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culture et histoire - Page 1466

  • Christophe Guilluy "La France périphérique : comment on a sacrifié les classes populaires"

    Après Fractures françaises, qui avait déjà fait parler de lui, Christophe Guilluy nous propose ici un essai décapant sur notre pays. Géographe, l'approche de l'auteur est intéressante à plus d'un titre car elle se fonde sur une étude des hommes au sein de leur espace et de leurs territoires. Le vocabulaire employé est spécifique à la discipline et un glossaire à la fin de l'ouvrage permettra au lecteur d'y voir plus clair. Cependant d'autres notions ne s'y trouvent pas et nécessiteront pour les non initiés un dictionnaire récent. Passé le cap du vocabulaire spécifique à la discipline, nous remarquons d'emblée que l'essai de Christophe Guilluy s'appuie sur d'autres auteurs, géographes, sociologues ou démographes. Le raisonnement est étayé par un grand nombre de chiffres et illustré par des cartes en couleurs malheureusement trop petites. L'auteur n'hésite pas, en bon géographe, à changer d'échelle pour étudier des cas concrets. L'ouvrage m'a paru rigoureux sans pour autant être neutre. En effet l'auteur y défend une thèse selon laquelle la société française serait fracturée entre une France des métropoles, intégrée à la mondialisation et une France périphérique des petites et moyennes villes et des zones rurales éloignées des bassins d'emplois comme l'indique assez fidèlement la quatrième de couverture.

    La France dans laquelle plonge Christophe Guilluy est la France des oubliés, dont la sociologie électorale se caractérise de plus en plus par l'abstention ou le vote FN. Il décrit une France laissée de côté par la mondialisation connaissant une insécurité sociale, économique ou identitaire. En effet 2/3 du PIB français provient des métropoles connectées au reste du monde. N'oublions pas, comme le rappelle Christophe Giulluy, à la suite d'Olivier Dollfus, que la mondialisation repose sur un « archipel métropolitain ». Par conséquent, l'organisation du territoire, son aménagement, ainsi que ses dynamiques, ont été profondément impactées par la mondialisation. Il démontre de façon convaincante que l'Etat-providence et le système républicain se sont effacés progressivement pour laisser place au modèle anglo-saxon communautariste et libéral. A ce titre il relaye la fameuse étude du non moins fameux « think-tank » du PS Terra Nova tout en notant de façon judicieuse que le projet sociétal du PS ne cadre pas avec la « clientèle » électorale immigrée. Il prévoit d'ailleurs à terme la disparition du PS et il explique clairement que nous ne faisons plus société.

    Dans son étude, Christophe Guilluy soulève des remarques très pertinentes. Il remet en question les représentations qui entourent les populations issues de l'immigration. Par exemple, il considère que ce ne sont pas des banlieues que viendront les « révoltes populaires », mais des classes populaires et des classes moyennes « déclassées » françaises de la France périphérique comme l'illustre pour lui le mouvement des bonnets rouges, le mouvement des « nouvelles ruralités », le vote FN ou l'abstention. Il remarque comment les élites vivant dans les métropoles ont focalisé leur attention sur les banlieues alors que celles-ci sont bien moins impactées par la mondialisation puisqu'elles vivent dans métropoles connectées, aménagées et équipées. Il note aussi, sans nier la pauvreté qui y existe réellement, que l'ascenseur social fonctionne désormais uniquement pour les populations issues de l'immigration qui sont eu cœur des territoires producteurs de richesses et où se concentrent par exemple les universités alors, qu'à l'inverse, les milieux populaires de la France périphérique sont exclus en raison de l'impossibilité de loger leurs enfants dans les métropoles par exemple. Celles-ci concentrent ainsi des populations aisés dans les centre-villes gentrifiés et des populations issues de l'immigration. Elles se sont vidées des classes populaires et des classes moyennes paupérisées qui cherchent un environnement où elles peuvent se loger et se protéger des différentes formes d’insécurités évoquées précédemment.

    Christophe Guilluy estime qu'il faut même « s'affranchir du concept de classe moyenne » (p.17) mais également des catégories de l'INSEE (p. 19) qui, pour lui, ne sont pas pertinentes et seraient une lecture essentiellement urbaine et économique du territoire qui n'interrogent pas l'intégration des classes populaires. Il n'y a pas selon l'auteur d'opposition entre une France urbaine et une France rurale. Il cite l'exemple de la Nièvre où les habitants définissent leur département comme « rural » tout en se définissant eux-mêmes comme des urbains (p.24). L'opposition ville/campagne ou urbain/rural n'est aujourd'hui plus pertinente en géographie. L'étude de Christophe Giulluy replace donc l'approche autour des notions de pôles, de périphérie et in fine, sans que cela soit vraiment évoqué, de marge. Ainsi le phénomène de métropolisation est en somme une polarisation des activités et des hommes dans les métropoles. La France périphérique s'organise donc à l'écart de ces pôles. Ce que Christophe Guilluy défini comme une périphérie ressemble parfois à une marge.

    L'auteur explique assez longuement dans l'ouvrage les ressorts du vote FN en s'appuyant autant sur des dynamiques générales que sur des cas précis. Il en tire la conclusion que le vote FN est normal et repose sur une approche rationnelle de la part des exclus de la mondialisation et qui serait même universelle en démontrant que dans d'autres pays les réactions ne diffèrent pas face à des situations similaires. Il ne voit pas d'ailleurs ce qui arrêterait le processus en cours. Il tente de tordre le cou aux clichés entourant l'électeur FN : inculte, ayant peur de l'autre, de l'avenir, de la mondialisation, en démontrant qu'au fond, les représentations sont inversement proportionnelles à l’intégration dans la mondialisation. Ceux qui profitent de la mondialisation la voient positivement alors que ceux qui en sont victimes la voient négativement, ce qui est on ne peut plus logique. Pour Christophe Guilluy, la bourgeoisie n'a pas changé dans son regard sur les classes populaires, considérées comme des classes dangereuses. Il voit d'ailleurs dans le débat sur le mariage homo un conflit interne aux milieux bourgeois qui ne concerne qu'à la marge les milieux populaires. Il oppose, à la suite de Jean-Claude Michéa, la « gauche kérosène » et le « nomade attalien » dont le mode de vie serait impossible à généraliser aux processus de relocalisation et de réenracinement en cours dans la France périphérique. Il montre qu'une véritable « révolution par le bas » a débuté dans notre pays.

    Un bémol cependant, l'auteur n'aborde pas le rôle des technologies numériques dans son tableau: le rôle de la télévision ou d'internet dans cette France périphérique et les effets de différents médias et technologies numériques sur les différents territoires.

    Je vous laisse découvrir le reste de l'ouvrage et entrer dans les détails de son raisonnement. C'est d'après moi une lecture incontournable que devrait se procurer chaque militant pour savoir dans quel cadre géographique et sociologique il milite. Pour les non militants, c'est une très bonne approche pour mieux comprendre notre pays et les dynamiques en cours. L'ouvrage ne faisant « que » 179 pages, il se lit très rapidement et vous occupera utilement. A lire et à faire lire !

    Jean/C.N.C

    http://cerclenonconforme.hautetfort.com/

  • Le cinéma, quel roman ! Deux romans de la rentrée explorent les coulisses

    « À la fin, les noctambules se retrouvent sur la plage. Les pêcheurs hissent un filet où ne se débat déjà presque plus le monstre marin qu’ils viennent d’attraper. Après avoir longuement contemplé l’oeil glauque de la bête, Marcello entend la voix d’une jeune fille qui l’appelle. Il la connaît, elle incarne l’innocence, la pureté.

    Séparé d’elle par l’embouchure d’une petite rivière, il feint de ne pas comprendre et rejoint le groupe de fêtards qui l’attend ». La dernière scène de la Dolce Vita laisserait-elle entrevoir le sens véritable du cinéma qui, comme métaphore de la vie moderne, ne serait pas une quête, mais un renoncement -renoncement mélancolique mais sans appel à la pureté et à l’innocence ? C’est ce que suggèrent ces jours-ci deux beaux romans au titre plus jovial que leur contenu, Pas ce soir, Joséphine, d’Éric Alter, et Quiconque exerce ce métier stupide mérite tout ce qui lui arrive, de Christophe Donner.

    Ce dernier s’attaque, sur le mode décidément efficace de la non fiction, à un célébrissime inconnu, Jean-Pierre Rassam, étoile montante puis filante de la production cinématographique française, retrouvé mort à 43 ans au domicile de sa compagne Carole Bouquet. Le voyage au bout de la nuit américaine commence par un suicide – le 31 décembre 1966, celui d’un autre producteur mythique, Raoul Lévy, le découvreur de Brigitte Bardot, qui se tue d’un coup de fusil dans le bas-ventre à la porte, close, de sa maîtresse. [...]

    Frédéric Rouvillois - La suite sur Causeur

    http://www.actionfrancaise.net/craf/?Le-cinema-quel-roman-Deux-romans

  • PETIT LEXIQUE DU PARTISAN EUROPÉEN

    AVANT-PROPOS

    Le combat des idées et la construction d'un corpus doctrinal efficace, ainsi que son utilisation optimale, passent par une claire définition et une bonne connaissance d'un certain nombre de mots-clés ; ces derniers doivent se différencier de ceux des idéologies adverses. Se réapproprier le réel, c'est d'abord le nommer et, de ce fait, imposer ses propres notions, ses propres définitions.

    L'ambition de ce court lexique est de proposer une définition claire de nos concepts les plus fréquents et les plus importants et, par là même, d'offrir un aperçu global de notre vue du monde. (...)

    Rédigée de manière didactique, chaque notice se compose de 3 parties. En premier lieu, la définition proprement dite, volontairement courte, qu'il convient de bien posséder. Deuxièmement, le "commentaire", c'est-à-dire le condensé de notre discours sur l'idée à laquelle renvoit le mot défini. Enfin la plupart des notices sont pourvues d'une bibliographie qui permettra à chacun de diversifier et d'approfondir ses lectures sur les sujets concernés.

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    Index des notices :

    • A : Américanisme / Aristocratie / Autarcie
    • B : Bien-être / Biologie / Bourgeoisisme
    • C : Christianisme / Civilisation occidentale / Communauté / Conception-du-monde
    • D : Démocratie / Désinstallation
    • E : Économisme / Égalitarisme / Élite / Empire / Enracinement / Ethnopluralisme / Éthologie / Europe / Évolution
    • F : Fonction
    • G : Géopolitique
    • H : Homme
    • I : Idéologie(s) occidentale(s) / Individualisme
    • J : Judéo-christianisme
    • L : Libéralisme / Liberté
    • M : Modernité / Monothéisme / Mythe
    • N : Nation / Nature / Nihilisme / Nominalisme
    • O : Organique
    • P : Paganisme / Peuple / Politique / Polythéisme
    • R : Racisme / Raison / Réductionnisme / Région / Religion
    • S : Sacré / Sélection / Sens / Société marchande / Souveraineté
    • T : Totalitarisme / Tradition / Tragique / Travail / Tripartition
    • U : Universalisme
    • V : Valeurs / Volonté de puissance
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    ◘ 1 - AMÉRICANISME

    Forme dominante de la déculturation occidentale véhiculée par son foyer principal, la société-nation des États-Unis.

    L'américanisme constitue ce qu'il y a de plus occidental dans la culture de masse de la civilisation occidentale, du fait de la position centrale des États-Unis en tant que modèle de la société marchande, en tant que représentants privilégiés de l'égalitarisme, du biblisme, et enfin en tant que puissance d'exportation de mœurs que l'on doit qualifier de néo-primitives.

    L'américanisme n'est donc nullement la modernité entendue comme futurisme. Parmi ses nombreux éléments constitutifs, retenons : la domination linguistique anglo-américaine, la diffusion homogénéisante de formes artistiques, vestimentaires, musicales, alimentaires, etc., de provenance et surtout de “style” américains (américanomorphe autant qu'”américains”) ; l'alignement des modes d'enseignement, des techniques de presse, de gestion, de communication, comme de l'imaginaire et des mythes sociaux sur la société américaine. La progression de l'américanisme se fait, notamment, par un système où entrent les modes culturelles et la consommation de produits, ou l'adoption de mœurs liées à ces modes (”complexe économico-culturel”). La critique de l'américanisation des cultures, américanisation qui entraîne pour les peuples la perte de leur indépendance économique et politique, est un vecteur idéologique particulièrement fructueux — un des thèmes sur lesquels peuvent se retrouver une nouvelle droite et une nouvelle gauche . 

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    • L'empire américain, C. Julien, Grasset, 1968
    • Le modèle défiguré, l'Amérique de Tocqueville à Carter, T. Molnar, PUF, 1978 
    • « Il était une fois en Amérique », R. de Herte et HJ Nigra, in : Nouvelle École n°27/28, 1975
    • « L'ennemi américain : un tour d'horizon », M. Walker ; « Le destin californien des États-Unis », R. Steuckers, in : Orientationsn°6, 1985
    • L'America di fronte all'Europa, P. Gerbore, G. Volpe Ed., 1981. Bref survol des relations euro-américaines depuis 1776. L'A. insiste tout particulièrement sur la "bonne affaire" qu'ont réalisé les milieux financiers américains en envoyant les GI's en Europe.
    • Amerika ist allem Schuld : Die Amerikanisierung der Alten Welt, G. Herm, W. Heyne Vg, Munich, 1980. Depuis plus de 100 ans, l'américanisation du monde est en marche. Herm nous en décrit toutes les étapes. Un bon livre documentaire auquel manque, hélas, une conclusion politique claire.

    ◘ 2 - ARISTOCRATIE 

    Gouvernement du peuple par ses meilleurs éléments, ou bien catégorie du peuple, qui ne se confond pas avec une classe économique, qui manifeste au plus haut degré les qualités éthiques, spirituelles, anthropologiques, psychologiques et intellectuelles propres à ce peuple, l'aristocratie est de ce fait “l'essence du peuple”.

    Toute société possède une élite. Mais l'élite ne désigne que ceux qui sont en position dominante de fait, sans faire référence à des valeurs — ou en faisant référence à des valeurs qui sont pour nous négatives. Ainsi aujourd'hui, les critères de sélection des élites sont déterminés par les valeurs du bourgeoisisme — intérêt, position économique, pouvoir financier, capacités démagogiques — ou de la technocratie, savoir purement technique, manipulation des appareils institutionnels. À l'inverse, les valeurs aristocratiques, qui intègrent par ailleurs le savoir technique et les hiérarchies économiques, insistent d'abord sur le caractère, l'exemplarité, le commandement compris comme service. L'aristocratie n'est pas une “noblesse” en forme de caste : elle est partie intégrante de la communauté populaire qu'elle anime et inspire, ses obligations sont la mesure de ses privilèges. La civilisation égalitaire n'a pas tué les aristocraties : elles sont virtuelles, puisqu'un peuple, biologiquement, en génère toujours. Il nous appartient de créer les conditions de réalisation de ce potentiel. Notre communauté doit constituer, par elle-même, le premier embryon d'une future aristocratie populaire. D'où les grandes exigences que nousdevons nousimposer à nous-mêmes. Il faut savoir que le risque majeur qui guette toute aristocratie est de générer en caste nobiliaire. Cela s'est souvent produit au cours de l'histoire (exemples de la République romaine ou de l'Ancien Régime finissant, en Europe).

    ◘ 3 - AUTARCIE

    Régime économique dans lequel les échanges d'un espace économique avec l'extérieur sont limités, surtout à l'importation, de manière à lui conférer une indépendance politique et à protéger le développement des industries intérieures.

    Savamment régulée, l'autarcie a été pratiquée par toutes les puissances industrielles naissantes, surtout sous la forme d'autarcie sectorielle, nécessaire à promouvoir le lancement d'un “secteur” industriel précis. Aujourd'hui, devant le complet échec du libre-échangisme économique et du système monétaire international, de plus en plus d'économistes, auxquels nous nous rallions, préconisent la construction de régions économiques en développement autocentré, dit aussi “autarcie d'expansion” organisée pour de grands espaces homogènes politiquement et culturellement ; c'est une réponse à la déculturation et à la crise économique du système occidental. Certains sous-continents du Tiers-Monde, tout comme l'Europe de l'Ouest, pourraient adopter ce système, en outre de plus en plus compatible avec l'état actuel des techniques énergétiques (énergies autoproduites) ; il a été par ailleurs démontré que seule la solution du développement autocentré pouvait combattre le sous-développement croissant du Tiers-Monde provoqué par le néo-colonialisme de l'économie de libre-échange. L'autarcie d'expansion est un outil privilégié dans la construction d'un équilibre de grands blocs géopolitiques.

    ◘ 4 - BIEN-ÊTRE

    Version laïcisée par les idéologies occidentales de l'idéal chrétien du bonheur entendu comme félicité passive, le bien-être est une des finalités centrales de la société marchande.

    Il repose sur la définition universaliste de besoins économiques et sociaux qui seraient propres à tous les humains. Quoique légitime comme fin seconde du politique, le “bien-être économique individuel” est devenu, dans une perspective réductionniste, la finalité centrale des États-providence contemporains, au détriment des dimensions historiques, politiques et culturelles de la vie des peuples. Il contribue à domestiquer ces derniers dans le consumérisme et à les transformer, conformément aux doctrines du progrès et du développement, en masse d'individus-consommateurs dont la seule aspiration légitime doit être la satisfaction de besoins matériels, définis a priori et posés comme des droits (des “droits de l'homme”). Il faut se demander sérieusement si le bien-être, par sa “mortelle tiédeur”, n'est pas le plus grand danger qui menace les peuples, en les incitant à démissionner de l'Histoire. Le bien-être c'est le “totalitarisme mou”.  

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    ◘ 5 - BIOLOGIE

    Ensemble des sciences de la vie et de ses mécanismes micro-cellulaires de transmission de l'information et d'évolution, la biologie est venue contredire beaucoup d'axiomes de la conception-du-monde égalitaire.

    La biologie a corroboré l'idée intuitive que les cosmogonies indo-européennes se faisaient de la vie (vitalisme tragique, infirmant dans chaque cas les conceptions issues du judéo-christianisme). La vie est conflictuelle, puisque la sélection, inter et intraspécifique y fonde le devenir des espèces comme la destinée des potentiels génétiques ; la vie est hiérarchisante, complexifiante, néguentropique à l'inverse de la convergence entropique — retour au chaos — qui caractérise la matière inanimée toujours en déperdition d'énergie : c'est une infirmation de la téléonomie judéo-chrétienne. La vie est évolutive selon un schéma non-linéaire, gaspilleuse ; ses phénomènes sont marqués par l'aléatoire, le schéma défi/réponse, la polarité hérédité/mutation qui correspond au couple tradition/innovation, c'est-à-dire conservation sélective d'informations/tentative risquée d'introduire de nouvelles informations. Bref, la vision d'une nature aléatoire, non-rationnelle, risquée, évolutive et d'un temps sphérique (sphère en expansion), et non pas linéaire-segmentaire, corrobore la conception traditionnelle indo-européenne du devenir.

    En outre, la biologie peut maintenant être associée à la sociologie et à l'histoire, comme aux sciences politiques et économiques, ce que refusent toujours les idéologies dominantes, très mécaniscistes : en effet, le développement des cultures comme le fonctionnement des sociétés ou le déroulement de l'histoire suivent des processus métabiologiques (cf. organique et culture). c'est pourquoi nous entendons intégrer la biologie, en adoptant une perception globalisante (holiste) du fait humain, dans l'analyse sociale et politique (biopolitique). Par ex., la société marchande peut, entre autres, être dénoncée comme une pathologie de la domestication biologique, et la civilisation occidentale comme une pathologie de l'homogénéisation biologique de l'humanité, ou encore la divergence culturelle peut être décrite comme un impératif biologique (un fait bio-culturel). Notre volonté d'inclure la dimension biologique dans notre analyse des phénomènes et notre vue-du-monde s'accompagne évidemment d'un clair refus de tout réductionnisme biologique.

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  • Conférence d’Alain Jakubowicz à l’Université Lyon III : le compte-rendu d’E&R Rhône-Alpes

    « Les limites de la liberté d’expression »…

    Tel fut l’audacieux intitulé de la magistrale allocution d’Alain Jakubowicz , avocat, actuel président de la LICRA, ancien président du CRIF Rhône-Alpes et Chevalier de la Légion d’Honneur, dans le cadre d’une conférence à l’Université Lyon IIIJean Moulin le 29 septembre 2014.

    S’il se déchargea d’emblée d’être un spécialiste de l’exercice, l’invité de marque donna pourtant une leçon de communication. Dieudonné, Soral, Zemmour, Faurisson, Houellebecq, la Shoah, la loi Gayssot, la loi Taubira, les crimes contre l’Humanité, la quenelle : tout y passe. Admirez donc.

    Les meilleurs moments :

    En juriste chevronné, Maître Jakubowicz a parfaitement désamorcé la situation, ce qui lui a permis de déverser calmement sa litanie habituelle, que nous résumons ici :

    - la liberté d’expression n’a aucune limite, sauf celle de la légalité ; 
    - dans toutes les démocraties, il y a des limites à la liberté d’expression.

    Habile procédé qui induit cette idée sous-jacente qu’il n’y a pas de limites à la liberté d’expression, à part les limites « nécessaires », « essentielles », « normales » que tout état de droit qui se respecte se doit d’élever, c’est d’ailleurs cela qui prouve que c’est une démocratie.

    Avec en acmé révélatrice de cette consubstantialité, l’ordonnance exceptionnelle du Conseil d’État du 9 janvier 2014 dans l’affaire Dieudonné, qui démontre ainsi que « les institutions ont parfaitement fonctionné ».

    Une société qui fonctionne bien est donc une société qui limite bien. Mon petit doigt me dit que la France est partie pour fonctionner de mieux en mieux…N’ayant pas réussi à accéder au micro pour poser de vive voix la question qui me brûlait les lèvres, je me permets de la retranscrire ici par écrit. J’espère que l’orateur professionnel qu’est Monsieur Jakubowicz ne m’en voudra pas.

    Lire l’intégralité de l’article sur egaliteetreconciliationrhonealpes.com

    http://www.egaliteetreconciliation.fr/Conference-d-Alain-Jakubowicz-a-l-Universite-Lyon-III-le-compte-rendu-d-E-R-Rhone-Alpes-28684.html

  • « L’effacement du politique » de Pierre Le Vigan par Michel THIBAULT

    De nombreux ouvrages paraissent pour identifier les causes de la crise de l’idée européenne, mais peu d’entre eux creusent le sujet jusqu’à la racine, comme le livre de Pierre Le Vigan. Préfacé par Éric Maulin, professeur de droit international à l’Université de Strasbourg, il est sous-titré : La philosophie politique et la genèse de l’impuissance européenne. Parmi les causes de cette impuissance, l’auteur pointe les « belles idées » qui tournent au cauchemar car mal interprétées : liberté, égalité, morale, droits de l’homme, démocratie, etc. Pis, l’Europe ne s’aime pas et pratique le déni – quand ce n’est pas la haine de soi : « On préfère tout ce qui n’est pas nôtre. Chacun y plante et cultive ses croyances. Toutes les diversités sont bonnes sauf celles d’Europe. »

    À force de se penser seulement en termes économiques, celle-ci est devenue une simple zone marchande, informe et fluide, un néant (et un nain) politique : « Impuissante à vouloir, impuissante à se vouloir. » Oui, la crise européenne est d’abord une crise d’identité. Les responsables ? Pierre Le Vigan rappelle les propos de Pierre-André Taguieff, pour qui l’Europe est « gouvernée par des super-oligarques, caste d’imposteurs suprêmes célébrant le culte de la démocratie après en avoir confisqué le nom et interdit la pratique ».

    D’où l’urgence de retrouver la voie du politique et de la puissance. Comment ? Certainement pas en s’identifiant à un Occident de plus en plus caricatural. Pierre Le Vigan penche pour une Europe impériale (mais non impérialiste), seule capable de faire face aux géants que sont les Etats-Unis et la Chine.

    Dense, d’une grande clarté et d’une érudition sans faille, il s’agit là d’un ouvrage appelé à faire date.

    Michel Thibault

    • D’abord paru dans Le Spectacle du monde, n° 613, juillet-août 2014, l’ultime numéro !.

    http://www.europemaxima.com/

  • La justice dans l'Ethique à Nicomaque

    A. Le juste et l’injuste 

    Le lien entre éthique et politique est établi par la justice. Elle est le principe d’organisation de la cité, comme cela est démontré dans le livre I de la Politique. Mais, en même temps, elle est une disposition acquise dont les hommes doivent faire montre. Il faudra donc articuler la justice en soi, la vertu propre aux justes et la justice dans la cité, fondée sur le système des lois.

    L’homme injuste est, d’une part, celui qui agit contre la loi ; d’autre part, celui qui veut posséder plus que son dû, même au détriment d’autrui. On doit remarquer que ces deux définitions ne sont pas de même nature ni à mettre sur le même plan. La première est conventionnelle et peut être purement nominale : elle dépend de la convention par laquelle est fondée la société humaine, alors que la seconde peut être l’objet d’une fondation rationnelle.

    Mais cette différence n’en est pas une car lois et égalité vont ensemble, comme vont ensemble illégalité et inégalité. En effet, « nous appelons justes toutes les choses qui tendent à produire ou à conserver le bonheur, avec les éléments qui le composent, pour la communauté politique ».

    B. La justice, première des vertus 

    La justice contient toutes les autres vertus. Et, d’emblée, la justice est un bien qui contient tous les autres. Dans la justice, chacun manifeste sa vertu non seulement à l’égard de lui-même, mais aussi à l’égard d’autrui. En outre, si la vertu est la juste mesure, la justice est, en quelque sorte, le prototype de toutes les vertus et en même temps ce qui est nécessaire à toutes les autres vertus.

    La justice est égalité : en premier lieu, trouver le juste milieu, c’est se situer à mi-chemin, donc partager la ligne en deux parties égales. La justice peut donc s’identifier à l’égalité arithmétique. En second lieu, la juste mesure est aussi la bonne proportion. Il s’agit alors non d’une égalité des valeurs absolues, mais d’une égalité des rapports, égalité proportionnelle ou encore égalité géométrique.

    La justice signifie obéissance aux lois. Or les lois imposent le respect de toutes les vertus. Donc la justice commande toutes les autres vertus. Pourquoi y a-t-il deux termes distincts, vertu et justice ? Elle est vertu en tant que disposition acquise : on devient vertueux par l’exercice de la vertu ; on devient juste par l’exercice de la justice. Cette vertu est justice dans la mesure où elle a rapport avec autrui. Cette première distinction en commande une deuxième, entre la justice en soi et la justice dans la cité.  

    C. Trois formes de la justice dans la cité 

    Il s’agit d’abord de définir les règles de la répartition de la richesse collective entre tous les membres de la cité. C’est le problème de la justice distributive. Ici, chacun doit recevoir en proportion de ses mérites. Le rapport entre les biens distribués doit refléter le rapport entre les personnes. Cependant, la répartition selon le mérite pose la question de la définition du mérite car « tous ne désignent pas le même mérite, les démocrates le faisant résider dans une condition libre, les partisans de l’oligarchie soit dans la richesse soit dans la noblesse de race, les défenseurs de l’aristocratie dans la vertu.

    Dans la justice corrective, c’est-à-dire celle qui vise à réparer les torts, c’est au contraire l’égalité arithmétique stricte qui s’applique. En effet, la loi n’envisage que la nature de la faute sans égard pour les personnes qu’elle met sur un pied d’égalité. C’est la justice qui remet droit ce qui était courbe, la justice « redresseuse de torts ». Elle a pour but le rétablissement de l’égalité. L’étymologie le dit : un juge est « celui qui partage en deux ».

    La justice commutative définit les lois de l’échange et règle les contrats. Ce qui règne ici, c’est la réciprocité. Cette réciprocité est la base de la cohésion sociale – elle est ce qui fait subsister la cité – et repose sur un échange proportionnel.

    La justice consiste à suivre les lois ; et la justice dans la cité se contente de suivre formellement les principes d’égalité arithmétique ou proportionnelle qu’on vient de définir. Mais observer les lois ne suffit pas à définir l’homme juste.

    Tout d’abord, l’action injuste elle-même comporte deux extrêmes : l’un d’eux, le moindre, consiste donc à subir l’injustice ; l’autre, le plus grave, à la commettre. Ces deux extrêmes ne sont pas situés à égale distance de la justice, puisque l’un est plus grave que l’autre. Etre juste « en soi », c’est donc aussi être capable de subir l’injustice. En outre, certaines vertus n’ont point d’excès. L’amour, la bonté, l’honnêteté entrent dans cette catégorie. Être juste alors, c’est savoir aller au-delà de ce que la loi exige. 

    Þ Ici, c’est la lecture du livre V qui s’impose. Il s’agit du cœur même de la philosophie aristotélicienne.

    Source : 

    http://www.oragesdacier.info/2014/10/la-justice-dans-lethique-nicomaque.html

  • Notre vocabulaire par Georges FELTIN-TRACOL

    Il s’agit de l’intervention inaugurale de Georges Feltin-Tracol à la 8e Journée nationaliste et identitaire de Synthèse nationale du 12 octobre 2014 à Rungis.

    Mesdames, Mesdemoiselles, Messieurs, Chers Amis,

    À l’été 1993, dans Foreign Affairs, la revue du C.F.R. (en anglais Conseil des relations étrangères), un cénacle mondialiste installé aux États-Unis, paraissait un article du professeur Samuel P. Huntington sur « Le choc des civilisations » (1). Cet enseignant de Harvard répondait ainsi à la thèse de la fin de l’histoire lancée en 1989 par le futur ex-néo-conservateur étatsunien d’origine japonaise Francis Fukuyama (2). Trois ans plus tard, Huntington sortait de cet article son célèbre essai avec la fameuse expression polémologique (3).

    Grâce à cet universitaire d’outre-Atlantique, le concept de civilisation prenait un sens polémique certain, même si la civilisation ici définie contient des confusions non négligeables. En effet, Samuel P. Huntington y mentionne une civilisation occidentale qui couvrirait l’Amérique du Nord, l’aire européenne chrétienne romano-protestante, l’Australie et la Nouvelle-Zélande. Il s’agit de l’actuel Occident atlantiste.

    Huntington n’est pas le seul à associer l’Europe, l’Amérique et l’Occident dans une même collectivité. Dès 1985, le sociologue français Jules Monnerot estimait qu’« il faut souhaiter aujourd’hui une étroite concertation avec tous les États dont les lois témoignent des mêmes tendances que les nôtres et qui prolongent avec nous la même filiation de cultures, la même lignée de civilisation. C’est ce que j’appelle la préférence occidentale. Derrière l’alliance avec les États-Unis d’Amérique. Derrière l’Europe totale, encore future mais plus que jamais nécessaire, nous devons reconnaître en nous-mêmes, comme variante historique d’époque de notre identité nationale française, un patriotisme de civilisation (4) ».

    Il va de soi que la théorie de Huntington ne nous convainc pas, car elle néglige toutes les différences essentielles entre l’Occident américanomorphe dont il se fait le porte-parole et notre vision de l’Europe. Nous tenons à l’originalité existentielle d’une civilisation européenne qui ne serait pas la pâle copie d’une production atlantiste.

    Depuis Oswald Spengler et son célèbre Déclin de l’Occident (5), on connaît la dichotomie entre la civilisation et la culture. D’après Spengler, la culture incarnerait pour les peuples le moment ascendant de leur histoire. Puis viendrait le temps de la civilisation avec une lente et longue déperdition d’énergies vitales collectives, l’engoncement, les rigidifications structurelles jusqu’à la nécrose, l’agonie et la disparition.

    À cette opposition binaire, on préférera la conception d’une civilisation européenne, polymorphe à travers le temps, tissée par de multiples cultures à la fois spécifiques et consubstantielles à son étymon. Certes, le mode de vie d’un Espagnol diffère de celui d’un Letton qui n’est pas celui d’un Arménien du Haut-Karabakh ou d’un Islandais. Mais, au-delà leurs langues, leur quotidien, leurs mentalités perdurent deux constantes déterminantes : une évidente substance anthropologique et un riche héritage spirituel pagano-chrétien. Il n’y a de civilisation européenne que par l’énergique médiation de ses cultures.

    Ces dernières se déclinent en cultures nationales et en cultures régionales ou vernaculaires. La nation constitue en soi un objet de débat. Venant du latin nascio, qui veut dire naître, le mot prend une autre acception pour désigner la forme moderne d’organisation politique, cet aboutissement de l’individualisme collectif. Idée défendue, développée et propagée par les révolutionnaires de 1789, la nation politique comprise comme un ensemble de citoyens égaux a au cours des deux derniers siècles plongé le continent européen dans les tourments nationalitaires. Il serait toutefois dément de la nier comme le rêvent les escrocs de la pseudo-construction européenne. Avec la mondialisation et l’immigration de peuplement massive, indéniable contre-colonisation, le fait national connaît un regain certain face aux dangereuses menées mondialistes, européistes et séparatistes régionales.

    Considérées par certains commentateurs comme des régions, – ne sachant pas qu’elles furent des royaumes médiévaux -, l’Écosse et la Catalogne montrent la vivacité de l’affirmation identitaire avec le risque préjudiciable d’affaiblir finalement la civilisation européenne toute entière. La robustesse des nations impose néanmoins que leurs cultures régionales ou vernaculaires ne soient pas broyées par un centralisme administratif dépassé. Souvent, hélas !, l’indépendantisme régional et le nationalisme étatique œuvrent en vecteurs involontaires (?) du mondialisme. Or une nation n’est en réalité solide que si ses régions trouvent elles-mêmes leur dynamisme ! Force est de constater, dans le cas de l’Hexagone, que les cultures régionales sont plutôt moribondes, étouffées par la prédominance mortifère de Paris. Heureusement, Flamands, Normands, Bretons, Basques, Catalans, Occitans, Provençaux, Corses, Nissarts, Savoisiens, Arpitans, Alsaciens et Thiois tentent de préserver ce qui peut l’être encore, et en premier lieu, la terre, notre terre.

    La terre appartient aussi à notre champ lexical. Oublions ici l’habituelle et lassante antinomie géopolitique entre la Mer et la Terre sur laquelle reposerait la lutte incessante entre les thalassocraties et les puissances continentales. Plus prosaïquement, on entend par terre le milieu vivant qui nous entoure et dans lequel nous interagissons. Ces relations complexes sont étudiées par l’écologie qui a fourni une version théorique – politique. On sait tous que l’écologie politique a été détournée par les trotskystes, les sociétalistes, les gendéristes, les multiculturalistes, les féministes et les mondialistes. Dans la revue L’Or vert, Robert Dun signalait dès les années 1970 la nécessité écologique. Pourquoi préserver nos identités si les lieux sont bétonnés, les terrains pollués, des paysages dévastés ? Au moment où un mini-candidat réclame l’exploitation du gaz de schiste, ce qui reviendrait à défigurer des campagnes déjà meurtries par le productivisme, l’exode rural et la politique agricole commune, refusons cet appel rentable aux seules firmes multinationales prédatrices et néo-coloniales ! Un écologiste conséquent devrait être clairement identitaire. Il l’est d’une certaine manière puisque Les Verts soutiennent les mouvements régionalistes progressistes sans comprendre la prégnance majeure de l’appartenance collective. pour sa part, un identitaire cohérent se doit d’être écologiste, surtout s’il refuse la société de marché libérale, la société de la G.P.A. (autorisée, soit dit en passant, en Russie) et la société de la charia. La préoccupation écologique constitue un troisième pilier, fondamental, de nos principes à côté des piliers d’identités (continentale, nationales, régionales) et social. Face à l’étalement urbain et à la destruction programmée des terres arables (il faut ensuite quarante ans – deux générations ! – pour qu’un sol naguère urbanisé retrouve sa fertilité première), les identitaires devraient au moins soutenir les valeureux opposants à l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes, au barrage de Sivens ou à l’O.L. Land (le stade de foot privatisé) érigé dans la banlieue lyonnaise ! Que ces combats soient menés par des écolo-gauchistes importent peu parce qu’il vaut mieux voisiner avec un écolo ultra, voire un fan de Julien Coupat, qu’avec un lecteur sarkocufié du Figaro et de Valeurs actuelles !

    Si l’on considère que l’Europe est la patrie de nos nations et de nos régions, notre réflexion militante se doit d’adopter le triptyque révolutionnaire exposé dans les années 1970 par Georges Gondinet et Daniel Cologne et en 1991 par Jacques Marlaud. La civilisation européenne constitue, avant d’être un évident dessein géopolitique, une patrie spirituelle albo-ethnique. Ses nations forment souvent des patries politico-historiques tandis que les régions demeurent bon gré mal gré des patries charnelles. L’indispensable conciliation entre l’authentique diversité ethno-culturelle et l’urgente unité géopolitique et économique passe par un dépassement salvateur : l’Empire.

    Unité décisive de destin collectif, l’Empire est mal vu et mal compris en France. Il est desservi par le verbe « empirer » qui signifie « s’aggraver », « devenir pire ». Il se confond en histoire avec les deux expériences bonapartistes – napoléoniennes au XIXe siècle. Maints Français ignorent en outre que leur pays est intrinsèquement un empire qui a mal tourné alors que l’idée impériale hante sa psyché collective. Dans le présent contexte anxiogène, « seuls les nationalistes peuvent faire l’Europe (6) » affirmait en 1973 Adriano Romualdi. Tous les nationalismes régionaux et étatiques doivent par conséquent entreprendre leur mue. « Le seul moyen de résoudre l’épineuse question des ethnies, dont le réveil menace les nations d’éclatement, est d’ouvrir les nationalismes sur l’Europe, avertissait Daniel Cologne. D’une part, le nationalisme doit emprunter à la grande tradition politique de notre continent la notion d’État organique qui concilie l’unité nécessaire à toute société évoluée avec le respect, voire l’encouragement de sa diversité naturelle. Conçu de façon organique, le nationalisme s’accommode d’une certaine autonomie des régions. D’autre part, si la nation, loin de s’ériger en un absolu, se considère seulement comme une composante autonome du grand ensemble organique européen, les régions et les ethnies n’auront aucune peine à se considérer comme les incarnations nécessaires du principe de diversité au sein de la grande unité nationale. Dans une Europe organique des nations organiques, être breton ou français, basque ou espagnol, flamand ou belge, jurassien ou suisse ne sont que des manières parmi d’autres d’être européen (7). » Par le biais du principe ordonnateur de la subsidiarité, l’Empire fédère autour des domaines diplomatique, stratégique et militaire la formidable variété nationale et vernaculaire de notre patrie continentale civilisationnelle.

    Par-delà cette référence ternaire subsumée par l’idée organique d’Empire interviennent d’autres termes qui consolident notre langage militant. Le premier est celui de communauté. Évoquer maintenant en public ce mot équivaut quasiment à voir surgir cette hantise des Occidentaux indifférenciés, ce nouveau diable des plateaux télé, le communautarisme ! Et pourtant quel beau mot ! Suivant son échelle d’implication, la communauté coïncide à des espaces de vie. À l’Union (pseudo-)européenne, il aurait été judicieux de conserver la « Communauté européenne » comme avant 1992 et le détestable traité de Maastricht. Les nations d’Europe resteraient des communautés politiques – historiques de destin qui parviendraient à s’enchâsser les unes dans les autres dans un nouvel agencement continental. Mais les régions sont elles aussi des communautés vernaculaires de destin infra-nationales.

    Les cadres régionaux sont des communautés de proximité comme le sont d’ailleurs les entreprises, ces communautés productives de destin. L’entreprise moderne pratique ce nouvel esclavage : le salariat. Or le justicialisme – solidarisme européen combat cette aliénation sociale. À l’entreprise libérale ou étatisée, promouvons des « communautés de travail » comme le fit déjà le candidat bien trop méconnu à la présidentielle de 1965, Marcel Barbu dont le directeur de campagne travaillait à Rivarol (8). Que serait aujourd’hui une telle « communauté de travail » ? Une unité de production dirigée par ceux qui y travaillent. Un bon début existe avec la S.C.O.P. (société coopérative et participative). Alors que la moitié du CAC 40 se soumet aux multinationales, une société coopérative préserve l’indépendance économique, perturbe les mécanismes aveugles du libéralisme et se détourne de la mondialisation libérale. La « communauté de travail » idéale rassemblerait les travaux de Hyacinthe Dubreuil, l’ergonisme de Jacob Sher, l’association Travail – Capital du gaullisme d’opposition (1947 – 1953), la participation chère aux gaullistes de gauche, la cogestion promue par l’ordo-libéralisme allemand, le corporatisme social-chrétien, voire l’autogestion de Proudhon reprise par les anarchistes.

    On a compris que les communautés territoriales et professionnelles agiraient en véritables Rei Publicae. Le Système liberticide et albo-génocidaire répète jusqu’à la nausée ses valeurs républicaines alors que sa République n’est qu’une supplétive zélée des forces de l’Or et de l’Argent. Son unicité fallacieuse doit s’effacer devant des unités républicaines partielles constituées de communautés de travail (ou de production) et de vie identitaires.

    L’identité est l’autre maître-mot de notre registre. Le mettre au pluriel serait plus satisfaisant parce qu’elles englobent les cultures, les ethnies, les langues, les métiers, les histoires, les croyances… Toutes nos identités sont la sève qui part des racines des patries charnelles pour aller au feuillage de la patrie civilisationnelle en passant par le tronc des patries historiques et l’écorce des communautés professionnelles. Sauvegarder les identités signifie de préserver le peuple.

    Le peuple est une notion centrale. Sans lui, vaines seraient toutes nos actions. Il importe de l’appréhender dans toutes ses acceptions. Le peuple est aussi bien l’ensemble de personnes d’origine ethnique commune que l’immense majorité de la société composée de producteurs et de consommateurs ainsi que les détenteurs de la souveraineté politique moderne qui indispose tant les oligarchies transnationales. Longtemps s’affrontèrent les tenants de l’ethnos, du demos et du laos. En 2014, il apparaît crucial de rassembler ces trois définitions et de s’élever contre la confiscation de la légitimité, les ravages d’une immigration de peuplement métisseuse et les oukases de la ploutocratie bancaire mondialisée.

    Il y a quarante-cinq ans, l’extrême gauche souhaitait représenter le peuple avec l’insuccès que l’on sait. À l’ère du Village cosmopolite interconnecté global, il faut partout en Europe et sur d’autres continents susciter la révolution des peuples ! Le soulèvement radical des communautés, des nations, des patries vernaculaires, des identités et des civilisations commence toujours par un bon vocabulaire !

    Je vous remercie.

    Georges Feltin-Tracol

    Notes

    1 : Samuel P. Huntington, « The Clash of Civilizations ? », dans Foreign Affairs, été 1993.

    2 : Francis Fukuyama, The End of History and the Last Man. Free Press, 1992, traduction française : La Fin de l’histoire et le Dernier Homme, Flammarion, coll. « Histoire », 1992.

    3 : Samuel P. Huntington, The Clash of Civilizations and the Remaking of World Order, Simon & Schuster, 1996, traduction française  incomplète : Le Choc des Civilisations, Éditions Odile Jacob, 1997.

    4 : Jules Monnerot, « Désintox ». Au secours de la France décérébrée, Albatros, 1987, p. 63, souligné par l’auteur.

    5 : Oswald Spengler, Der Untergang des Abendlandes. Umrisse einer Morphologie der Weltgeschichte, Verlag C.H. Beck, 1918 et 1922, traduction française : Le déclin de l’Occident, 2 volumes, Gallimard, coll. «  Bibliothèque des Idées », 1948.

    6 : Adriano Romualdi, La droite et la crise du nationalisme, « Totalité », 1982, p. 23.

    7 : Daniel Cologne, Éléments pour un nouveau nationalisme, Cercle Culture et Liberté. Pour une Europe libre et unie, 1977, p. 18.

    8 : Information donnée par Emmanuel Ratier au cours du n° 84 de l’émission de Web-radio « Méridien Zéro » du 20 février 2012 consacrée à une « Histoire non conformiste de l’élection présidentielle ».

    http://www.europemaxima.com/?p=4014

  • La mission de Sixte de Bourbon-Parme

    Recension : Tamara GRIESSER-PECAR, Die Mis­sion Sixtus : Österreichs Frie­dens­versuch im Ersten Welt­krieg, Amalthea, Wien / München, 1988, 414 p.

    La guerre sévissait depuis deux ans déjà, lorsque l'Empereur et l'Impératrice d'Autriche-Hongrie déci­dèrent, en décembre 1916, de me­ner des négociations secrètes extraordinaires. Par l'intermédiaire des Princes Sixte etXavier de Bourbon-Parme, de leur propre chef et sans en avertir l'allié allemand, l'Empereur Charles et l'Impératrice Zita, prirent des contacts secrets avec les autorités politiques des puis­sances de l'Entente, la France et la Grande-Bretagne. Leur objectif : obtenir la paix, tant qu'il y avait encore quelque chose à sauver. En effet, le couple im­périal était parfaitement conscient de la volonté française d'éclater l'ensemble austro-hongrois en plusieurs pe­tites nations aisément contrôla­bles, qu'on pourrait té­léguider depuis Paris contre Berlin et Vienne. Par la paix anticipée qu'ils espéraient obtenir, ils voulaient éviter un sort funeste à l'œuvre politique plurisécu­laire de leurs ancêtres. Les tractations auront quelque chose de tragique : les intermédiaires de l'Em­pereur étaient tous deux officiers de l'armée bel­ge, en guerre contre l'Allemagne, alliée de l'Autriche-Hongrie. Les négociations, menées sans que Berlin le sache, fini­ront par être con­nues de tous et faire passer Charles de Habs­bourg pour un traître qui complotait dans le dos de l'Allemagne.

    Les Allemands d'Autriche lui en voudront cruellement. Mais l'intérêt du livre de Ta­mara Griesser-Pecar ne réside pas seule­ment dans la narration détaillée de cette affaire, mais aussi dans l'analyse du rôle de l'Italie dans l'échec des négocia­tions secrètes. En plein mi­lieu de celles-ci, l'Italie es­suie un cuisant échec militaire, ce qui renforce la po­sition de l'Au­triche et déforce celle des Alliés, qui avaient es­compté des victoires italiennes pour faire fléchir Vienne. Les Autrichiens avaient le dessus et pouvaient demander des conditions de paix ho­no­­rables, d'autant plus que des unités françaises s'étaient mutinées après les offensives inutiles de George Nivelle. Des grèves secouent la Fran­ce et les ouvrières descendent dans les rues en criant : « Nous voulons nos maris ! ».

    Deux projets différents ani­maient alors la diplomatie française : 1) celui de main­tenir l'Autriche-Hon­grie telle quelle, afin de faire contre-poids à la Prusse et de ne pas créer le chaos en Europe Centrale et 2) celui d'éliminer l'Empire des Habsbourgs, de le morceler et d'instaurer des régimes d'idéologie républicaine et illuministe en Europe Centrale. La deuxième solution finira par l'emporter. Dans ce contexte, le Prince Sixte arrive à Paris et ex­plique que l'Italie est prête à faire une paix séparée à condition que l'Autriche cède le Trentin italophone (pas le Sud-Tyrol germanophone), avec pour com­pensation, l'en­semble ou une partie de la Somalie. La France et l'Angleterre ont donc intérêt, elles aussi, à signer une paix séparée avec l'Autriche. Lloyd George était favorable au projet, car les évé­nements de Russie laissaient entrevoir la ces­sation des hostili­tés entre Russes et Allemands, le Prince Lwow ayant contacté les autorités du Reich en ce sens. De ce fait, l'Italie et la Russie risquaient de quitter l'Entente et de laisser Français et Britanniques seuls face aux armées allemandes et austro-hongroises. Poincaré et Ribot rétorquent que ni les intérêts serbes ni les intérêts roumains ni la question polonaise n'ont été pris en compte par le vieux monarque au­trichien. Les Fran­çais se montrent très réticents à l'endroit du projet vi­sant à coupler la ré­trocession du Trentin à l'Italie et la récupération de l'Alsace-Lorraine. En effet, si l'Italie reçoit le Trentin, elle cessera de se battre et l'Entente aurait perdu un allié qui mobilisait plusieurs divisions austro-hongroises qui auraient pu intervenir sur le front russe ou sur le front de Salonique et barrer le route aux alliés franco-britanniques.

    Les Alliés occidentaux se rendaient comp­te que l'Italie jouait son jeu seule mais que son poids militaire était tel qu'ils ne pouvaient la négliger. Le 3 juin 1917 : coup de théâtre ! L'Italie proclame qu'elle entend exer­cer un protectorat sur l'Albanie, coupant de la sorte l'accès de la Serbie à la mer. Le petit royaume slave des Balkans ipso facto ne pouvait plus acquérir un ac­cès à l'Adriatique qu'en grignotant le territoire aus­tro-hongrois, situation inacceptable pour Vienne. Au même moment, les Slovènes, Croates et Serbes à l'intérieur de la monarchie souhaitent constituer un royaume constitutionnel séparé selon le modèle hon­grois.

    Les contra­dictions internes de la monarchie la fragilise et la ténacité du Ministre italien Sonnino, im­posant aux Alliés ses vues sur l'Albanie malgré les revers militaires italiens, négociant avec les Anglais et les Français un partage des Iles de l'Égée et du terri­toire turc, fait échouer les pourparlers entre Sixte et les autorités anglaises et françaises. De plus, les pro­positions de paix italiennes ne venaient ni de Sonnino ni du Roi d'Italie, ce qui réduisait considérablement les chances de l'Empereur autrichien et des frères de Bourbon-Parme. Le livre de Tamara Gries­ser-Pecar est une enquête très serrée qui nous permet de saisir la vision européenne et pa­cifiste, éloignée des engoue­ments idéologiques générateurs de carnages abomi­nables, des Bour­bon-Parme et des Habsbourgs. Al­bert Ier y avait pleinement souscrit. La réussite de leurs projets aurait évité la Seconde Guerre mondiale et la partition de l'Europe à Yalta

    ► Robert Steuckers, Orientations n°11, 1989. [version légèrement remaniée]

    http://www.archiveseroe.eu/histoire-c18369981/7

  • Malgré les soutiens de Hollande, Valls et Sarkozy, la pièce de théâtre de BHL est un échec

    BHL-hotel-europe-hollande

    La nouvelle pièce de théâtre de Bernard-Henri Lévy, Hôtel Europe, adaptation du livre éponyme, bénéficiait dès le départ du soutien de tous les réseaux de la BHL connection. François Hollande, Manuel Valls et Nicolas Sarkozy ont notamment payé de leur personne en s’affichant aux premières représentations. Et les médias du système en rajoutaient en affirmant, comme Le Point, qu’Hôtel Europe affichait complet.

    Photo Yann Revol

    Pourtant, lancée le 11 septembre et initialement programmée jusqu’au 3 janvier 2015, la pièce Hôtel Europe cessera les représentations le 16 novembre, faute de public. De profundis.

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