La monarchie Fédérale
Le Bulletin de l'une des trois paroisses de ma petite ville m'est arrivé avec un poème provençal en l'honneur de saint Éloi, suivi d'un cantique à la gloire du même saint, en provençal toujours, suivi lui-même d'un sermon prononcé par le curé pour le jour de la Trinité, en provençal encore. À la fin du numéro, autre cantique en provençal. Le titre du Bulletin est seul en français d'oui ; encore porte-t-il une épigraphe de Mistral. Huit vers du grand poète servent aussi de devise et d'invocation aux Quatre Dauphins, la revue aixoise, qui est bilingue. Les jeunes gens de 1890 fondaient des revues cosmopolites ; elles s'appelaient, par exemple, Le Saint Graal. Ils entendaient exclure de leurs soucis et de leurs amitiés tout ce qui ne leur venait pas de Bayreuth; en 1912, au même âge, dans le même monde et la même classe, on a le cœur rempli du murmure des cloches, et des fontaines du pays natal, le tremblement de la mer natale, et nos jeunes Aixois prennent plaisir à émouvoir l'élite de Paris et des provinces en faveur des Saintes-Maries de la Mer menacées par le flot et qu'il faut endiguer à tout prix.