impression que les hommes politiques cités réclamaient exclusivement la reprise de l’héritage culturel musulman [sic] par les églises chrétiennes », et a soutenu qu’il voulait parler d’un « échange réciproque, par exemple : des chants musulmans dans l’église, des chants chrétiens à la mosquée ».
Les journaux allemands (Bild, le Spiegel et aussi la Frankfurter Allgemeine Zeitungont immédiatement corrigé leurs articles pour introduire cette supposée réciprocité, dont il n’était nullement question au départ. Sera-ce suffisant pour désamorcer la polémique ?