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culture et histoire - Page 1590

  • Les intellos les plus myopes du monde

    Le Figaro Magazine - 29/10/2005

    L’affaire Battisti, sur laquelle paraît un livre polémique, le confirme : nos penseurs continuent à voir le monde avec des oeillères.

    La scène se passe au Théâtre de l’OEuvre, le 26 juin 2004. Le cas Battisti défraye alors la chronique. Cet Italien est fixé en France depuis treize ans. S’étant fait un nom avec ses romans policiers, il est lié avec ce qu’il y a de plus à gauche dans le petit monde des lettres parisiennes. Mais il vient d’être rattrapé par son passé : ancien militant marxiste, il se trouve sous le coup d’une demande d’extradition que l’Italie a présentée pour deux crimes de sang qu’il a perpétrés au cours des années de plomb du terrorisme transalpin, et pour complicité dans deux autres assassinats. En 1981, alors qu’il était en prison, il avait été libéré par ses amis des PAC (Prolétaires armés pour le communisme). Sa cavale l’avait emmené jusqu’au Mexique, avant qu’il ne rejoigne la France où le pouvoir mitterrandien était réputé refuser les demandes d’extradition émanant de Rome. En 2004, son dossier ayant été relancé, l’écrivain - condamné à la prison à vie - est à nouveau réclamé par la justice de son pays. Du côté de Saint-Germain-des-Prés, c’est le branle-bas de combat : il faut sauver le soldat Battisti, généreux combattant anticapitaliste.

    Au Théâtre de l’OEuvre, donc, un lieu pourtant habitué à toutes sortes de spectacles, la comédie jouée ce soir de juin 2004 vaut le détour. Sous une photo géante du héros, et sous le slogan « Résistances », Fred Vargas, Philippe Sollers et Bernard-Henri Lévy se succèdent à la tribune afin de proclamer leur solidarité avec Cesare Battisti. Mais il n’y a pas que des écrivains : Guy Bedos, Lio, Jacques Higelin, Miou-Miou et Georges Moustaki sont là aussi. Tandis que les orateurs stigmatisent le système pénal italien et ses lois « scélérates », les chanteurs, dans une ambiance Sorbonne-Mai 68, entonnent le grand air de la « révolution permanente ».

    Guillaume Perrault, un journaliste du Figaro, raconte l’épisode dans un livre à paraître le 3 novembre (*). De son enquête, il ressort que ceux qui se sont engagés derrière Battisti l’ont fait parce qu’ils se sont « sentis mis en cause personnellement ». « La plupart de ses défenseurs, remarque l’auteur, étaient prêts à cautionner tous les mensonges pour préserver leurs croyances et leurs souvenirs. La génération Battisti existe : ses membres ont “fait Mai 68″, sont aujourd’hui aux commandes - dans les milieux intellectuels, les médias, la politique -, et ils ne voulaient pas savoir. »

    Ils ne voulaient pas savoir. Ces oeillères, le travail de Perrault apporte les preuves de leur existence. Et permet de ranger l’affaire Battisti parmi les grands moments où des intellectuels français, saisis par le prurit révolutionnaire, ont manifesté leur aveuglement face à la réalité. Depuis les années d’après-guerre où, comme un serpent fascine sa proie, la toute-puissance du Parti communiste fascinait la rive gauche, elle est longue la liste de ces manifestations d’hystérie collective où l’on a vu les mêmes méthodes se mettre en branle. Une campagne étant d’abord lancée afin de faire aboutir telle ou telle revendication, un bouc émissaire est désigné parmi les institutions : l’État, la police, la justice, l’armée, le patronat, etc. Pendant que les opposants éventuels - assimilés aux pires figures du mal, selon la technique de la reductio ad hitlerum analysée par Leo Strauss - sont délégitimés et voués à la vindicte générale, les défilés et les pétitions se succèdent. But : intimider l’opinion, impressionner le pouvoir. Quand l’autorité politique est forte, elle tient le coup. Quand elle est faible, elle cède devant l’assaut conjugué des marcheurs de la Bastille à la Nation et des pétitionnaires du VIe arrondissement.

    En vertu du « sinistrisme immanent » naguère analysé par Albert Thibaudet, ce mécanisme est typique du tropisme à gauche de la vie politique française. Le phénomène connaît cependant des variables, qui tiennent à l’idéologie dominante du moment. La fin des années 40 et les années 50, on l’a dit plus haut, sont sous influence communiste. C’est l’époque où Aragon chante les louanges de Staline et où Emmanuel Mounier affirme que « l’anticommunisme est la force de cristallisation nécessaire et suffisante d’une reprise du fascisme ». Pendant les années 60, l’heure est à l’anticolonialisme. « Abattre un Européen, écrit Jean-Paul Sartre, c’est faire d’une pierre deux coups, supprimer en même temps un oppresseur et un opprimé. »

    Viennent Mai 68 et ses suites immédiates, où l’on entend ou lit un nombre incalculable de sottises. « Le fascisme d’aujourd’hui ne signifie plus la prise du ministère de l’Intérieur par des groupes d’extrême droite, mais la prise de la France par le ministère de l’Intérieur » : cette phrase de 1971 est signée d’André Glucksmann (qui ne tient plus le même discours). Dans une atmosphère fiévreuse et enfumée par le cannabis, Saint-Germain-des-Prés guette la révolution qui viendra du tiers-monde. Quelques années après la Révolution culturelle (5 millions de morts), Sollers assure que la Chine de Mao représente « espoir et confirmation pour les révolutionnaires du monde entier ». En 1975, quand les Khmers rouges évacuent de force la population de Phnom Penh, Jean Lacouture y voit une « audacieuse transfusion de peuple ».

    Mais au début des années 80, les désillusions sont cruelles : le socialisme ayant partout apporté dictature ou pauvreté, les intellectuels de gauche se replient vers une sorte de protestation morale qui érige les droits de l’homme en critère absolu de jugement politique. C’est le temps de l’antiracisme triomphant, où il convient de s’afficher dans les cocktails en ayant épinglé sur son vêtement la petite main jaune des amis de Harlem Désir. « Tout ce qui est terroir, bourrées, binious, bref franchouillard ou cocardier, nous est étranger, voire odieux », clament Pierre Bergé, Georges-Marc Benamou et Bernard-Henri Lévy, dans le premier numéro de Globe, en 1985. Dix ans plus tard, le gouvernement  de Jacques Chirac tente de prendre des mesures - pourtant timides - destinées à juguler l’immigration illégale. En 1996, lors de l’évacuation des clandestins enfermés dans l’église Saint-Bernard, Léon Schwartzenberg soutient que « les camions stationnés devant l’église rappellent ceux qui partaient pour les camps de concentration ». C’est également à cette époque que Robert Badinter dénonce la « lepénisation des esprits », expression qui permet de diaboliser n’importe qui.

    Concernant les guerres qui déchirent le monde, que ce soit dans les Balkans, en Afrique ou en Orient, c’est encore au nom de la morale que certains déterminent leurs jugements. Reste à savoir si les droits de l’homme font une politique extérieure, et si l’antibushisme suffit à concevoir une géopolitique cohérente.

    Le multiculturalisme et le différentialisme post-soixante-huitards ont aussi conduit certains à nier qu’il pût exister un danger islamiste. « Ses positions méritent d’être débattues, explique en 2003 Michel Tubiana, le président de la Ligue des droits de l’homme, mais Tariq Ramadan avait tout à fait sa place au Forum social européen. » Le leader fondamentaliste et José Bové venaient de se donner l’accolade à Paris. L’« altermondialisme », nébuleuse apparue avec les années 2000, non contente d’ouvrir des passerelles avec l’islamisme, recycle les thèmes qui furent ceux, il y a trente ans, du gauchisme, du pacifisme, de l’écologisme ou du féminisme. « Un vrai Mai 68 à l’échelle mondiale », se réjouit Bernard Kouchner.

    En décembre 1995, la grande grève des cheminots illustrait le renouveau de l’extrême gauche. Les professionnels de la pétition ressortirent leur stylo : « Nous nous reconnaissons pleinement dans ce mouvement qui n’a rien d’une défense des intérêts particuliers. En se battant pour leurs droits sociaux, les grévistes se battent pour l’égalité des droits de toutes et de tous : femmes et hommes, jeunes et vieux, chômeurs et salariés, salariés du public et salariés du privé, immigrés et Français. » Parmi les signataires de ce texte, on relevait le nom de Pierre Bourdieu. Mort en 2002, ce sociologue atrabilaire, néo-théoricien de la lutte des classes, a laissé des disciples. A Paris, il est toujours des idéologues qui cherchent à plier la vie intellectuelle et politique à leurs désirs. Le combat pour la liberté de l’esprit n’est donc pas - et ne sera sans doute jamais - terminé.

    Jean Sévillia http://www.jeansevillia.com

    * Guillaume Perrault, Génération Battisti, Plon.

  • La gauche guidant le peuple

    Le Figaro Hors-Série, « 8 mai 1945, la victoire finale » - 01/05/2005

    Quand les communistes français profitent du rôle joué par l’URSS dans la victoire contre le nazisme pour développer un véritable terrorisme intellectuel.

    Le 6 juin 1944, les Anglo-américains débarquent en Normandie. Le 15 août, c’est en Provence que les Alliés prennent pied sur le continent. Le 25 août, Paris est libéré. Au même moment, sur le front Est, les troupes du Reich reculent. Le 1er août, alors que les Allemands commencent à évacuer Varsovie, l’armée secrète polonaise se soulève. Ce sont les SS qui sont chargés de réprimer l’insurrection. L’armée rouge n’est qu’à 20 km de la ville, mais elle ne bouge pas. Les plans de Staline sont formels : il faut laisser les nazis écraser les patriotes polonais, ce qui épargnera aux Soviétiques de le faire. Le 28 août, les derniers résistants se réfugient dans les égouts de Varsovie, où ils tiendront un mois encore. À Paris, à la mi-septembre, l’IFOP (institut de sondage fondé juste avant la guerre) reprend ses activités. Une de ses premières enquêtes, publiée dans le courant du mois, révèle que pour 61 % des Français, l’URSS est la puissance qui a le plus contribué à la défaite allemande, 29 % attribuant ce mérite aux États-Unis…

    Un an plus tard, en octobre 1945, lors des premières élections législatives d’après-guerre, le parti communiste remporte plus de 26 % des suffrages, devançant les démocrates-chrétiens du MRP et les socialistes de la SFIO. En 1946, ce score monte à 28 % des voix. De 1945 à 1947, les communistes siègent au gouvernement. Le PCF, auréolé de sa participation à la Résistance (« le parti des 75 000 fusillés », chiffre mythologique, supérieur au nombre total des fusillés sous l’Occupation), atteint alors son apogée. Son prestige s’augmente du crédit accordé à l’URSS, ce pays ami dont l’opinion pense qu’il a joué le plus grand rôle dans la défaite de Hitler.

    Un trou de mémoire collectif engloutit ce qui s’est passé quelques années auparavant. En août 1939, les communistes français ont approuvé le pacte germano-soviétique, et pendant que Maurice Thorez, le secrétaire général du PCF, désertait son régiment pour rejoindre l’URSS, le gouvernement Daladier a interdit le Parti et l’Humanité. Six jours après l’entrée des Allemands dans Paris, les communistes ont sollicité l’autorisation de faire reparaître leur quotidien auprès de la Propagandastaffel. C’est en 1941 seulement, quand Hitler a attaqué l’URSS, qu’ils sont entrés dans la Résistance. À la Libération, qui oserait rappeler ces faits ? Thorez a été amnistié, l’entente Hitler-Staline est occultée, et les 4 500 officiers polonais dont les dépouilles ont été exhumées par les Russes à Katyn, selon la version officielle, ont été tués par les nazis.

    Tragique ambiguïté de 1945. La victoire sur l’Allemagne nationale-socialiste, victoire indispensable, victoire vitale, a été remportée grâce au concours de l’Union soviétique. Stratégiquement, il n’existait pas d’autre solution. Mais voilà l’URSS rangée dans le camp de la liberté, et le silence de se faire sur la nature totalitaire de son régime. Comparer le nazisme et le communisme est interdit : s’y risquer, c’est être suspecté de sympathie rétrospective pour Hitler.

    Le résistant Jean Paulhan est un des premiers à en faire l’expérience. Membre du Conseil national des écrivains, il en démissionne, effrayé par la tournure prise par l’épuration. Dès février 1945, le journal communiste Le patriote lance l’accusation : « Monsieur Jean Paulhan, trahissant les Lettres françaises qu’il avait servies durant l’occupation nazie, se met au service de la pensée fascisante. »

    « L’antifascisme : avec ce mot, tout est dit de ce qui va faire le rayonnement du communisme dans l’après-guerre », écrira François Furet dans Le passé d’une illusion. La technique, pour autant, date de l’avant-guerre. Dans les années 30, l’anticléricalisme étant passé de mode, l’antifascisme est le creuset de toutes les gauches. Il sert de dénominateur commun à l’alliance ébauchée, le 12 février 1934, lors de la première manifestation réunissant communistes et socialistes, alliance concrétisée, en juillet 1934, par la signature d’un pacte d’unité d’action entre le parti communiste et la SFIO. C’est aussi l’antifascisme qui prépare la coalition formée entre communistes, socialistes et radicaux, un an plus tard, en vue des élections de 1936 qui donneront la victoire au Front populaire.

    Pour les communistes, ces retrouvailles avec les socialistes obéissent à un choix tactique opéré à Moscou. Après l’écrasement des communistes allemands par les nazis, échec d’une stratégie qui consistait, pour Staline, à laisser Hitler démolir la République de Weimar dans l’espoir que les communistes ramassent le pouvoir, le Kremlin, abandonnant la ligne « classe contre classe », donne consigne aux partis affiliés à la IIIe Internationale de s’allier aux socialistes, afin de former, au nom de la défense de la paix, un front commun contre le fascisme. À Paris, Willi Münzenberg, un agent du Komintern, chef d’orchestre de la propagande pour l’Europe de l’Ouest et l’Allemagne, met cette tactique en oeuvre, pendant qu’Eugen Fried, un Tchèque qui est le véritable chef clandestin du PCF, veille à son application. Il s’agit de faire passer la cause de la paix par la défense de l’URSS, donc du communisme : être pour la paix, c’est être contre Hitler ; être contre Hitler, c’est être pour Staline ; a contrario, être contre Staline, c’est donc être pour Hitler.

    Après-guerre, les communistes resservent cette thématique antifasciste. Le communisme incarne le bien absolu, et le nazisme le mal absolu. À gauche, ceux qui veulent servir la « classe ouvrière » doivent suivre les communistes (le Bien). A droite, l’hostilité à l’encontre du Bien (le communisme) trahit une connivence implicite avec le Mal (le nazisme). La droite libérale et la droite nationale sont complices dans l’anticommunisme ; la droite nationale est en réalité fasciste ; or le paradigme du fascisme est le nazisme. Donc un libéral peut glisser vers le fascisme, car l’anticommunisme conduit au nazisme.

    Immense sophisme, mais d’une puissance d’attraction considérable : qui ne serait pas révulsé par Hitler ? Afin de donner consistance au danger fasciste, il faut donc inventer des fascistes. De Gaulle fonde le Rassemblement du peuple français ? C’est un fasciste. Certains prétendent que l’URSS abrite des camps de concentration ? Ce sont des fascistes. Raymond Aron dénonce le communisme international ? C’est un fasciste.

    Les accords de Yalta, en 1945, ont prévu en Europe de l’Est des élections libres qui n’auront  jamais lieu : la nuit du stalinisme tombe sur les démocraties populaires. « De Stettin, dans la Baltique, à Trieste, dans l’Adriatique, un rideau de fer est descendu à travers le continent », constate Churchill le 5 mars 1946. La guerre froide commence, mais la propagande communiste invente un ennemi fictif : l’impérialisme américain. Et ceux qui se hasardent à mettre en garde contre l’adversaire réel tombent sous le coup de l’accusation suprême, colportée non seulement par les communistes mais par leurs compagnons de route : « L’anticommunisme est la force de cristallisation nécessaire et suffisante d’une reprise du fascisme », affirme Emmanuel Mounier en 1946.

    Le terrorisme intellectuel culmine en 1949, lors du procès Kravchenko. Dans son livre J’ai choisi la liberté, ce citoyen soviétique, réfugié politique aux États-Unis, a exposé la nature totalitaire du régime soviétique. À Paris, un procès l’oppose aux dirigeants des Lettres françaises, hebdomadaire communiste qui l’accuse d’être un faussaire. Kravchenko produit des témoins qui sont tous des rescapés des camps soviétiques, et parfois, comme Marguerite Buber-Neumann, doublement rescapés, puisque cette dernière est passée directement du goulag à Ravensbrück, livrée par Staline à Hitler après le pacte germano-soviétique. Devant le récit de leurs souffrances, l’avocat des Lettres françaises n’a qu’un commentaire : « La propagande nazie continue ». « Un anticommuniste est un chien », s’écriera encore Jean-Paul Sartre en 1961.

    Pour que la vérité sur le système soviétique se fasse jour, il faudra attendre longtemps encore. Mais d’ailleurs, a-t-elle jamais été vraiment faite ?

    Jean Sévillia http://www.jeansevillia.com/

  • La grande manip antifasciste de Münzenberg

    Willi Münzenberg, né en 1889, milita dans sa jeunesse au sein du vieux parti social-démocrate. En contact avec Lénine et les bolcheviks à Zurich dès 1916, il se ralliera en 1918 au mouvement que l'on appelle alors spartakiste.

    En 1920 il représente les jeunesses internationales au Deuxième Congrès de l'IC.

    En 1921, alors âgé de 32 ans, il se rend à Moscou. (1)

    Dès 1922, lors du Quatrième congrès de l'IC il est en mesure de quantifier à hauteur de 40 millions les “êtres humains exposés directement” et de 3 millions de morts les conséquences de la famine en URSS. Le nombre réel de décès semble plus proche de 5 millions. Mais son rôle de propagandiste habile et acharné consistera à s'impliquer dans une “commission internationale de secours aux affamés”, dissimulant les responsabilités et entravant la mise en cause du système affameur.

    À partir de 1924 et jusqu'en 1933, de retour en Allemagne, il siège au Reichstag élu sur les listes du KPD, parti communiste allemand.

    Lorsque le brillant essayiste Philippe Muray le décrit comme un “compagnon de route du bolchevisme”, et le plus talentueux de l'espèce, une telle litote introduit donc un grave contresens. Simple et naïf “compagnon de route” ? Non : agent du Komintern stalinien et du NKVD.

    Plus réaliste, Stephen Koch souligne au contraire (2) que Münzenberg met tout simplement en œuvre les directives de Staline : “Son objectif était de susciter chez les Occidentaux non communistes et bien pensants le préjugé politique qui allait dominer toute l’époque : la conviction que toute opinion favorable à la politique étrangère de l’union soviétique était fondée sur les principes de l’honnêteté la plus élémentaire.”

    Créateur de multiples organisations, comme la “ligue contre l'Impérialisme” il apparaît dès 1926 comme l'inspirateur de la fameuse campagne en faveur de Sacco et Vanzetti. Mais divers témoignages permettent de le situer, comme apparatchik stalinien, au centre de la manipulation d'ensemble.

    L'écrivain alors communiste Manès Sperber qui collabora avec lui de 1927 à 1937 décrit de la sorte son rôle : “Münzenberg poussait des écrivains, des philosophes, des artistes de tout genre à témoigner, par leur signature, qu'ils se plaçaient au premier rang de combattants radicaux […] constituant ainsi des caravanes d'intellectuels qui n'attendaient qu'un signe de lui pour se mettre en route; il choisissait aussi la direction.” (3)

     

     

    Comme on ne prête qu'aux riches on lui a aussi attribué l'inspiration de l'école de Francfort, le recrutement de Kim Philby, le traitement d'André Breton pape infaillible du surréalisme, etc.

    Mais son indiscutable et majeure invention s'identifie à “l'antifascisme”. Non qu'en Italie les militants communistes ne se soient trouvés en opposition au gouvernement de Mussolini et souvent en prison ou en exil. Mais d'une part les relations inter-étatiques entre Rome et Moscou ont parfaitement fonctionné jusqu'en 1941. D'autre part jamais jusqu'au milieu des années 1930 les communistes n'ont accepté d'opérer de différence entre leurs adversaires, leurs rivaux, et les “sociaux-traîtres”. “Feu sur le Blum” écrit le poète Aragon. Et surtout la confusion entre les diverses formes de ce qu'on désigne du terme générique de “fascismes” n'a été mise en œuvre que très tardivement, et artificiellement, par la propagande soviétique. Que M. Poutine affuble, aujourd'hui encore l'Allemagne hitlérienne de cette épithète, (4) qui devient, dans le cas précis dérisoire, en dit long sur cette imprégnation.

    L'idée géniale d'un front commun antifasciste va fonctionner à plein régime à l'occasion de la guerre d'Espagne, entre 1936 et 1938, lorsque les relations germano-soviétiques paraissent glaciales.

    En réalité, le point essentiel découle de la ligne définie en 1920. Celle-ci dominera presque constamment la politique extérieure de Moscou. Elle inspire donc sans mystère la conduite du Komintern, en vertu de l'obligation statutaire de “solidarité internationale”. Vis-à-vis de l'Allemagne, elle avait donné naissance au traité de Rapallo de 1922, par lequel la Reichswehr allait recevoir un soutien permanent de l'Urss, en matériel et en formation de ses cadres. Cet accord sera complété en 1926 par un traité d'amitié. Or à partir de 1933 le gouvernement de Berlin prendra, seul, et de manière provisoire, l'initiative d'un  relatif refroidissement de ces relations. Jamais le Kremlin, de son côté n'a varié dans sa remise en cause du traité de Versailles, ce que ses stratèges appellent “la paix des Alliés” et ce que les hitlériens et les nationalistes allemands dénoncent comme le “diktat”.

    En 1933 le procès de Leipzig consécutif à l'incendie du Reichstag avait donné à Münzenberg l'opportunité d'exprimer tout son talent. Il orchestre une campagne  visant à décrédibiliser l'enquête menée de façon expéditive sous la houlette de Goering, ministre de l'Intérieur de Prusse. L'incendiaire Van der Lubbe, militant d'extrême gauche hollandais, est ainsi présenté tour à tour comme un “nazi puisqu'homosexuel” ou malheureux fantoche conduit sur les lieux de son forfait par des provocateurs policiers. Le procès tournera à la confusion de la dictature allemande, et permettra au dirigeant communiste bulgare Dimitrov, accusé de complicité, de quitter le pays. En fait, protégé par le Guépéou, il sait que sa propre libération a été négociée en coulisse avec la Gestapo, et il se montre étonnamment combattif lors des audiences. (5)

    En 1935 à Paris, Münzenberg organise encore “en sous-main” (6) à la demande d'André Malraux le “Congrès des écrivains pour la défense de la culture”. Il fait venir de Moscou, le temps d'une intervention, Isaac Babel. Celui-ci sera arrêté après son retour, et assassiné par la police en 1940.

    Durant la guerre civile espagnole, à partir de 1936, certes l'Internationale communiste s'engage aux côtés des républicains. Mais en fait elle soutient les Rouges comme la corde soutient le pendu. Et la grande épuration des “antifascistes” commence dès cette époque. Elle se prolongera pendant 15 ans, selon les pays, à partir de la guerre, pendant les luttes secrètes au sein de la résistance ou après le partage de Yalta et Potsdam de 1945, qui transforment la libération en occupation soviétique de l'Europe centrale et orientale.

    À partir de 1939 l'activité de propagande en direction des bonnes consciences ne sert donc plus à rien. Dès le mémorandum de Lord Halifax, lui-même consécutif à la délimitation de la frontière des Sudètes, en octobre 1938 la Grande-Bretagne se prépare au conflit. Au Kremlin, on souhaite que celui-ci abatte l'immense puissance maritime qui domine alors le quart des terres émergées. Certes les radicaux socialistes français, conduits par Daladier président du Conseil, imaginent encore de finasser. La diplomatie de la Wilhelmstraße et les discours du chancelier ménagent ces interlocuteurs, tels des petits cochons roses qui ne voient pas le danger du grand méchant loup.

    Dès lors le grand manipulateur de l'antifascisme Mûnzenberg n'apparaît plus comme un rouage nécessaire. Il devient désormais encombrant. Et au lendemain du pacte du 23 août 1939, il se rebellera. Voici ce qu'il écrit le 6 octobre en direction des communistes français, qui eux-mêmes appliquent sans broncher les directives soviétiques et, au lendemain du partage de la Pologne du 28 septembre demandent dès le 1er octobre la “paix immédiate”.

    “Vous cherchez des arguments pour expliquer les changements à Moscou et leur donner une signification “socialiste” ? écrit-il. Il n'y en a pas (…) le grand fauteur de guerre se trouve aujourd'hui à Moscou et s'appelle Staline”. (7)

    En 1940 on retrouvera son cadavre dans la campagne française. 

     

     

    JG Malliarakis   http://www.insolent.fr/

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    Apostilles

    1. Cf. Jean-Louis Panné “Boris Souvarine” Ed. Robert Laffont 1993 page 115

    2. Cf. Il lui consacre un livre essentiel : “La fin de l'innocence” (The End of Innocence, The Free Press, New-York, 1994, La fin de l'innocence, les intellectuels d'Occident et la tentation stalinienne : 30 ans de guerre secrète, Grasset, Paris, 1995) Lire à ce sujet la notice que Denis Touret consacre à l'auteur.

    3. Cf. Wikipedia

    4. Cf. par exemple sa tribune libre au Figaro en mai 2005 pour le 60e anniversaire de la victoire alliée.

    5. Cf. Panné page 213

    6. Cf. Panné page 221

    7. Cité par Alexandra Viatteau “Staline assassine la Pologne” (ed. Seuil 1999 coll. Archives du communisme) pp 308-309 et par le “Dossier Münzenberg” (Revue “Communisme” Nos 38-39 1994).

    “L'Alliance Staline Hitler”

    Ashs Sous ce titre paraîtra un ouvrage de l'auteur de ces lignes retraçant le contexte de la politique soviétique pendant toute l'entre deux guerres. Il comprend en annexe, et expliquant, plus de 80 documents diplomatiques, caractéristiques de cette alliance. Il sera en vente à partir du 15 mai au prix de 29 euros. Les lecteurs de L'Insolent peuvent y souscrire jusqu'au 30 avril au prix de 20 euros, soit en passant par la page spéciale sur le site des Éditions du Trident, soit en adressant directement un chèque de 20 euros aux Éditions du Trident 39 rue du Cherche Midi 75006 Paris. Tel 06 72 87 31 59.

  • Jacques Collin : « L’intelligence des plantes est démontrée par la CIA »

  • Camille Galic à L’AF 2883 : « Je partage assez largement le pessimisme de Dame Agatha sur ce qu’elle appelle "notre époque dégénérée" ! »

    Camille Galic, directeur et rédacteur en chef de 1983 à 2010 de l’hebdomadaire Rivarol après s’être vouée dès sa prime jeunesse à la politique, a surpris son monde en publiant fin décembre une biographie d’Agatha Christie aux éditions Pardès, dans la collection « Qui suis-je ? ». Un virage assez curieux — à première vue en tout cas — pour qu’on lui demande de s’en expliquer.

     

    L’AF 2883 - On sent que ce qui vous lie à Agatha Christie va bien au-delà d’une simple passion pour les romans policiers...

    Camille Galic - J’écris dans le livre que je l’avais découverte jeune adolescente avec L’Homme au complet marron, qui se déroule pour l’essentiel en Rhodésie, et Rendez-vous avec la mort, situé à Petra en Jordanie, deux endroits qui me firent rêver. Mais c’est surtout à travers son autobiographie, terminée en 1965 mais publiée en 1980 quatre ans après sa mort, que je me suis aperçue que la romancière à l’imagination si fertile dans l’élaboration de ses intrigues policières valait qu’on s’intéresse à elle car c’était une personnalité aussi intéressante qu’attachante.

    D’une part, elle est pleine d’humour et pratique même l’art assez rare de l’autodérision comme le prouve son personnage d’Ariadne Oliver, son double, très sympathique mais parfois ridicule quand elle assaille Poirot d’hypothèses abracadabrantes. Et si elle multiplie les anecdotes sur ses débuts et ses affres de romancière, sa gourmandise ou son étourderie, elle reste extraordinairement réservée sur sa vie privée, se contentant de dire que l’année 1926 où elle perdit sa mère, où Christie lui annonça son intention de divorcer, et où se produisit sa mystérieuse disparition, dont elle ne souffle mot, fut « la plus pénible de sa vie ».

    D’autre part, elle reste modeste quant à son apport à la littérature, elle qui sera jusqu’à sa mort une lectrice « vorace » des grands poètes anglais, qui lui ont inspiré tant de titres de ses romans.

    Enfin et surtout, elle mériterait de figurer dans le « défilé des réfractaires » qu’a brossé Bruno de Cessole tant ses convictions seraient aujourd’hui qualifiées de rétrogrades et de sulfureuses. Elle est salutairement réactionnaire, en ce sens qu’elle voit clairement, dès les années 60, les fléaux qui s’abattront à la fin du siècle : l’hégémonie des nouvelles technologies, l’hyperconsommation qui conduit à l’endettement des ménages et l’hypersexualisation de notre société conduisant à la dissolution de la famille et à la multiplication des viols alors qu’on tympanise le public avec la libération de la femme.

    Comment expliquer le fait qu’elle n’ait connu aucun purgatoire alors même qu’elle semble si éloignée de la mentalité actuelle, notamment du politiquement correct ?

    Si la presse et les pseudo-intellectuels privilégient l’anachronisme pour condamner les opinions d’écrivains d’hier au regard des critères d’aujourd’hui, les lecteurs ne tombent pas dans ce travers. Ce qui les intéresse dans un livre, c’est l’intrigue, les personnages et l’univers dans lequel ceux-ci se meuvent. Or, les intrigues de Christie sont très astucieuses, ses personnages existent charnellement et son univers Old England, avec ses cottages, ses châteaux, ses presbytères, ses vieilles filles et ses avocats de village fait un peu figure de paradis perdu pour ceux qui subissent et la « dissociété », pour reprendre le mot de Marcel De Corte, et la société plurielle. C’est la raison pour laquelle, à mon avis, la vente des romans d’Agatha Christie n’a cessé d’augmenter depuis sa mort. Reste à savoir si l’universitaire Sophie Hannah, qui a été choisie pour ressusciter Hercule Poirot dans un roman à paraître en septembre, mais censé se dérouler vers 1930, restera dans la ligne « christienne » ou cédera à l’air du temps…

    La romancière déplorait l’emprise de « l’émotion » sur les media et donc sur l’opinion publique : cela rejoint le thème de votre livre, signé Claude Lorne, Les Médias en servitude, paru en 2012 chez Polémia...

    En effet, et cela m’a frappée. Elle-même avait été victime de l’acharnement de la presse après sa disparition, consécutive à la décision de son mari Archibald Christie de divorcer, et cette impression d’être un « renard traqué » explique sa méfiance, voire son hostilité, envers les journalistes. Mais, à mon avis, et au-delà de son cas personnel, elle voyait dans cette course au sensationnalisme, même de la part des journaux théoriquement les plus respectables, une autre preuve de notre décadence. Et cela s’est aggravé avec la prééminence des mass-media sur la presse écrite. Et le pire est que si les media surréagisent sous le coup de l’émotion provoquée par tel fait divers, les gouvernements suivent de manière moutonnière en faisant légiférer sur des sujets sans intérêt véritable. Souvenons-nous que l’extension de la loi Gayssot à l’homophobie fut adoptée à la suite de l’« ignoble agression » d’un inverti, en réalité tabassé… par son petit ami comme on l’apprit plus tard !

    Quel regard l’analyste politique que vous demeurez jette-t-elle sur la situation française ? 

    L’immense succès des Manifs pour tous et du Jour de colère, comme la bonne surprise des dernières municipales, montrent qu’un sursaut se dessine. Je voudrais croire qu’il sera durable et se généralisera et que seront dessillés les yeux de ceux qui se sont laissés prendre aux mirages du progrès indéfini, de la mondialisation et surtout de la « France black-blanc-beur » où envahisseurs et envahis sont censés "s’enrichir de leurs différences". Mais les ravages exercés ces dernières décennies sont tels en matière civilisationnelle, avec la faillite de l’Education nationale et des « élites » politiques et parfois -, hélas !, religieuses à la remorque des minorités dites visibles et sexuelles, la dégradation d’une institution judiciaire s’éloignant de plus en plus du droit pour privilégier une éthique d’ailleurs sélective, etc., qu’ils me paraissent irréparables. À vue humaine en tout cas.

    Vous voyez que je partage assez largement le pessimisme de Dame Agatha sur ce qu’elle appelle « notre époque dégénérée » !

    Propos recueillis par François MarcilhacL’AF 2883

    http://www.actionfrancaise.net/craf/?Entretien-Camille-Galic-a-L-AF

  • Les veilleurs préparent discrètement leur avenir et celui de leur pays

    Axel Rokvam, fondateur du mouvement des Veilleurs, déclare à Valeurs Actuelles :

    "Je dois reconnaître que je suis incapable de dresser le bilan de près de 3000 veillées qui ont eu lieu en France depuis un an.Pourtant, s’il y en a toujours autant, c’est peut-être qu’elles sont utiles. La vérité d’une chose ou d’une personne se dévoile dans la patience et dans la persévérance. Or, patients et persévérants, les veilleurs le sont. Ils préparent discrètement leur avenir et celui de leur pays. Ils savent que la vertu naît dans l’ombre. Ils ne veillent pas pour proclamer que « la société est pourrie », mais pour chercher comment s’engager et changer leur vie dans les prochaines années. Ils ont à cœur d’organiser des veillées gratuites et ouvertes à tous.

    La constance du mouvement spontané des veilleurs depuis un an est donc une bonne nouvelle dans un monde en quête de racines, de justice, et d’une culture qui puise plus profondément que dans les valeurs avariées qu’on leur sert sur les écrans de télévision. A la faveur de la « loi Taubira », une nouvelle forme d’action culturelle est apparue dans la société française, et ceux qui le nient se marginalisent. Le chemin des veilleurs sera long. Georges Bernanos écrit qu’« une fois sorti de l’enfance, il faut très longtemps souffrir pour y rentrer, comme tout au bout de la nuit retrouver une autre aurore. »"

    Michel Janva

  • Quand les élites ne trahissaient pas…

    De la réalité des élites, de leur reproduction et de leurs devoirs.

    Trois hypothèses de départ:

    1. Quand une communauté atteint la taille de 10 membres, elle se structure et se choisit des chefs (c’est pour cela que les anarchistes sont rarement plus de 9!)

    2. Ces chefs ont une tendance naturelle à passer le pouvoir à leurs enfants (la reproduction des élites)

    3. La condition morale de la société est dictée par la condition morale de son élite (notamment dans les pays latins catholiques)

    Aujourd’hui, nous avons une élite qui ne dit pas son nom, dont les enfants accèdent à leur tour à l’élite, mais dont la condition morale est des plus douteuses.

    Le Moyen-Âge, heures les plus sombres de notre histoire (en concurrence avec le moustachu d’Outre-Rhin), était parvenu à résoudre ce problème:

    1. La société avait un chef, des sous-chefs, et un quadrillage par les corps intermédiaires (paroisses, corporations, etc.)

    2. Plutôt que de parler d’égalité républicaine, la reproduction des élites était encadrée dans l’aristocratie (avec des entrées tous les ans de bourgeois et guerriers)

    3. Mais l’élite s’imposa un code d’honneur que je reproduis ici:

    1. Tu croiras à tous les enseignements de l’Église et tu observeras ses commandements.
    2. Tu protégeras l’Église.
    3. Tu défendras tous les faibles.
    4. Tu aimeras le pays où tu es né.
    5. Tu ne fuiras jamais devant l’ennemi.
    6. Tu combattras les infidèles avec acharnement.
    7. Tu rempliras tes devoirs féodaux, à condition qu’ils ne soient pas contraires à la loi divine.
    8. Tu ne mentiras jamais et tu seras fidèle à ta parole.
    9. Tu seras libéral et généreux.
    10. Tu seras toujours le champion du droit et du bien contre l’injustice et le mal.

    Si le chevalier manque à son serment, il est proclamé indigne d’être chevalier. Il est conduit sur une estrade, son épée est brisée et piétinée, son blason est attaché à un cheval et trainé dans la boue. Tous peuvent l’injurier. On le met sur une civière, puis on le recouvre d’un drap noir et on le porte à l’église comme un mort. On récite les prières des défunts : il est mort comme chevalier et banni toute sa vie.

    Si tous les ministres, financiers, people et journalistes prononçaient ce serment, le monde irait probablement un peu mieux.

    Si l’Eglise comprenait cette maxime de Nicolas Gomez Davila "le Christ n’est pas venu sur terre pour régler la condition économique des pauvres, mais pour régler la condition morale des riches", le monde irait probablement un peu mieux aussi.

    http://droitedavant.wordpress.com/2014/03/04/quand-les-elites-ne-trahissaient-pas/