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culture et histoire - Page 899

  • Le phénomène Louis XVI et la République

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    Faut-il s'étonner ? Il y a plus de deux siècles que Louis XVI a été guillotiné. Deux siècles que les événements révolutionnaires ont bouleversé notre histoire. Et il y a bien longtemps qu'il n'y a plus de parti royaliste dans les assemblées. De ce point de vue - c'est Pierre Boutang qui l'a dit - les royalistes sont un « néant de force ».

    Alors faut-il s'étonner que chaque début janvier se mettent en place les longues listes de messes et de manifestations qui vont commémorer la mort, le 21 janvier 1793, de ce roi malheureux ? Et tirer pour aujourd’hui les leçons de cet événement qui pèse sur nous.

    Cette année encore, les annonces sont très nombreuses et l'on sait que, presque partout, les églises, qui n'en ont plus trop l'habitude, seront pleines et ferventes.

    Faut-il s'en étonner ?

    En 1877, dans son Journal d'un écrivain, Dostoïevski, déjà, avait observé et signalé « la ténuité des racines qui unissent la République au sol français ». C'était l'époque du royalisme électoral et parlementaire, qui fut majoritaire, un temps, à l'Assemblée nationale. La République n'avait été instituée – « la moins républicaine possible » - qu'en attente de la monarchie. Mais à la mort du comte de Chambord, le royalisme parlementaire avait vécu, avalé par le jeu des partis et par le régime d'opinion. Comme échouera, ensuite, le stratagème du pape Léon XIII, qui crut, avec le Ralliement, faire de la France une république chrétienne, puisque la grande majorité des Français était catholique... Ce Pontife, en politique, fut un naïf. Il récolta la guerre que la République mena à l'Eglise de France au commencement du siècle suivant, le XXe. Le royalisme se réfugia dans quelques salons surannés ou dans de nobles et nostalgiques fidélités.

    Les racines qui unissent la République au sol français étaient-elles pour autant devenues moins ténues ?

    En l'année 1900, le souvenir de la défaite de 1870, de l'Empereur prisonnier, des Allemands sur les hauteurs de Montmartre, était toujours omniprésent, mêlé à l’obsédant souci des provinces perdues. Alors que se profilait la terrible menace d'une nouvelle guerre, l'on vit soudain se lever du marais du camp patriote, la forte résurgence d'un royalisme français, jeune, intellectuel, doctrinal et combatif, qui bousculait le royalisme endormi et le vouait au patriotisme le plus exigeant. Ce que fut la place de l'Action Française d'alors, son autorité intellectuelle et morale, son emprise sur la jeunesse, sur l'Intelligence française, sur la catégorie des Français actifs, avant la Grande Guerre et dans l'entre-deux guerres, nous avons de la peine à le mesurer aujourd'hui, malgré les livres et les travaux universitaires. Le royalisme français avait opéré une étonnante renaissance qui attestait de cette ténuité inchangée des racines qui unissent la République au sol français, telle que Dostoïevski l’avait observée. 

    Le royalisme français restauré ou refondé par l'Action Française a traversé le XXe siècle et deux guerres mondiales, la première gagnée par miracle, la seconde perdue dans des conditions – l’effondrement que l’on sait - qui, comme l'a dit Boutang, ont failli tuer la Patrie. 

    Nous voici, un siècle plus tard. La République est-elle devenue plus assurée de son enracinement dans le sol français ? 

    Deux rendez-vous historiques ont au contraire confirmé sa ténuité : tout d’abord, le millénaire capétien en 1987, au cours duquel le Comte de Paris assura l’avenir de la Maison de France en titrant ses deux petits-fils, les princes Jean et Eudes, duc de Vendôme et duc d’Angoulême ; cette année-là le comte de Paris et le président de la République, François Mitterrand, commémorèrent ensemble, côte à côte dans la cathédrale de Reims, le baptême de Clovis en 987. Ces événements porteurs de puissants symboles eurent un grand écho. Deux ans plus tard, vint 1989. L’on devait célébrer le bicentenaire de la Révolution française. Tâche ardue. Qui fut ratée. Le comité des célébrations fut d’abord confié à Edgar Faure qui décéda avant l’heure. Puis à Pierre Joxe qui courut à l’échec. Grâce à quelques initiatives heureuses et fortes – Jean Raspail, Jean-Marc Varaut, Marcel Jullian – le bicentenaire tourna à la critique de la Révolution, se mua en un vaste courant de sympathie pour ses victimes, à commencer par le roi, la reine, le dauphin, martyrs de la Terreur.     

    Près de trente ans encore ont passé, sous les mandats délétères de François Mitterrand (second septennat) de Jacques Chirac, Nicolas Sarkozy et François Hollande. On sait la situation de la France et le discrédit du régime au terme de leurs mandats.

    Or voici que le 8 juillet 2015, dans l'hebdomadaire Le 1, le ministre de l’économie de François Hollande, sans que quiconque le reprenne ou le sanctionne, écrivit ceci, qui mérite d’être relu : 

    « Il nous manque un roi. La démocratie comporte toujours une forme d'incomplétude, car elle ne se suffit pas à elle-même. Il y a dans le processus démocratique et dans son fonctionnement un absent. Dans la politique française, cet absent est la figure du roi, dont je pense fondamentalement que le peuple français n'a pas voulu la mort. La Terreur a creusé un vide émotionnel, imaginaire, collectif : le roi n'est plus là ! On a essayé ensuite de réinvestir ce vide, d'y placer d'autres figures : ce sont les moments napoléonien et gaulliste, notamment. Le reste du temps, la démocratie française ne remplit pas l'espace. On le voit bien avec l'interrogation permanente sur la figure présidentielle, qui vaut depuis le départ du général de Gaulle. Après lui, la normalisation de la figure présidentielle a réinstallé un siège vide au cœur de la vie politique. Pourtant, ce qu'on attend du président de la République, c'est qu'il occupe cette fonction. Tout s'est construit sur ce malentendu. »

    Chacun sait que l’auteur de ce constat radical – qui ne fait que confirmer les réflexions anciennes de Dostoïevski - est Emmanuel Macron, élu entre-temps, contre toute attente, président de la République française.

    Faut-il s’étonner s’il y a beaucoup de Français à travers le pays pour se souvenir de la mort du roi Louis XVI, dans les jours qui viennent ?  

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    En deux mots, réflexion sur l'actualité

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  • LE MERCENARIAT CHEZ LES CELTES

    A part la conquête de nouveaux territoires, les Celtes exerçaient leurs talents militaires pour le service mercenaire. Son développement rapide à partir du IVè siècle av. J.-C. constitue un phénomène important pour l’histoire et la civilisation du monde laténien.

    L’existence des mercenaires celtiques fait apparition dans les sources anciennes peu après la prise de Rome par les Sénons. On peut parler pour le IVè s. d’une alliance entre les Gaulois et Denys l’Ancien de Syracuse. Les visées adriatiques de ce tyran sont bien connues. Il faut donc supposer que le recrutement des Celtes était lié à Ancône qui a été fondé par Syracuse au début du IVè s. L’installation des Sénons dans les Marches d’une part les mettait en contact direct avec la Grande Grèce et la Sicile et d’autre part, ce nouveau territoire celtique devenait un pôle d’attraction pour les éléments aventureux transalpins. Les textes évoquent la présence gauloise en Apulie et parlent aussi de troupes celtiques à la solde de Denys l’Ancien qui participent aux conflits de Sparte et de Thèbes. Notamment, en 396/8 av. j.-c., 2 000 mercenaires gaulois et hispaniques envoyés par le tyran de Syracuse aident les Spartiates dans l’isth

    Denys le Jeune et plus tard Agathoclès ont employé des mercenaires celtes qui ont aussi été enrôlés par les Carthaginois, jouant ainsi un rôle varié dans les guerres gréco-puniques du IVè s. av. J.-C. en Sicile.

    Le service mercenaire a donc bien élargi la périphérie des déplacements celtiques. Il faut noter qu’en 307 av. J.-C. Agathoclès a amené ses troupes celtiques en Afrique, en terre carthaginoise.

    Le mercenariat celtique prend à partir de la mort d’Alexandre le Grand une ampleur extraordinaire : les Celtes combattant dans les armées diverses du monde hellénistique se comptent par milliers. Cette nouvelle phase est donc étroitement liée aux offensives contre les Macédoniens et les Grecs qui débutent par les invasions des années 280-270 av. J.-C. L’événement décisif date cependant de la fin de 278 ou début de 277, quand Antigonos Gonatas, revenu d’Asie Mineure en Europe, détruit par la ruse une armée celtique en Thrace, près de Lysimacheia. La victoire doit être considérée comme le coup de grâce porté à la tentative d’invasion celtique contre le monde méditerranéen. Elle ouvre cependant en même temps la porte des armées hellénistiques à ces guerriers redoutables, réputés partout. Antigonos, le vainqueur, ne tarde pas à prendre le reste de l’armée celtique battue à sa solde. Sous le commandement de Kidérios, elle l’aide à s’emparer de la Macédoine. Ainsi se prolonge la présence des Celtes en terre grecque : Antigonos Gonatas envoie ses Gaulois contre Pyrrhos qui en avait également à son service. Le roi d’Epire les a laissé violer les tombes royales macédoniennes à Aigai (très probablement identique à Vergina actuelle où les fouilles grecques ont constaté le pillage du tumulus présumé de Philippe II), puis ils l’accompagnèrent dans le Péloponnèse et étaient auprès de lui, à Argos, lorsqu’il périt.

    La Thrace devient à cette époque-là un réservoir important de mercenaires : Antigonos Gonatas envoie en 277/6 av. J.-C. 4 000 Gaulois à Ptolémée II Philadelphie qui était en guerre avec son frère Magas. La victoire est suivie d’une révolte des Celtes qui périrent enfermés dans une île du Nil.

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  • Le respect (schonen) de la nation

    Heidegger explique dans son extraordinaire livre Essais et conférences ou Recueillement, ce qu'est le respect du quadriparti.
         Le quadriparti est constitué de la terre, du ciel, de la divinité et des hommes. Ménager le quadriparti consiste à "sauver la terre", à sauver les racines au lieu de les exploiter jusqu'à l'épuisement. Ménager le quadriparti, c'est accueillir le ciel comme ciel, donc respecter le déroulement du temps, le mûrissement des choses, ne pas faire de révolution. Ménager le quadriparti, c'est attendre le Divin comme tel et ne pas tomber dans l'adoration des idoles, dans la superstition. Enfin, ménager le quadriparti, c'est conduire les mortels en dehors de la futilité et de la dispersion afin qu'ils existent conformément à leur être propre. Ce quadruple ménagement est ce que Heidegger appelle pratiquer l'habitation. Ménager la nation correspond surtout au premier volet de ce programme, à savoir sauver la terre et les racines d'une exploitation dévastatrice. 
         Ménager la nation, la respecter, est un moyen de lutter contre l'uniformisation et la déshumanisation du monde : cela suppose comme on l'a vu, de conserver le caractère sacré de la famille procréatrice et de l'armée, les deux institutions indispensables à la survie nationale car gérant la naissance et la mort. 
         Cela suppose aussi d'inverser les priorités du Gestell qui règnent aujourd'hui :
         - mettre l'homme avant le sol ;
         - mettre le sens du Sacré avant le droit positif. Car la liberté ne donne de bons fruits que si le sacré est respecté, par exemple, le caractère sacré de la vie humaine. La liberté sans aucun sens du Sacré mène vite au crime ;
         - mettre l'identité (qui rassemble) avant l'égalité (qui disperse) comme le montre Heidegger dans Essais et Conférences : "l'homme habite en poète" : "L'identité écarte tout empressement à résoudre les différences dans l'égal ; l'identité rassemble le différent dans une union originelle. L'égal au contraire disperse dans l'unité fade de l'un simplement uniforme" ;
         - mettre l'histoire avant l'instant. Exister au sein d'une nation suppose la connaissance de son histoire et sa prise en charge affective.
        Il convient donc de réfléchir sur la notion de l'identité nationale et de voir quelles mesures pourraient la conforter.
         La France est soumise au défi de l'intégration de très nombreux immigrés à une période où le sentiment national semble s'être affaissé. On pourrait même avec un peu d'esprit de paradoxe défendre l'idée que l'intégration à la nation n'est pas une exigence qui concerne les seuls immigrés mais aussi les jeunes générations de Français de souche.
         En effet, la France moderne, pour prendre la terminologie du sociologue Tönnies, est plus une société (Gesellschaft) qu'une communauté (Gemeinschaft). La société est fonctionnelle et se compose d'individus reliés par contrats. La communauté est affective et se compose de personnes partageant une communauté de valeurs. 
         C'est cette perte de sens communautaire dans la nation française qui entraîne le "communautarisme" : de nombreux individus déçus par la froideur de la société fonctionnelle se tournent vers la chaleur de leur communauté ethnique ou religieuse. 
         La société moderne dérive vers ce que le philosophe Martin Heidegger a appelé le "Gestell", dispositif où les hommes sont arraisonnés en fonction de leur seule utilité. Les hommes sont alors gérés comme la plus précieuse des matières premières. Dans une telle forme de société, les valeurs dominantes sont les suivantes : la technique, l'argent, l'ego individuel et la masse à imiter. Ce système de valeurs touche notamment les "jeunes de banlieue" mais il s'étend en fait à l'ensemble des jeunes générations, voire à toute la société. Dans ce système, la conscience d'appartenir à une même nation est fortement érodée. 
    Yvan Blot, L'oligarchie au pouvoir

  • PHILIPPE V : Un Bourbon en Espagne

    Philippe V règne sur l'Espagne à partir du 15 novembre 1700. Suzanne Varga brosse le portrait de ce petit fils de Louis XIV dans une biographie richement documentée, avec un grand sens de la psychologie.

    Les éditions Pygmalion viennent de publier un livre de Suzanne Varga, volumineux mais point du tout pesant, même élégant, fort documenté et riche d'une grande culture historique, littéraire et artistique, sur Philippe V, roi d'Espagne, petit-fils de Louis XIV, le premier Bourbon régnant sur ce pays et fondant une nouvelle maison dont découlèrent bientôt les Bourbon-Parme et les Bourbon-Siciles.

    Le dur destin des princes

    Tout est dit de la grande prudence de Louis XIV qui prit dans le plus grand secret la décision d'accepter le testament du dernier Habsbourg d'Espagne, le vieux et maladif roi Charles II qui donnait la succession du trône ibérique à son petit-neveu Philippe, duc d'Anjou, âgé alors de dix-sept ans, lequel se trouvait être aussi le petit-fils de Louis XIV et de l'infante Marie-Thérèse, et l'arrière petit-fils de Louis XIII et de l'infante Anne d'Autriche. Décision cornélienne pour le vieux roi de France : accepter c'était, outre se souvenir des liens civilisateurs très étroits qui unissaient les deux pays depuis des siècles, faire disparaître à jamais la menace de la prise en tenaille de la France par un nouveau Habsbourg ou un de leurs amis montant sur le trône outrePyrénées, mais c'était aussi prendre le risque, en ayant cette jeune monarchie à protéger, d'une guerre générale contre les États de l'Europe entière qui regardaient déjà le royaume de Charles II comme une proie à s'arracher bientôt...

    Suzanne Varga étudie avec un grand sens de la psychologie ce que fut le drame de Philippe, fils du Grand Dauphin de France, qui aimait tant Versailles et qui idolâtrait son frère cadet le duc de Bourgogne, d'être ainsi pris au dépourvu par le dur destin des princes. Mais le devoir primait alors chez ces âmes bien nées qui sentaient le sang royal couler dans leurs veines et que l'on n'appelait pas encore du nom ridicule d'adolescents. Philippe, jeune prince mélancolique, accueilli par une joie débordante dans la péninsule ibérique, d'abord soumis à la force des événements, n'attendit pas pour montrer sa valeur le nombre des années. Il se prit à aimer son nouveau royaume et ses « chers Espagnols » dès qu'il eut à les mener à la bataille contre l'Europe coalisée, même parfois contre la France du Régent, duc d'Orléans, et à courir le risque de la mort parmi eux.

    Réformant les tribunaux, protégeant les Arts, le commerce et les manufactures, fondant la bibliothèque royale de Madrid, il imprima alors à la monarchie d'outre-Pyrénées une tournure nouvelle, offrant ainsi l'apport de la sagesse de la France classique au tempérament effervescent de l'élite espagnole, un peu avant que la Révolution dite française vînt entraîner la décadence de deux royaumes.

    Chacun chez soi

    Il ne fut jamais question d'annexer l'Espagne à la France. Louis XIV avait été clair le matin du 15 novembre 1700 en annonçant à Versailles à Philippe qu'il régnerait sur l'Espagne : « Soyez bon Espagnol, c'est présentement votre premier devoir ; mais souvenez-vous que vous êtes né Français pour entretenir l'union entre les deux nations ; c'est le moyen de les rendre heureuses et de conserver la paix de l'Europe. » Donc accord familial et amical, mais chacun souverainement chez soi. « Il importe au repos de la chrétienté que les deux États soient séparés à jamais », écrivait aussi Louis XIV. Quand, au plus fort de la guerre de Succession d'Espagne (vers 1704), il apparut que Versailles ne pouvait continuer de soutenir l'Espagne sans dommages graves pour la tranquillité de l'Europe, c'est alors que le jeune roi adopta pour jamais le pays qui l'avait appelé sur le trône. Suzanne Varga parle d' « émancipation » du royaume avant d'ajouter qu'entre lui et son peuple naissait une « fervente communion » car il se sentait « un Espagnol parmi les Espagnols » et « semblait être ce qu'apparemment ses sujets attendaient de lui : à la fois de la terre et du ciel, battant et priant, réservé et intrépide, mystérieux et fraternel. » En l'occurrence, il trouva auprès de son peuple fidèle une de ces réactions vives qui prouvait que, tout accablé qu'il fût, il gardait assez de vaillance et de fierté nationale pour se dévouer au salut de la patrie. Le roi « s'était en effet hissé à la hauteur des circonstances embrassant ce qu'il considérait comme les intérêts exclusifs de son royaume, dans ses actions comme dans son gouvernement ».

    Un roi bon espagnol

    Bien décidé à ne quitter l'Espagne qu'avec la vie, il accepta sans état d'âme les renonciations de la branche espagnole des Bourbons au trône de France enregistrées aux traités d'Utrecht (1712) non parce qu'elles furent imposées par les nécessités de la guerre et la volonté de l'Angleterre, mais parce qu'il savait qu'elles étaient conformes aux lois fondamentales des deux royaumes. Si dans un premier temps Philippe eut des velléités de revenir en France, c'était à cause de l'hécatombe qui dépeupla presque toute la descendance de Louis XIV entre 1712 et 1714, mais dès qu'il s'avéra que le petit Louis XV, arrière-petit-fils du vieux roi, vivrait, il renonça à ce projet, ne pensant plus qu'à son royaume espagnol auquel il assurait une abondante dynastie de ses deux épouses successives Marie -Louise-Gabrielle de Savoie et Élisabeth Farnèse, héritière du duché de Parme. Les renonciations des Bourbons d'Espagne furent solennellement enregistrées au parlement français et devant les Cortès sur les saints évangiles et sous la garantie de Dieu Lui-même. Un tel serment engageait deux royaumes chrétiens qui ne sauraient songer à le violer.

    Ce n'est pas tout à fait ainsi que, quatre cents ans plus tard, certains des descendants de Philippe V et leurs partisans voient la question ; partant du fait que les lois fondamentales de primogéniture mâle sont immuables en France, ils ne voient pas que les meilleures lois aboutissent aux pires sophismes quand on ne les considère pas dans leur continuité historique, dominée par la coutume. En fait, les lois de succession au trône de France (loi d'hérédité par primogéniture mâle, loi d'exclusion des femmes de la succession, loi d'inéliabilité du domaine) sont plus le fruit de la coutume que du travail en chambre de juristes purs et durs et ont toujours été subordonnées au principe majeur de la sauvegarde de la nation, ce qui exclut toute prétention d'un prince descendant d'une branche qui a lié son sort des siècles durant à un pays étranger. C'est le temps qui fonde les légitimités, or le temps veut que les princes espagnols et leurs descendants sont légitimes en Espagne, à Parme et en Sicile, nulle part ailleurs...

    Retour en France

    Suzane Varga n'aborde pas cette question dans son grand livre, elle ne cite même pas dans son tableau généalogique des Bourbons d'Espagne le prince Luís-Alfonso, aîné de tous les Bourbons, et qu'au nom de la légitimité stricte certains présentent comme le futur roi de France. Ce prince descend d'un fils d'Alphonse XIII exclu de la succession espagnole au profit du comte de Barcelone, père de Juan Carlos, le roi actuel. Il est donc disponible pour servir et le fait qu'il le désire est tout à son honneur. Il pourrait aspirer à une haute mission diplomatique à laquelle l'appellent son rang et sa naissance. La question de ses droits au trône d'Espagne ne nous regarde pas en tant que Français. Mais il ne saurait être question d'oublier quatre siècles de l'histoire de nos deux pays pour lui donner le trône de France, lequel reviendra, la branche aînée s'étant éteinte en 1883 en la personne d'Henri V, comte de Chambord, aux Orléans, descendant de Philippe, duc d'Orléans, second fils de Louis XIII et qui, malgré les fautes personnelles de quelques uns d'entre eux, n'ont jamais servi que la France.

    Michel Fromentoux L’ACTION FRANÇAISE 2000 Du 1er au 14 décembre 2011

    Suzanne Varga, Philippe V, roi d'Espagne, petit-fils de Louis XIV, Pygmalion, 582 pages, 24,90 euros

  • Dans "Présent" daté de samedi, un entretien avec Jean-Marie Le Pen sur la publication prochaine de ses Mémoires

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  • Que l'on apprécie ou pas Jean-Marie Le Pen, que l'on soit d'accord avec lui ou pas, ses Mémoires sont passionnants

    6a00d83451619c69e201bb09ea3b4f970d-250wi.jpgEntretien avec Guillaume de Thieulloy suite à l'annonce que ses éditions Muller allaient publier les mémoires de Jean-Marie Le Pen :

    Nous avons appris récemment que vous alliez éditer le premier tome des mémoires de Jean-Marie Le Pen. Comment cela s'est-il fait ?

    D'après ce que je sais, Jean-Marie Le Pen et son entourage se sont heurtés à plusieurs refus de "grands" éditeurs (en tout cas, plus habitués que moi aux grands tirages). Etant plus libre que la moyenne de mes confrères par rapport aux oukases de la bien-pensance, j'ai volontiers accepté de m'en charger.

    Quelle est votre motivation ?

    D'abord, l'intérêt pour un demi-siècle d'histoire contemporaine vu 6a00d83451619c69e201b8d2d13e23970c-250wi.jpgpar un acteur politique de premier plan. Ce premier tome couvre la période de l'enfance, l'engagement dans la Résistance, l'Indochine, le poujadisme, les combats pour l'Algérie française, la campagne de Tixier-Vignancour, mai 68… Jusqu'à la fondation du Front national en 1972. Que l'on apprécie ou pas Le Pen, que l'on soit d'accord avec lui ou pas, c'est passionnant.

    Ajoutons, ce qui ne gâte rien, que c'est bien écrit.

    Plusieurs médias laissent entendre que votre proximité idéologique avec Jean-Marie Le Pen est pour beaucoup dans cette publication. Qu'en est-il ?

    Comme beaucoup de Français, je suis d'accord avec Jean-Marie Le Pen sur certains sujets et en désaccord sur certains autres. J'ai lu dans la presse que Muller éditions était une maison "ultra-nationaliste". C'est assez loufoque. D'abord, parce qu'en général, une société n'a pas de doctrine politique. Ensuite, parce que, personnellement, je ne suis pas ultra-nationaliste, ni même nationaliste tout court. Le nationalisme est une idée moderne et je suis ce que les Américains appellent un "paléo-conservateur" - ou ce que Mme Schiappa qualifie de "réactionnaire, obscurantiste et moyenâgeux" (mais, à la différence de Mme Schiappa, je crois que le Moyen Âge de saint Louis et de saint Thomas d'Aquin est le sommet de la civilisation!). S'il faut absolument me coller une étiquette, je suis un catholique social à la façon d'un La Tour du Pin ou d'un Henri V.

    Et s'agissant de la politique concrète, je suis plus "droite hors les murs" qu'autre chose. Je déteste le régime des partis et je m'imagine mal prendre ma carte dans un parti, quand bien même il défendrait 100% de mes idées.

    J'ajoute qu'ayant travaillé longtemps au sénat avec Jean-Claude Gaudin, le maire LR de Marseille, je connais beaucoup mieux ce parti que le FN. Il y a, à ce propos, une chose qui me frappe à la lecture des mémoires de Le Pen: pendant ce premier tome, il est essentiellement un élu du CNIP d'Antoine Pinay (comme Gaudin à cette époque). Il n'aura échappé à personne que leurs routes se sont bien éloignées par la suite. Mais, dans les années 60, deux hommes qui représentent aussi magistralement la division de la droite contemporaine pouvaient militer côte à côte.

    Mais, tout de même, Le Pen, n'est-ce pas un peu sulfureux ?

    Qui décide que c'est "sulfureux" ? La gauche, n'est-ce pas ? Eh bien, pour ce qui me concerne, je dénie absolument à la gauche - qui n'hésite pas à s'allier avec les communistes aux cent millions de morts - le droit de me dire qui est fréquentable et qui ne l'est pas.

    Il m'est arrivé souvent de dire en quoi j'étais en désaccord avec tel dirigeant du FN (au point que l'on m'a dit que, pendant un temps, et c'est peut-être encore le cas, le Salon beige était la bête noire au "Carré" - plus même que "Libération"!). Mais ces désaccords n'exigent pas, je pense, de me rouler par terre en écumant de bave dès que l'on énonce le nom du FN ou de Le Pen devant moi.

    Et, si le fait qu'un éditeur de la "droite classique" puisse tendre la main à Jean-Marie Le Pen pouvait être le premier pas vers une sortie du piège mitterrandien de la division à droite, j'en serais ravi.

    par Michel Janva

    http://lesalonbeige.blogs.com/my_weblog/2018/01/que-lon-appr%C3%A9cie-ou-pas-jean-marie-le-pen-que-lon-soit-daccord-avec-lui-ou-pas-ses-m%C3%A9moires-sont-pas.html