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culture et histoire - Page 1771

  • Edito : Mouvement de masse et guerre de l’information

    Le mouvement contre le mariage pour tous a réactualisé une problématique qui était considérée comme obsolète depuis la disparition progressive des vagues d’agitation gauchistes dont le point culminant fut les évènements de mai 1968. Plusieurs enseignements sont à tirer dès maintenant de cette nouvelle phase de relance de pratiques subversives, initiées cette fois-ci par des forces de la société civile majoritairement positionnées à droite de l’échiquier politique. 
    Les évènements actuels sont dominés par deux modes d’action très imbriqués : la manifestation de rue et l’activisme des réseaux sociaux sur Internet. Il nous a semblé intéressant de rapprocher ces deux notions dans le décryptage des évènements liés au mouvement contre le mariage pour tous. Jusqu’à présent, la combinaison de ces deux modes d’action était très factuelle et ne débouchait pas sur une dynamique durable d’ampleur nationale, voire internationale. C’est la première fois dans la jeune Histoire de la société de l’information que l’expression publique dans la rue est articulée avec autant d’efficacité et d’efficience que l’usage offensif d’Internet par le biais des réseaux sociaux.

    L’imbrication du mouvement de masse dans la toile
    L’analyse des évènements actuels fait ressortir une combinaison innovante de l’art de la manifestation de rue (conçu entre le XIXe et le XXe siècle) avec les nouvelles techniques de prise de parole (sites Internet, blogs, pages Facebook), par les Smartphones (SMS, prise d’images et de vidéos) et Twitter.
    L’usage subversif de la manifestation de rue est l’un des produits des révolutions françaises (1789, 1830, 1848). Il devint par la suite un des actes marquants du militantisme propagé par les courants marxistes et libertaires. Au XXe siècle, cette tactique est reprise par les courants révolutionnaires russes et instrumentalisés par les Bolchéviks. La succession des expériences révolutionnaires dans l’Europe des années 30 élargit son utilisation aux courants de pensée d’extrême droite (Marche sur Rome des fascistes italiens, défilés des SA du parti nazi allemand, manifestation des Croix de feu et des Ligues nationalistes le 6 février 1934 à Paris). Mais la théorisation de cette tactique est réalisée par Mao Tsé Toung qui l’intègre dans une notion plus large de portée stratégique : la notion de mouvement de masse, colonne vertébrale de la pensée du courant maoïste lors de la Révolution culturelle officialisée en 1966 (mobilisation de fractions de la jeunesse chinoise contre certains dirigeants et cadres du Parti).
    Dans la praxis révolutionnaire, la notion de mouvement de masse est mise en avant pour vérifier l’écho des thèses révolutionnaires et souligner leur impact au sein du peuple. Sans mouvement de masse, le combat révolutionnaire est une démarche d’avant-garde qui ne trouve pas sa légitimité historique. Contre toute attente,  le mouvement contre le mariage pour tous de 2012/2103 s’est peu à peu imposé sur la scène politique en prenant appui sur la force de la mobilisation des manifestants dans la rue. Cette montée en puissance d’un mouvement de masse n’est pas simplement le résultat d’un phénomène de bouche à oreille et de répercussion de l’impact des manifestations dans les médias (note 1). Il résulte d’une campagne d’action très soutenue à partir des réseaux sociaux. La dimension prise par ce buzz sur Internet est une des clés pour comprendre le maintien de la mobilisation, l’augmentation graduelle du nombre de manifestants et la capacité d’organisation tous azimuts de manifestations ciblées dans plusieurs zones urbaines du territoire. Cette propagation d’un courant d’idées (que d’aucuns estiment divisé, mais rappelons pour les profanes que les courants révolutionnaires étaient divisés quels que fussent les contextes historiques) est d’autant plus surprenante qu’elle n’émane pas d’un centre de commandement longtemps positionné à l’avance (note 2). Aucun parti de l’opposition ne s’attendait à l’ampleur de cette vague protestataire. Il en est de même pour les partis au pouvoir. L’analyse de ce syncrétisme entre des méthodes d’agit-prop traditionnelles et de pratique offensive du web nous semble illustrer de manière très didactique les critères de guerre de l’information par le contenu. La notion de guerre de l’information par le contenu est théorisée au sein de l’Ecole de Guerre Economique (note 3) qui a déjà publié de nombreux articles sur le sujet (note 4).

    Un syncrétisme des techniques offensives de management de l’information
    Les méthodes d’agit-prop initiées par le collectif contre le mariage pour tous sont un condensé de multiples pratiques déjà employées par des mouvements protestataires dans le passé mais enrichies par une créativité propre à ce mouvement :

    L’intérêt de ce mouvement est la démultiplication des opérations militantes qui rappellent  le principe du slogan maoïste: « Une étincelle peut mettre le feu à toute la plaine ». Si comme tentent de le démontrer les journalistes Abel Mestre et Caroline Monnot du quotidien Le Monde, des pratiques militantes de nature idéologique se sont greffées dans la dynamique militante, leur influence reste très circonscrite à des cercles périphériques à un mouvement de protestation multidimensionnelle. Les dissidents du Printemps français prônent la radicalisation politique des opposants au mariage gay par le biais d’un site Internet et d’un compte Twitter. Cet activisme principalement virtuel use de symboles tels que le graphisme agressif du poing tendu qui voisine étrangement avec la référence apaisante au pacifisme de  Gandhi. Les initiatives des groupuscules d’extrême droite ont elles aussi pour l’instant une portée marginale et se limitent à des manœuvres de galvanisation de la foule en marge des manifestations nocturnes, à des blocages de la circulation et à des collages d’affiche sur des permanences du Parti Socialiste ou sur un site parisien qui accueillait l'Inter-LGBT (Lesbiennes, Gay, Bi, Trans). La présence du mouvement religieux Civitas dans des manifestations collatérales n’a pas non plus changé l’orientation première du mouvement.
    Les « opérationnels » du mouvement contre le mariage pour tous sont à l’origine d’un syncrétisme entre des techniques subversives de propagande et des méthodes propres au monde de l’intelligence économique ou des ONG. Pour ce qui concerne l’intelligence économique, ce mouvement a ouvert la voie à une forme de démocratisation du lobbying qu’aucun cabinet de conseil spécialisé dans le domaine ne serait en mesure d’égaler. En revanche, la cartographie et la traçabilité des prises de position des parties prenantes réalisée au niveau des parlementaires est la reproduction typique d’une technique de plus en plus usitée par les agences de communication et les structures spécialisées dans la communication d’influence. L’un des points forts du mouvement est la manière de pousser les autorités dans leurs contradictions, à l’image du refus de la préfecture de police de communiquer les images de la manifestation du 24 mars.
    Les techniques de pression psychologique sur des leaders d’opinion ou des responsables politiques sont comparables à celles pratiquées par les acteurs de la société civile. Des ONG  comme Greenpeace, figure emblématique des défenseurs de l’environnement, ont systématisé ce type de mode d’action pour faire parler d’elles dans les médias et accroître leur notoriété.
    C’est notamment le cas des techniques de harcèlement épistolaire ou téléphonique  (courrier envoyé à tous les  parlementaires, communications téléphoniques répétées auprès des responsables de la Préfecture de Police ou de la  Mairie de Paris (cf. polémique sur la pelouse du Champ de Mars). La tentation de pratiques de désobéissance civile comme le projet de campagne de vider les livrets, les appels à forcer le traitement manuel de la déclaration de revenus ou de contrepouvoir électoral (composition de listes électorales aux prochaines élections municipales) sont le prolongement possible de cette nouvelle forme de stratégie de la tension informationnelle.
    Le mouvement contre le mariage pour tous n’a pas encore de centre de commandement politique digne de ce nom comme le laissent pressentir les déclarations parfois confuses et contradictoires de l’une des porte-parole improvisée, Virginie Tellenne. Il a fait preuve en revanche d’une organisation logistique d’une efficacité remarquable compte tenu du caractère spontané de son développement au cours des derniers mois. La gestion financière des manifestations (note 5) et l’organisation de la venue d’une telle masse de manifestants implique un suivi de nature quasi militaire. La logique d’entraide des manifestants est le point novateur de ce savoir faire dans la mesure où la capacité de mobilisation se mesure aussi par les propositions de covoiturage, d’hébergement, de babysitting, de parrainage financier pour aider des familles à manifester. Le service de sécurité dirigé par le jeune militant Albéric Dumont a démontré lui aussi une certaine maîtrise de la situation dans la mesure où il a su réunir et structurer plusieurs milliers de bénévoles répartis selon les tâches à accomplir : gilet jaune pour l’accueil des participants, gilet rouge pour la sécurité, gilet vert pour la logistique. Le dialogue permanent entretenu avec les services de police a été un gage de réussite qui n’est pas cependant un chèque en blanc pour l’avenir.

    Une pratique intensive mais parfois déficiente de la guerre de l’information
    L’une des particularités du mouvement contre le mariage pour tous est le recours systématique à tous les ressorts de la société de l’information. Le système interne de pilotage du Pôle web est un travail militant de nature quasi professionnelle par la qualité du suivi de l’actualité, de la veille sur les prises de parole amies et hostiles, de la relation entretenue avec la presse internationale. La cellule presse a réussi à sensibiliser des journalistes étrangers et une partie de la population sur la tendance de medias français à pratiquer l’omission, l’autocensure ou la dépréciation de la force du mouvement.
    La création de centaines de sites et de blogs sur Internet (note 6) est une des preuves de la particularité de cette mobilisation dont la presse ne rend compte qu’avec une parcimonie pour le moins surprenante. Chaque antenne régionale du mouvement contre le mariage pour tous pour tous dispose d’un blog, d’une page Facebook et d’un compte Twitter. Les flux informationnels qui transitent par  ces relais virtuels ont des objectifs bien précis :

    • Sensibilisation des internautes.
    • Préparation des manifestations.
    • Diffusion de preuves par prises de photographies lors des manifestations.
    • Diffusion des témoignages.
    • Communication des sondages en ligne.
    • Campagne de résonance sur les réseaux sociaux (cf. htag #floppourtous).

    Certains activistes du web mènent aussi des attaques informationnelles :

    • Recueil de témoignages sur les dérives liées au mariage homosexuel (échec dans l’éducation d’enfants élevés par des couples homosexuels).
    • Diffusion de photos chocs extraites de manifestations en faveur du mariage gay et nuisibles à leur image.
    • Attaque ciblée contre Pierre Bergé (note 7) et Jean Pierre Michel.

    Mais cet activisme du net a ses limites tactiques comme le démontre l’incapacité des organisateurs du mouvement à exploiter une des erreurs grossières commises par le Ministère de l’Intérieur. Lors de la manifestation du 24 mars à Paris, des photos ont été prises de plusieurs  policiers en civil brandissant des matraques télescopiques en acier trempé. La scène est intéressante car lorsqu’on la visionne, on constate que les policiers armés de ces matraques ne sont pas menacés par des manifestants et qu’ils ont une attitude provocatrice. Ils mettent ensuite leur brassard police et se réfugient derrière un rideau de CRS. Le collectif qui organise la manifestation a la preuve visuelle de ce qu’on appelle une provocation policière. Il se contente de diffuser les photos compromettantes sur le web mais ne les exploitent pas dans la polémique qui va suivre. La matraque télescopique est une arme dangereuse qui peut provoquer des coups mortels lorsqu’ils sont portés sur la tête d’un individu. Cette arme n’a donc pas sa place dans une opération de maintien de l’ordre. Les questions posées au Ministre de l’Intérieur auraient pu être très gênantes sur ce point (note 8) car elles contrebalançaient son argumentation non démontrée par des photos sur la présence d’éléments agressifs de groupes d’extrême droite aux abords de la place de l’Etoile.
    Au niveau stratégique, la guerre de l’information menée par les opposants au mariage pour tous est pour l’instant un échec (la loi est votée et le Conseil Constitutionnel reste un recours plus qu’aléatoire). Les défenseurs du mariage gay ont joué sur la défense des minorités alors que les opposants se sont battus pour le maintien des valeurs. En termes de guerre de l’information, la résonance des pour reste encore plus forte que celle des contre.

    Limites et dépassements du mouvement
    Les opposants au mariage pour tous n’ont pas trouvé les éléments de langage pour renverser le rapport de force. Il leur fallait pour atteindre un tel but aller sur un autre terrain que celui du respect ou du maintien des valeurs morales. Le changement de société impulsée par la dynamique anglo-saxonne (théorie du Gender, remise en cause de notre définition des droits de l’homme, non respect de la propriété intellectuelle et des données personnelles, recherche sur l’optimisation du consumérisme par la disparition de la différence entre les sexes) est la toile de fond de ce non débat stratégique. Sur ce point précis, le mouvement contre le mariage pour tous est piégé par son origine idéologique. La relation avec les Etats-Unis et dans une certaine mesure la survie de l’empire américain est le sujet tabou de la droite française. La solitude du général de Gaulle pour tenter de trouver une troisième voie reste dans toutes les mémoires. L’incapacité de dire non à l’influence culturelle du modèle américain sur la France et l’Europe est le caillou dans la chaussure qui bloque toute capacité d’optimiser la guerre de l’information actuelle pour la traduire politiquement dans un mouvement de masse de nature réellement stratégique. Si le recul provisoire du gouvernement sur la procréation assistée peut apparaître comme une concession faite à ce mouvement de masse, il n’est une fois de plus que de portée tactique.
    La manifestation du 26 mai prochain sera-t-elle l’arbre qui cache la forêt ? Les retombées du mouvement contre le mariage pour tous sont déjà très perceptibles au sein de l’Eglise catholique. La conférence des évêques de France fortement marquée par la crise de société issue des événements de mai 68 doit faire face à l’émergence d’une nouvelle génération de chrétiens qui sont à la recherche de valeurs spirituelles moins matérialistes. Il ne s’agit pas à priori d’un courant contestataire mais d’un renouveau de la pratique religieuse qui prend de plus en plus en compte les grands débats de société.

    Christian Harbulot
    Directeur de l’Ecole de Guerre Economique

    http://www.infoguerre.fr/edito/edito-mouvement-de-masse-et-guerre-de-linformation/

    Notes

    Note 1 : La plupart des médias ont minoré le chiffre des manifestants dès la manifestation du 17 novembre 2012 et ce n’est qu’à partir de la manifestation du 24 mars que la polémique a été évoquée dans les médias sur le comptage des manifestants à partir des photos prises par hélicoptère par les services du Ministère de l’Intérieur.

    Note 2 : Le mouvement contre le mariage pour tous est né d’une volonté spontanée de personnes d’individualités et de groupes animés par des convergences de vue en opposition au mariage pour tous. La création d’un collectif Lamanifpourtous issu du Manifeste pour l’humanité durable regroupe plusieurs associations de confession différente mais à majorité chrétienne.

    Note 3 : L’Ecole de Guerre Economique est aujourd’hui à la pointe de l’étude de la guerre de l’information par le contenu. Cette légitimité acquise à travers des travaux de recherche menés depuis seize ans vient en appui aux réflexions plus conventionnelles du monde universitaire et complète les vides laissés par des institutions verrouillées par les contraintes gouvernementales. Ce positionnement original nous incite aujourd’hui à faire un état des lieux de la démarche méthodologique multidimensionnelle qui transparaît dans les pratiques militantes du mouvement contre le mariage pour tous.

    Note 4 : articles publiés par l’EGE sur la guerre de l’information par le contenu

    • Christian Harbulot, Note sur la guerre des perceptions, CSFRS, avril 2013.
    • Christian Harbulot, Le piège technologique de la cyberguerre, Nouvelle Revue de Géopolitique, numéro de janvier, février, mars 2013.
    • Christian Harbulot, De la guerre de l’information aux cyberconflits, dossier réalisé par le CSFRS pour Enjeux les Echos, mars 2012.
    • Christian Harbulot, Les démocraties occidentales face à la guerre de l’information, Nouvelle revue de Géopolitique, automne 2011.
    • Christian Harbulot et Patrice Lefort-Lavauzelle de l’article Une démocratie peut-elle mener une guerre de l’Information, revue Défense, septembre 2011.
    • Christian Harbulot, Les guerres de l’information dans l’ouvrage Management stratégique de la concurrence, coordonné par Frédéric Leroy et Saïd Yami, Dunod, 2009.
    • Christian Harbulot, Le rôle de l'information dans les conflits asymétriques pour les cahiers n°12 du Collège de l'Enseignement Supérieur de l'Armée de Terre (CESAT), avril 2008.
    • Christian Harbulot et Philippe Baumard de l’article La maîtrise de l’information dans les conflits asymétriques, dans Bulletins d’Etudes de la Marine, 2007.
    • Christian Harbulot et Didier Lucas de l’article Comment résister aux attaques par l’information ?, dans l’ouvrage d’Alice Guilhon et Michel Henri Bouchet, Intelligence économique et gestion des risques, Editions Pearson, juin 2007.
    • Christian Harbulot, De la légitimité de la guerre cognitive, revue de l’Institut de Recherches Stratégiques, janvier 2005.
    • Christian Harbulot, La France et l’Europe face à l’américanisation de l’arme de la connaissance, revue Conflits actuels, mars 2004.
    • Christian Harbulot et Didier lucas, La guerre cognitive, ouvrage collectif de l’Ecole de guerre économique, Lavauzelle, février 2002.
    • Christian Harbulot, La guerre de l’information du faible au fort, numéro spécial de la revue Panoramiques, avril 2001.
    • Christian Harbulot, « Frappes informationnelles sur Internet », numéro d’été la revue Pouvoirs, 2000.
    • Christian Harbulot, Didier Lucas et Alain Tiffreau, Gestion des risques dans le cadre d’une déstabilisation par l’information, étude commanditée par l’Adit, 1999.
    • Christian Harbulot et Pascal Jacques Gustave, Manœuvre médiatique et compétition économique, revue Enjeux Atlantiques, décembre 1998.
    • Christian Harbulot, « Intelligence économique et guerre de l’information », Revue Mars, troisième trimestre 1999. 

    Note 5 : selon les organisateurs, la manifestation du 24 mars a coût  près de 700 000 euros. 550 000 euros ont été récoltés par des dons de particuliers.

    Note 6 : exemple de sites créés dans la mouvance du mouvement conte le mariage pour tous 
    http://huonsnosministres.fr/
    http://www.printempsfrancais.fr/
    http://www.deputespourtous.com/
    http://www.senateurpourtous.com/
    http://www.lamanifpourtous.fr/fr/
    http://www.homovox.com
    http://lecampingpourtous.fr/
    http://democratiepartout.tumblr.com/
    http://www.laissez-nous-voter.org/
    http://www.referendum-officiel.fr/
    http://www.we-facile.fr/
    http://www.mairespourlenfance.fr/
    http://www.tous-pour-le-mariage.fr/
    http://www.lesmusulmanspourlenfance.com/
    http://lamanifdesjuristes.free.fr/
    http://www.enmarchepourlenfance.com/
    http://enfantsjustice.wordpress.com/
    http://www.derapages.org/
    http://www.tousenpriere.com/
    http://hommen-officiel.tumblr.com/

    Note 7 : Pierre Bergé a été au centre d’un certain nombre de polémiques et a lui-même tenu des propos très controversés dans ce débat.

    Note 8 : une question au gouvernement aurait pu être posée à l’Assemblée Nationale par un député de l’opposition (la mission de ces policiers en civil, la nature de l’autorité qui leur avait donné l’ordre de porter des matraques télescopiques, et la raison pour laquelle ils avaient sorti, cette arme alors qu’ils n’étaient pas en situation de légitime défense).

  • Ali Shariati, une synthèse entre islamisme et nationalisme révolutionnaire

    Ali Shariati, une  synthèse entre islamisme et nationalisme révolutionnaire Le parcours de Ali Shariati (1939-1977) à poursuivi ses études de sociologie et d’histoire des religions à Paris. De retour en Iran, il sera tout exclu de l’université pour ses positions politiques. Tout en participant dès sa jeunesse au mouvement nationaliste dirigé par le Dr Mossadegh, Shariati fait partie du mouvement du renouveau islamique « Les adorateurs socialistes de Dieu ».
    Ainsi dès le départ, Shariati se distingue par une sorte de synthèse entre islamisme et nationalisme révolutionnaire. Il fut durant les années 60 et 70 le représentant de l’islamisme radical de gauche dans les rangs de la jeunesse iranienne. Son engagement politique lui a valu prison, torture et exil. Sa mort prématurée, en Angleterre, en 1977, à l’âge de quarante-quatre ans, dans des conditions suspectes, n’a jamais été élucidée mais de nombreux observateurs l’attribuent à la police secrète du Shah, la Savak. Elle fut en tous cas une grande perte pour le mouvement de renouveau islamique et plus généralement le mouvement de libération en Iran lorsqu’on sait combien ses positions auraient pu influencer les débats ultérieurs qu’a connus la révolution iranienne.
    Parti de positions national-révolutionnaires anti-impérialistes, Shariati a trouvé dans l’islam l’inspiration qui lui a permis de se façonner une conception indépendante à l’égard des deux blocs qui s’affrontaient durant la guerre froide. Bien avant son séjour d’études en France, Shariati s’est familiarisé avec les grands courants philosophiques qui pouvaient inspirer une résistance anticapitaliste comme le marxisme et l’existentialisme. Même lorsqu’il soulève leurs contradictions internes ou leur désaccord avec la conception islamique du monde, Shariati n’hésite pas à en emprunter une approche méthodologique, voire une analyse circonstanciée de certains phénomènes sociaux et politiques. Shariati ne s’est pas seulement intéressé au grands auteurs européens mais aussi à des auteurs qui ont été marqués particulièrement par l’expérience de la colonisation /décolonisation comme Frantz Fanon qu’il a traduit en persan.
    Pour Shariati, « l’intellectuel authentique » qu’il soit religieux ou laïc est celui qui se tient sur le champ de bataille intellectuel, social et politique pour le changement révolutionnaire : « Si tu n’es pas sur le champ de bataille, peu importe que tu sois à la mosquée ou au bar ». Chez Shariati, la libération ne dépend pas essentiellement de la renaissance de la pensée religieuse. Il s’agissait plutôt d’une reconstruction d’une « identité irano-islamique » . L’élément religieux et civilisationnel est solidairement lié aux autres éléments constitutifs de la société et de la nation iranienne.
    C’est ce facteur qui l’amène à considérer que le rôle de l’intellectuel musulman-laïc est aussi décisif que celui de l’intellectuel religieux membre du clergé dans le processus de changement révolutionnaire dans la mesure où l’intellectuel musulman-laïc est situé au point de contact conflictuel entre la société iranienne musulmane et le système de domination moderne. A cet égard, l’intellectuel musulman-laïc est le mieux placé pour exprimer les aspirations de la société musulmane et combattre en connaissance de cause les aspects oppressifs du système capitaliste moderne.
    C’est la prise de conscience du fait que la lutte de libération ne saurait ignorer le facteur culturel et religieux qui conduit Shariati à s’ouvrir à la dimension théologique. C’est ce qui fait écrire à John Esposito que « Shariati prêche ce qu’on peut appeler une théologie de la libération qui concilie une réinterprétation de la croyance islamique avec une pensée socio-politique moderne » (1). Sur l’initiative de Motahhari, Shariati rejoint l’association islamique « Huseynia Ershad » et participe à ses travaux de recherche et d’enseignement. Cependant, la participation de Shariati aux activités de cet institut ne l’a pas empêché de continuer à défendre ses positions originales, parfois en opposition à Motahhari lui-même.
    La principale originalité théologique de shariati fut l’introduction de certain acquis méthodologiques empruntés aux sciences sociales dans la critique historique des Ecritures. Les divergences théologiques et idéologiques avec Motahhari n’ont jamais altéré leur amitié et leur collaboration dans le cadre de cette association. L’ouverture de shariati ne s’arrête pas aux questions de méthode.
    Son rapport à la modernité et à l’occident rejoint la démarche sélective de Motahhari. La renaissance musulmane ne peut se passer de l’apport moderne occidental. Celui-ci est d’ailleurs présenté comme un acquis universel et non seulement limité aux pays qui l’ont initié : « La civilisation contemporaine est la plus grandiose des civilisations humaines...Apollo n’appartient pas en propre à l’Amérique, ni aux blancs ou aux noirs, mais bien à la civilisation humaine tout entière » (2). L’exigence de l’indépendance et de la renaissance nationale ne signifie pas l’isolement par rapport au monde. L’Europe ou l’occident ne peuvent être rejetés en bloc comme s’il s’agissait d’une doctrine monolithique : « La condamnation par un intellectuel de l’occidentalisation de sa société n’est légitime que s’il possède une connaissance approfondie de la culture et de la civilisation européenne, ainsi que de sa propre histoire, société, culture et religion ».
    Mais s’il fait la différence entre modernisation et occidentalisation, Shariati n’en met pas moins en garde ses compatriotes contre la tentation du mimétisme aveugle. Pour lui, la modernisation n’est pas un produit technique. Elle ne saurait par conséquent se limiter à une opération d’importation : « La civilisation et la culture ne sont pas de produits d’importation. Elles ne peuvent pas se déplacer comme un poste de télévision ou de radio ou bien un réfrigérateur, d’un endroit à l’autre et fonctionner à nouveau grâce à l’électricité. Elles exigent la préparation du terrain, le travail de la terre, patience, recherche, intelligence et vigilance de la part du cultivateur. Elles nécessitent la transformation de l’homme, de la pensée, la connaissance de l’environnement » (3)
    Shariati reprend la principale critique adressée par le réformisme musulman à la modernité occidentale, à savoir son glissement vers une civilisation « matérialiste », finalement en contradiction avec l’humanisme proclamé depuis la renaissance. Dans un texte aux accents marxiens, Shariati écrit : « Voulant échapper à l’oppression des puissants et des maîtres d’esclaves, l’homme se tourne vers les grandes religions et écoute les prophètes : Mais il ne souffre les combats et les martyres que pour devenir la proie des mages, des khalifes, des brahmanes, et, pire encore, du noir et mortel chaos de l’Eglise médiévale ... Des générations se sont battues et sacrifiées pour susciter une renaissance, pour mobiliser l’humanité dans la conquête de la science et de la liberté, afin d’être libérée de tout ce qu’elle a dû souffrir au nom de la religion ... Gagnée au libéralisme, l’humanité a choisi la démocratie à la place de la théocratie, comme clé de libération. Elle a été piégée par un capitalisme pur et dur dans lequel la démocratie s’est avérée aussi décevante que la théocratie. Le libéralisme se révèle un régime dans lequel la liberté n’existe que pour « les cavaliers » rivalisant de coups de main et de pillages » (4).
    Le processus de déshumanisation du capitalisme contemporain, fondé sur une logique d’exploitation, est inséparable de processus historique de déculturation d’où l’importance accordée à la marginalisation de la religion dans la vie sociale : « Sous prétexte d’attaquer le fanatisme, les puissances coloniales, ont, au début de leur histoire surtout, combattu la religion... Elles ont lancé des assauts contre la tradition, afin de produire un peuple sans histoire, sans racines, sans culture, sans religion, et sans plus aucune forme d’identité » (5). Il y aurait donc chez Shariati un rapport direct entre la tendance à l’exploitation générale du capitalisme d’une part et la tendance à la déculturation-despiritualisation de l’homme d’autre part, car des peuples sans histoire et sans culture sont plus facilement exploitables.
    Michael Amaladoss a fait ressortir cette corrélation en ces termes : « La relation d’injustice et d’inégalité entre les quelques puissants et la masse des démunis sans pouvoir représente une structure fondamentale de la société humaine à toutes les époques, bien que les moyens et les expression de cette relation de domination aient pu varier dans le temps...Shariati développe avec plus de détails les oppressions de l’impérialisme contemporain, avec la domination économique et l’effort pour faire des gens de simples consommateurs. Comme aiguillon pour ce processus, il y a une campagne de diffusion d’une culture matérialiste et uniforme. Corrélativement, il y a l’effort pour enlever aux gens leurs racines culturelles et religieuses dans leur propre tradition. Shariati sent combien arracher les gens à leurs racines culturelles revient à les priver de leur identité et de leur humanité, pour en faire des objets d’exploitation commode »(6).
    La théologie de libération de Shariati incorpore l’élément central de l’approche islamique qui considère que l’humanisme est impossible sans la dimension spirituelle constitutive de l’homme : « Le vrai humanisme est un ensemble de valeurs divines au cœur de l’homme, constituant son héritage moral, culturel et religieux ». Ceux qui voient une contradiction entre religion et libération ne saisissent pas la dialectique du Tawhid (l’unicité) en islam : l’adoration du dieu unique signifie rejet de tout shirk (associationnisme) et par conséquent le rejet de l’idéalisation de tout autre chose que dieu : la matière, l’argent, le pouvoir, etc. Par ailleurs le rapport des hommes au dieu unique fonde leur égalité radicale sur laquelle les théologiens musulmans de la libération devraient construire leur discours politique égalitariste.
    M.Amaladoss commente très justement cette dialectique du Tawhid à l’œuvre chez Shariati : « A l’affirmation du dieu unique, correspond au commencement une société unifiée dans l’égalité et la justice. Cette unité sociale une fois brisée en différentes classes et groupes, le polythéisme a fait son apparition dans les sphères religieuses. Ce qui signifie que combattre l’inégalité et l’injustice dans le monde devient un devoir religieux, parce que c’est en réalité s’attaquer au polythéisme et à l’idolâtrie » (7). Cependant, le rejet du polythéisme et de ses formes contemporaines ne conduit pas Shariati à tourner le dos à la civilisation matérielle et l’exigence de modernisation.
    L’islam permet d’affronter le monde mais n’admet aucune fuite du monde aussi injuste soit-il. Réalisme et spiritualisme ne s’excluent pas en islam. Shariati le rappelle avec force : « l’islam est une religion réaliste : il aime la nature, la force, la beauté, la richesse, l’abondance, le progrès et la satisfaction des besoins humains...plutôt que préoccuppée de métaphysique et de mort, sa production littéraire s’intéresse à la nature, la vie, le monde, la société et l‘histoire » (8).

    Mohamed Tahar Bensaada http://www.voxnr.com/cc/di_antiamerique/EFZZlZkpZpxnpaLSSb.shtml

    Notes

    Le titre est de la rédaction. Le premier paragraphe a été légèrement coupé sans en altérer le sens.
    (1) Cité par N.YAVARI-D’HELLENCOURT : Modernisation autoritaire en Turquie et en Iran, Paris, L’Harmattan, 1989, p. 89
    (2) Op.cit, p.97
    (3) Op.cit, p.98
    (4) Ali SHARIATI : Marxism and other western fallacies, Mizan press, Berkley,1980
    (5) Ali SHARIATI : What is to be done ? p. 31
    (6) Michael AMALADOSS : Vivre en liberté, Bruxelles, Lumen Vitae, 1998, p.190
    (7) Op.cit, p.188
    (8) Ali SHARIATI : What is to be done ? p. 43

  • Uranus : un casse-tête pour les "scientifiques" évolutionnistes

     

    Les intelligences vont moins vite que les engins spatiaux...

    Voilà bientôt vingt ans (en janvier 1986), la sonde spatiale Voyager 2 approchait la planète Uranus, septième des neuf planètes du système solaire, et transmettait des informations qui ne devaient être rendues publiques que des années plus tard, puisque la revue Creation dut attendre juin 2002 pour en faire état.

    Il est vrai que certaines des découvertes signalées contredisaient fortement le dogme évolutionniste et que, Uranus tenant son nom d’Uranie qui était la muse de l’astronomie, même les esprits les plus "scientifiquement corrects" auraient dû voir un signe dans le fait que cette planète est, entre toutes, celle qui porte la contradiction la plus claire à la vulgate big-banguiste.

    Mais les tabous étant plus fort que les évidences, deux décennies plus tard, alors même que la théorie du Big Bang est à peu près discréditée ou, pour le moins, sérieusement cabossée, le dogme évolutionniste continue de régner sans partage même quand ses incohérences crèvent littéralement les yeux.

    Uranus, dix-neuf fois plus éloignée du Soleil que la Terre, tourne sur elle-même en une dizaine d’heures pour effectuer une révolution complète en quatre-vingt-quatre années terrestres. Dès 1948, on a observé que les cinq satellites d’Uranus alors connus (en 1979, l’encyclopédie illustrée Larousse ne lui en accordait encore qu’une quinzaine) tournent sur un plan orbital perpendiculaire à celui des autres planètes et leurs satellites. L’axe de rotation et les pôles de cette étrange planète sont alignés sur ce plan. Cela signifie qu’Uranus, contrairement aux autres corps célestes du système, tourne sur son flanc, et que son point le plus chaud n’est pas son équateur mais le pôle exposé au Soleil.

    Cette simple observation fait exploser (chacun son tour...) la théorie du Big Bang. Celle-ci stipule en effet que toutes les planètes et leurs satellites ont pour origine une unique masse gazeuse originelle qui aurait tourné sur elle-même jusqu’à donner naissance au système solaire.

    Impossible, dans ce cas de figure, d’expliquer comment un système planétaire sur neuf aurait pu, lui seul, réagir différemment des autres à la même cause.

    Contraints de reconnaître que l’exception d’Uranus battait en brèche le mythe du Big Bang. les évolutionnistes ont alors posé l’hypothèse d’une autre catastrophe cosmique, postérieure donc au Big Bang et qui aurait, en quelque sorte, fait basculer le système Uranus et lui seul. Las ! A peine formulée, cette théorie d’exception s’est heurtée à des impossibilités : l’ellipse d’Uranus ne montre aucun signe de catastrophe ou de collision. Bien au contraire ! Elle est, après celle de Vénus, de la Terre et de Neptune, l’ellipse la plus parfaite et la plus circulaire. De plus, Uranus est, après la Terre, la planète la mieux alignée au plan écliptique.

    Autre obstacle : on ne trouve aucun des débris planétaires innombrables qu’une telle collision cosmique aurait forcément provoqué à l’exception de la vingtaine de satellites répertoriés depuis Voyager 2.

    Enfin, un tel phénomène cosmique aurait concassé les cinq satellites initialement connus (avant Voyager 2) et qui constituaient seulement 0,01 % de la masse totale d’Uranus.

    Mais au lieu de se rendre à ce constat d’impossibilité, certains scientifiques ont jugé astucieux d’ajouter une nouvelle catastrophe cosmique qui chaque fois, vient "expliquer" toute nouvelle incohérence manifeste. Ainsi, Miranda, qui, jusqu’à Voyager 2 était le plus petit satellite connu d’Uranus avec un diamètre de 472 kilomètres, serait-il le résultat de cinq catastrophes !

    Il est d’ailleurs assez comique de voir les évolutionnistes s’attacher, pour se débarrasser de ces particularités indisciplinées, à l’hypothèse passe-partout d’une Grande Catastrophe qu’ils rejettent par ailleurs avec un haussement d’épaules quand les créationnistes l’avancent pour justifier la réalité historique du déluge ou les datations courtes par l’examen des couches géologiques.

    Mais décidément bien arrogant, le "frère" d’Uranie inflige d’autres démentis aux sectateurs du Big Bang.

    A l’inverse des trois autres planètes gazeuses du système solaire qui délivrent beaucoup plus d’énergie qu’elles n’en reçoivent du Soleil, Uranus, en proportion de sa taille, de sa composition atmosphérique, de sa vitesse de rotation et de son positionnement dans le système solaire, dégage bien peu d’énergie. Voyager 2 a permis de découvrir aussi que le champ magnétique de cette planète forme un angle de 60° avec son nord géographique, son axe de rotation. Cela étonne fort les "scientifiques", car le champ magnétique se forme sous l’effet de l’axe de rotation par un phénomène d’effet dynamo.

    Récemment encore, de telles interprétations, peu crédibles, ont déformé la véracité des toutes dernières informations fournies par la sonde spatiale Cassini, approchant et livrant des images inédites du voile brumeux qui enveloppe Titan, un des plus grands satellites de Saturne.

    Ainsi, Toby Owens du Jet Propulsion Laboratory déclare dans le Daily Telegraph du 28 octobre 2004 que Titan a « une atmosphère primitive qui a été préservée pendant 4,6 milliards d’années. » Et d’ajouter, dans l’enthousiasme : « Titan nous donne la chance d’un voyage cosmique et temporel... en revenant aux premiers jours de la Terre quand elle avait une atmosphère similaire ».

    Sans insister une fois de plus sur le caractère arbitraire et fantasmagorique de la datation de l’origine du système solaire, on peut s’étonner de découvrir, d’après cette assertion, qu’un "scientifique" était présent avec son laboratoire portable quand la Terre fut créée. Faute de quoi, on se demande ce qui autorise quiconque à garantir la composition primitive de l’atmosphère terrestre à l’époque...

    Le bulletin trimestriel créationniste Creation update n° 55, paru en décembre 2004, ne manque pas de souligner cette galipette scientifique derrière laquelle se cache, comme toujours, l’antique refus de reconnaître la main du Créateur dans Son Œuvre.

    Tout en prétendant dénoncer dans la Genèse une fable écrite par des escrocs à l’usage de demeurés, les joueurs de Meccano savant s’agitent comiquement pour fabriquer une nouvelle usine à gaz qui remplacera la vieille machinerie déglinguée du darwinisme et produira de ces nouveaux mensonges fumigènes, de composition invérifiable, dont le but est de cacher la vérité et d’embrumer les esprits.

    Mais au-dessus de leurs gesticulations, dans la Gloire des cieux, Uranus continuera de briller discrètement. Comme le sourire d’un père de famille qui, au fond, s’amuse de la désobéissance entêtée, vaniteuse et maladroite de ses enfants rebelles.

    Car jusqu’à la fin des temps...

    Les cieux racontent la gloire de Dieu, et le firmament annonce l’oeuvre de ses mains. (Psaume XIX,1-2).

    ***
    Uranus

    Planète géante gazeuse à peine visible a l’oeil nu à une distance moyenne du Soleil de 2 870 972 200 km.

    Son diamètre équatorial est de 52 400 km. Sa période de révolution est de 84,016846 ans.

    Sa période de rotation (jour) dure 17,23 heures.

    Inclinaison orbitale : 0,76986°.

    L’axe de rotation est incliné de 97,86°.

    Sa vitesse orbitale moyenne est de 6,83 km/s.

    La vitesse de libération équatoriale y est de 21,29 km/s.

    Sa masse est de 14,48 (Terre = 1).

    Sa densité : 1,3 (Terre = 1).

    Sa gravité au sol : 1,15 (Terre = 1).

    Température au sol : -197° là où la pression est de 1 bar.

    Composants de l’atmosphère : H2, He, CH4.

    Nombres d’anneaux : 11.

    Ses satellites que l’on découvre au fil des années portent soit des numéros anonymes soit des noms tirés de l’oeuvre de Shakespeare : Cordelia (fille du roi Lear), Ophelia (fille de Polonius dans "Hamlet"), Bianca (soeur de "La Mégère apprivoisée"),  Cressida (fille de Calchas dans "Troilus et Cressida"), Desdemona (épouse d’Othello), Juliette (de Roméo...), Portia (épouse de "César"), Rosalind (l’androgyne de "Comme il vous plaira"), Puck (esprit malin du "Songe").

    Seul Belinda porte le nom d’une héroïne d’Alexander Pope.

  • État traditionnel et État totalitaire

    « Le principe d’une autorité centrale inattaquable se « sclérose » et dégénère lorsqu’il est affirmé à travers un système qui contrôle tout, qui enrégimente tout et qui intervient partout selon la fameuse formule « Tout dans l’État, rien hors de l’État, rien contre l’État ». Si l’on ne précise pas en quels termes on doit concevoir cette inclusion, une formule de ce genre ne peut valoir que dans le cadre d’un étatisme de type soviétique, étant donné les prémisses matérialistes, collectivistes et mécanicistes de celui-ci : non pour un système de type traditionnel reposant sur des valeurs spirituelles, sur la reconnaissance du sens de la personnalité et sur le principe hiérarchique. C’est pourquoi, dans la polémique politique, on a pu concevoir un commun dénominateur en parlant d’un totalitarisme de Droite et d’un totalitarisme de gauche : ce qui est une véritable absurdité.

    L’État traditionnel est organique, mais non totalitaire. Il est différencié et articulé, il admet des zones d’autonomie partielle. Il coordonne et fait participer à une unité supérieure des forces dont il reconnaît cependant la liberté. Précisément parce qu’il est fort, il n’a pas besoin de recourir à une centralisation mécanique : celle-ci n’est réclamée que lorsqu’il faut contrôler une masse informe et atomique d’individus et de volontés, ce qui fait, d’ailleurs, que le désordre ne pourra jamais être vraiment éliminé, mais seulement contenu provisoirement. Pour reprendre une heureuse expression de Walter Heinrich, l’État authentique est omnia potens, non omnia facens, c’est-à-dire qu’il détient au centre un pouvoir absolu qu’il peut et doit faire valoir sans entraves en cas de nécessité ou dans les décisions ultimes, au-delà du fétichisme de l’ « État de droit » ; mais il n’intervient pas partout, il ne se substitue pas à tout, il ne vise pas à imposer une vie de caserne (au sens négatif), ni un conformisme niveleur, au lieu de la reconnaissance libre et du loyalisme ; il ne procède pas à des interventions impertinentes et imbéciles du domaine public et de l’ « étatique » dans le domaine privé. L’image traditionnelle, c’est celle d’une gravitation naturelle de secteurs et d’unités partielles autour d’un centre qui commande sans contraindre, agit par son prestige, par une autorité qui, certes, peut avoir recours à la force, mais qui s’en abstient le plus possible. La preuve de la force effective d’un État est donnée par la mesure de la marge qu’il peut concéder à une décentralisation partielle et rationnelle. L’ingérence systématique de l’État ne peut être un principe que dans le socialisme d’État technocratique et matérialiste.

    Par contraste, la tâche essentielle de l’État authentique est de créer un certain climat général, immatériel en un certain sens, selon ce qui fut propre à tous les régimes de l’époque précédente. Telle est la condition nécessaire afin qu’un système où la liberté est toujours le facteur fondamental prenne forme de manière pratiquement spontanée et fonctionne de façon juste, avec un minimum d’interventions rectificatrices. »

    Julius Evola, « Le fascisme vu de Droite ».

    http://dhdc2917.eu/page/4/

  • Columbo et les autres...

    Columbo et les autres... On sait le grand nombre de séries télévisées policières. On sait aussi leur succès. Leur arrivée sur les écrans n’est pas récente. Le fait « policier » n’est d’ailleurs pas limité au petit écran et s’est donc vu aussi exploité au cinéma ou dans la littérature.
    L’opposition systématique, pavlovienne, au qualificatif « américain », comme la plupart des formulations de type « anti », ne peut être que caricature : « Quand j’entends les talons claquer, je pressens que les cerveaux se ferment. » Maréchal Lyautey. Après tout, par exemple, on ne voit pas pourquoi le problème de la centralisation politique, très mesuré aux Etats-Unis, devrait être éludé. La série policière intitulée « Columbo » est américaine. Encore une fois, elle est loin d’être la seule, américaine ou pas. Créée en 1968, elle dispose de ses spécificités, à commencer par un personnage principal que l’on peut qualifier d’atypique. Anti-héros, le personnage principal a un visage et un physique disgracieux. Il n’a pas de certitude. A l’image des penseurs authentiques, ceux des Lumières ou Heidegger par exemple, sa démarche est hésitante, inquiète, méandrée. Son chien est d’une race qui prête peut être le plus à déclencher le sourire. Sa voiture n’est qu’une caisse. Même ses vêtements sont grossiers. On sait aussi ses difficultés avec le monde matériel, malhabile qu’il est. En cela, il est radicalement différents des policiers auxquels télespectateurs et spectateurs ont coutume de s’identifier : qui voudrait ressembler à Columbo ? Pourtant, le personnage est psychologiquement anormalement fin. Se voit donc posé le problème du choix entre le contenant et le contenu, ce dernier étant de plus en plus délaissé depuis l’avènement de la postmodernité.
    Un épisode de cette série nous semble aujourd’hui anormalement long (90 minutes), soit près du double auquel on est désormais habitué. Les épisodes courts s’expliquent par la difficulté qu’éprouvent nos contemporains à se concentrer longuement. Plus grave, nous en sommes maintenant parvenus au stade ou dans un seul épisode, deux intrigues sont proposées, une seule passant désormais pour lassante. C’est ainsi qu’une intrigue ne fait plus que 22.5 minutes alors que c’était quatre fois plus dans le cadre de la série Columbo.
    Pas de suspens non plus dans cette série puisque l’on sait dès le départ qui est le meurtrier. Pas non plus d’actions avec coups de feu ou bagarres. Contrairement aux autres séries ou films contemporains, l’action donc le corps, est absente. Columbo, contrairement aux films à succès plus récents dans lesquels le rôle principal est tenu par Mel Gibson (l’arme fatale) ou Bruce Willis (Die Hard), est cérébral parce que uniquement psychologique. D’où le choix plébiscitaire des seconds aujourd’hui aux dépens du premier.
    Depuis quelques années, on a vu apparaître, avec beaucoup de succès au demeurant, des séries policières à base scientifique. Ce sont alors les expertises scientifiques – « calculantes » aurait écrit Heidegger – qui font la différence et élucident l’affaire, démasquant le meurtrier. Voilà qui nous rappelle une des critiques majeures effectuées par l’Ecole de Francfort, notamment Adorno, à l’encontre du cercle de Vienne. Si le monde est réduit à une seule base de données empiriques, s’il n’est qu’équationnel, fatalement la pensée dans ce qu’elle a de méditatif, n’a plus de raison d’être. La dictature du fait objectif (la science, le calcul, l’utile, l’intérêt, l’efficace) ne peut que mettre en berne toute forme de pensée spéculative. En cela, je suis intimement convaincu, d’une part du triomphe actuel du positivisme comtien, d’autre part que le fait de l’existence contemporaine de ses séries scientifiques en est l’un des marqueurs.

    Philippe Delbauvre http://www.voxnr.com/cc/dh_autres/EFZZlyukAVhOYGwffW.shtml

  • Le plus ancien globe terrestre à montrer le Nouveau Monde

    7hy8.jpgUn globe terrestre remontant aux années 1500 a été retrouvé. Fabriqué à partir d’un œuf d’autruche, il comporte 71 noms dont certains font référence au Nouveau Monde.

     

    Baptisé Erdapfel, le plus ancien globe terrestre jamais retrouvé a été fabriqué en 1492 par Martin Behaim. Au vu de cette date, il ne comporte logiquement pas le continent américain à peine découvert à cette époque. C’est donc une remarquable trouvaille qui vient d’être annoncée par des spécialistes : celle d’un globe remontant aux années 1500 et montrant le Nouveau Monde. L’objet pourrait ainsi être le plus ancien globe terrestre trouvé et représentant le continent. [...]

     

     

     

    Pour percer les secrets de l’objet, le scientifique a utilisé la datation au carbone, des tests de tomographie informatique, une évaluation de l’encre, ainsi qu’une analyse géographique, cartographique et historique. Ceci a permis de découvrir que le globe a été fabriqué à partir d’un œuf d’autruche, plus précisément de deux moitiés inférieures de deux œufs. Il daterait d’environ 1504 et aurait été conçu à Florence en Italie. [...]

    Maxisciences   http://histoire.fdesouche.com

  • Pourquoi les identités régionales ont à espérer du réveil des nations

    Face au patriotisme français, l’un des arguments les plus fréquemment rencontrés est celui du caractère mythologique de la France, qui ne serait qu’un amas de régions mises par l’histoire à la botte d’un État central tyrannique. Bainville, Michelet, Bloch et Braudel se retrouvaient au moins quand face à eux se dressait cet absurde. La France est. Ceci étant dit, la préoccupation que j’ai ici n’est pas de réécrire une histoire de France. J’en serais d’ailleurs bien incapable. Il s’agira de montrer comment la diversité de la France peut faire synergie et non conflit avec une indivisibilité nationale. Autrement dit, l’État est une chance pour les régions, et vice-versa. Cette vision entre en totale contradiction avec la supercherie de « l’Europe des régions », tartuferie à laquelle je consacrerai le premier point de mon analyse. Le second tâchera de saisir les intérêts particuliers et communs d’une combinaison entre État et régions. Le troisième précisera quelques conditions que je pense nécessaires à la bonne marche de cette régénération.

    Les faux-amis de l’identité régionale

    Par ma mère je suis breton. Voilà plus de vingt ans que j’ai le granit pour oreiller, le vent pour couverture et le bruit des vagues pour métronome. Je n’oublies pas que la langue d’ici a connu une E.M.I. (expérience de mort imminente) du fait de la République. Je sais que la duchesse Anne ne s’est pas donnée avec joie à Charles VIII. Je n’oublies pas non plus comment la péninsule s’est offerte aux Plantagenêts contre les rois de France. Mais, plus que tout, je garde en mémoire Du Guesclin, ce Breton connétable, icône homérique, exempt à jamais de tout procès en trahison. Bref, je ne suis pas de ceux qui s’arrangent avec leur mémoire et c’est par souci d’avenir que mes yeux se fatiguent sur les traces du passé.

    Quel avenir m’est donc proposé ? Le plus probable semble être un monde uniformisé dans sa pratique politique, son mode de vie, ses cultes, ses aspirations et ses stratifications sociales. Si j’en voulais, je ne serais pas ici. Que l’on se sente d’abord Breton ou Français, on entend tambouriner à la porte les mêmes V.R.P. de la globalisation hédoniste et intempestive. Ces vendeurs de cravates et de constitution disent au patriote français qu’il a rendez-vous chez le taxidermiste. Pour faciliter sa mort, ils agitent la vieille lune d’un monde refragmenté respectueux des identités réelles. Ils appellent ça l’Europe des régions. Ils oublient que les frontières sont précieuses, même inconsciemment, tant leur construction a été laborieuse. Ils oublient l’irrédentisme, les malgré-nous et mes aïeuls partis du Finistère vers le front, sachant de quel côté du Rhin venait le danger pour leur foyer. À cours d’arguments identitaires, ils prétextent l’efficience économique transfrontalière dans une perspective de compétition mondialisée. À cela, j’expose deux arguments :

    •La coopération transfrontalière était une réalité précédent de longtemps la « (dé)construction européenne ».

    •Quand on transforme un territoire et ses occupants en autant d’éléments d’optimisation de la production, comment peut-on oser se réclamer de l’humanisme ? Avec Maurras, je préfère le Sang à l’Or. Avec Barrès, « je défends mon cimetière ».

    Alors, Bruxelles à Brest et à Bayonne pour les libérer de Paris ? La ficelle est grosse et ne résiste pas à l’analyse. La dissolution de l’État-nation ne se fera que pour renforcer une gouvernance européenne d’abord, euro-atlantique ensuite – je renvois aux travaux de Pierre Hillard –, globalisée enfin si la multipolarité géopolitique finit par rendre l’âme. Il n’est cependant pas dans les projets de l’orchestre oligarchique de faire jouer la partition des épopées de jadis. La subordination à la dérégulation économique, morale et identitaire prévaudra. On pourra avoir ici des druides, là une macro-région rhénane, tantôt l’ikkuriña flottant, tantôt les panneaux d’indication écrits en langue d’oc. Les druides seront en jeans et les panneaux diront comment se remplir le ventre d’un bon burger au coulommiers made in Taiwan. On ne multipliera pas les identités. Au mieux se contentera-t-on de devenir un zoo d’indigènes qui prostituent une identité amputée et réduite au folklore. Que ne regrettera-t-on pas d’être devenus les fossoyeurs enterrés de l’Histoire, comme les Parlements furent ceux de l’Ancien Régime… Ce qui attend les régions au carrefour de l’euro-mondialisme, ce n’est pas la libération du joug national mais un alignement létal qui ne laissera de variation dans le monde que sur les détails. Alors je demande aux régionalistes et aux indépendantistes : votre rancune face à des États va-t-elle jusqu’à faire de vous des kamikazes ? Ne perdez pas de vue qu’il sera toujours plus aisé de traiter avec des acteurs touchés de politique, porteurs d’un projet lisible et surtout soucieux de la notion d’identité. Si j’étais fermement partisan d’une Bretagne indépendante, je me sentirais toujours plus proche des hommes de Valmy que de ceux de la City. Le morcellement régional a toujours été joué par l’empire comme un carte intelligente pour la domination, des Achéménides jusqu’à Hitler en passant par Édouard III. La raison invite donc à ne pas envisager de fest-noz autour du cadavre de Marianne. Plus encore, elle peut servir à envisager une synergie réelle entre la France et ses régions, aboutissant à donner à l’homme l’Être en plus de l’Avoir.

    Le marteau et l’enclume plutôt que l’étau

    Exit donc la voie vers cet étau des nationalités, enserrées entre un hyper-local divisé en préfectures qui appliquent les directives, et le global impalpable qui les dicte. En somme, un retour à la féodalité, avec le Carrefour market en guise de basilique et Georges Soros en parangon de vertu. Mieux que Saint-Benoît et Roland de Ronceveaux… J’avais expliqué précédemment pourquoi cette issue n’était ni fatale, ni logique. Voyons donc pourquoi les identités locales ont à espérer du réveil des nations. Diplomatiquement, économiquement, démographiquement et stratégiquement, les principes de la paix de Munster réadaptés aux réalités actuelles sont à même d’offrir une alternative à la « globalindividualisation ». Les régions seules et divisées ne souffriraient pas les puissances supranationales dont on sait les intentions. « Elles peuvent se réunir », me dira-t-on. Oui, on appelle cela un pays… Un État fort est seul à même de créer un corridor permettant de sortir des rails euro-mondialistes. Cet État s’enracine dans un territoire varié physiquement et culturellement. Les régions font la France. Les régions sont la France. Si la France est mise au ban de l’histoire, point de salut pour la bouillabaisse ni le bœuf bourguignon pourquoi les identités locales ont à espérer du réveil des nations pourquoi les identités locales ont à espérer du réveil des nations – à digérer avec un bon armagnac… Le principe de l’union faisant la force a autant démontré son efficience pour la France que son inconsistance pour l’Europe. En cause : l’Histoire. Le rayonnement français a une fâcheuse tendance à l’éclipse. Néanmoins, il n’est pas sot de penser qu’une fois recouvrée une marge de manœuvre importante, il soit le meilleur ambassadeur de la richesse de ses terroirs et la plus belle vitrine d’une communion nationale réussie sans déracinement des individus. On en déduira ce qu’on voudra quant à l’actualité.

    La France ne saurait cependant être l’idiote utile des fêtes villageoises. Ne tombons pas dans les images d’Épinal seulement bonnes à décorer les bouteilles de vins de table. Primo, la France ne peut décemment pas omettre son essence composite, faute de quoi elle serait auto-dissoute. La France est ses régions, plus une volonté bien cernée par Ernest Renan. Si elle néglige cette « heureuse diversité » chère à Bainville, elle se condamne à n’être qu’un amas de cabinets ministériels mal gérés, une oligarchie de vampires déracinés. Secundo, la France, pour disposer des outils nécessaires à son indépendance connus au moins depuis Richelieu et Colbert, doit pouvoir compter sur toutes les ressources naturelles et humaines disposées sur son territoire. Despote, elle passerait pour un prisme contingent entre les populations et l’idéal d’un monde régionalisé et libérateur. Arrogante, elle demanderait « qui t’a fait région ? » et se verrait répondre « qui t’a fait État ? » L’ambition patriotique ne doit jamais perdre de vue le réel qu’elle prétend légitimement défendre. Alors, l’enracinement local et le sentiment national retrouveront leur communion naturelle que l’on a trop souvent occultée sur fond de procès du jacobinisme. Alors, les identités pourront être préservées dans leur diversité, et les marteaux des provinces pourront battre tous les impérialismes déracinants sur l’enclume immuable de la nation régénérée. Alors, aussi, pourrons-nous préserver un monde hétérogène où voyager voudra dire autre chose qu’acheter ailleurs. Ce reflux de l’uniformisation, aussi utopique puisse-t-il paraître, est parfaitement envisageable sous deux conditions essentielles.

    Impérative reconnaissance

    Il faut dans un premier temps que l’État reconnaisse, comme nous l’avons dit, sa composition diverse. Après tout, ce ne serait que pour mieux exposer sa puissance intégratrice, tant malmenée aujourd’hui. Il ne s’agit de rien de moins que d’user à cet escient de la décentralisation. Laisser au local le droit et les moyens d’exister avec sa langue, l’enseignement de son histoire, l’entretien de son patrimoine, la possibilité d’habiter le territoire sans avoir à être happé tôt ou tard par les grandes métropoles. Il semble juste, dans ce contexte, de réhabiliter le critère historique et culturel pour redécouper le territoire. Ainsi, ne pas oublier que les Ducs de Bretagne logeaient à Nantes, ou que les cantons sont plus représentatifs des réalités sociales que les départements, dont la genèse était administrative et le devenir, politicien. Il ne s’agit pas de retourner aux privilèges des Marches d’Ancien Régime mais de redonner nom et repère à la réalité passée, car « mal nommer les choses, c’est ajouter au malheur du monde ». Ceux qui prétendent venir de nulle part ne vont généralement pas bien loin. Nous caressons là un problème plus vaste : celui de la ringardisation de l’histoire et du passé. On n’imposera pas aux enfants la lecture de la Condition de l’homme moderne de Hannah Arendt ou des Désillusions du progrès de Raymond Aron. Il faudra néanmoins, pour que l’on arrête de caillasser de concert et les Gaulois urbains et les ploucs ruraux, que l’ethnomasochisme hexagonal cesse.

    Le jour où j’aurais honte d’être Français et où je serais fier d’être Breton (ou le contraire), je serais un apatride réfugié dans la connerie.

    Pour éviter ce triste sort, je m’attache donc à savoir l’histoire de mes aïeux, ceux de Normandie comme ceux de Bretagne. Force est alors de constater que les pages de l’histoire ont lentement mais sûrement écrit les Nations. Si je ne la jugeais pas si néfaste et irrémédiable, je laisserais les pseudo-identitaires tenter l’aventure du l’Europe des régions, et au-delà du mondialisme régionalisé, juste pour rire… Penser global, agir local. Soit uniformiser les gestes au service d’une même fin que l’on ne choisit pas. Je m’y refuse et je crois que la France est le chemin réel indispensable à la pérennité régionale. Je ne me vends pas à la France, je lui appartiens par ma naissance. Je ne tire pas au canon sur la blanche hermine, je prends acte de l’histoire et je ne crois pas qu’il y ait plus de bonheur à remplacer la langue d’Hélias par celle de Steve Jobs que par celle de Molière.

    Je laisse à d’autres la politique du pire. Je reconnais ma terre comme française et j’y reconnais l’autorité de l’État. Je crois qu’en politique comme en langue et en droit, la souveraineté nationale doit primer. C’est dans la France que je mets mes forces et mes espoirs, non pour appeler de nouvelles colonnes infernales et de nouveaux hussards mais pour arrêter l’hémorragie culturelle, paysagère et mémorielle qui se fiche bien des limites de circonscription. Je pense, enfin, que l’histoire est encore le meilleur moyen d’une prise de conscience permettant de passer du mythe de l’étau à la réaction du marteau et de l’enclume. C’est dans l’échange et l’étude que l’on se rend compte que la ligne partagée par les Français est précisément celle du refus d’être alignés.

    Je crois donc en la  réconciliation du local et du national séparés par les Constituants parce que cette articulation est naturelle et produite par les siècles. J’embrasse la France, plus souvent sur sa main bretonne que sur son front parisien, mais elle reste la même grande et belle demoiselle. Au moins puis-je me vanter de ne pas être adultérin. Appel aux polygames et aux célibataires…

    Guillaume Enault http://www.europemaxima.com/?p=3039

     

    • D’abord mis en ligne sur Le Bréviaire des Patriotes, le 18 mars 2013.

  • Barrès redécouvre la Grèce (arch 1988)

    L'excellente biographie (1), que François Broche a consacrée à Maurice Barrès est une invitation à partir à la découverte de certaines œuvres de cet écrivain complexe et souvent mal connu.
    En 1906, Barrès est élu à l'Académie française au siège de José Maria de Hérédia, ce maître du Parnasse qui ciselait, sculptait, les vers de ses sonnets. En cette même année, paraît à la devanture des librairies « le voyage de Sparte », où l'auteur des «Déracinés» relate le séjour qu'il fit en Grèce en l'année 1900.
    L'homme s'était embarqué, pensant entreprendre un voyage initiatique. Partagé entre les exigences d'une sensibilité romantique et celle d'une raison très cartésienne, Barrès a l'intention, au cours de ce périple, « de reconnaître quel bénéfice moral nous pouvons encore tirer de la Grèce ».
    « J'ai traversé, confesse le voyageur, comme un colis des messageries, et nullement comme un Ulysse, une mer qui m'embrouillait tout ». Mais voici enfin, le Pirée ; derrière le port, la capitale de l'Attique, Et là, fichée sur cette très antique colline inspirée, l'Acropole où se meuvent les ombres des Chateaubriand, des Byron, des Lamartine, des Renan, des Leconte de Lisle... Barrès prend néanmoins vite congé de ces illustres mais encombrants fantômes. Il se rend compte qu'il  n'y a plus de place, en ce lieu bien encombré, pour le Démosthème des professeurs. Il importe désormais de procéder à la révision décapante d'un Hellénisme aussi onirique que théorique chanté avec leur lyres, par Leconte de Lisle ou Anatole France. Barrès se sent en revanche transporté en contemplant un paysan moderne descendant des derniers princes d'Athènes, juché sur un baudet, poursuivant son chemin au rythme cahotant de sa monture. Non sans amertume, il adresse des reproches à Pallas Athénée. Force lui est de constater que, sur l'Acropole, il a trouvé « la révélation d'une vie supérieure qui ne peut pas être la sienne ». Aux exposés théoriques, aux discours idéologiques, dirait-on aujourd'hui, sur les vertus de la démocratie athénienne, il oppose les hautes valeurs de la Cité de Sparte. Mais il n'est pas dupe. Avec franchise, il reconnaît que derrière les émotions, il ne peut croire aux dieux de tous ces Olympes. Avec son « naïf cœur gaulois » il demeure « un chrétien de la vallée du Rhin ». La Grèce ne peut être isolée dans un temps ou dans un espace. Ce regard original l'amène naturellement à célébrer les réminiscences de l'ancien paganisme et à chanter les valeurs du nationalisme et de l'enracinement.
    La pensée de Barrès a été souvent mutilée, réduite, ou encore caricaturée. Ce livre, écrit avec élégance, est une fête pour l'esprit. Il est aussi l'occasion opportune de lire un autre ouvrage écrit à la même époque et chantant, lui aussi, la Grèce antique. Celui-ci est dû à Charles Maurras. Et « Le voyage d'Athènes » vient enrichir ce superbe périple à travers la politique et la littérature.  
    Jean-Claude Lauret National Hebdo du 3 au 9 mars 1988
    1) - Editions du Trident,

  • « Le désert croît… ». Nietzsche et l’avilissement de l’homme

    La question de l’humanisme est viciée dans son principe même par la définition implicite de l’humain qu’elle présuppose. Si l’on envisage en effet l’humanité à la fois comme une fin et comme un tout, on s’interdit de saisir la véritable signification de l’humain. On disserte encore naïvement sur l’ambiguïté essentielle de l’homme, créature hybride, ni ange ni bête, mais hésitant toujours entre ces deux extrêmes, sans voir que cette représentation caricaturale de l’« humain » et de l’« inhumain » s’appuie sur une vision morale du monde surannée et pernicieuse. L’inhumanité de l’homme n’a ainsi de sens que si l’on sait avec certitude ce qui est proprement humain, c’est-à-dire si l’on attribue à l’homme une essence idéale, à laquelle il ne coïncide peut-être pas encore, mais qu’il doit pourtant s’efforcer de réaliser, comme sa vocation propre. C’est à cette non-coïncidence momentanée de l’homme avec sa nature véritable, qui serait d’être un sujet moral et libre, qu’il faudrait imputer les actes « inhumains » qu’on le voit partout commettre, si l’on en croit les thuriféraires attardés de l’idée de progrès. Or, si l’humanitarisme actuel a bien repris à son compte l’idéal chrétien d’humanisation, qui fait un devoir à l’homme de surmonter la part de bestialité en lui pour pouvoir accéder à l’humanité véritable, cela n’a pas eu pour effet la moralisation de l’homme, loin de là (1) ! C’est bien plutôt l’échec de toute tentative de rendre l’homme meilleur qui apparaît clairement dans le mélange d’incompréhension et de terreur panique que suscite le récit de la « barbarie » dont l’homme est toujours capable.

    Aussi est-il étonnant de voir que cet idéal, qui n’a jamais engendré qu’un respect abstrait de l’homme, au mieux de ses droits, mais pas de sa particularité, non seulement n’est pas abandonné, mais est maintenu et même renforcé : il faut « toujours plus » de civilisation, c’est-à-dire d’humanisme abstrait pour combattre la barbarie, alors que celle-ci se nourrit très certainement de l’hypocrisie et de la pusillanimité d’une politique angélique. L’opposition de Nietzsche à cet humanisme lénifiant, hérité de la pensée des Lumières et de Kant, est en ce sens salutaire. À ses yeux, l’histoire de la civilisation occidentale, qu’il résume à l’entreprise chrétienne d’humanisation de l’homme, est l’histoire du rapetissement de l’homme, de sa dénaturation. En cherchant à moraliser l’homme, on a simplement réussi à le mettre en contradiction avec lui-même, à le séparer de son animalité première. La morale chrétienne a ainsi creusé un abîme entre l’homme et la nature en faisant de lui le centre de la création, sa véritable raison d’être. Il lui fallait désormais se détacher de plus en plus de sa propre nature pour remplir sa destination finale, qui est d’être pleinement homme. L’affirmation de Kant selon laquelle il y a en chacun de nous un « intérêt naturel pour la moralité », une disposition morale qu’il nous suffit de développer pour devenir un homme digne de ce nom, explique que l’accomplissement de l’homme ait jusqu’ici été confondu, comme le souligne Nietzsche, avec son accomplissement moral. La question fondatrice et en apparence innocente de l’anthropologie morale, « Qu’est-ce que l’homme ? » (2), doit donc être impitoyablement rejetée, car elle suppose l’existence d’une essence invariable de la nature humaine. Elle avait en effet chez Kant le sens d’une incitation à faire ce que notre devoir nous impose de faire pour devenir réellement humains, alors que la vraie question pour Nietzsche, qui conçoit l’homme comme un « pont », une « transition » et non une fin, est de savoir jusqu’où l’homme peut aller, et ce par-delà bien et mal.

    Il n’est pas dès lors exagéré d’affirmer que Nietzsche est un humaniste, dans la mesure où son œuvre tout entière se présente comme une tentative pour ennoblir l’homme, le rendre plus fort, plus profond, plus « méchant ». Il s’oppose simplement à l’humanisme moral, dont le but est de domestiquer l’homme, comme on apprivoise la nature sauvage, et non de l’élever comme une « plante » pour lui permettre de tenir ses promesses. En faisant de l’homme « le seigneur de la nature », la philosophie pratique de Kant ouvrait en effet la voie à la singulière alliance de l’humanitarisme et du technicisme qui caractérise la modernité, le principe commun aux deux étant la subordination et la négation de la nature. Dans son rejet sans équivoque de la modernité, Nietzsche se pose, dès la Préface de 1872 à La Joute chez Homère, en héritier de la conception grecque de l’homme, qui nous paraîtrait bien « inhumaine » aujourd’hui, si nous devions la mesurer d’après nos critères moraux :

    Lorsqu’on parle d’humanité, on se fonde sur l’idée qu’elle pourrait bien être ce qui sépare l’homme de la nature et l’en distingue ; mais, en réalité, cette séparation n’existe pas : les propriétés « naturelles » et celles qu’on dit être proprement « humaines » se sont entremêlées de façon indissociable. Dans ses facultés les plus nobles et les plus élevées, l’homme est tout entier nature et porte en lui l’étrangeté de ce double caractère naturel. Ses aptitudes redoutables et qu’on tient pour inhumaines sont peut-être même le sol fécond d’où peut surgir une quelconque humanité sous la forme tant d’émotions que d’actions et d’œuvres. C’est ainsi que les Grecs, les hommes les plus humains de l’Antiquité, possèdent un caractère cruel et portent en eux la marque d’un désir sauvage de destruction : trait de caractère que révèle également fort bien l’image grotesquement agrandie de l’Hellène que renvoie Alexandre le Grand, mais qui, dans toute son histoire comme dans sa mythologie, ne peut que nous effrayer, nous qui n’avons pour l’observer que le concept pusillanime d’humanité au sens moderne.

    Il faut donc préciser ce qu’on entend par humain avant de jeter l’anathème sur certains hommes et leur reprocher leur prétendue « inhumanité ». Nietzsche montre que l’échelle de valeurs ici adoptée est biaisée et qu’elle repose en réalité sur le dogme chrétien de l’égalité naturelle des hommes. D’après lui, l’homme passe infiniment l’homme : un abîme sépare ainsi le dernier homme – l’homme fragmentaire, servile – du surhumain, l’homme complet, souverain. Aussi paradoxal que cela puisse paraître, c’est donc par philanthropie que Nietzsche exprime fréquemment son aversion pour ce que l’homme est devenu sous l’emprise de la morale judéo-chrétienne. Mais le constat amer de Zarathoustra que « le désert croît… » (3) ne signifie pas qu’il faille désespérer de l’homme : son ennoblissement reste possible aux yeux de Nietzsche, qui ne partage pas sur ce point le pessimisme de son « éducateur » Schopenhauer (4).

    Mais ennoblir l’homme ne consiste pas à l’affranchir du règne de la nature et de l’animalité, bien au contraire. C’est pour cela que Nietzsche se montre intransigeant – à l’instar de Schopenhauer certes, mais pour des raisons inverses – envers la notion kantienne d’une « dignité » inconditionnelle de l’homme :

    L’homme a été éduqué par ses erreurs : il ne se vit jamais, tout d’abord, qu’incomplètement, en second lieu il s’attribua des qualités imaginaires, en troisième lieu il se sentit dans une situation hiérarchique inexacte à l’égard de l’animal et de la nature, en quatrième lieu, il ne cessa d’inventer de nouvelles tables de biens et les considéra pendant un certain temps comme éternelles et inconditionnées de sorte que tantôt telle pulsion et tel état humain, tantôt tels autres occupèrent le premier rang et furent ennoblis par suite de cette appréciation. Si l’on compte pour rien ces quatre erreurs, on aura également compté pour rien l’humanitarisme, l’humanité et la « dignité humaine » (5).

    Contrairement aux traditionnels réformateurs politiques et moraux, Nietzsche ne souhaite donc guère changer la nature humaine de fond en comble, mais la retrouver sous le masque complaisant de la moralité. Ramener « l’humanisation » ou la « moralisation » à une dénaturation de l’homme lui permet ainsi de dénoncer en passant les rêves d’ennoblissement qui font peu de cas de l’humanité véritable. On ne peut en effet se défendre de voir dans la volonté révolutionnaire de faire progresser l’humanité dans son ensemble une traduction laïque de la morale socratique et chrétienne du perfectionnement moral. Dans les deux cas, il s’agit de rendre l’humanité meilleure et d’ouvrir la voie à un « homme nouveau », qui aura surmonté tout ce que l’humanité ancienne contenait d’« inhumain ». Nietzsche a raison en ce sens de dénoncer « une chimère dans la théorie de la révolution » :

    Il est des visionnaires de la politique et de la société qui poussent de toute leur éloquence enflammée à un renversement total de l’ordre établi, dans la croyance qu’aussitôt après s’érigera comme de lui-même le temple le plus fier d’une belle humanité. Il persiste dans ces rêves dangereux un écho de la superstition de Rousseau, qui croit à la bonté de la nature humaine, une bonté miraculeuse, originelle, mais comme ensevelie désormais, et qui impute toute la faute de cet ensevelissement aux institutions de la civilisation, société, État, éducation (6).

    Non seulement l’humanisation conçue comme « amélioration » n’est pas un gage de progrès, mais elle repose surtout sur une fausse conception de l’homme et de ce qui est (ou peut devenir) humain. L’erreur fondamentale ici est, sous prétexte de droit à l’égalité, de concevoir l’humanité comme un tout, alors qu’il est manifeste que la notion d’humain recouvre d’immenses différences entre individus particuliers et entre « types », comme le dit Nietzsche. On ne parvient ainsi à l’homme en soi, cette « abstraction exsangue » (7), que par nivellement.

    Le règne misérable du dernier homme

    C’est précisément pour insister sur la grande plasticité de l’humain que Nietzsche creuse autant le fossé entre le « fort » et le « faible », l’homme tropical et l’homme domestiqué, le surhumain et le dernier homme. Comme son nom l’indique, le dernier homme représente l’homme le plus méprisable qui soit, le terme possible de l’évolution (ou plutôt de l’avilissement) de l’humanité, si le processus de décadence se poursuivait jusqu’au bout et mettait fin à toute perspective d’avenir. Cet homme crépusculaire est aux antipodes du surhumain, qui incarne au contraire l’avenir de l’humanité. En accentuant de la sorte le contraste entre ces deux pôles extrêmes de la hiérarchie humaine, Nietzsche a voulu dépeindre de la manière la plus vive le choix décisif entre montée et déclin que chacun de nous est selon lui nécessairement amené à faire. Ainsi, lorsque Zarathoustra brosse le portrait peu flatteur du dernier homme dans le Prologue, c’est dans l’espoir de susciter le mépris de la foule, que la description du type surhumain n’avait guère émue.

    Cet homoncule, cet homme avorté que Nietzsche voyait avec dégoût se profiler à l’horizon de la modernité, a renoncé à toute grandeur et n’aspire plus qu’à vivre confortablement et le plus longtemps possible. Semblable à un puceron hédoniste, il a en aversion le danger et la maladie : « On a son petit plaisir pour le jour et son petit plaisir pour la nuit : mais on révère la santé ». Tard-venu, il veut travailler le moins possible et met au-dessus de tout la paix, la tranquillité, la sécurité. Nietzsche compare pour cette raison cet adepte d’une vie sédentaire, en troupeau, à un animal grégaire. L’histoire de la civilisation occidentale est de ce fait l’histoire du déclin de l’Occident, de la « médiocrisation » et du nivellement des Européens, qui ont en commun les mêmes besoins grégaires. Certes, les sentiments grégaires ont toujours existé et ont toujours constitué un frein puissant à l’affirmation de fortes personnalités, mais ils avaient au moins mauvaise conscience avant le christianisme. Sanctifiés par lui, le laisser-aller, la pusillanimité (l’« humilité »), la lâcheté (la « prudence »), le goût du confort matériel et intellectuel s’étalent désormais au grand jour, sans la moindre vergogne.

    Les valeurs chrétiennes et démocratiques encourageraient de la sorte une vie parasitaire, tout entière vouée à la poursuite d’un bonheur mesquin et étriqué. Nietzsche n’hésite pas en effet à qualifier de « parasite » (8) l’avorton produit par la morale chrétienne et égalitaire, puisqu’il se niche dans tous les recoins et interstices de la vie et qu’il cherche à survivre aux dépens de son hôte involontaire. Délibérément provocatrice, cette image décrit à merveille la vie grégaire, une vie de totale dépendance, animée d’un secret ressentiment envers cela même qui la nourrit, tout comme le vrai parasite essaie de détruire le corps même qui lui sert de refuge … Il est frappant à cet égard de voir à quel point les nombreuses innovations technologiques de notre temps incitent à la paresse et à la servitude sous prétexte de « faciliter la vie ». Or, « la paresse, conçue comme inaptitude à un effort soutenu, est le propre de la dégénérescence » (9), d’après Nietzsche. Si l’on flatte de manière aussi éhontée la propension naturelle à la paresse, c’est dans le but non avoué d’affaiblir la volonté, de la rendre incapable d’une application durable. Aussi ne faut-il pas s’étonner si les derniers hommes se liquéfient face à la plus infime épreuve, si la moindre tension les désagrège. L’anémie de la volonté n’est que le résultat prévisible d’une vie en grande partie assistée, dépendante.

    Rejetant là encore tout point de vue moralisant, Nietzsche refuse de qualifier d’individualistes ou même d’égoïstes les hommes modernes. Car le « moi » n’est pas à ses yeux une unité, mais une pluralité de forces à organiser. Seul celui qui réussit cette hiérarchisation interne peut prétendre à un égoïsme sain et parfaitement conscient : « Toute vigueur, toute santé, toute vitalité, témoigne de la tension accrue vers l’instinct dominateur du moi / tout relâchement est décadence* » (10). L’hédonisme, le relâchement de la volonté sont des signes de décadence parce qu’ils manifestent l’absence d’un tel « instinct directeur », qui hiérarchise les différentes tendances du moi. L’égoïsme doit en effet être compris comme conquête de soi et non comme simple et timide conservation. Comme le but de l’égoïste conséquent est de parvenir à la maîtrise, l’égoïsme, comme le goût de la domination, a essentiellement besoin d’être éduqué. Pour reprendre le jeu de mots d’Ecce Homo, le véritable égoïsme (Selbstsucht) est dressage du moi (Selbstzucht) (11) et diffère essentiellement du contentement de soi, qui n’est qu’enflure et vanité. Autrement dit, la fierté n’est pas en soi condamnable, mais on ne peut y prétendre qu’à condition de parvenir à la maîtrise de soi. C’est seulement le « moi » non dressé qui est « haïssable » …

    Le véritable égoïsme ne consiste donc pas dans le souci maniaque de soi, l’intérêt exclusif pour sa propre personne, mais dans une juste estime de soi (12). Nietzsche dénonce ainsi l’hédonisme comme symptôme d’un ego déclinant, qui n’a plus la force de s’étendre, de subjuguer et qui ne fait plus que se flatter. L’égoïsme supérieur est bien plutôt du côté de la Selbstüberwindung, de l’effort constant pour se surmonter soi-même, un égoïsme donc très éloigné du repli frileux sur soi, du souci économe de sa petite santé … L’éducation de la volonté est en ce sens nécessaire pour renforcer l’homme, dont la pente naturelle est la paresse. Le but, comme l’écrit Nietzsche, est « d’obéir longuement, et dans une seule direction » (13). On parvient ainsi à la maîtrise à force d’application et de concentration d’esprit. Le dépassement de soi n’est plus alors source de douleur, mais disposition permanente. La force de la volonté patiemment éduquée permet d’éviter la dispersion et la fragmentation qui caractérisent l’homme moderne et de devenir un « homme total », l’inverse de l’homme fragmentaire ou du simple rouage.

    Au début de la Considération inactuelle qu’il a consacrée à Schopenhauer, Nietzsche dénonce en ce sens la déshumanisation qu’entraîne la société industrielle, qui fait de ses fonctionnaires de simples rouages de la gigantesque machine qu’elle est au fond : « À la question “Pourquoi vis-tu ?”, ils répondraient tous vite et fièrement – “pour devenir un bon citoyen, un savant, un homme d’État” – et pourtant ils sont quelque chose qui ne pourra jamais devenir autre chose, et pourquoi sont-ils justement cela ? Hélas, et rien de mieux ? » L’humanité est irrémédiablement fragmentée par l’exigence économique de rentabilité, qui vise à confiner chacun dans un recoin, dans une « spécialité » (14). L’éducation moderne se donne d’ailleurs ouvertement pour tâche de perpétuer cette spécialisation excessive, dans la mesure où elle forme à des métiers particuliers plutôt que de tenter de développer l’indépendance d’esprit. L’indifférenciation est paradoxalement la rançon de cet éclatement généralisé des vocations en petits gagne-pain : il s’agit d’imposer à tous les mêmes désirs limités, les mêmes ambitions mesquines. A la vie dangereuse et inconfortable de l’esprit libre s’oppose ainsi l’obsession du dernier homme pour le confort et la sécurité, en même temps que son hédonisme mou de consommateur passif. Il voudrait au fond être assuré contre tout, même contre la vie et contre soi-même. On tient là la formule du « bonheur pour tous », du bonheur grégaire qu’annonce l’idéologie du « Progrès » telle que la démasque Nietzsche : une vie presque végétative, en tout cas étriquée, réduite aux besoins les plus élémentaires, où il n’y a pas de place pour la grandeur et le dépassement de soi.

    Le caractère décadent de ce « bonheur » lénifiant, qui est avant tout une volonté d’engourdissement, l’aspiration à un profond sommeil ne fait aucun doute. Il masque à peine la profonde détresse spirituelle d’êtres qui cherchent plus à anesthésier la vie qu’à vivre. En ce sens, il exprime la lassitude plutôt que la maturité de l’homme. Les derniers hommes ont en effet un grand besoin de divertissements, de récréations pour oublier leur misère affective et pour s’oublier eux-mêmes : « Un peu de poison de-ci de-là : cela procure des rêves agréables. Et beaucoup de poison en dernier lieu, pour mourir agréablement ». Ils ne pensent qu’à se laisser aller, se relâcher, parce que pour eux la douleur est le mal absolu et qu’il leur faut littéralement se rétracter pour souffrir le moins possible. Nietzsche met particulièrement en avant l’adoption complaisante de la posture de la victime et la propension à justifier, à pardonner la faiblesse : on sait se montrer « compréhensif » et « tolérant », c’est-à-dire accommodant envers les autres et on attend d’eux en retour la même indulgence. L’affinité profonde entre l’idéologie égalitaire et la diabolisation compassionnelle de la souffrance apparaît dès lors clairement :

    Ce à quoi ils [les partisans des « idées modernes »] aimeraient tendre de toutes leurs forces, c’est la généralisation du bonheur du troupeau dans sa verte prairie, avec pour tout le monde sécurité, absence de danger, bien-être, allègement de la vie ; les deux chansonnettes et doctrines qu’ils entonnent le plus généreusement s’appellent « égalité des droits » et « compassion pour tout ce qui souffre », – et ils tiennent la souffrance elle-même pour quelque chose qu’il faut abolir .

    Nietzsche n’a que mépris pour le sentimentalisme, la « honteuse effémination sentimentale » (16) que l’on a le front de travestir en noblesse du sentiment. Loin de constituer un progrès en moralité, l’adoucissement de nos mœurs trahit une sensiblerie peu compatible avec la vertu véritablement humaine (17). Nietzsche rejette ainsi sans ambages le « mol concept » d’humanité, qui exclut de sa définition toute violence et toute dureté. Le ton de l’indignation morale, devenu spontané, masque mal la « dévirilisation » générale, l’incapacité à lutter. Sans surprise, les idéaux modernes portent au pinacle l’homoncule, l’avorton humain : il s’y reconnaît d’autant plus facilement qu’ils flattent son désir de se dissimuler derrière les feuilles de vigne morales de la « dignité » et de la « responsabilité ».

    La forte séduction qu’exercent les valeurs « humanistes » vient en effet de ce qu’elles rendent possible l’oubli de soi, la dépersonnalisation de l’individu. La curiosité émoussée et les nerfs fatigués des derniers hommes les contraignent à recourir à des stimulants toujours plus forts. Ce besoin physiologique de narcotiques en tous genres, poussé à son comble, semble conduire tout droit à ce que Nietzsche appelle le « bouddhisme européen », c’est-à-dire à une époque de consomption sénile. Le slogan socialiste Ni dieu ni maître serait alors réalisé : il n’y aurait plus de berger, mais un seul troupeau, comme le dit le Prologue du Zarathoustra … Nietzsche dénonce dans le § 173 d’Aurore les arrière-pensées des « apologistes du travail », qui veulent briser l’individu, l’étourdir, mais il est loin de voir comme un Lafargue dans la paresse un remède à l’oubli volontaire de soi dans le travail. Elle est bien plutôt une autre manière de s’oublier, de se vautrer, de s’affaler de tout son long et n’a donc rien de commun avec l’otium, le loisir actif que Nietzsche oppose à la hâte indécente qui caractérise les Occidentaux. Il insiste ainsi sur l’égale passivité de l’affairement et du repos intégral qui le suit, de la suractivité morbide et de l’avachissement auquel donnent lieu par exemple aujourd’hui les sacro-saintes « vacances », qui signifient en réalité vacance de l’esprit … Dans les deux cas, il s’agit de se fuir, de se distraire, comme si on ne supportait pas de rester un seul instant seul avec soi-même. La diminution conséquente du temps de travail grâce aux efforts des socialistes a donné raison à Nietzsche : l’aliénation par le travail a laissé place à l’aliénation par les « industries du loisir » ; on ne sait pas quoi faire de son temps libre et on est reconnaissant à ceux qui montrent comment l’occuper « utilement ». Dans un texte posthume de 1881, Nietzsche juge ainsi les divertissements modernes « d’une parfaite médiocrité, car il faut y éviter une trop grande dépense d’esprit et de force, donc non plus en exiger trop – il s’agit de se reposer » (18). On retrouve là les petits plaisirs dont raffole le dernier homme, qui ignore tout de la contemplation ou de l’oisiveté active propres au surhumain.

    Certes, le surhumain n’est qu’une représentation, un contre-idéal qu’il oppose au nihilisme tranquille et béat du dernier homme, mais Nietzsche s’accroche à cette possibilité presque idéale, au risque de paraître céder au donquichottisme. Il veut croire que l’avilissement de l’humanité n’est pas irréversible, qu’il est possible de lui indiquer à nouveau la voie de la grandeur, du dépassement de soi. Cette volonté angoissée de remédier au déclin de l’homme apparaît clairement dans un fragment de 1874, alors qu’il n’a que trente ans :

    Je n’arrive pas à croire que l’homme soit cet être qui rampe à travers la vie avec une sombre application, apprend, calcule, parle de politique, lit des livres, engendre des enfants et se couche pour mourir – ce n’est alors qu’une larve d’insecte, quelque chose de méprisable, de périssable et complètement superficiel. Vivre ainsi n’est rien d’autre qu’un mauvais rêve (19).

    La victoire sur le dégoût

    Nietzsche fait ainsi du surhumain le sens et la raison d’être de l’humain pour montrer que le nihilisme n’est pas une fatalité, qu’il peut et doit être surmonté. Cela n’a rien d’un geste humanitaire, comme le rappelle le § 377 du Gai savoir, car ce n’est pas l’amour abstrait de l’humanité qui anime Nietzsche, mais plutôt l’amour du surhumain à venir : « L’amour pour le surhumain est le remède contre la pitié pour l’homme : l’humanité devrait rapidement périr de cette compassion » (20). La pitié est en effet ici au service du rapetissement de l’homme puisqu’elle le conforte dans sa faiblesse et voit même en elle le signe d’une humanité supérieure. Tout compte fait, Nietzsche trouve plus humaine que la complaisance émolliente la dureté visant à rendre de nouveau possible la grandeur de la plante ou animal homme.

    Si la « dernière tentation » de Zarathoustra est bien la pitié qu’il ressent pour les « hommes supérieurs », il a plus de mal encore à surmonter son dégoût viscéral pour l’homme moderne. Cette réaction physiologique appelait aussi un remède pour ne pas donner lieu à l’amertume et à la misanthropie d’un Schopenhauer par exemple. Nietzsche décrit parfaitement cette victoire sur le dangereux dégoût dans Ecce Homo :

    Le sentiment d’humanité ne consiste pas chez moi à me sentir proche de l’homme tel qu’il est, mais à supporter seulement de me sentir proche de lui… Le sentiment d’humanité n’est chez moi qu’une continuelle victoire sur moi-même. […] Tout mon Zarathoustra n’est qu’un dithyrambe en l’honneur de la solitude, ou, si l’on m’a compris, en l’honneur de la pureté. […] Le dégoût de l’homme, de la « canaille », fut toujours mon plus grand péril (21).

    Il est donc nécessaire pour le philosophe-législateur de se projeter dans l’avenir pour ne pas entièrement désespérer de l’humanité. Le surhumain sert ainsi d’horizon non tant de l’attente messianique que de l’action présente. Il faut « vouloir » le surhumain pour le rendre possible, il faut créer cet avenir pour le moins incertain. Pour que cet espoir de renaturalisation de l’homme ne reste pas vain, il est nécessaire au préalable de mettre fin à toute espérance idéale. Ce n’est pas un hasard à cet égard si Nietzsche présente la doctrine de l’éternel retour comme la pensée la plus désespérante qui soit : ce n’est que du nihilisme « outrancier » ou « extatique » que peuvent surgir les conditions favorables à l’émergence du type surhumain. Il faut en quelque sorte faire le vide pour permettre la création de valeurs nouvelles favorisant la vie ascendante. Le « nihilisme extatique » de Nietzsche s’apparente dès lors à un pari pascalien inversé : pour prévenir le lent suicide de l’humanité, il faut faire résolument le choix de la terre, de la grandeur naturelle. Mieux vaut pour l’humanité périr courageusement en tentant de se dépasser elle-même que glisser insensiblement vers le nihilisme passif des derniers hommes.

    Le surhumain n’est donc en rien comparable à l’« homme nouveau » du christianisme et des révolutionnaires. Il est bien plutôt l’homme complet, souverain, qui non seulement ne cherche pas à faire table rase du passé, mais assume pleinement la responsabilité de l’ensemble de l’histoire. Ce parfait héritier se distingue par ce trait de l’homoncule, qui reste rivé au présent et qui n’a de ce fait aucun avenir. Libre d’esprit, il n’est pas asservi aux jugements moraux dominants et les grands mots de la vertu lui répugnent. Il vit dangereusement, rejetant toute forme de confort, avant tout le conformisme et les diverses consolations. La « nature humaine » reste donc plastique, en devenir pour Nietzsche : c’est en ce sens profond que le surhumain n’est pas le terme de l’évolution, mais un perpétuel dépassement de soi. A la triste uniformité des goûts et des aspirations des derniers hommes, Nietzsche oppose la vaste synthèse de pulsions contradictoires que doit accomplir le surhumain :

    L’homme suprême serait celui qui aurait la plus grande diversité d’instincts, et cela avec l’intensité la plus forte dans les limites de ce qui est encore supportable (22).

    L’indépendance apparaît ainsi comme la principale qualité de l’homme véritable, dont la force – intacte – de volonté lui permet de maîtriser une si grande diversité intérieure. Le surhumain est en ce sens une perspective plus raisonnable qu’il n’y paraît. « Celui qui a gardé et cultivé une forte volonté, jointe à un esprit vaste, a de meilleures chances que jamais » (23), écrit Nietzsche. Mais le désert continue entre-temps de croître …

    Yannis Constantinidès, « Le désert croît… Nietzsche et l’avilissement de l’homme », Noesis, 10 | 2006, 115-127.

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    Notes :

    (1) Cf. CId, « Divagations d’un Inactuel », § 37 : « “Sommes-nous vraiment devenus plus moraux ?” Le fait que tout le monde le croie est plutôt un argument contre cette théorie… Nous autres, hommes modernes, très délicats, très vulnérables, pleins d’égards pour tous et en exigeant de tous, nous nous imaginons en fait que ces délicats sentiments d’humanité que nous incarnons, cette unanimité acquise pour nous ménager, nous rendre service, nous faire mutuellement confiance, constitue un progrès positif, et qu’en cela nous surpassons de beaucoup les hommes de la Renaissance. »
    (2) Cf. FP XIII, 9 [173] : « L’exigence d’“humanisation” (qui se croit très naïvement en possession de la formule “qu’est-ce qui est humain ?”) est une tartuferie sous laquelle une espèce d’hommes bien déterminée cherche à imposer sa domination : plus exactement un instinct bien déterminé, l’instinct grégaire. »
    (3) Cf. Za, IV, « Parmi les filles du désert », § 2 : « Le désert croît : malheur à qui recèle des déserts ! »
    (4) Lire là-dessus mon article, « L’humanisme paradoxal de Nietzsche », in L’Art du comprendre, n° 15, 2006, p. 163-177.
    (5) GS, § 115 (« Les quatre erreurs »).
    (6) HTH I, § 463.
    (7) A, § 105.
    (8) Voir par exemple FP XIV, 23 [4].
    (9) Ibid., 15 [37].
    (10) Ibid., 22 [18] (* en français dans le texte).
    (11) EH, « Pourquoi je suis si avisé », § 9.
    (12) Cf. FP XIII, 10 [127] : « La préoccupation de soi et de son “salut éternel” n’est pas l’expression d’une nature riche et sûre d’elle-même : car celle-ci envoie au diable la question de savoir si elle connaîtra la béatitude – elle n’a aucun intérêt à une quelconque forme de bonheur, elle est force, acte, convoitise – elle s’imprime dans les choses, elle fait violence aux choses … Le christianisme est une hypochondrie romantique de ceux qui ne se tiennent pas solidement sur les pieds. – Partout où la perspective hédoniste passe au premier plan, on peut conclure à de la souffrance et à une certaine malvenue. »
    (13) PBM, § 188. Voir aussi HTH I, § 521 (« La grandeur : imposer une direction »).
    (14) Nietzsche dénonce cet « optimisme économique » dans une note posthume de 1887 : « les frais de tous se soldent par un déficit total ; l’être humain s’avilit : si bien que l’on ne sait plus seulement à quelle fin a bien pu servir cet énorme processus. A quelle fin ? un nouveau “à quelle fin” (Wozu) – voilà ce qui est nécessaire à l’humanité … » (FP XIII, 10 [17]).
    (15) PBM, § 44. La « plante “homme” » ne peut pourtant croître vigoureusement selon Nietzsche qu’à condition de ne pas être ménagée.
    (16) GM, III, § 14.
    (17) Cf. CId, « Divagations d’un Inactuel », § 37 (déjà cité) : « Nous autres, modernes, avec notre “humanité” douillettement ouatée, qui prend bien soin de ne se blesser à aucune pierre du chemin, nous aurions offert aux contemporains de César Borgia un spectacle du plus haut comique. »
    (18) FP du GS, 11 [219].
    (19) FP des Considérations inactuelles III et IV, 35 [12].
    (20) FP IX, 3 [1], § 385.
    (21) EH, « Pourquoi je suis si sage », § 8.
    (22) FP X, 27 [59].
    (23) Ibid., 26 [449].