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géopolitique - Page 769

  • Le rapport de l’ONU sur les armes chimiques en Syrie expose les mensonges de Washington.

    La publication d’un rapport des inspecteurs des Nations unies sur les armes chimiques qui pointe plusieurs attaques au gaz sarin menées par les forces soi-disant « rebelles » expose encore plus les mensonges du gouvernement Obama sur la responsabilité du gouvernement syrien pour l’attaque à l’arme chimique du 21 août à Ghouta dans la banlieue de Damas.
    Washington s’était emparé de cet incident comme d’un prétexte pour une campagne de bombardement déjà prévue et pour accentuer la pression en faveur d’un changement de régime sur le président syrien Bashar el-Assad.
    La publication du rapport de l’ONU jeudi dernier fait suite à la publication par le journaliste d’investigation Seymour Hersh, lauréat du prix Pulitzer, d’un article détaillé dans la London Review of books. Celui-ci révélait que le gouvernement Obama avait délibérément manipulé les renseignements dont il disposait pour affirmer à tort qu’il avait des preuves de la responsabilité du gouvernement syrien et de son armée dans l’attaque de Ghouta.
    Hersh citait des responsables actuels et passés de l’armée américaine et des services de renseignements américains sur la falsification des informations concernant l’attaque du 21 août et sur le fait que le gouvernement Obama avait dissimulé l’existence de rapports des services de renseignements prévenant de ce que le Front Al Nusra (affilié à Al Qaïda) avait la capacité de fabriquer et d’utiliser comme arme du gaz neurotoxique sarin, le même qui a servi lors de l’attaque de Ghouta.
    Le rapport de 82 pages rendu par les l’ONU sur les armes chimiques s’appuie sur des enquêtes approfondies sur les lieux de plusieurs attaques où des allégations d’usage d’armes chimiques ont été faites soit par le gouvernement syrien, soit par les gouvernements américain, britannique et français. Les inspecteurs ont analysé le sol et d’autres prélèvements dans l’environnement, examinés des prélèvements de cheveux, d’urine, de tissus biologiques et sanguins pour y trouver des traces de composés chimiques, ils se sont entretenu avec des survivants, des témoins et du personnel médical, ils ont également étudiés les obus qui auraient servi de vecteur au sarin dans chaque incident.
    Ils sont arrivés à la conclusion qu’outre l’incident de Ghouta, il y a eu au moins quatre attaques « probables » au sarin. Dans trois de ces attaques, ce sont les soldats de l’armée syrienne qui ont été victimes du gaz mortel, et dans la quatrième, ce sont des civils. Aucune des attaques confirmées n’a visé les milices des combattants « rebelles ».
    Deux des attaques maintenant confirmées ont eu lieu à quelques jours de celle de Ghouta. Le 24 août – trois jours après Ghouta et au moment où Obama préparait l’armée américaine pour une frappe et dénonçait le gouvernement syrien pour avoir « franchi une ligne rouge » – le gaz sarin a été déployé contre des soldats syriens à Jobar dans la banlieue de Damas. Ce que le rapport de l’ONU décrit comme « une attaque relativement petite » a été confirmé par des entretiens avec des survivants et des personnels de santé, ainsi que par des prélèvements sanguins positifs au sarin collectés par les autorités syriennes et authentifiés par les inspecteurs de l’ONU.
    Sur cet incident, le rapport indique : « un groupe de soldats a reçu l’ordre de nettoyer certains bâtiments sous le contrôle des forces de l’opposition. Vers 11h00, l’intensité des tirs de l’opposition a baissé et les soldats avaient l’impression que l’autre camp se retirait. À près de 10 mètres de certains soldats, une bombe improvisée aurait éclaté avec un faible bruit, libérant un gaz qui sentait très mauvais. Un groupe de 10 soldats a été évacué dans des transports de troupes blindés vers le local médical de campagne avec des difficultés respiratoires et des symptômes étranges non spécifiés. »
    Un jour après cette attaque, le 25 août, du sarin a été utilisé « à faible échelle contre des soldats » dans la ville d’Ashrafiah Sahnay au Sud, au cours d’affrontements entre des « rebelles » et des troupes qui tenaient un poste de contrôle du gouvernement. Là aussi, l’ONU appuie ses conclusions sur des entretiens et des prélèvements sanguins effectués par le gouvernement syrien.
    Les inspecteurs n’avaient pas pour tâche de déterminer qui était responsable des attaques au sarin qu’ils ont confirmés, et ce rapport est donc silencieux sur cette question. Ce rapport, néanmoins, est rédigé dans les termes les plus circonspects, se contentant de donner des conclusions scientifiques.
    Cela ne fait qu’en rendre le contenu encore plus fort. La seule conclusion qui peut être tirée est que les milices « rebelles » soutenues par les États-Unis et dominées par les islamistes sont responsables de plusieurs crimes de guerre sous la forme des attaques chimiques contre les soldats syriens et les civils.
    Celles-ci ont été menées pour tenter d’inverser le sort sur le champ de bataille et de déclencher une intervention américano-britannico-française du même genre que celle qui avait donné la victoire aux rebelles libyens, afin d’écraser le régime d’Assad et d’installer au pouvoir l’opposition soutenue par les impérialistes. Le gouvernement Obama a délibérément menti parce qu’il y voyait une occasion de supprimer un autre obstacle à sa domination impérialiste de cette région riche en pétrole et d’isoler l’Iran, en préparation d’une frappe éventuelle contre ce pays.
    En fin de compte, Obama s’est retiré à cause des divergences tactiques aiguës au sein de son gouvernement, de l’élite militaire et des services de renseignements américains au sujet des implications qu’il y aurait à laisser le contrôle de la Syrie à des forces dominées par Al Qaïda; et à cause de l’opposition majoritaire dans la population Américaine et mondiale à une guerre sans raison de plus au Moyen-Orient.
    Washington a préféré organiser un changement de tactique, donnant son accord au plan russe pour la destruction des armes chimiques syriennes et à l’ouverture de négociations avec le gouvernement iranien. Un des motifs principaux de cette évolution était le désir de libérer les forces militaires américaines pour le « pivot » en Asie et une éventuelle guerre contre le rival montant de l’impérialisme américain sur la scène internationale, la Chine.
    Les dernières révélations sur les mensonges du gouvernement Obama sur la Syrie exposent encore plus le rôle criminel joué par les États-Unis et les médias internationaux. Il y a dix ans, les élucubrations du gouvernement Bush sur les armes de destruction massives irakiennes étaient promues comme des informations sûres par les grands médias. En août et en septembre de cette année, les médias ont fait comme si la population mondiale était affectée d’amnésie collective, avec des « renseignements » bidons et des affirmations sans preuves de la part de la Maison blanche, une nouvelle fois relayées par la presse et la télévision.
    Maintenant que ce barrage de propagande a été complètement exposé, la couverture se poursuit. L’article de Seymour Hersh comme les conclusions de l’ONU sur les attaques chimiques en Syrie ont été soit minimisés soit complètement passés sous silence.
    Les organisations de la pseudo-gauche dans le monde entier ont servi de complices dans ces efforts pour faire taire toute exposition de la propagande guerrière du gouvernement Obama. L’international Socialist Organisationaméricaine mal nommée, le Nouveau parti anticapitaliste en France, tout comme le Parti la Gauche (Die Linke) en Allemagne continuent à faire de l’agitation pour une intervention plus forte des États-Unis contre le régime syrien, en maintenant que les milices « rebelles » seraient à la pointe d’une « révolution » démocratique.
    Depuis les préparatifs de guerre d’Obama en août jusqu’à aujourd’hui, ces organisations issues des classes moyennes et pro-impérialistes ont rejeté toute remise en question des allégations américaines selon lesquelles le gouvernement Assad était responsable de Ghouta. Maintenant elles évitent toute mention de Hersh et des révélations de l’ONU.
    En opposition complète à cela, le World Socialist Web Site a immédiatement remis en question les affirmations faites sur Ghouta par le gouvernement Obama et ses alliés internationaux. Dans un article publié le lendemain de l’incident, le WSWS notait : « Les accusations non fondées selon lesquelles le régime syrien du président Bashar al-Assad a perpétré une attaque aux armes chimiques près de Damas et qui a tué un grand nombre de civils présentent toutes les caractéristiques d’une provocation montée de toutes pièces visant à déclencher une intervention occidentale. [...] Si l’on se demande à qui profite un tel crime, il est clair que ce n’est pas au régime d’Assad mais aux forces dirigées par les islamistes et qui combattent pour le renverser. Ces accusations de crimes de guerre perpétrés par le gouvernement syrien sont faites au moment où ces forces sont confrontées à une crise croissante et à une série de défaites militaires.»

    Patrick O’Connor

    http://www.voxnr.com/cc/etranger/EFlZlZyulVUVPjorey.shtml

  • Constantes et changements dans l’histoire des conflits

    Constantes et changements dans l’histoire des conflits, bref essai de typologie des déterminants de conflits – par Aymeric Chauprade. Premier chapitre de l’analyse publiée dans Déterminants des conflits et nouvelles formes de prévention (Bruylant, 2013, sous la dir. de S.E. Jean-Pierre Vettovaglia).

    Introduction

    L’un des mérites de la recherche historique est d’avoir démonté tous les modèles explicatifs simples de l’histoire des crises et des conflits. Il s’agit d’emblée de repousser la causalité unique et systématique. Comme le disait Bossuet : « le plus grand dérèglement de l’esprit consiste à voir les choses telles qu’on le veut et non pas telles qu’elles sont ». Si l’idéologie règne en maîtresse incontestée entre 1945 et 1990 dans l’étude des relations internationales conflictuelles, la géopolitique et ses permanences ont, depuis, regagné leur place. Dans ce chapitre introductif de la partie théorique de cet ouvrage, nous tenterons de passer en revue les déterminismes de la géopolitique physique et humaine (persistance de constantes) qui ne constituent pas en soi des sources de conflits mais qui peuvent le devenir au gré des circonstances.

    Nous cherchons à participer à ce que Fernand Braudel appelle le nécessaire « rassemblement des sciences sociales » en vue de nous approcher de la vérité, par la convergence des savoirs. Pour parvenir à se rapprocher de la vérité des causes et de la compréhension du réel, dans leur complexité propre, toutes les sciences sociales doivent en effet  être tour à tour auxiliaires les unes des autres.

    Nous voulons poser comme hypothèse le rejet de tous les modèles d’explication monocausale du monde et considérer que la tentative d’explication d’un conflit contemporain intègre nécessairement  la prise en compte d’une multiplicité de facteurs et de paramètres. Car si les causes des conflits sont profondes et donc anciennes, il faut être capable d’aller à leur recherche jusque dans des temps reculés et il faut les suivre à travers les siècles pour souligner la récurrence de leurs effets. La recherche des déterminants des conflits est donc un aller retour permanent sur l’échelle du temps avec des stations courtes mais aussi des projections dans le passé (causalité continue/causalité discontinue). En un mot, il va s’agir d’observer la réalité dans sa diversité et sa complexité puis d’isoler les facteurs  explicatifs de conflits en soulignant à chaque fois l’insuffisance des explications monocausales et réductrices d’une part et d’autre part la nécessité de relier les facteurs entre eux pour progresser dans la compréhension des conflits. Notre tableau sera évidemment incomplet car comment rendre compte de l’immense richesse et complexité identitaire du monde ?

    L’addition des facteurs ne suffit d’ailleurs pas : encore faut-il savoir les hiérarchiser selon l’originalité propre de chaque conflit étudié.

    Chapitre I  Permanence de la carte, premier déterminisme

    1.1     L’enclavement

    La situation d’enclavement est d’une importance majeure car elle est à l’origine de nombreux chocs entre les peuples. Un État enclavé n’a pas d’accès maritime direct. Il peut disposer d’accès fluviaux mais leur navigabilité est soumise au passage chez les voisins. Ses communications économiques  avec le monde dépendent des relations politiques avec les voisins. La voie aérienne contribue à dédramatiser la situation d’enclavement mais la solution est mineure par rapport au handicap. L’enclavement entraîne souvent une situation de dépendance  à l’égard des voisins. L’ambition première d’un tel état est de sortir de l’enclavement. Cette situation provoque souvent des contentieux sérieux avec les États du voisinage. Il en existe une quarantaine dans le monde dont  le  Laos, la Serbie, le Kosovo, le Lesotho, le Burkina Faso, le Mali, le Niger, la RDC (avec seulement une quarantaine de km de côtes sur la façade atlantique), la Centrafrique, le Rwanda, le Burundi, l’Éthiopie, etc. Un exemple de tentative de désenclavement océanique en Afrique du Nord est celui de l’Algérie qui soutient le Front Polisario dans le Sahara occidental pour s’ouvrir une façade atlantique. On peut aussi signaler les « poussées vers les mers chaudes » de la Syrie à travers le Liban, de l’Irak à travers le Koweït et de l’Ethiopie à travers l’Erythrée et la Somalie tout en se rappelant du « Grand jeu » entre la Russie et l’Angleterre au XIXème siècle, et entre la Russie et les États-Unis au XXème.

    L’enclavement est une situation objective du point de vue territorial et un sentiment subjectif qui peut agir de manière déterminante  sur les comportements politiques des peuples se représentant comme enclavés et vivant un véritable complexe d’obsidionalité. On se sent enclavé et assiégé. Ce sentiment d’étouffement  détermine des velléités de poussées souvent déstabilisantes pour les États voisins (Moldavie, Gibraltar, etc).

    1.2     L’insularité

    Il existe de nombreuses situations de partage d’une île. Il est rare que dans ces circonstances il n’y ait pas refus par l’un des États considérés de la partition de l’île et revendication de l’unité insulaire à son profit (nationalisme irlandais, partage de l’île de Chypre condamnée par les Nations Unies, les îles Hanish du Yémen, l’unité comorienne remise en cause par les séparatisme îliens, celui d’Anjouan et de Mohélie en particulier, l’insatisfaction mauricienne de son héritage insulaire)

    1.3     Topologie, nature du relief

    La topologie a contribué à forger historiquement le rapport et la représentation entre les États et les peuples, rapport et représentation sur lesquelles nous vivons encore largement malgré les progrès de la technique qui diminuent la fonction séparatrice de mers et de déserts et donc la diminution de la pertinence des obstacles naturels. Dans les pays en développement, l’obstacle naturel continue de modeler les rapports  entre États voisins. De nombreux espaces vides, comme les déserts, et nombre de régions forestières ou montagneuses restent éloignées des phénomènes d’accroissements mondiaux des flux. La topologie reste stratégiquement une réalité incontournable.

    Espace vide, le désert est souvent représenté comme une zone de séparation entre aires distinctes voire comme une zone d’affrontement. Le Sahara est une zone de séparation et d’affrontement entre l’Afrique du Nord et l’Afrique noire. Parmi les dix États  construits sur des étendues sahariennes – six sont arabes et quatre appartiennent à l’Afrique noire – ceux qui se trouvent sur les franges du Sahara comme le Mali et le Niger sont bâtis sur une opposition Nord-Sud. Les pasteurs nomades arabisés s’y opposent aux populations africaines. D’une manière générale, l’Afrique noire est soumise à la poussée historique  des populations maghrébines et islamisées à travers le Sahara. Un tropisme sahélien pousse l’ensemble des pays du Maghreb – Mauritanie, Algérie, Maroc et Tunisie – vers l’Afrique selon des lignes de pénétration très anciennes  et qui correspondent notamment  aux poussées de l’islam dans la profondeur du continent africain, le long des routes de l’or.[1]

    Par nature extensif, le désert nourrit des forces de poussée. Ce caractère inhérent aux étendues désertiques est en contradiction avec l’idée de fixation des frontières et constitue donc un facteur de conflictualité. Il est difficile de matérialiser les frontières sur l’espace fluctuant des vides spatiaux et lorsque deux États se rencontrent  dans le désert, un conflit peut facilement apparaître (frontières récentes du Sahara, ex-Sahara espagnol)[2].

    En de nombreux points de la planète, des peuples s’affrontent encore pour le contrôle d’espaces désertiques qui ne sont pas nécessairement riches en pétrole, en gaz ou en matières premières. Des hommes se battent pour la maîtrise de l’étendue. A l’heure où nombre d’analyses soulignent la primauté absolue des causes socio-économiques dans les dynamiques d’affrontement, les « ambitions désertiques ou steppiques » appellent à méditer sur la place centrale qu’occupe encore aujourd’hui le territoire dans l’origine des dynamiques conflictuelles. Le « désir de territoire », dont François Thual a décortiqué les mécanismes[3], reste une donnée fondamentale du monde contemporain.

    Un lac peut être international s’il est placé sur la frontière de deux ou plusieurs États. Certains États de l’Afrique des Grands Lacs sont ainsi construits suivant une logique d’accès à un lac et se partagent celui-ci avec d’autres États. Lorsqu’un lac est une frontière, il est aussi un bassin commun de ressources – eau douce, hydro-électricité, pêche, irrigation – qui peut susciter bien des convoitises communes et des difficultés dans le partage. La formation territoriale de l’État du Niger est issue d’un compromis entre les colonisateurs français et anglais qui portait sur le contrôle du fleuve Niger.

    La montagne a ses peuples aux rudes identités qui s’opposent souvent à ceux des plaines plus conquérants. Dans cette opposition à la domination d’une ethnie  ou d’une religion, ou bien des deux à la fois, la montagne a été le refuge des minorités et des hérésies. Le monde arabe de la montagne a en fait largement résisté à la bédouinisation turque, contrairement aux montagnes d’Asie Mineure et des Balkans. L’Atlas saharien d’Algérie, le Haut Atlas marocain, les Aurès d’Afrique du Nord, les massifs du Yémen, d’Oman, les monts du Liban, la montagne alaouite de Syrie, ont, d’une manière ou d’une autre  résisté à la domination de la plaine, soit en conservant leurs modes de vie, soit en accueillant des populations de la plaine  fuyant la domination turque sunnite.

    L’interaction de la climatologie  et de la topologie n’est plus à démontrer. Au climat sont associés des conditions de vie plus ou moins favorables  pour l’homme et son développement. Ces conditions peuvent être des déterminants de conflits[4] dans la mesure par exemple où la chaleur insupportable, les maladies, peuvent provoquer des migrations de populations ou les empêcher comme la mouche tsé-tsé a longtemps arrêté les pasteurs peuls musulmans venus du Nord et par la même occasion la pénétration de l’Islam vers l’intérieur de l’Afrique noire.

    La question du changement de climat n’est pas nouvelle et il existe de nombreux exemples de changements climatiques qui eurent des conséquences importantes sur les sociétés humaines. Fernand Braudel pose très tôt la question du changement climatique dans ses conséquences sur les modes de vie des sociétés humaines.[5]

    La géographie physique constitue la donnée constante qui fonde la continuité de la politique des États. C’est la raison pour laquelle la géopolitique accorde la primauté aux caractéristiques d’enclavement, d’insularité, aux données du relief (montagne, désert)  qui sont elles-mêmes indissociables des données climatiques pour expliquer des comportements nationaux, régionaux ou internationaux et des ambitions avouées ou inavouées, potentiellement sources de conflit. C’est le premier déterminisme géopolitique.

    Aymeric Chauprade

    [1] F. Maurette, « Afrique équatoriale orientale et australe », in Géographie universelle, XII
    [2] A. Chauprade et F. Thual, « Dictionnaire de géopolitique », 2e éd., Paris, Ellipses, 1999, article Maroc
    [3] F. Thual, « Le désir de territoire », Paris, Ellipses, 1999
    [4] D.S. Landes, « Richesse et pauvreté des Nations », Paris, Albin Michel, 1998, p.30
    [5] F. Braudel, « Ecrits sur l’histoire », rééd. Paris, Flammarion, 1984, coll. « Champs », p. 169

    http://www.realpolitik.tv/2013/12/constantes-et-changements-dans-lhistoire-des-conflits/

  • Turquie: un triste spectacle.

    Vue de l'extérieur et malgré les efforts d'explication de la presse européenne, la Turquie paraît s'enfoncer dans une crise incompréhensible. Depuis quelques jours maintenant, les déclarations abruptes du Premier ministre Recep Tayyip Erdogan se succèdent, accusant des manipulations politiques destinées à déstabiliser son gouvernement, dit islamo-conservateur, et son parti l'AKP.

    Dans le même temps, la justice et la police mènent depuis le 17 décembre une vaste opération dite anti-corruption. Cinquante et une personnes étaient toujours en garde à vue, mercredi soir, soupçonnées de malversations, de fraudes et de blanchiment d'argent. Parmi les placés en garde à vue figurent le maire (AKP) du quartier central de Fatih à Istanbul, les fils de trois ministres parmi les plus proches du chef du gouvernement, le cousin d'un responsable du bureau national de l'AKP, des bureaucrates de premier plan mais aussi des hommes d'affaires liés au secteur de la construction et de la promotion immobilière.. .
    La justice enquête en particulier sur l'Administration de développement de l'habitat collectif (TOKI), qui a réalisé au cours de la dernière décennie des bénéfices considérables en revendant à des promoteurs immobiliers amis du pouvoir des terrains publics, tout en réalisant ses propres projets de logements collectifs. Cette entreprise parapublique est au cœur de la politique de transformation urbaine initiée par Erdogan à Istanbul et tant décriée au printemps au moment des manifestations de la place Taksim. Ceux-ci protestaient notamment contre la destruction envisagée par le pouvoir du parc de la place Taksim, le seul ou presque espace vert demeurant dans la capitale.
    L'opposition menée par le CHP (Parti républicain du peuple), exige la démission du gouvernement et la création par l'Assemblée nationale d'une commission d'enquête. Mais la justice et l'opposition peuvent-elle se présenter comme neutres dans cette offensive de vertu? Malheureusement non. Il apparaît de plus en plus qu'elles sont instrumentalisées par une secte ou confrérie très puissante qui, un peu comme les frères musulmans dans d'autres Etats islamiques, a pris en mains une partie de la police, de la justice et des cercles économiques.
    Bien qu'elle s'en défende, la confrérie, née dans les années 1970 autour des prêches de l'imam turc Fethullah Gülen, issue du courant Nourdjou et inspirées par les idées du penseur Said Nursi, prospère depuis vingt ans dans les coulisses du pouvoir politique. L'Etat turc, quelle que soit la couleur du parti majoritaire, a utilisé, dès le début des années 1990, les réseaux de ces "missionnaires de la turcité", actifs dans les pays d'Asie centrale nouvellement indépendants.
    Une véritable guerre
    Or longtemps alliés, la secte et l'AKP s'opposent aujourd'hui dans une véritable guerre. Les partisans du premier ministre Erdogan affrontent désormais ceux de Fethullah Gülen, exilé depuis 1999 aux Etats-Unis à la suite d'enquêtes menées à l'époque par les militaires alors très présents au gouvernement avant d'en être chassés par Recep Tayyip Erdogan. L'instruction contre l'entourage de ce dernier est conduite par le procureur Zekriya Öz, proche des gülénistes, et qui avait dirigé l'enquête dans l'affaire Ergenekon, un réseau militaro-nationaliste démantelé après 2008.
    Pourquoi les deux pouvoirs, précédemment alliés, non seulement contre les militaires mais contre l'opposition réputée démocratique, sont-ils entrés en guerre? Les raisons n'en sont guère glorieuses. La secte reproche désormais au gouvernement la fermeture des dershane – un réseau de cours privés de soutien scolaire dans lesquels elle a massivement investi. Plus généralement, l'enjeu est la conquête du patronat, notamment de province. Depuis 2004, la forte croissance turque a largement profité aux petits patrons qui forment le tissu du mouvement religieux et financent ses écoles dans le monde entier. Depuis 2005, les gülénistes ont formé leur propre patronat : la confédération des entrepreneurs turcs (Tüskon). Elle compte 30 000 membres, dont 30 des 200 plus grandes entreprises du pays, et les réseaux commerciaux de ses hommes d'affaires sont incontournables.
    Mais pourquoi l'AKP a-t-elle décidé d'affronter la secte en organisant la fermeture de ses écoles privées? D'une part pour prendre de l'influence dans les esprits des très nombreux milieux sociaux fréquentant ces écoles, et d'autre part pour récupérer une partie des revenus en découlant.
    Tout ceci ressemble fort à une guerre entre mafias. L'actuel visage de la Turquie la rend plus mal fondée que jamais à poursuivre une entrée dans l'Union européenne, quels que soient les soutiens qu'elle avait reçus pour cela de l'Amérique. Certes les intérêts de beaucoup d'entreprises européennes sont très liés aux intérêts turcs dont nous venons de voir la complexité. Mais les Européens doivent cependant sauver les apparences. Ajoutons que les louvoiements de la diplomatie turque dans le conflit syrien augmentent encore les méfiances qu'elle inspire.
    La conclusion de ces péripéties pourrait être, non une montée sérieuse de l'opposition libérale toujours faible et divisée, mais un certain retour en grâce des militaires. Ils ont été chassés du pouvoir par Erdogan, à la suite d'accusations apparaissant aujourd'hui injustes. En fait, dans la tradition du kémalisme, ils incarnaient un gouvernement se voulant aussi laïc et intègre que souhaitent l'être beaucoup d'Etats européens. Dans une certaine mesure, ils ressemblaient aux militaires égyptiens revenus récemment au pouvoir à la suite du « coup d'état » du général Abd el Sissi.
    N'idéalisons pas ici les militaires turques ou ce qu'il en reste, mais bornons nous à retenir, en attendant la suite des évènements, que Recep Tayyip Erdogan et l'AKP ne donnent pas une image très attrayante de la politique islam-conservatrice modérée qu'ils prétendaient incarner. La place de la Turquie en Europe est moins souhaitable que jamais.

     

    Jean Paul Baquiast, 20/12/2013
  • Noël en Syrie : "La politique étrangère de la France est vécue comme une trahison"

    Quelques nouvelles de l'expédition de 21 Français en Syrie, partis passer Noël sur place avec 4 tonnes de jouets et de vêtements pour la population :

    "Le projet humanitaire de Noël en Syrie a rapidement trouvé sons sens sur place. Chaque distribution de cadeaux, chaque moment partagé avec des Syriens, des ministres aux simples Syriens, nous prouve combien la politique étrangère de la France est vécue comme une trahison à Damas. Trahison pour cette mère qui nous montre la photo de sa fille de sept ans tuée par les rebelles, trahison pour ces prêtres qui nous confient les plus de 300 martyrs de l’Eglise catholique melkite, trahison pour ces soldats loyalistes qui voient la France au chevet des intérêts américains et saoudiens, trahison pour les rescapés de Maaloula ou ses réfugiés qui expliquent les comportements barbares des djihadistes heureux de décapiter et violer quand ils entrent dans les villages chrétiens.

    Une journaliste qui m’interrogeait hier m’interpellait sur le fait que des armes financées par la France aient pu servir à tirer au mortier sur le lycée français de Damas, j’espère que nos lecteurs du Quai d’Orsay sauront trouver la réponse adéquate à cette interrogation légitime. (...)

    Je veux aussi vous dire que les informations que nous avons font vraiment de Sydnaya la prochaine cible privilégiée des rebelles, je vous demande de prier pour cette ville, historique et symbolique pour les chrétiens d’Orient. Je vous le demande car elle sera sans doute attaquée par les armes et les hommes qui servent à ceux qui sont aujourd’hui à la tête de notre Etat. Je vous demande de prier pour que les Syriens sachent reconnaître dans les plus de 2000 cadeaux de Noël en Syrie, le vrai signe de l’amitié historique entre nos deux peuples."

    Lettre complète à lire sur Nouvel Arbitre.

    http://www.lesalonbeige.blogs.com/

  • Poutine a-t-il tout compris ?

    La Russie prône la révolution conservatrice contre les déchéances

    Jean Bonnevey
    Ex: http://metamag.fr
    L’homme qui vénère Staline et le général Denikine, qui se veut l’héritier d’une certaine grandeur soviétique se pose aussi en rempart de la tradition européenne. La Russie, dans un monde instable, doit être un rempart à l’hégémonie américaine et garantir les valeurs traditionnelles face à la déchéance du monde occidental. Toute la politique de Poutine tient en une phrase qui le désigne pour le mondialisme comme l’homme à abattre.
    La troisième Rome est de retour
    « Le monde devient de plus en plus contradictoire et agité. Dans ces conditions, c’est la responsabilité historique de la Russie qui se renforce », a déclaré M. Poutine lors de son adresse à la nation dans une salle d’apparat du Kremlin. Il s’agit de la responsabilité d’un « garant clé de la stabilité globale et régionale, et d’un État qui défend avec constance ses valeurs », a-t-il ajouté. « Nous ne prétendons pas à l’appellation de superpuissance, si on entend par là une ambition d’hégémonie mondiale ou régionale, nous ne nous attaquons aux intérêts de personne, n’imposons à personne notre parrainage, et ne faisons la leçon à personne », a déclaré M. Poutine, dans une allusion claire aux États-Unis. « Mais nous nous efforcerons d’être des leaders », a-t-il ajouté. Poutine, au pouvoir depuis plus de 13 ans et dont l’emprise sur le pays n’a cessé de s’affirmer, a aussi souligné sa détermination à faire aboutir le projet d’union économique eurasiatique de pays issus de l’ex-URSS, dans laquelle la Russie invite avec insistance l’Ukraine. Cette zone renforcée de libre-échange, qui se veut l'alternative à l'Est de l'accord d'association proposé par Bruxelles, regroupe aujourd'hui la Russie, la Biélorussie, le Kazakhstan et demain, l'Arménie, voire le Kirghizstan.
    M. Poutine a enfin présenté son pays comme la dernière place forte du « conservatisme », notamment dans la conception de la famille par rapport à une déchéance morale supposée du monde occidental. Il a prôné « la défense des valeurs traditionnelles qui constituent depuis des millénaires la base morale et spirituelle de la civilisation de chaque peuple ». Poutine incarne donc une sorte de révolution conservatrice face à la subversion politique et morale que veut imposer l’occident atlantique. «On procède aujourd’hui dans de nombreux pays à une réévaluation des normes morales», a déclaré M. Poutine. Mais la Russie refuse «la soi-disant tolérance, stérile, qui ne fait pas de différence entre les sexes», a-t-il ajouté. La Russie a été vivement critiquée en Occident après la promulgation en juin dernier par le président Poutine d’une loi punissant la «propagande» homosexuelle devant mineurs, un texte dénoncé par des défenseurs des droits de l’homme qui le jugent potentiellement discriminatoire.
    La Russie avait auparavant réagi avec vigueur à la légalisation du mariage homosexuel dans plusieurs pays dont la France. « On exige de la société, aussi étrange que cela puisse paraître, qu’elle mette sur le même plan le bien et le mal», a encore déclaré M. Poutine. La Russie a, en la matière, «un point de vue conservateur, mais le conservatisme a pour but d’empêcher un mouvement en arrière et vers le bas, dans le chaos des ténèbres», a-t-il conclu, citant le philosophe orthodoxe Nicolas Berdiaev, qui avait été expulsé de Russie après la révolution de 1917. Voila un langage clair et qui explique tout.
    S'agissant de l'Ukraine, Moscou «n'impose rien à personne», a déclaré le président russe. «Si nos amis [ukrainiens] le souhaitent, nous sommes prêts à poursuivre le travail», a-t-il simplement ajouté. Contre toute évidence, Moscou prétend que, même sans l'adhésion de Kiev, un pays de 46 millions d'habitants considéré comme le berceau spirituel de la Russie, son union douanière resterait suffisamment «puissante». Et dément avoir exercé toute «pression» sur les industriels ukrainiens. C’est moins convaincant.
    En revanche il faut le croire quand il conclut : «Personne ne doit avoir d’illusions sur la possibilité d’obtenir la supériorité militaire sur la Russie. Nous ne l’accepterons jamais», a déclaré M. Poutine, rappelant avoir lancé un programme de réarmement du pays «sans précédent».
    http://euro-synergies.hautetfort.com/archive/2013/12/18/temp-37422a257d0f2fe49cc4809d9b4f12be-5249748.html

  • Pourquoi l’Occident adore Mandela ? L’icônisation et la sanctification d’un conciliateur et pacificateur utile

    L’unanimisme est suspect. Statufié de son vivant, l’homme politique Mandela fut et reste toujours très utile aux puissants et aux puissances d’Occident depuis les années 1990. Ceci explique son Prix Nobel de la Paix –prix bien décrépit et discrédité on le sait- décerné en 1993. Les propos répétés à l’occasion de son décès par les médias et les dirigeants occidentaux, comme incantations universelles, disent, ressassent, répètent que ce fut l’homme de la paix, de la réconciliation et du pardon. Un prêt-à-penser, un vaccin anti-1789, un kit idéologique en papier cadeau faisant fonction d’antidote définitif contre cette fâcheuse tendance des peuples opprimés, des classes sociales opprimées, des gueux de partout dans notre planète, à résister et essayer de s’émanciper y compris violemment, à lutter avec touts les moyens possibles, à se battre radicalement, à se révolter et à faire des révolutions pour tourner pour de vrai les pages et périodes sombres de l’histoire, de leur histoire.

    Le dernier Mandela, non-violent, pacifique, conciliateur, indulgent et « pardonneur », amnistiant les oppresseurs, les bourreaux et les criminels, est proposé comme une voie unique à suivre, la voie par excellence, en réalité comme un antidote idéologique contre les luttes de libération nationale et les luttes des classes opprimées, où ceux d’en bas se rebiffent, en concrétisant des processus qui ne sont pas des dîners de gala. Le message des puissants du monde, du monde occidental tout au moins, est subliminal. Résignez-vous, patientez, acceptez l’ordre injuste du monde, ordre « naturel » et si par hasard vous gagnez une guerre sociale, si vous réussissez une révolution émancipatrice, si vous menez à son terme une guerre de libération nationale faites comme Mandela, épargnez-nous, pardonnez-nous, décrétez l’amnistie au nom de la paix et de la réconciliation. Pour l’heure nous restons impitoyables, nos guerres –économiques et sociales contre les dominés à l’intérieur des frontières ou internationales, colonialistes, néocolonialistes, impérialistes, de caractère économique ou militaire à l’extérieur de nos frontières- sont sans quartier mais que voulez vous, c’est plus fort que nous. Pour les classes et castes dominantes, pour les pays impérialistes, colonisateurs et néo colonisateurs, la pensée Mandela est une police d’assurance pour survivre et même reprendre le pouvoir en cas de défaite.

    Les prises de position de Mandela sur le devenir du monde restaient sans trop d’incidence sur le cours des choses, et sans coûts personnels ni trop de risques pour lui. Il aurait pu par contre influencer profondément le devenir de son pays dans les années 1980-90 pour obtenir une transformation radicale, de fond en comble, mais il ne le fit pas, en agissant par contre de sorte que l’appareil économique de l’apartheid réussisse à survivre entièrement ou presque et que les criminels de ce système abominable soient amnistiés, pardonnés.

    Béatification et canonisation de son vivant

    Avant Mandela rien, pendant Mandela ce seul soleil brillait, après Mandela ce serait l’angoisse et peut-être le chaos ! Cette vision des choses, cet imaginaire construit patiemment, imaginaire ahistorique, déraciné des réalités sociales, des réalités concrètes, d’une Histoire complète et complexe, a et eut une utilité, une finalité bien concrète mais pas toujours facile à déceler. Au-delà des desseins, ambitions et projets personnels du personnage Mandela, une dialectique fut alimentée des deux côtés par lui-même et par ses ennemis et geôliers. Mandela n’était pas bien sûr exempt d’ambitions personnelles et dès le milieu des années 1980 les tenants de l’Etat d’apartheid qui le choisirent comme interlocuteur privilégié et quasiment unique surent alimenter le mythe de sa personne et flatter l’homme, sa personne physique. Leur pari ne fut pas erroné, ne fut pas vain. Mandela prit la tête d’une transition politique où les racistes et ségrégationnistes sud-africains eurent une sortie honorable, en bon ordre mais de la scène visible seulement, avec la fin de leur modèle politique, de leur abomination de modèle. Ce fut une fausse sortie, un faux départ car ils choisirent seulement de se faire plus discrets voire très discrets, de passer à une semi pénombre pour mieux conserver le cœur du pouvoir, à savoir l’appareil, la machine économique, le vrai pouvoir et garder aussi toujours le contrôle presque direct de l’armée et des polices. La médiation politique fut laissé fondamentalement aux autochtones africains, qui devinrent gestionnaires, fondés de pouvoir, fusibles bien visibles garants de l’ordre social et de la pérennité du système économique toujours dans les mains des Blancs, dominé par eux.

    Le culte de la personnalité et le mythe de l’homme providentiel restent des dérives de du politique que les medias et les intellectuels d’Occident décrient s’agissant des pays et des régimes combattus, désignés comme ennemis ou rivaux détestés à l’Est, en Orient ou au Sud. Dérives, et que cela soit dit au passage, qu’ils ne dénoncent guère ou pas du tout dans ses propres rangs s’agissant de ses rois, princes, monarques et caudillos modernes, y compris ceux des régimes « républicains ». Par contre s’agissant de Mandela le culte de la personnalité ne fut pas, ne l’est absolument pas, critiqué ni même repéré ou soupçonné. La force du mythe est énorme. La mystification construite patiemment est trop puissante.

    Personnage humain –licence de pléonasme à la main- avec ses vertus et ses défauts, Mandela ne fut guère présenté, tout au moins en dehors des frontières de l’Afrique du Sud, comme un personnage complexe et contrasté, avec ses zones de lumière mais aussi ses zones d’ombre par ses thuriféraires sud-africains et les médias du monde occidental. Les médias occidentaux essayaient de se racheter une image de probité en misant sur l’amnésie collective après des décennies de mépris et d’intoxication médiatique qu’ils avaient organisé contre les combattants anti-apartheid sud-africains. La radicalité atteinte par Mandela, son intransigeance de la fin des années 1950 et début des années 1960 s’estompa après plus de deux décennies de prison. Il devint ensuite, fatigué, vieilli, amoindri et malade, l’homme des dialogues personnels avec l’Etat de l’apartheid, des compromis et compromissions, fini par ne revendiquer en synthèse que le droit de vote des Noirs et l’abolition de l’appareil, de l’édifice législatif ségrégationniste. Enfonçant des portes déjà grandes ouvertes.

    La démocratie formelle, la fiction démocratique, pas moins mais fondamentalement pas plus pour clore une période très sombre de l’histoire de cette partie de l’extrême méridional de l’Afrique, de l’Azanie. Une période trop longue et meurtrière qui ne survécut que grâce à la grand cruauté des colons européens racistes et aux complicités et lâchetés de l’Occident blanc et de ses sous-fifres qui soutirent ce terrible système colonial, cette abomination contemporaine, presque jusqu’à l’avant-veille de sa chute. Ce minimalisme « mandeliste » donna le résultat que l’on connaît à présent, à savoir un pays très clivé, très polarisé socialement et économiquement, champion mondial de l’inégalité, avec une énorme violence social, un système économique intracolonial, crypto-ségrégationniste, fondamentalement inchangé. La colonialité interne dans ce pays, dans cette partie du monde, reste inchangée et elle est toujours le pilier de l’ordre toujours en vigueur. Les classes dominantes sud-africaines à présent sont, comme en Amérique latine ou aux USA, héritières et petites-filles directes des colons envahisseurs, conquérants spoliateurs, créolisés entre temps, ayant rompu les amarres avec les métropoles coloniales pour essayer de pérenniser une colonialité interne et ayant accepté un aggiornamento.

    Mandela fut cependant exigent et radical dans ses prises de position sur la politique internationale, critiquant voire conspuant parfois les USA et Israël. Cette dualité nous rappelle la schizophrénie mexicaine en vigueur pendant sept décennies à l’époque du parti quasi unique, le social-démocrate PRI –Partido Revolucionario Institucional- ce fils indigne de la Révolution mexicaine des années 1910, avec une politique étrangère plutôt progressiste mais à l’intérieur des frontières nationales mexicaines restant extrêmement réactionnaire et répressif.

    L’apartheid est mort, vive le néo-apartheid !

    L’apartheid était un système mourant, il allait tomber plus tôt que plus tard. Le Etat d’apartheid cherchait une transition pour sauver les meubles, mais aussi les immeubles, les mines, les terres, les ressources… tout sauver in fine et ne pas seulement la peau de leurs dirigeants. Et ils l’obtinrent ! Ils ne furent ni jugés et emprisonnés, ni jetés à la mer, ni dépossédés. Leur crainte était de se voir quittant massivement le pays comme les Pieds Noirs français d’Algérie en 1962. Ils changèrent tout, l’apartheid politique fut aboli, un nouveau régime avec une constitution acceptable, dans les standards occidentaux, fut votée, un Président noir fut alors élu dans le personne de Mandela et d’autres présidents noirs, Mbeki et Zuma, suivirent avec l’ANC incrustée à vie, devenue parti-Etat, gérant les affaires et garantissant l’ordre social. Et vingt ans après 1994, en faisant le bilan nous pouvons constater l’état pas réjouissant des majorités noires et « de couleur » dans le domaine économique et social.

    Tout changea pour que pas grande chose ou rien ne change, comme disait l’autre dans Le Guépard. L’apartheid était mourant, mis en échec par l’impasse économique, social et politique, mais aussi militaire de la fin des années 1980. S’agissant de ce dernier volet il ne faut pas, surtout pas, oublier l’impasse des troupes sud-africaines de l’apartheid face aux combattants cubains, angolais et namibiens à la fin des années 1980 où elles furent mises en échec et contraintes à quitter l’Angola et à reconnaître l’indépendance de la Namibie en évacuant aussi ses troupes d’occupation de ce pays. On ne reconnaît pas, surtout pas assez, et l’on occulte même, le rôle capital de Cuba dans les luttes anticoloniales en Afrique lusophone et la mise en déroute des troupes de l’apartheid.

    Mandela préempta, s’appropria, des rapports et négociations avec l’Etat blanc raciste pour négocier seul ou presque, biaiser et brader une lutte profonde et ancienne contre l’apartheid. Les questions à poser, impertinentes, iconoclastes, seraient : Mais quand Mandela capitula ou fut retourné ? ; Ce fut un processus conscient et voulu ou le résultat de l’addition des compromissions et renonciations pas toujours très visibles mais qui rassemblées donnèrent le résultat que l’on peut constater de nos jours ? Il faut pour cela un regard très critique, exigeant et dépourvu de complaisances et révérences.

    Brader la lutte contre l’apartheid pour un plat de lentilles : le droit de vote des Noirs ou l’illusion démocratique… pour aller voter pour Mandela ! Pour que Mandela soit élu président comme son épouse Winnie le proclamait haut et fort comme un objectif pas négociable, une échéance inéluctable, au moins une dizaine d’années avant qu’il ne soit formellement libéré. Et il fut élu et alors ? En échange Mandela mit son poids pour assurer l’amnistie pour les assassins, tortionnaires et responsables étatiques, militaires, civiles et économiques de l’apartheid. Et aussi pour que l’appareil économique des Blancs soit maintenu intact : terres, mines, industries, immobilier urbain… etcetera. C’est ainsi que l’Afrique du Sud put rester une pays avec une économie et une société toujours dominée par les Blancs. Les terres et les ressources naturelles du sol et du sous-sol arrachées, confisquées, expropriées par le colonialisme anglo-néerlandais, ne furent jamais rendues … jusqu’aujourd’hui. Grâce à la garantie Mandela obtenue en 1994.

    Le modèle choisi pour entretenir l’illusion d’un « post-apartheid » fut le clientélisme vorace et le favoritisme envers les tenants de l’ANC –comme le social-démocrate PNR-PRI déjà cité, parti post-révolutionnaire au Mexique dès 1929 qui garda le pouvoir soixante-dix ans- avec la « discrimination positive » et l’encouragement et financement de l’émergence d’une bourgeoisie noire et des « personnes de couleur », d’un capitalisme noir sensé être la revanche de l’apartheid. Une question se pose ou est à poser aux autochtones africains : Le capitalisme des Noirs est plus doux et moins cruel que le capitalisme anglo-afrikaner ? La voie choisie par le modèle Mandela fut la « réconciliation », le pardon, l’oubli, le réformisme, la continuation du capitalisme néocolonial, intracolonial, l’encouragement d’une bourgeoisie noire naissante, avec l’éclosion des « diamants noirs », ces nouveaux entrepreneurs noirs sensés aller ensuite conquérir le reste du continent africain.

    Pour illustrer la générosité à sens unique et le refus du modèle Mandela de rendre justice aux victimes de l’apartheid rappelons par exemple l’assassinat du leader noir anti-apartheid Steve Bantu Biko, en septembre 1977. Le célèbre film Cry freedom relate ce crime. Le scandale international provoqua deux résolutions du Conseil de sécurité de l’ONU cette même année (résolutions 417 et 418) condamnant le régime raciste et décrétant un embargo sur les ventes d’armes à destination de Pretoria, bien sûr contourné par l’Occident. Les policiers coupables furent seulement blâmes à l’époque et la police en tant qu’institution reconnut, avoua, le crime devant la « Commission vérité et réconciliation » à la fin des années 1990. Malgré tout cela la justice « arc-en-ciel » sud-africaine décida en octobre 2003 de renoncer à poursuivre les cinq policiers responsables pour « manque de preuves et absence de témoins ».

    Mais que célèbre-t-on dans l’Afrique du Sud en 2013 à la mort de Mandela? Une révolution émancipatrice ? Une libération nationale ? Une libération sociale ? Toutes les trois ? Quel est le bilan de ces processus de transition que Mandela conduisit ? La « réconciliation » et la « paix » rendirent service aux colons blancs créolisés. La « réconciliation » des races probablement mais cela reste à prouver, mais surtout la volonté forcenée de conciliation de classes, pour noyer et invisibiliser les luttes des classes dominées, dans un pays néocolonial, pour garantir le continuité de cet impitoyable capitalisme d’anciens colons, des Britanniques et Boers, toujours au pouvoir, le vrai pouvoir, le pouvoir économique, foncier, minier, industriel et financier.

    « Il n’y a plus des races en Afrique du Sud ! » disait devant la télévision française un naïf et enthousiaste adolescent noir devant la maison d’un Mandela tout juste décédé, « Nous sommes une nation arc-en-ciel ! ». Il aurait pu dans la foulée décréter aussi que les classes sociales n’existent plus en Azanie, que tous les hommes dans son pays sont frères, que tout le monde est beau et que tout le monde est gentille. L’Etat blanc d’apartheid fut détruit ou seulement transformé politiquement de fond en comble ? L’apartheid disparut des textes juridiques mais tout changea pour que rien ne change … et que tout continue.

    Luis Basurto, Paris, 10 décembre 2013

    http://www.mondialisation.ca/pourquoi-loccident-adore-mandela-liconisation-et-la-sanctification-dun-conciliateur-et-pacificateur-utile/5361299

  • Égypte : constitution novatrice

     

    Par Pascal Nari - Un projet de nouvelle constitution a été adopté en Égypte. Ce texte rompt avec l’inspiration religieuse généralement de mise dans le monde arabe. L’Occident ne s’en montre pas moins réservé, voire critique.

     

    La nouvelle constitution égyptienne vient d’être votée après deux jours de débats par la chambre haute du parlement. Ce texte de deux cent quarante sept articles a été rédigé par un comité d’experts venus d’horizons divers et présidé par Amr Moussa, ancien secrétaire général de la Ligue arabe, juriste de formation française, l’homme politique le plus respecté du pays et sans doute l’un des plus populaires, toutes tendances d’opinion confondues. Le samedi 14 décembre, il a été déclaré qu’il serait soumis à un référendum les 15 et 16 janvier prochain.

    Un texte moderne

    Plusieurs traits essentiels marquent ce nouveau projet et en font un texte novateur dans le monde arabo-musulman.
    - La liberté de croyance et d’opinion devient "absolue", ce qui avait été écarté par le texte élaboré et voté par les Frères musulmans.
    - La formation des partis politiques sur des bases religieuses est interdite, ce qui bloque le retour au pouvoir des "Frères" sous forme d’un parti politique et constitue une garantie pour la laïcité des institutions.
    - L’égalité "absolue" entre les hommes et les femmes, tant sur le plan des droits que des devoirs, est proclamée et explicitée. Une nouveauté. Le texte précédent faisait des femmes les "compléments des hommes" ! Les islamistes faisant partie de la commission de rédaction et de la chambre haute ont protesté et refusé leur vote. Mais la disposition a été approuvée.
    - La loi islamique, la charia, n’est plus proclamée comme base de la législation et de droit. La constitution est laïque.
    - Au cours des deux prochaines mandatures présidentielles, la désignation du ministre de la Guerre, chef des armées, devra recevoir l’accord du Conseil supérieur des forces armées, et le budget militaire sera octroyé sous forme de dotation. Dispositions critiquées par certains en Occident mais nécessaires, croyonsnous, pour la stabilité des institutions par rapport aux menaces islamistes, etc. Le chef suprême d’El-Azhar, la plus haute autorité de l’islam sunnite, et l’Église copte, représentant 10 à 15 % de la population, ont approuvé l’ensemble du texte. Un beau succès.

    Réactions en Occident

    De prime abord, l’Occident devrait se féliciter de la mise en place de cette constitution, et des élections qui vont suivre, qui mettront fin aux désordres qui n’ont pas cessé depuis l’éviction du président Moubarak début 2011, souhaitée, voire planifiée, en tout cas ouvertement aidée par Washington. C’est un texte qui respecte, pour la première fois dans le monde arabe depuis des années, les "valeurs" dont on se gargarise de Paris à Washington. Il n’en est rien. Silence radio à Washington, Paris et Londres. Critiques violentes dans les milieux bien pensants sur le "recul des libertés" en Égypte, éditorial enflammé du très respecté New York Times, etc. L’Égypte est toujours tenue en quarantaine, les "sanctions" américaines contre ce pays restent en place. La nostalgie du règne anarchique et dévastateur des Frères musulmans continue...

    Deux poids, deux mesures

    On occulte l’islamisation progressive, mais désormais accélérée, de la Turquie de M. Erdogan, ses milliers de prisonniers politiques, la presse de plus en plus muselée, l’inégalité croissante entre hommes et femmes qu’on y instaure. On oublie la désagrégation quasi totale de la Libye par suite de l’instauration de la "démocratie", le chaos qui s’installe progressivement en Tunisie. Sans parler de l’Arabie séoudite ni de son étrange régime qui est tout sauf démocratique. On s’accommode de tous ces cas, mais on s’attaque à l’Égypte, la plus grande et la plus ancienne des nations arabes, qui s’engage de nouveau sur la bonne voie, celle de la rénovation et de la modernisation, de la séparation de la religion et de l’État, d’un régime respectueux des droits fondamentaux de l’homme. Deux poids, deux mesures. Il faudrait soutenir la nouvelle évolution de l’Égypte. Tant pis pour la frustration des bonnes âmes à propos de l’échec des islamistes dans ce pays.

    Pascal Nari - L’ACTION FRANÇAISE 2876

    http://www.actionfrancaise.net/craf/?Egypte-constitution-novatrice

  • Egypte : enfin une Constitution digne de ce nom ?

    Le projet soumis à référendum tente de concilier stabilité et libertés

    Au cours des révolutions politiques, le temps semble à la fois s’accélérer et s’arrêter : tout tourne en rond, mais tout se précipite, « immobile à grands pas ».

    La révolution égyptienne, qui débute avec la chute éclair du Président Moubarak le 25 janvier 2011, ne fait pas exception à le règle. Après une brève période d’euphorie, le pays était entré dans une phase de tumultes et d’incertitudes – en dépit de l’élection du président Morsi, le candidat des Frères musulmans, investi en juin 2012, puis de l’adoption d’une nouvelle constitution en décembre.

    Comme toujours dans ces cas-là, le mouvement commande : on met la charrue avant les bœufs en désignant un Président sans savoir quels seront ses attributions. Cela se traduit par une succession de tentatives pour prendre, ou reprendre, le dessus, et un chef de l’Etat que les observateurs qualifient tantôt de « fantôme », tantôt de despote, lorsqu’avec le « décret constitutionnel » du 12 août 2012, celui-ci parvient à abroger la “Déclaration constitutionnelle complémentaire” qui limitait ses prérogatives. Une situation à peine améliorée avec l’adoption d’une constitution que l’universitaire franco-égyptien Wagdi Sabete qualifiait de « constitution sui generis » – indiquant par là qu’on aurait eu bien du mal à la faire entrer dans l’une des catégories classiques du droit constitutionnel. [...]

    Frédéric Rouvillois - La suite sur Causeur

    http://www.actionfrancaise.net/craf/?Egypte-enfin-une-Constitution

  • APRES LA FLAMME OLYMPIQUE, VOICI LA TORCHE DES JEUX ISLAMIQUES.

    De G.H.W Bush à Barack Hussein Obama (prix Nobel de la Paix 2009), les Etats-Unis ont mis l’Orient à feu et à sang.

    Notre devoir de mémoire nous rappelle que pour contrer l’invasion communiste en Afghanistan (1979-1989), les américains ont recruté toutes sortes d’alliés et de mercenaires, dont Oussama Ben Laden et ses sbires salafistes, via le prince Turki al-Faycal –chef des services de renseignements saoudiens- et vieil ami des Ben Laden, famille richissime. La libération de l’Afghanistan devient pour Oussama son djihad personnel, sa croisade anticommuniste, pour laquelle il recrute, sur les fonds saoudiens et américains, des centaines de moudjahidines, affluant de tous les pays arabes.

    Après la déroute des armées russes venues en aide au régime communiste afghan de Najibullah et l’effondrement de l’URSS en décembre 1991, Ben Laden s’alliera finalement à la cause des talibans du mollah Omar, pour revenir au centre du « Grand Jeu ».

    En guise de représailles à l’effondrement des 3 tours du WTC (1,2 &7) le 11/9/2001, les USA interviennent militairement en Afghanistan contre Al-Qaïda (la Base) en février 2002.

    Guerre du Golfe. Irak acte I.

    En 1990, l’ONU condamne l’invasion du Koweït et son annexion par l’Irak. Une coalition de diverses armées envahit l’Irak en 1991 pour attaquer Saddam Hussein, désigné comme responsable de la mystification des couveuses de Koweït-City. Souvenons-nous quand même que c’est l’Irak qui est entrée en guerre contre l’Iran en 1979 (après la chute du Shah, valet des intérêts américains) pour tenter de faire tomber l’ayatollah Khomeiny et les gardiens de la révolution (pasdaran) auteurs de la prise d’otages à l’ambassade US de Téhéran. Jusqu’au cessez-le-feu en 1988, l’Irak n’a pas pu se développer socialement et économiquement, alors que dans la région d’Abadan, le Koweït lui pompait ignominieusement son pétrole !

     Korbo.Made in USA. 18.11.2013

    Irak acte II.

    Sans doute pour mettre main basse sur les richesses pétrolifères de l’ancienne Mésopotamie, une offensive militaire anglo-américaine (hors mandat de l’ONU) et sur base de mensonges grotesques (armes de destruction massives, 4ème armée mondiale) lancée le 20 mars 2003, conduit à l’effondrement du régime le 9 avril et portent les USA à l’administration de l’Irak. Après une parodie de procès, Saddam Hussein est pendu le 30 décembre 2006. Le tyran éliminé, le pays s’en porterait beaucoup mieux …

    Stabilité, pacification ou développement économique ?

    Bien au contraire : la bête immonde du Nouvel Ordre Mondial a semé le désordre, la misère et le chaos dans tous les pays orientaux depuis plus de 30 ans, pour le plus grand bénéfice du complexe militaro-industriel américain et avec l’appui des gnomes de Wall Street. Il suffit de lire la rubrique « International » des grands quotidiens pour apprendre qu’en Irak ou en Afghanistan la situation est catastrophique.

    Qui peut prétendre, par ailleurs, que le « Printemps arabe » a été bénéfique pour la population en Tunisie, en Egypte ou en Libye ? Ces pays n’ont en aucune façon prospéré après la destitution de Ben Ali, l’emprisonnement de Moubarak et l’assassinat de Kadhafi. Au contraire : ils se sont inexorablement enfoncés dans l’obscurantisme le plus démentiel, accompagné d’un désastre institutionnel.

    Et de grandes âmes, intellos de gauche comme de droite, voudraient impérativement que l’on soutienne les euros-mondialistes belliqueux dans une sombre machination pour écraser la Syrie et renverser Bachar al-Assad, afin de le « punir » comme l’exigeait Hollandouille ? Au contraire : il faut défendre le soldat Bachar !

    Que la communauté internationale envoie plutôt ses missiles « Tomahawk » sur Tel-Aviv et Jérusalem pour que l’Etat hébreu respecte in fine les résolutions 181 et 242 restées inappliquées depuis des décennies et sur lesquelles les sionistes s’assoient ! L’exemple des bombardements de Belgrade en 1999 et de Bagdad en 2003, devrait leur servir de leçon. Mais il est vrai que ni les Yougoslaves, ni les Irakiens ne possédaient de missiles nucléaires « Jéricho », ni d’un centre de recherches comme celui de Dimona !

    Pieter KERSTENS. 

    http://www.altermedia.info/france-belgique/uncategorized/apres-la-flamme-olympique-voici-la-torche-des-jeux-islamiques_93576.html#more-93576

  • Wahhabisme saoudien et protestantisme américain : un troublant parallèle…

    Entretien avec Jean-Michel Vernochet

    Vous venez de consacrer un livre au wahhabisme saoudien, Les Egarés. Vous y dressez le parallèle entre cette doctrine à vocation mondialiste et le capitalo-protestantisme américain, lui aussi à vocation messianique. Vous pouvez résumer ?

    Un exercice périlleux. Pour un comparatif détaillé de l’éthique de l’hypercapitalisme – reflet d’un univers mental situé à la confluence de l’Ancien Testament et de la sélection des espèces – avec le fondamentalisme musulman, je vous renvoie à la lecture des Égarés ! Mais, en quelques mots, disons qu’il existe des similitudes frappantes entre le wahhabisme et le puritanisme judéo-protestant. Wahhabisme qui, rappelons-le, est la religion d’État de ces deux ogres géopolitiques que sont aujourd’hui le Qatar et l’Arabie saoudite. Un exemple : chacun aura noté le juridisme dévorant qui, de nos jours, caractérise la société américaine. Dans celle-ci, tous sont censés obéir à de véritables catalogues d’interdits. C’est un pays parcouru de lignes jaunes sauf en quelques domaines bien précis où l’anarchie est quasi de rigueur, telle la sexualité sans contrainte ni limites. Coluche a su décrire de façon lapidaire cette dérive prohibitionniste de nos sociétés en voie d’américanisation accélérée : « Tout ce qui n’est pas spécifiquement autorisé est interdit. Et tout ce qui n’est pas interdit est obligatoire. » Suivant cet ordre d’idées, le wahhabisme n’est qu’un long code d’obligations et de sanctions balisant de façon totalitaire l’existence des croyants sauf celle, bien entendu, des princes de ce monde autorisés à de nombreux écarts. Mais derrière le corset juridique, que reste-t-il ? Une absence de morale véritable, un monde déserté par toute transcendance où le crime devient licite dès lors qu’il est commis au nom de Dieu… ou de l’idole démocratique. Nous le voyons en Syrie où les salafo-wahhabites mènent une guerre sauvage au nom des principes divins avec, jusqu’ici, la bénédiction de l’Occident postchrétien.

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