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culture et histoire - Page 1468

  • Modernité et communication de masse : contradictions, dangers et illusions

    Traits caractéristiques de la modernité : exigence de communication, nécessité d'une transparence, demande d'un flux libre d'informations. A contrario, la post-modernité se caractérise, entre moultes autres choses, par une critique à l'encontre de cette communication de masse, par des doutes à l'endroit de la transparence, par l'inquiétude face au débordement du flux informatif. Cette communication qui, depuis le XVIIIe siècle était considérée comme un facteur de libération, nous apparaît désormais comme un instrument de domination. D'énormes contradictions sociales et culturelles naissent de l'information de masse et surtout depuis l'application des techniques modernes de communication. La télévision s'assied sur le banc des accusés. Pourtant, jamais inculpé ne fût aussi sûr de se tirer si facilement d'affaire : l'Occident accuse la communication de masse tout en regardant un vidéo-clip. Narcisse est de retour mais cette fois il ne s'agit pas d'un jeune homme qui admire son reflet dans les eaux calmes d'un étang mais d'une masse informe qui égratigne l'écran de ses téléviseurs en essayant d'atteindre ce qui, pour elle, a déjà cessé d'exister : la réalité, l'histoire, la vie.

    La société de l'information

    Ce nouveau monde qui naît avec l'explosion des techniques de communication et la culture de masse a reçu le nom de “société de l'information”. Les termes contemporains “société post-industrielle”, “société post-moderne” ou “Nouvelle Société de Consommation” (Faye) sont peu à peu utilisés de­puis la moitié des années 70 pour désigner les so­ciétés occidentales en tant que réseaux de flux infor­matifs : Daniel Bell, Alvin Toffler, S. Nora et Alain Minc, James Martin, J. McHale, Yoneji Misuda ou J. Naisbitt, entre autres, ont popularisé le concept.

    En Espagne, l'un des premiers à introduire ce terme dans le monde universitaire en tant qu'objet d'étude — et à éditer des travaux à ce sujet — a été Francisco Javier Bernal. Salvador Giner accorde une certaine importance à ce terme ; pour lui, « le faisceau de phénomènes évoqué par l'expression “société de l'information” est d'une telle ampleur qu'il faut se demander s'il n'est pas en train de se forger ce que, traditionnellement, on avait coutume d'appeler un “mode de production”, un mode de domination et un ordre culturel distincts, sous ce nom, sous un terme proche ou sous un synonyme ». Pour Giner, ce « faisceau de phénomènes » serait constitué de la télé­matique, de l'informatique, de la microélectronique, de la robotique, de l'intelligence artificielle, etc. Il ne cite pas d'éléments aussi décisifs que la multiplica­tion de l'offre propre à la télévision (chaînes privées, antenne parabolique) ou la publicité. De toute façon, pour Giner, l'expression “société de l'information” n'est qu'« une candidate de plus, parmi d'autres ex­pressions également attirantes, à la définition de ce qui est essentiel aux étapes futures de la modernité ».

    Bien que l'on puisse douter que la modernité (en tant que telle) soit encore à même de nous offrir des « phases futures », l'importance croissante de l'information au sein des structures socio-économiques de l'Occident est indiscutable. D'après Román Gubern, au cours des 30 dernières années de ce siècle, le secteur électronico-informatique a dépassé celui des industries lourdes comme la pétrochimie et l'auto­mobile. Pour l'an 2000, on estime que, dans les pays développés, 90% de la population active tra­vaillera dans le secteur des services et la moitié de ces personnes dans des systèmes d'information ou des réseaux informatisés. Cette conséquence prati­que de l'extension de l'univers médiatique se conju­gue, d'autre part, avec une légitimation sociale (et même psychologique) de son utilisation : dans une société atomisée et individualiste, les média joue­raient le rôle (et c'est ce qu'ils font effectivement) de “thérapeutes sociaux” de l'individu, en essayant de compenser la carence d'une communauté réelle.

    Universalisation et résistance

    Comme l'écrivent Faye et Rizzi, « les média sont l'une des causes majeures de l'isolement individuel actuel mais, en même temps, leur fonction et leur prétention sont d'y apporter un remède. Facteurs d'atomisation — une atomisation dont la société de consommation a besoin pour survivre — ils se présen­tent pourtant à nous comme des antidotes contre l'atomisation » (« Vers la médiatisation totale », in : Nouvelle École n°39, 1982). Nous pourrions dire que la “société de l'information” est celle dans laquelle la société est remplacée par l'information ou, plus précisément, celle dans laquelle la transmission technique de l'information joue le rôle que la société elle-même déte­nait auparavant : définition d'objectifs, normation de règles de conduite, imposition culturelle de modèles,  de formes de production économique, d'échelles de valeurs morales…

    Les conséquences sont évidentes : la société dispa­raît, s'évanouit dans le réseau technique de la communication de masse. Les cosmovisions particuliè­res et enracinées sont remplacées par une culture de masse homogène qui met fin aux cultures tradition­nelles. La communication se met ainsi au service du néo-colonialisme post-industriel et de la cosmopolis marchande. Comme l'affirme le publicitaire David Victoroff, « grâce aux images de marque, la publicité tend à construire de nouvelles valeurs symboliques, communes à la totalité du groupe social, et ce, sur les ruines des systèmes de valeurs et de symboles caractéristiques sous-groupes particuliers ». Un nouvel imaginaire collectif, universaliste, s'installe dans nos sociétés à l’abri de ce que Abraham Moles a appelé « l'opulence communicationnelle ». Mais ce­la ne se passe pas sans résistances. Un fort courant critique verra dans la communication de masse — et concrètement dans la communication technique — un abîme insondable vers lequel notre société se pré­cipite inéluctablement.

    Le regard de la Méduse

    Évidemment, les critiques qui s'adressent à la communication de prirent leur envol hier, avant l'usage généralisé des moyens technologiques les plus sophistiqués. Dans les années 40 et 50, une certaine critique que, par convention, nous appele­rons “de gauche”, a accusé la publicité et la propa­gande d'asservir les masses : Max Horkheimer, Theodor W. Adorno, Dwight MacDonald, Irving Howe ou Leo Lowenthal, voyaient, dans la culture de masse, un fauteur de création d'une “fausse conscience”, dans les classes populaires, qui annulait leur puissance révolutionnaire et les intégrait dans un système d'exploitation ; au fond, ils ne critiquaient pas la communication de masse mais son utilisation sociale.

    La perspective de droite, qui leur était antérieure, était différente, elle ne critiquait pas tant la commu­nication que son caractère massif et technique, comme on peut le voir chez Ortega y Gasset ou Carl Schmitt. Entre les années 60 et 70 et malgré ces criti­ques, la communication de masse s'est développée à une vitesse incroyable et elle ne manqua pas de pro­tecteurs pour la légitimer : tantôt on alléguait la pos­sibilité d'une rétroaction et d'une rétro-alimentation (feed-back) qui affirmait que le récepteur pouvait contester le message en agissant selon son libre ar­bitre ; tantôt on disait que, grâce à la communication cation de masse, l'homme moderne pouvait se détacher de la terre à laquelle il était lié et entrer dans une société où il manifesterait librement ses goûts culturels. Ce fut là la position défendue notamment par Edward Shils, Herbert Gans, Raymond Williams, Hans M. Enzensberger ou même Walter Benjamin. Parallèle­ment, et à partir du développement à grande échelle de moyens audiovisuels, des auteurs apparaissaient qui se montraient ouvertement critiques envers la TV : Jerry Mander écrivait ses célèbres Quatre arguments pour éliminer la Télévision qui jouirent d'une influence notable. La télévision devenait le principal accusé. Il y a quelques années, David Mata identifiait l'effet paralysateur de la télé au regard terrifiant de la Méduse mythique.

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  • Vide du Politique/Politique du Vide/Révolution : Le retour du politique : du chaos à la révolution européenne.

    La société du vide que dépeignait Yves Barel, en 1984, est bien là. Elle est consécutive au triomphe de la consommation, à la prévalence de l’activité marchande et financière sur toutes les autres formes d’activités humaines. Corrélativement, elle a vidé le politique de sa substance. Cette mutation globale n’est ni un fait du hasard, ni une nécessité historique. Mais, elle est le résultat d’une stratégie de longue haleine inspirée par l’interprétation véhémente de la philosophie libérale (celle que redoutait et condamnait David Hume), et, plus précisément, par une extrapolation du « paradigme smithien » qui convient si bien au monde des affaires, lequel sait l’instrumentaliser avec le plus grand cynisme.

    En effet, il a été emprunté à Adam Smith deux idées qui fondent et légitiment l’argumentaire des hommes politiques occidentaux contemporains. Au-delà de leurs nuances partisanes, qu’elles soient de droite ou de gauche. La première, la plus connue, est que la généralisation de l’économie de marché et de l’échange, qui satisfait à la recherche du gain individuel, est la meilleure façon de développer « la richesse des nations ». La seconde est qu’il existe chez l’homme « un plaisir de sympathie réciproque » (in Théorie des sentiments moraux) tel que l’élévation du produit global, accouplée à l’expansion de la communication universelle, doit lui permettre de sortir de l’animosité latente de la sociabilité politique.

    Erreur

    L’homme mondialisé, sans appartenance identifiée, dépolitisé, sans préférences nationales ou culturelles, est ainsi devenu, en dépit de toutes les réalités qui en contredisent l’existence, l’icône de la pensée occidentale moderne. Au point que l’on voudrait enlever aux Européens leur droit à conserver leurs différences, et interdire qu’ils s’opposent, dès lors et à ce titre, au fait d’être remplacés sur leurs propres terres par des populations venues d’ailleurs.
    L’éviction du politique en Occident
    La fin du politique a été stratégiquement réfléchie au lendemain de la Grande guerre, dont il faut dire, mais la seconde guerre mondiale aussi, combien elle a illustré les effets néfastes et catastrophiques de la part d’irrationnel qui peut habiter l’animal politique qu’est l’homme. Plutôt que dans l’internationalisme du président américain Wilson, c’est dans la conception d’un monde unifié (One World) qui occupe l’esprit de Franklin D. Roosevelt, laquelle lui est inspirée par son conseiller le géographe américain Isahïa Bowman, qu’il faut situer cette réflexion. Ce dernier cultivait l’idée d’un fédéralisme mondial, réalisable le jour où les Etats-Unis parviendraient à débarrasser le monde de ce qu’il jugeait être « la force la plus rétrograde du Vingtième siècle », à savoir l’Etat-nation. Dans les faits, il aura fallu attendre la fin de la Guerre froide, et que les Etats-Unis aient vaincu le communisme après avoir écrasé le nazisme, pour que l’économicisation des sociétés et des relations internationales devienne effective.

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  • Capitalisme (3/6) : Ricardo et Malthus, vous avez dit liberté ?

    David Ricardo et Thomas Malthus sont considérés comme des acteurs fondamentaux de la construction de la société britannique du XIXe siècle. Depuis quarante ans, l’économie se mondialise selon la vision de David Ricardo de “l’avantage comparatif” et en conditionne notre adhésion à la logique du marché. Les bouleversements sociaux et politiques engendrés par ce tsunami économique ont été présentés comme le prix à payer pour améliorer le sort de tous. Mais qu’est-ce que David Ricardo a réellement écrit ? Est-ce que l’histoire des quatre dernières décennies s’explique avec des théories du XIXe siècle ou par les intérêts politiques et économiques de nos contemporains ?

    Réalisé par Ilan Ziv (France – 2014)

    http://fortune.fdesouche.com/

  • PARIS] Vendredi 07 novembre 2014 : PIERRE DE LA COSTE AU CERCLE DE FLORE

    A Paris, vendredi 07 NOVEMBRE à 20h00, ne manquez pas le nouveau Cercle de Flore. Pierre de la Coste, écrivain, viendra présenter son dernier ouvrage "L’Apocalypse du progrès " VENEZ NOMBREUX À CETTE SOIRÉE EXCEPTIONNELLE ! Vendredi 07 novembre 2014, à 20h00 10 rue Croix des Petits Champs 75001 Paris, Escalier A, 2 ème étage M° Palais-Royal PAF : 3€ , gratuité pour les adhérents. Renseignement : (...)

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  • Hommage à Jean Thiriart (1922-1992)

    Le 23 novembre 1992, Jean Thiriart, fondateur et animateur du mouvement politique Jeune Europe dans les années 60, s'est éteint brusquement, fauché en pleine santé et en pleine activité.

    Après Jean van der Taelen, qui l'avait appris de leur notaire commun, Maître Jean-Pierre de Clippele, je fus le premier à l'apprendre. Jean m'a appelé tout de suite, vers 20 heures 30, alors que je travaillais à classer des vieux documents dans ma cave. Atterré, j'ai gravi les escaliers quatre à quatre : l'invincible, le sportif, l'incarnation de l'énergie, l'empereur romain, le persifleur, le vieux mécréant, venait d'être emporté par la “Grande Faucheuse”. On s'attendait à la disparition de beaucoup d'autres, plus souffrants, moins alertes, plus âgés, pas à la sienne. Aussitôt, le téléphone a fonctionné et j'ai entendu des voix consternées, des larmes, de Paris à Moscou en passant par Milan ou Marseille.

    Par quelques idées bien articulées, Jean Thiriart avait donné une impulsion nouvelle à cette sphère que l'on qualifie de “nationale-révolutionnaire” et qui échappe à toutes les classifications simplistes, tant ses préoccupations, ses variantes sont vastes et différentes. Thiriart avait aussi énoncé des principes d'action qui gardent toute leur validité, non seulement pour ce microcosme NR, mais aussi pour tout praticien de la politique, quelle que soit l'orientation idéologique de son engagement.

    Né en 1956, je n'ai pas pu observer Jeune Europe en action, dans la foulée de la décolonisation, immédiatement avant mai 68. Ayant acquis mes premières convictions politiques vers 14 / 15 ans, c'est-à-dire en 1970-71, en constatant très tôt les turpitudes du régime, ses fermetures qui empêchent le citoyen normal, sans liens partisans, confessionnels ou associatifs, de participer activement à la vie de la cité, j'ai cultivé mes idées en dehors de toute organisation ou association jusqu'à l'âge de 24 ans, où j'ai découvert les activités de la “Nouvelle Droite”.

    Jeune Europe n'avait pas laissé de traces ni dans la société, noyée à l'époque dans la stupidité soixante-huitarde, “freudo-marxiste”, ni dans les sphères militantes qui, majoritairement gauchistes, faisaient dans l'exotisme angolais, bolivien ou vietnamien, sans plus se préoccuper des aliénations qui frappaient les peuples européens. A fortiori peu d'ouvrages faisait référence à l'action et aux écrits de Thiriart. Dans des torchons gauchistes, mal rédigés, vulgaires, bourrés de fautes de syntaxe et d'orthographe — comme il se doit en bonne logique égalitariste — son nom apparaissait quelque fois comme celui d'un “satan” et je n'y prêtais pas attention.

    Dans un ouvrage qui préfigurait les monomanies de nos cinq dernières années, Le racisme dans le monde de Pierre Paraf, publié avec l'appui de la LICRA, « la revue Jeune Europe de Bruxelles » était décrite comme « anti-américaine et anti-gaulliste », et, bien entendu, comme « raciste ». Après en avoir acquis une collection chez un bouquiniste, dix ou douze ans plus tard, j'ai au contraire pu constater qu'elle contenait deux articles de Thiriart vitupérant la nocivité pratique du racisme ou le décrivant comme le camouflage de problèmes affectifs, souvent d'origine sexuelle. Les milieux qui font profession d’“anti-racisme” m'apparaissent depuis ce jour comme des cénacles d'exaltés hystériques qui, à l'instar des illuminés “racistes”, ont besoin de boucs émissaires pour assouvir leur mal de vivre. Racismes et anti-racismes ne sont que des variantes d'une même maladie, d'un déséquilibre psychique remontant sans doute à la petite enfance. Thiriart en était convaincu, le répétait à qui voulait l'entendre et appelait cela sa « psycho-pathologie des groupuscules politiques ».

    C'est en découvrant un exemplaire de L'Europe, un empire de 400 millions d'hommes, sur l’étal d’un bouquiniste que j'ai appris qui était vraiment Jean Thiriart. La bonne tenue de ce livre, la clarté et la limpidité des arguments qu'il y développait, l’apport de cartes géopolitiques, m'ont tout de suite convaincu que Jean Thiriart n'était pas un agitateur exalté d'extrême-droite, comme tentaient de le faire accroire les foutriquets de la gauche post-soixante-huitarde, débraillés, mal dans leur peau, anti-politiques, dépourvus de tout sens historique, qui avaient alors pour lecture de base le très éphémère Hebdo 75, assorti de dessins de très mauvais goût, qui en disaient long sur la psycho-pathologie de leurs auteurs. Jean Thiriart n'apparaissait pas non plus comme un de ces polémistes de droite qui étalent, fort brillamment peut-être, leur rouspétance dans des feuilles populaires — et parfois populacières — sans jamais proposer rien de concret.

    C'est ainsi que j'ai appris que Jeune Europe avait existé. Au même moment, dans un cahier du très officiel CRISP (Centre de recherche et d'information socio-politiques), paraissait une histoire de l’“extrême-droite” belge sous la plume d’Étienne Verhoeyen. Et c'est ainsi que j'ai découvert le contexte, dans lequel on fourrait un peu arbitrairementJeune Europe. De tous les cénacles, groupuscules, partis ou associations qui avaient émaillé la chronique “droitiste” belge après 1945, incontestablement, Jeune Europe sortait du lot. Et pour les très jeunes gens que nous étions, vivant un âge d'or et d'abondance qui ne reviendra sans doute plus jamais, lecteurs des classiques latins, de La Rochefoucauld, de Nietzsche pour “embêter” les curés et les conformistes, de Marcuse — mai 68 oblige — des Lettres sur l’humanisme de Heidegger, parce qu'on nous les avait imposées, de Koestler, de Camus et d'Orwell, Jeune Europeapparaissait d'emblée comme un instrument possible du politique, mieux, comme quelque chose de naturel, de non-idéologique, de porteur d'histoire.

    Jeune Europe ne nous apparaissait certes pas comme une organisation de gauche car, dans ce cas, nous ne l'aurions pas aimée puisque la gauche, déjà, était la coqueluche des professeurs qui se piquaient d'intellectualisme et puisque ces professeurs nous énervaient, nous prenions évidemment un malin plaisir à les contrarier. Mais Jeune Europe contenait des idées universelles qui convenaient aux jeunes lecteurs de Koestler et de Camus que nous étions : Jeune Europeétait européenne et nous nous sentions tout naturellement “européens” ou “impériaux”, au-delà des frontières existantes ; Jeune Europe n'était pas nationaliste belge, ce qui nous plaisait car tout ce qui touchait à l’État belge, à ses hommes politiques, à ses institutions, nous apparaissait risible voire méprisable.

    Nous avons décidé de retrouver des anciens de Jeune Europe. C'est ainsi qu'après une longue enquête, nous sommes tombés sur Bernard Garcet, un ancien animateur de la section de Louvain de Jeune Europe. Garcet avait conservé quelques papiers de cette époque mouvementée où il était militant étudiant. Nos questions l’amusaient et aussitôt, il décida de reformer, chez lui avec la complicité de sa charmante épouse, une petite école des cadres dans le style deJeune Europe. Nous avons accepté et c'est ainsi que nous avons découvert successivement les thèses de Mosca et de Pareto (notamment la circulation des élites), les cours de Raymond Aron sur les grandes figures de la sociologie, La sociologie de la révolution de Jules Monnerot, que nous avons complétée de quelques thèses de Jean Baechler, le système de Pitirim Sorokin, L'ère des organisateurs de James Burnham, Le viol des foules par la propagande politiquede Serge Tchakhotine. C'est dans ce cercle privé et très restreint que j'ai rédigé tant bien que mal mes deux premières conférences : l'une sur la description du conservatisme dans Ideology and Utopia de Karl Mannheim et l'autre sur les thèses de Louis Rougier sur le Bas-Empire romain (que Garcet critiquait).

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